Rodney repris conscience avec une certitude : il avait froid. Etait-il debout, assis, couché ? Il n'en avait aucune idée. Un tremblement le parcourut des pieds à la tête, laissant chacun de ses muscles douloureux. Il sentit quelqu'un serrer sa main et murmurer des paroles rassurantes à son oreille. Des larmes lui montèrent aux yeux. Il n'en pouvait plus, il voulait que ça s'arrête, qu'il puisse enfin dormir, tout simplement. Un second tremblement plus fort que le premier le fit s'arc-bouter et dans le même temps il cogna sa tête à l'endroit même de sa blessure. Sous la douleur il en eut le souffle coupé. Quand ses poumons se remirent à fonctionner se fut pour exhaler un long et douloureux gémissement.

La voix se fit plus pressante dans son oreille. Il entendit son nom plusieurs fois, répété comme une incantation pour le garder dans le monde des vivants.

Il se força à respirer par petite saccade et se força à retrouver dans sa tête le tableau de Mendeleïev pour oublier la douleur.

- Combien de temps Doc ? Demanda Sheppard avec impatience.

Les tremblements qui agitaient le corps de Rodney se faisaient de plus en plus espacés et John n'arrivait pas à déterminer si c'est un bon signe ou non..

Zelenka tournait en rond dans le cockpit.

- C'est presque finit Colonel, répondit-il avec la même impatience.

Puis il activa sa radio.

- Carson ?

- Radek, répondit immédiatement la voix de l'Ecossais.

- Préparez-vous, je vais ouvrir la porte du Jumper.

Sheppard regarda Radek mettre fin à la communication, regarder l'écran de son ordinateur deux ou trois fois, se tordre les mains, faire craquer ses doigts…

- C'est pour aujourd'hui ou pour demain ? Grogna le Colonel.

- Oui … oui … répondit Radek.

Enfin il se dirigea vers la porte d'un air décidé. Sheppard recentra son attention sur McKay.

- On y est presque, tenez bon Rodney, répéta-t-il pour la centième fois.

Le scientifique n'eut aucune réaction.

La douleur le prenait par vague, fusant à partir de sa tête, elle se répandait dans tout son corps, accompagnée de frisson qui le mettaient au bord de la nausée. Le temps qu'il passa à résister lui parut incroyablement long et à la fois court. Le temps n'avait plus vraiment d'importance. Il pensa à Griffin et espéra que sa mort avait été rapide.

Soudain il sentit de l'agitation autour de lui. La main qui tenait la sienne le lâcha, il ne put s'empêcher d'essayer de la retenir, mais une autre pris sa place, et il sentit une piqûre dans son bras, puis un masque sur son visage. Petit à petit la conscience qu'il avait de son corps disparut et il sombra dans un état ouaté ou plus rien ne l'atteignit.

- Posez-le sur la civière, cria Carson à ses assistants, en douceur ! Et faites attention à sa tête !

Il se tourna vers Sheppard.

- Allez vous reposer Colonel, il n'y a plus rien que vous puissiez faire maintenant. Je vous appelle dès qu'il sera stabilisé.

Sheppard acquiesça de la tête. Il avait senti que McKay avait essayé de retenir sa main. Maintenant il avait l'impression de l'abandonner. Il regarda Beckett et son équipe l'emmener en direction de l'infirmerie.

Zelenka était à ses côtés, aussi perdu que lui. Après le stress du sauvetage, ils avaient du mal à se rendre compte que leur mission était remplie.

Sheppard tapota l'épaule du Tchèque et lui conseilla d'aller se reposer un peu, dans quelques heures nul doute que le docteur Weir organiserait une petite réunion.

Le scientifique hocha la tête mais ne bougea pas. Sheppard le poussa gentiment hors du vaisseau.

- Vous savez, je devais faire ce vol d'essai, lança-t-il, les yeux dans le vague. Je ne suispas très à l'aise avec les Jumpers, j'ai demandé à Rodney s'il voulait bien me remplacer.

John hésita. Le Tchèque avait sûrement des choses à se reprocher, mais sans lui ils n'auraient pas pu sortir Rodney de ce tombeau à temps.

- Ce n'est pas à moi qu'il faut dire cela Doc, répliqua-t-il. Et puis sans vous Rodney serait encore là au fond.

Zelenka ne répondit rien, perdu dans ses pensées. John fit un signe à un soldat et lui demanda de ramener le scientifique dans ses quartiers, doutant qu'il soit capable de s'y rendre par lui-même.

Puis il décida de suivre ses propres conseils et d'aller dans les siens, mais ses pas le conduisirent à l'infirmerie.


Il était tard quand John se réveilla en un sursaut. Il s'était endormi dans un fauteuil près du lit de Rodney. Elisabeth, Teyla et Ronon qui veillait avec lui plus tôt dans la soirée avaient finalement cédé aux assauts de Carson qui leur assurait que leur présence n'était pas nécessaire et qu'ils les appelleraient s'il y avait du nouveau.

Sheppard localisa ce qui l'avait réveillé. L'Ecossais vérifiait l'encéphalogramme de Rodney.

- Carson ? Murmura John d'une voix endormie.

- Ah vous êtes réveillé mon garçon, constata le docteur à voix basse.

John acquiesça. Son regard se posa sur Rodney.. Le scientifique paraissait calme. Sa peau était encore bleutée mais au moins son visage n'était plus tendu par la douleur.

- Je pense qu'il va se réveiller d'ici peu, commenta Carson.

Il prit une chaise et s'assis de l'autre côté du lit, en face du Colonel.

- Il nous aura encore fait une sacrée peur.

John hocha la tête et sourit :

- Il est vraiment impossible à vivre.

Carson lui sourit en retour.

- Vous savez que… commença-t-il, mais un murmure l'arrêta.

- Sam ?

Rodney s'agita, sans ouvrir les yeux. John sourit. Il préférait penser qu'aux pires moments l'esprit de McKay allait au Colonel Carter plutôt qu'au tableau de Mendeleiev.

Carson s'était levé. Il posa une main sur l'épaule de son ami.

- Rodney? Vous êtes à Atlantis, en sécurité, dit-il d'une voix apaisante.

Le physicien battit des paupières puis les ouvrit franchement, dévoilant ses yeux bleus. Ceux-ci survolèrent Carson, puis Sheppard, sans se poser sur l'un ou sur l'autre.

- Il va bien ? Demanda le Colonel.

- Oui, il est juste encore un peu désorienté. Il était presque en état d'hypothermie quand vous l'avez sorti de cette sacrée machine. Je suppose aussi que l'oxygène devait commencer à se faire rare. Il a un traumatisme crânien. Il est possible qu'il lui faille encore plusieurs heures avant de se reconnecter totalement avec la réalité.

Pendant qu'il parlait le docteur avait rempli un verre d'eau et essayait de le faire boire à Rodney avec pour résultat de mettre beaucoup d'eau partout sauf dans la bouche de son patient.

- Il a moins l'air d'un génie comme ça, remarqua John moitié plaisantant, moitié inquiet.

Beckett eut un petit rire.

- Oh ne vous inquiétez pas, dans deux jours au plus il sera redevenu notre bon vieux Rodney. Par contre vous aurez de la chance s'il ose remonter dans un Jumper, lui qui était déjà claustrophobe, maintenant il a de bonnes raisons d'avoir peur.

- N'y pensez pas Carson, McKay ne pourrait pas renoncer au plaisir de nous rendre la vie insupportable en me blâmant d'avoir "garer" le jumper trop loin de notre but, ou en se plaignant de la pluie, du soleil ou de la chaleur…

Rodney avait refermé les yeux. Sheppard se demanda comment il avait pu tenir aussi longtemps, seul dans un Jumper endommagé et remplit d'eau sans succomber totalement à une crise de panique.

- Je crois qu'il s'est rendormit Colonel. Autant que nous en fassions autant.

- Vous avez raison Doc, répondit John avant de se réinstaller confortablement dans son fauteuil.

- Quand je disais en faire autant Colonel…

- Laissez tomber, l'interrompit John en fermant les yeux, je ne bouge plus d'ici.

- Ok. Appelez-moi s'il y a le moindre problème, conclut Carson en sortant de l'infirmerie.