Trois semaines s'étaient écoulées, Jean avait de nouveau été placée dans sa chambre pour tenter de la rendre à nouveau plus indépendante, elle se laissait faire de toutes manières. Son état n'avait pas évolué, elle était toujours aussi soumise et distante. Les bleus avaient disparus, mais elle portait toujours des atteles pour les nouvelles fractures.
Une nuit, elle vint s'introduire dans la chambre de Scott, qui ne parvenait pas à fermer l'œil, et alla se blottir dans ses bras, en larmes.
- « Jean ? »
- « Ils me surveillent…ils vont revenir… » fit-elle sans préambule au plus grand étonnement de Scott.
- « Ils ont été arrêtés Jean » fit-il en passant sa main dans ses cheveux.
- « Non, pas tous… il en reste…. il y en a d'autres qui pensent comme eux…ils vont revenir… »
- « Jean… »
- « Ils ont dit la première fois que je ne leur échapperais pas…. et ils avaient raison….ça a recommencé…ils vont revenir…» fit-elle les larmes se succédant.
- « Jean tu es en sécurité ici »
- « Non…. on est en sécurité nulle part…ils sont là…ils vont revenir…»
Scott ne parvint pas à la calmer, il était encore sous le choc de l'entendre parler avec facilité comme si elle n'avait pas passé plus d'un an muette. Elle finit par s'endormir d'épuisement, et il fit de même.
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Le lendemain, Scott posa un baiser sur le front de Jean et, voyant qu'elle ne réagissait pas, se leva doucement et descendit à la cuisine où se trouvaient les professeurs :
- « Jean m'a rejointe cette nuit, comme il y a des mois » annonça-t-il.
- « D'elle-même ? » s'étonna Hank.
- « Bien sûr d'elle-même » fit Scott avant d'ajouter «Elle a pleuré et…et elle a parlé »
- « C'est extrêmement important qu'elle communique de nouveau par votre lien » déclara le Professeur Xavier.
Scott secoua la tête et répondit :
- « Ce n'était pas par notre lien Professeur, elle a vraiment parlé »
Les autres le regardèrent surpris.
- « Qu'est-ce qu'elle a dit ?» s'enquit Ororo.
- « Elle n'a pas cessé de répéter qu'ils la surveillaient, qu'ils allaient revenir. Quoi que je dise elle n'en démordait pas »
- « …c'est ce que je craignais, mais je ne pensais pas qu'elle l'exprimerait verbalement » fit Moïra.
- « Qu'est-ce que tu veux dire ? » demanda Hank.
- « Paranoïa » se contenta-t-elle de répondre.
- « Elle n'est pas paranoïaque ! » la défendit l'adolescent.
- « Scott, elle exprime des peurs irraisonnées vu que ses agresseurs sont soit morts soit derrière les barreaux, elle reste dessus quoique tu lui dises, elle se sent surveillée, c'est de la paranoïa »
Le Professeur annonça :
- « Elle s'est réveillée. Scott va la chercher, Moïra va l'examiner »
- « Bien, mais peut-être qu'elle ne dira plus rien »
- « Nous verrons »
Scott sortit de la cuisine et revint dix minutes plus tard avec une Jean qui semblait inquiète. Il la fit s'asseoir sur un fauteuil, elle rabattit ses genoux contre elle et Moïra s'approcha d'elle alors que l'adolescente recommençait à parler.
- « Ils n'en ont pas fini avec moi, ils veulent me faire mal, ils vont revenir… »
- « Jean » fit Moïra.
L'adolescente fixa son regard sur elle :
- « C'est vous ! c'est à cause de vous ! vous leur avez dis où j'étais, ils… »
- « Jean, ils savaient parfaitement qui tu étais et où tu vivais dès la première fois »
Elle rabaissa son regard.
- « Ils vont revenir… »
- « Ils ont été arrêtés Jean, tous »
- « Non il en reste, ils sont là, ils rôdent, ils attendent le bon moment… »
- « Tu es en sécurité ici dans l'Institut » fit Moïra.
- « Non, on n'est en sécurité nulle part, ils vous enlèvent hors de l'enceinte puis dans le parc, ils viendront ici… »
- « Non Jean, c'est fini »
- « Comment pouvez-vous dire que c'est fini ? C'était déjà censé être 'fini' avant ! et ils sont revenus ! » cria Jean avant de se remettre à parler calmement « Ils me surveillent, ils attendent le bon moment… »
Hank arriva avec un calmant.
- « Je vais te donner un sédatif, donne-moi ta main » demanda Moïra en espérant qu'elle ne le fasse pas, mais elle le fit sans rechigner « Jean, tu n'as pas à te soumettre avec nous, nous ne te ferons pas de mal »
- « Il ne faut pas se débattre, ils l'ont dis, si je me débats ils me font du mal, je ne me débattrais plus, sinon ils me font mal…il ne faut pas…se… » elle ne finit pas sa phrase, le sédatif l'enveloppa dans une vague cotonneuse.
Moira se leva et soupira.
- « Je confirme mon pronostic, c'est de la paranoïa » déclara-t-elle « mais elle pourrait l'être envers nous tous, elle pourrait accuser tous les hommes d'être là pour elle, mais elle n'a accusé que moi car elle ne me connaît pas assez »
- « Vous allez l'aider ? » s'enquit Scott.
- « Bien sûr ! Il existe des médicaments pour la calmer, je les ais travaillés pour qu'ils soient efficaces sur les mutants. Ça va la soulager, mais ses propos vont effrayer les autres élèves… »
- « C'est Jean qui importe ! c'est son bien être ! les autres savent ce qu'elle a enduré ! » s'emporta Scott.
- « Scott je comprends ce que tu ressens, mais avoue que ça peut les déstabiliser »
- « Combien de temps ça va durer ? » s'enquit Logan.
- « Ça peut n'être que temporaire, comme beaucoup plus long, c'est une défense »
- « Je n'aime pas la voir aussi soumise » fit Scott d'une voix plus calme « C'est comme si elle me considérait comme ces ordures. Si je dis ou fais quelque chose qui lui fait mal, elle ne l'exprime pas…»
- « Ça finira par s'arrêter Scott, elle est encore sous le choc »
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Un mois s'écoula. Au début, les autres élèves avaient été étonnés d'entendre Jean parler, mais ils avaient gardé leur calme, même lorsqu'elle répétait encore et encore les mêmes choses dans la même pièce qu'eux. Les médicaments la calmaient mais pas complètement.
Scott travaillait régulièrement avec elle dans l'infirmerie, les autres observaient ce qui se passait d'une autre pièce et Moïra transmettait ses instructions par le biais de Charles et de sa télépathie pour ne pas les troubler. Mais cette séance fut particulière…
- « Jean, ce que j'aimerais c'est savoir quand je fais quelque chose qui te blesse là » fit-il en posant sa main là où se trouvait son cœur « Tu n'as pas à te soumettre avec moi, je ne te ferrais jamais de mal, tu n'as pas à faire ce qu'on te demande si tu ne le veux pas » lui dit-il en reprenant ses mains dans les siennes.
- « Mais ils… ils le sauront et ils me puniront, ils… » Jean craqua soudainement « ils….ils m'ont fait mal….tellement mal… »
Scott la serra contre lui.
Demande-lui ce qu'ils lui ont fait. transmis le Professeur.
- « Qu'est-ce qu'ils t'ont fait après t'avoir enlevé dans le parc Jean ? »
- « ….Ils…ils…ils m'ont assommée…Quand j'ai repris conscience ils étaient là….ils m'ont frappé… » elle s'était mise à trembler « …ils…ils voulaient recommencer à me faire mal…à me salir… mais je me défendais alors…ils…ils m'ont fais mal…ils m'ont dis que tant que je me défendrais ils me feraient mal… » répéta-t-elle en pleurs.
- - « Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ?»
- «…Un des gardes m'a cassé le bras…la douleur était atroce….je me défendais toujours alors ils…ils m'ont cassé des doigts…je ne voulais plus souffrir comme ça…je ne voulais plus…»
Encourage-la à continuer à parler Scott, demande-lui ce qu'ils ont fait la première fois
- « Jean, la première fois qu'ils t'ont enlevée, qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? »
- « Non…je veux oublier…je ne veux plus me souvenir…mais je me souviens de tout… Ils…ils m'ont fait mal, tellement mal… »
- « Comment ? »
- « Non, Non… »
Insiste
Mais répondit l'adolescent.
Il le faut Scott
- « Jean c'est important, qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? »
- « Ils….ils….non… non !…je ne veux pas…je ne peux pas…! »
Scott n'en supporta pas plus, qu'importent les demandes télépathiques.
- « Ce n'est pas grave, ça va aller mon ange, ça va aller » l'apaisa-t-il alors qu'elle pleurait contre lui.
Les autres vinrent le rejoindre :
- « Il ne fallait pas s'arrêter Scott » fit Moïra.
- « Elle n'est pas prête ! vous lui demandez de tout raconter comme si c'était une journée à la campagne, c'est loin d'être le cas, elle n'est pas prête ! » fit Scott avec force.
- « J'en suis consciente mais… »
- « Il a raison, il faut lui laisser du temps » approuva Logan.
- « Il faut qu'elle l'exprime verbalement, l'écrire ou le faire par télépathie sera inefficace, ça n'aura pas d'effet thérapeutique»
- « Laissez-lui du temps » fit Scott « Je ne vous laisserais pas la brusquer »
- « Elle semble avoir cessé d'être paranoïaque, elle s'est exprimée librement là, elle n'est pas resté dans un mantra comme ce dernier mois, c'est déjà un grand pas » appuya Hank.
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Trois semaines s'écoulèrent. La paranoïa de Jean semblait bel et bien avoir disparue même si elle était encore plus sur ses gardes qu'avant. Elle avait également repris l'habitude de dormir avec Scott. Et ce soir là elle avait sentit qu'elle devait se libérer d'un lourd poids.
Jean et Scott étaient allongés dans le lit, dans la pénombre.
- « Tu as voulu que nous allions nous coucher plus tôt, alors voilà » fit Scott.
Jean était allongée sur le dos, le regard fixant le plafond, lui était accoudé de manière à être tourné vers elle, il sentait un combat se livrant en elle à travers leur lien.
