Une fois que tous les élèves furent réunis autour de la 'table', le pique nique commença réellement :

- « Jean, tu veux goûter ma salade composée ? » demanda Shadowcat en ouvrant fièrement une boite pour en montrer le contenu.

- « Kitty, on doit l'encourager à manger, pas l'en dégoûter à vie » fit remarquer Evan sarcastiquement.

- « Ah c'est très drôle ça » railla Kitty « figure-toi que je me suis appliquée cette fois-ci, ta tante m'a même assistée »

- « Je pense qu'elle préférerait un sandwich » fit Malicia avant d'en donner un à Scott qui s'était avancé pour le prendre.

- « Personne ne veut de ma salade alors ? »

- « Ben c'est-à-dire que…. » commença Kurt.

- « On m'a prescrit un régime sans cellulose » fit Tabitha quand Shadowcat se tourna vers elle.

Ororo, sachant qu'il n'y avait pas trop de danger cette fois-ci se dévoua :

- « Aller, donne-moi en, ça leur montrera que tu as fait des progrès »

Tout au long du pique-nique, les conversations allèrent bon train, l'atmosphère se détendit et rapidement le repas fut terminé.

- « Allez les gosses, si vous alliez faire un tour pour digérer avant de vous baigner ? » fit Logan de son grognement habituel.

Les nouveaux acquiescèrent et Kitty, Kurt et Amara les accompagnèrent. Une fois qu'ils furent à une bonne vingtaine de mètres du groupe, Jubilée posa une question qui la travaillait depuis quelques temps déjà :

- « Dites, la rouquine –Jean c'est cela ?–, le Professeur nous a dit qu'elle et Scott sont ses deux premiers élèves, mais pourtant elle semble très renfermée, triste et craintive… »

Se fut Amara qui répondit :

- « Elle n'a pas toujours été comme ça, avant c'était notre modèle, celle à qui nous demandions de l'aide, mais maintenant c'est la plus fragile d'entre nous… » fit-elle avant de donner la raison de ce changement « Il y a cinq mois et demis elle a été enlevée par un groupe anti-mutants dont nous ignorions l'existence… »

- « Nous l'avons retrouvée il y a quatre mois, » poursuivit Kitty « Pendant six semaines, les membres de cette organisation l'avaient battue, torturée et avaient abusé d'elle… »

- « Oh mon dieu » fit Rahne.

- « Depuis elle n'a plus jamais été la même. Elle a replacée sa confiance en Scott avec qui elle a toujours partagé un lien spécial –et en plus ils étaient ensembles quand elle a été enlevée–, mais nous nous ne pouvons toujours pas l'approcher, elle a peur de nous » reprit Amara.

- « Ça explique pourquoi elle semble si réservée… » fit Jubilée.

- « Je pense que le Professeur Xavier vous en aurait parlé, mais pas tant qu'elle était dans les environs, pour ne pas la secouer » déclara Kitty.

- « Et ce groupe… » commença Jamie peu rassuré.

- « Les professeurs gardent un œil sur eux et la sécurité est renforcée, c'est tout ce que nous savons » répondit Kurt avant de changer de conversation : « Mais parlons plutôt de vous… »

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Une heure plus tard, tous étaient dans l'eau. Scott et Jean étaient restés là où ils étaient, gardant une bonne vue sur les festivités.

- « Tu ne veux pas aller te baigner ? » demanda doucement Scott à Jean.

Elle hocha la tête, laquelle était posée contre son torse.

- « Même en restant habillée ? »

Même réponse.

- « Tu vas t'endormir dans mes bras ? »

Elle hocha la tête d'un signe positif cette fois-ci ; Scott sourit. Il n'insista pas, la laissa s'installer confortablement, appréciant simplement le fait de la sentir contre lui, de la protéger. Il savait qu'elle avait prit un comprimé pour calmer les douleurs physiques qu'elle ressentait toujours plus ou moins fortement, avec de temps à autre des crises plus importantes. Les fractures étaient ressoudées, mais il lui arrivait de souffrir et Hank ne pouvait rien faire d'autre que lui donner un calmant qui en plus la faisait dormir ; selon lui ces douleurs risqueraient de durer toute sa vie, son corps avait été torturé et en garderait des séquelles. Scott n'aimait pas la voir souffrir physiquement, même si elle ne semblait pas y porter attention, et pourtant, à travers leur lien, il savait que parfois les douleurs étaient fortes. Il reporta son attention vers la piscine où un filet venait d'être placé. Un match de volley ne tarda pas à commencer à être arbitré par Logan qui demanda de temps en temps son avis à Scott qui n'avait pas le même angle de vue que lui.

Après quarante minutes de jeu, tous étaient vannés et se laissaient sécher au soleil, sur leurs serviettes qu'ils avaient étalées sur l'herbe ou sur les couvertures qui avaient servi de table pour le pique-nique.

Un calme relatif planait jusqu'à ce que Jean, qui s'était endormie dans les bras de Scott, ne commence à gémir dans son sommeil avant de brusquement se réveiller en sursaut. Ne sachant sur le moment plus où elle était ni avec qui, elle se tendit et tenta de se dégager, mais Scott la retint et lui parla immédiatement :

- « Ssshhh c'est moi Jean, c'est moi »

Ses yeux venaient de s'embrumer de larmes, elle se lova contre lui en l'entourant de ses bras, tremblante.

- « Shhhh, ça va aller ma puce, ce n'était qu'un cauchemar, ça va aller… » lui murmura-t-il en la berçant doucement, un bras autour de sa taille, une main lui caressant les cheveux. « Là, c'est ça, calme-toi, calme-toi… »

Lorsqu'elle sembla s'apaiser, Logan déclara :

- « Bon réflexe p'tit gars, tu ne l'as pas lâchée malgré la surprise, bravo »

- « Si je ne la retenais pas elle risquerait de se blesser en s'affolant, ou de blesser involontairement d'autres personnes avec ses pouvoirs » répondit Scott avant de déposer un baiser sur le front de Jean, lui murmurant d'autres mots apaisants.

Au bout d'un moment, Jean s'étant calmée et Scott ayant du mal à supporter le regard pesant bien que compatissant que les nouveaux portaient sur l'adolescente, il se leva avec elle et lui proposa d'aller faire un tour pour se changer les idées ce qu'elle accepta relativement facilement.

Une fois les deux jeunes gens éloignés, le Professeur s'adressa aux nouveaux, se doutant qu'ils étaient déjà au courant, pour leur dire ce qu'il ne fallait surtout pas faire ou dire devant Jean et qui ils devaient appeler en cas de problème, afin que la cohabitation se passe le mieux possible.

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Comme à son habitude, Scott se leva de bonne heure malgré le fait qu'il soit en week-end, et se dirigea vers la chambre de Jean. Habituellement, depuis l'arrivée des nouvelles recrues quelques jours auparavant, elle l'attendait car elle ne parvenait pas à se faire à l'idée de descendre seule. Mais cette fois-ci, elle dormait encore. Il referma doucement la porte et se rendit à la cuisine où se trouvaient déjà les professeurs.

Mais le sommeil de Jean ne resta pas paisible, dix minutes plus tard, elle commença à remuer et à gémir, des flashs lui revenant à l'esprit, des flashs de tortures et d'autres plus vils encore…

……Aller viens-là toi !...On va s'amuser tous les deux, petite salope…Tais-toi et tiens-toi tranquille chienne ! …si tu me mords encore, je te casse les doigts ! ... …

Son sommeil devenait de plus en plus agité, éparpillant ses draps. Grâce à leur lien psychique, Scott le sentit de là où il était et commença à monter.

……Tu vas voir, tu cries, mais tu vas aimer ça ……tu vas décroiser les jambes non de dieu ! ……

C'est en ressentant cette douleur déchirante qu'elle avait subit la première fois que Jean se réveilla en hurlant, haletante, assise sur son lit. Elle commençait à peine à sangloter que Scott débarqua un peu trop brutalement qu'il ne l'aurait fallu ce qui la fit violemment sursauter. Mais dès qu'elle reprit ses esprits elle tendit ses mains vers lui, en larmes. Scott s'approcha d'elle et vint s'asseoir sur le lit, elle se jeta dans ses bras.

- « Ce n'était qu'un cauchemar Jean, juste un cauchemar » lui dit-il doucement en lui caressant les cheveux.

Elle hocha la tête, laquelle était enfouie dans son cou, lui signifiant que ça, n'en était pas un, pleurant de plus belle, ne parvenant pas à reprendre son souffle.

- « Je sais » souffla-t-il en la berçant « c'est fini maintenant, tu ne risques plus rien ici, tu es en sécurité ; calme-toi, respire »

Voyant qu'elle hyper ventilait dangereusement, il prit doucement une de ses mains et la plaça sur son torse, là où elle pouvait sentir ses battements de cœur.

- « Respire Jean, essaye de calquer ta respiration sur la mienne, tout va bien maintenant, calme-toi ma puce, c'est fini tout va bien »

Elle commença peu à peu à se calmer.

- « Voilà, c'est bien, respire »

Il desserra leur étreinte lentement, et sécha ses larmes de ses doigts avant de lui demander :

- « Tu veux tes médicaments ? »

Elle acquiesça doucement, toujours sous le choc.

Les anxiolytiques se trouvaient déjà préparés sur la table de nuit. Lorsque Scott lui tendit le verre d'eau, elle manqua de le renverser tellement ses mains tremblaient ; il plaça la sienne par-dessus pour réaffirmer sa prise, et l'aida à avaler les comprimés avant qu'elle ne se rallonge, croisant ses chevilles comme à son habitude, garda la main de Scott dans la sienne.

- « Je vais rester un peu ici avec toi, puis nous descendrons d'accord ? » lui dit-il doucement, en lui caressant les cheveux d'un geste apaisant.

Elle acquiesça, tremblant encore suite à ce cauchemar parmi tant d'autres

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Deux semaines plus tard, en cette fin d'après-midi, une semaine et demie après l'arrivée des nouvelles recrues à l'Institut, l'ambiance était plutôt survoltée et cela était dû au fait qu'un anniversaire était fêté : en effet, aujourd'hui Evan avait 16 ans et pour l'occasion ses parents et quelques amis étaient venus de New York pour participer aux festivités.

Ororo avait eu une longue discussion avec sa sœur pour lui expliquer les raisons de l'état de Jean :

- « La pauvre, je me souviens de l'adolescente resplendissante et pleine de vie qu'elle était quand elle était venue avec toi et Scott pour nous parler d'Evan… »

- « Nous nous en souvenons tous, mais ça ne restera qu'un souvenir. Même si elle évolue un peu chaque semaine, intérieurement elle est définitivement détruite » répondit la sorcière du temps en poussant un soupir.

Non loin, le beau frère de Tornade s'entretenait avec Scott en présence de Hank.

- « Comment voyez-vous votre avenir avant ce drame ? » demanda le père d'Evan.

- « Ça peut paraître fantaisiste vu notre age » répondit Scott « Mais nous savions que notre relation était sérieuse et allait encore évoluer. Je pensais déjà la demander en mariage un jour ou l'autre et fonder une famille avec elle… »

- « Ce n'était pas fantaisiste pour nous Scott, c'était évident » fit remarquer Hank.

- « Oh c'était une réflexion très mature effectivement » approuva l'homme « Et aujourd'hui ? »

- « Je l'aime toujours plus que tout au monde et, même si ça prendra beaucoup plus de temps que prévu, même si je ne peux avoir que sa présence, mes projets restent les mêmes, c'est avec elle que je veux vivre » répondit-il.

Jean de son côté, fatiguée par les pilules qu'elle avait prise pour calmer une forte crise de douleurs, s'était allongée sur un des canapés de la grande salle où avait été organisée la fête, celui le plus isolé. Mais malgré ça, elle ne parvenait pas à fermer l'œil, à baisser sa vigilance, le moindre rire un peu rauque, claquement de porte, pas ou voix s'approchant un peu trop la faisait sursauter. L'ayant remarqué, Scott quitta la conversation qu'il entretenait avec le père de Evan et Hank et alla la rejoindre.

- « Jean ? » fit-il pour s'annoncer.

Elle leva les yeux vers lui.

- « Aller, fais-moi de la place » lui dit-il gentiment.

Elle se poussa un peu et il s'installa sur le canapé, à moitié assis grâce aux coussins, avant de la prendre dans ses bras doucement pour ne pas lui faire mal :

- « Tu n'arriveras pas à t'endormir tant que tu ne te sentiras pas en sécurité »

Je ne veux pas… t'empêcher de profiter de la fête… lui envoya-t-elle par leur lien.

- « Ne t'inquiète pas pour ça, je commençais à avoir mal aux jambes » sourit-il « Et je n'aime pas te voir mal à l'aise alors je préfère m'occuper de toi »

Merci

- « De rien mon ange »

Il l'embrassa sur le front alors qu'elle avait déjà fermés les yeux. Le prochain cri des autres élèves la fit un peu plus se lover contre lui, mais ensuite elle n'y réagit plus, elle savait qu'il la protégerait et ce sentiment de sécurité l'aida à rapidement s'endormir même si ce sommeil serait de courte durée.

Une vingtaine de minutes plus tard, le Professeur Xavier venait près d'eux :

- « Ça va Scott ? »

- « Hum hum » répondit-il.

- « Elle était nerveuse »

- « Oui, elle ne parvient toujours pas à se détendre quand il y a du monde autour d'elle encore plus si certains lui sont plus ou moins inconnus »

- « Et surtout si tu n'es pas près d'elle » ajouta Charles.

- « Oui »

- « Depuis le début nous savons qu'il lui faudra beaucoup de temps » poursuivit le puissant télépathe, se retenant de profiter du sommeil de Jean pour poser sa main sur la sienne, sachant qu'elle le sentirait immédiatement « Je sais qu'elle fait de violents cauchemars en ce moment… »

- « Si seulement ce n'étaient que des cauchemars…la plupart sont des souvenirs, et cela depuis son retour » répliqua Scott « Malgré les somnifères et les anxiolytiques du Docteur Mc Coy, il ne se passe pas une nuit sans que je doive aller la réveiller ; ils la hantent »

- « Oui, je m'en doute bien ; malheureusement nous ne pouvons pas effacer ce qu'il s'est passé … même si je le voulais je ne pourrais pas modifier sa mémoire, c'est une télépathe…et nous avons la faculté, ou ici le malheur, de ne jamais rien oublier, tout reste parfaitement gravé dans nos esprits » fit remarquer le Professeur en posant un regard compatissant sur Jean ; oui, même s'il le pouvait, ce ne serait pas vraiment l'aider, pas à long terme. « Cette semaine je pensais lui faire commencer une forme de thérapie, en ta présence bien entendu, étant donné qu'elle ne s'y prêtera pas si elle se trouve seule avec moi pour le moment »

Scott approuva cette idée, laisser Jean porter seule les événements des six semaines de son calvaire n'était pas possible, il fallait qu'elle en parle ou du moins qu'elle soit aidée pour affronter cette souffrance intérieure.

- « Oui, c'est une bonne idée, même si ça ne va pas être simple, il ne faut pas s'attendre à ce qu'elle communique »

Le Professeur acquiesça, il en était conscient, mais il voulait faire quelque chose pour Jean.

- « Je sais » se contenta-t-il de dire, posant son regard sur le visage endormi de la jeune mutante ; même son sommeil ne semblait pas apaisant, elle ne portait plus cette expression d'innocence qu'elle arborait avant. Avant, il ne pouvait même pas mettre un nom sur ce qu'elle avait subi ; tout avait changé maintenant, il y avait la Jean d'avant l'enlèvement et celle d'après, celle d'aujourd'hui, celle qui devait vivre avec ce traumatisme.

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(Une semaine s'est écoulée depuis l'anniversaire d'Evan.)

Elle se retrouvait dans cette cellule, la porte venait de s'ouvrir et deux gardes s'avançaient vers elle, se passant la langue sur leurs dents puis sur leurs lèvres avant de commencer à décrocher leurs ceintures. Jean sentit son corps se raidir, elle voulut se reculer le plus possible, mais elle avait tellement mal partout que c'était comme si elle faisait du ralenti ; et les hommes, les hommes riaient, ils riaient de voir la terreur dans son regard…le premier vint se coucher sur elle, et le second……elle avait mal, elle voulait hurler, mais aucun son ne sortait…

Jean se réveilla en sursaut ; elle était dans sa chambre, ce n'était qu'un cauchemar, même inspiré de ses souvenirs, ça ne restait qu'un cauchemar. Tremblante, les larmes aux yeux, Jean se leva et alla se passer de l'eau sur le visage et les bras, pour chasser la sueur qui avait fait son apparition. Encore secouée, elle retourna dans son lit en se blottissant contre le mur, recroquevillée sur elle-même. Habituellement, quand elle se réveillait d'un cauchemar, Scott était là et il restait près d'elle jusqu'à ce qu'elle se rendorme, sa présence, son parfum, son contact, la rassurait ; là, rien à faire, elle ne parvenait pas à s'apaiser et encore moins à se rendormir.

Elle se releva, enfila ses pantoufles et sortit de sa chambre. Silencieusement, elle longea le couloir et ouvrit tout aussi discrètement une porte ; mais c'était sans compter sur les sens auditifs de Scott qui s'étaient surdéveloppés lorsqu'il avait dû rester sans la vue quelques années auparavant :

- « Jean ? » fit-il en voyant la silhouette tremblant légèrement de la jeune mutante, vêtue d'un pyjama la recouvrant au maximum comme c'était le cas depuis son retour.

Fermant la porte par télékinésie, l'adolescente vint jusqu'au lit et s'introduisit sous les couvertures avant de se blottir dans les bras de Scott.

- « Tu as encore fait un cauchemar ? » s'enquit-il en passant sa main dans ses cheveux.

Jean acquiesça d'un mouvement de tête.

- « Et tu ne parvenais plus à t'endormir »

Elle acquiesça de nouveau.

- « Tu peux rester là si tu veux »

- « …Me...Mer…ci… » articula-t-elle avec difficulté.