EPILOGUE : Speed dating.

« Bon, j'ai accepté de m'inscrire à une matinée de speed dating. J'ai cinq minutes de conversation par personne pour m'en faire une opinion et plus si affinités. Il paraît que cette méthode de rencontres venue des USA est efficace. Je vais en avoir le cœur net. Il n'y a pas de raison que je ne tente pas de me caser comme les garçons. Surtout depuis mon internement forcé dans cette clinique spécialisée. Heureusement que les mashom'en ont sortie, sinon je crois que j'aurais fini par la raser.»

Assise à la table d'un café, armée d'un bloc-notes et d'un critérium chargé de mines, Kayura passait en revue son vis-à-vis.

« Mocassins, jean, chemise en toile, veste de tailleur. Il ne s'est pas foulé pour un rendez-vous.»

« Bonjour Mademoiselle. Je me présente : Katami Kouji. Enchanté.

-Je suis Kaos Kayura. Enchantée. »

« Escarpins, robe courte, chouchou, pas de bijoux. Une fille simple. »

« Je travaille comme professeur dans un lycée. Je suis célibataire, jamais marié, pas d'enfants. Je vis avec ma mère, qui est veuve.

-C'est elle qui vous tient le bras ? »

Un peu étonné, l'homme brun se tourne vers la charmante vieille dame en kimono qui l'agrippe :

« Maman, tu vois bien qu'elle n'a pas l'air méchante, lâche-moi s'il-te-plaît. Lui murmure-t'il.

-Il est hors de question que je te laisse seul alors qu'il se peut que tu t'engages. Je tiens à t'accompagner. Lui répond-elle d'une voix audible pour son interlocutrice.

-Maman…

-Au lieu de perdre ton temps à me parler, ne devrais-tu pas discuter avec cette personne ? Réplique la noble dame en faisant référence à Kayura. Après tout, tu n'as que 5 minutes pour la convaincre de tes qualités de futur époux. »

Embarrassés, Kayura et Kouji en deviennent écarlates.

« Hum. Vous habitez chez vos parents ?

-Non. Je n'ai plus de famille. »

« Aïe, quelle bourde. »

« Kouji ! Quel manque de tact !

-Maman, laisse-moi donc.

-Je suis navrée Mademoiselle, mon fils est aussi gauche que son défunt père. J'ose espérer que vous ne lui en voulez pas.

-Rassurez-vous, Madame. Et puis, vous ne pouviez pas savoir. »

« Qu'est-ce que c'est que ces deux comiques ? »

« Vous semblez avoir la tête sur les épaules. Que faites-vous dans la vie ? »

« Je viens d'une autre dimension où je lutte avec une armure et un bâton magique pour préserver la terre d'une guerre apocalyptique. Je suis le chef d'une armée. »

« Je suis dans l'armée.

-Si jeune ?

-C'est un peu par tradition. »

« Je suis la dernière de mon clan. C'est mon héritage. »

«Quitterez-vous votre métier pour vous marier ?

-Maman ! Et si elle veut faire carrière ? Elle en a le droit.

-Comment peux-tu me dire une chose pareille, à moi qui ait consacré ma vie à ton éducation ? »

La mère et le fils se disputent devant Kayura impassible.

« Pourquoi moi ? »

Une sonnerie retentit et une voix annonce :

« Suivant ! »

La petite famille se retire et un homme en costume de soie, cravate, les cheveux gominés plaqués en arrière arrive.

« Bonjour Mademoiselle. Vous a-t'on dit combien vous étiez belle ? »

« Les malheurs de Kayura, acte 2 : le mec qui se la joue. »

« Bonjour Monsieur. Non, ce n'est pas le genre de choses que l'on me dit en général.

-Quel dommage ! Une si jolie fille ! Vous avez un regard aussi profond que l'océan, une bouche à la courbe sensuelle, des mains fines et une peau si blanche. C'est un crime qu'aucun homme ne soit à vos côtés. »

« Un Don Juan à la noix après la mère dominatrice et son fiston. »

« Que pensez-vous d'aller boire un verre ensemble ? Je connaît un Love hotel très bien non loin d'içi. Nous pourrions faire plus ample connaissance dans l'intimité d'une chambre, ne voulez-vous pas ?»

« Hein ? Il me prend pour une… »

« J'ai peur d'avoir eu une hallucination acoustique. Voudriez-vous répéter votre phrase s'il-vous-plaît ?

-Allons, fais pas ta timide. Sortir avec moi, c'est la chance de ta vie, bébé.

-… »

« Mon discours et ma beauté lui ont ôté la voix. C'est dans la poche. »

« On y va mon petit sucre d'orge ? »

L'homme s'est levé et tend un bras à Kayura d'un air supèrieur.

« SUIVANT ! Hurle la jeune fille, verte de rage.

-Mais, mais je n'ai pas fini. Mon temps de passage n'est pas écoulé. Proteste-t'il. »

Kayura le regarde droit dans les yeux d'un air particulièrement agressif. Une idée germe dans son esprit.

« Enfin, poupée…

-AAAH ! Au secours ! Cet homme est un pervers ! »

Toutes les personnes présentes se retournent. Kayura continue de crier malgré les protestations du dragueur ringard qui s'en va. Elle se rassied en attendant la sonnerie.

« BIIIIIP ! »

Un homme à l'âge incertain s'installe. Il a des cheveux et une barbe grisonnante, un regard endormi, une salopette et une chemise à carreaux. Il porte de lourdes bottes.

« B'jour ! »

Son haleine avinée manque de faire tomber Kayura de sa chaise.

« Un alcoolique ! Il n'est que 8 heures et demi et ce type est déjà saoûl ! »

« J'suis un employé des espaces verts…Burp ! »

« Quel porc ! Me roter au visage ! »

« J'cherch'une nana qu'est cap' d'faire mon ménage, ma lessive et tout et tout, qui s'charg'rait d'mes mômes et…

-Stop ! L'interromp Kayura. Vous avez des enfants ?

-Ouaip. Sept. »

Kayura sent le sol se dérober sous elle.

« C'est pas vrai ! Comment a-t'il pu se trouver une femme assez dingue pour lui donner des enfants ? Et il en a sept ! Elle a dû s'enfuir sur un autre continent ! Ou alors il les a adoptés. Oui, c'est la solution la plus plausible. Parce qu'un mec aussi…aussi repoussant.»

« BURP ! »

« Méga-rot pour super-porc. C'est pas un homme ni un animal, c'est une expérience échappée du laboratoire d'un savant fou. »

« J'ai une ch'tite soif, pas vous ?

-Heu, non. »

Il fouille dans une des poches de sa salopette et en sort une petite bouteille avec un grand sourire.

« NON ! Il a apporté de l'alcool. »

« V'z'êtes sûre qu'n'en voulez pas ? C'est d'la bonne gnaule. Faites maison.

-Non, sans façons. Je vous remercie.

-A la vôtre ! »

« Ne me dites pas qu'il va vider ça d'un trait. Ne me dites pas qu'il va vider ça d'un trait. Ne me dites pas qu'il va vider ça d'un trait. Ne me dites pas qu'il va vider ça d'un…IL L'A BUE D'UN COUP ! »

Un rot pire que les précédents s'ensuit, puis l'homme s'écroule sur la table.

« Monsieur ? Risque Kayura. Vous allez bien ? »

Un ronflement sonore se fait l'écho de sa question.

« Il dort. 'Jamais deux sans trois' comme on dit. 'La troisième fois sera la bonne.' Avec ces trois 'échantillons' qui se sont succédés, j'en ai soupé pour un bon moment ! Je préfère rester seule qu'être mal accompagnée. »

Sur cette pensée, Kayura quitte le café d'humeur à en découdre contre quiconque aura le malheur de se trouver sur son chemin.

FIN