CHAPITRE 12 : LA LETTRE

Le mardi suivant, lorsque Hermione se leva, tous les évènements de la veille lui revinrent en mémoire et tourbillonnèrent dans sa tête, comme pour l'empêcher d'espérer qu'aujourd'hui soit une bonne journée. Elle n'y prêta pas attention et c'est avec un sourire indéchiffrable qu'elle se prépara pour descendre déjeuner.

- Hermione ! s'exclama Ron avec surprise et soulagement lorsqu'il la vit entrer dans la Grande Salle.

- Salut vous deux, lança-t-elle aussi joyeusement que d'habitude en s'asseyant à côté de lui.

- Salut, répondit Harry, qui la regardait d'un air légèrement étonné. Ca va ? demanda-t-il.

Pendant un instant, le sourire d'Hermione se fit un peu triste, puis elle répondit avec un haussement d'épaules :

- Oui…oui ça va.

Elle leur adressa alors un sourire si paisible et si rayonnant qu'ils ne s'inquiétèrent plus. Hermione était là, elle allait bien. Tout était rentré dans l'ordre. Visiblement ravi, Ron la prit dans ses bras et déposa un baiser sur son front.

- On s'est fait un sang d'encre Harry et moi !

- Oui, j'imagine, répondit-elle d'un ton amusé.

- On t'a cherchée partout, poursuivit le rouquin. Alors quand on a vu que tu ne venais pas dîner, on a essayé d'entrer de force dans tes appartements. Mais le portrait n'a pas voulu nous laisser passer vu que nous n'avions pas le mot de passe…

Il avait accentué la dernière phrase et Hermione afficha un sourire un peu coupable.

- Oui, j'y ai pensé en plus, mais…

- Ce n'est pas grave, coupa Harry. Lui aussi avait l'air soulagé de la voir. L'important c'est que tu ailles bien.

Hermione tourna la tête vers lui. Leurs regards se croisèrent et ils pensèrent tous les deux à la discussion qu'ils avaient eu, quelques semaines auparavant, à côté de la bibliothèque.

« Il a dû s'en vouloir, pensa Hermione avec une certaine culpabilité. Il a dû se dire que c'était sa faute et qu'il n'aurait jamais dû me laisser aimer Malefoy. Je n'aurais pas dû les éviter ! Quelle idiote !»

- Je suis désolée, dit-elle à voix basse.

- Ce n'est pas grave, répéta Harry.

Ils se regardèrent à nouveau, un peu gênés, puis après un sourire, ils se concentrèrent sur le petit déjeuner. Cette journée s'annonçait bien différente de la précédente… Le trio était de retour et tout allait bien.

- Au fait, articula Ron la bouche pleine de toast.

Il avala à grand peine et poursuivit.

- C'était quoi votre fameuse discussion de l'autre jour, quand vous m'avez planté à la bibliothèque ?

Drago entra dans la Grande Salle, poursuivi par son habituelle horde de fidèles. Evidemment, Laura se trouvait parmi eux, mais elle n'avait pas encore essayé de l'approcher depuis hier. Depuis ce fameux…« incident ». Il s'assit à la table des Serpentard et aussitôt, il sentit un corps se presser contre le sien.

- Tiens Laura…dit-il de sa voix traînante avec un soupçon de surprise (feinte, bien entendu).

- Bonjour Drago, roucoula-t-elle à son oreille, les yeux papillonnants, apparemment enchantée de se trouver si près de son héros.

« S'il te plaît, pensa-t-il avec lassitude, j'aimerais manger sans avoir envie de vomir. » Il lui adressa néanmoins un sourire de circonstance puis retourna à ses toasts.

De fait, elle était plutôt jolie. Le teint hâlé, de grands yeux sombres et les cheveux châtains parsemés de mèches blondes, elle avait de quoi faire tourner la tête à plus d'un. Mais elle était également, preuve en avait été largement faite, d'une stupidité tout à fait exceptionnelle. Ce qui la rendait aussi intéressante aux yeux de Drago qu'un troupeau de Veracrasses. Il n'avait pas encore réfléchi à ce qu'il pourrait lui faire subir. Laissant voguer ses pensées, son regard distrait se posa sur la table des Gryffondor. « Hermione ! » pensa-t-il. Il ne l'avait pas vue depuis la veille et ce cours catastrophique de SACM. Il la chercha des yeux avec une légère inquiétude et la vit enfin. Toute inquiétude disparut de son regard et laissa place à une rancœur mêlée de jalousie qui le submergea presque. La petite Hermione s'était remise apparemment. Fini les larmes ! Mademoiselle faisait des câlins avec ce stupide rouquin de Weasley ! Et un petit bisou sur le front, vas-y, bien sûr…

La cuillère du Serpentard tremblait dans sa main.

- Drago ? Qu'est-ce qui t'arrive ? demanda une voix aiguë.

Il tourna la tête et revint brusquement à lui. « Caldwell…mais bien sûr ! »

- Rien, Laura, dit-il à voix basse avec un sourire angélique. C'est d'être si près de toi qui me bouleverse autant.

Il se pencha pour l'embrasser dans le cou.

- Viens, murmura-t-il.

Lui prenant la main, il l'entraîna hors de la Grande Salle dans l'indifférence générale, mais peu lui importait que les autres élèves les remarquent pour le moment. Une seule devrait les remarquer.

Le démon caché sous le sourire de l'ange, Drago avait enfin trouvé ce qu'il allait faire de Miss Caldwell.

L'arrivée du courrier sauva de justesse Harry et Hermione. La question de Ron arrivait à un moment pour le moins inopportun et ils furent ravis de ne pas avoir à y répondre tout de suite. A la table des Poufsouffle, un élève reçut une Beuglante (enfin, pas UN élève, mais L'élève ! Un certain petit blond de troisième année…) et l'hilarité générale qui suivit l'explosion de la lettre sembla chasser sa question de l'esprit de Ron.

« C'est reculer pour mieux sauter, ne put s'empêcher de penser Harry. Il faudra bien que tu lui dises un jour ou l'autre. » Une violente douleur à la main le ramena brusquement à la réalité.

- Aïe ! Hedwige ! Arrête !

La chouette blanche lui mordillait le doigt depuis cinq bonnes minutes pour lui faire remarquer qu'il avait reçu une lettre. Harry l'ouvrit avec une certaine surprise. Qui donc pouvait bien lui écrire ?

Harry,

Comment vas-tu ? Nous n'avons pas vraiment eu le temps de parler depuis la rentrée et j'ai pensé que tu pourrais peut-être venir me voir un de ces jours, si tu as le temps. Hermione pourra venir avec toi, bien sûr. Je crois qu'il faudrait que l'on parle de Ron.

A bientôt

Hagrid

Harry reposa la lettre, sa surprise non dissipée. Cela faisait longtemps que Hagrid ne lui faisait plus parvenir de messages par hiboux postal, mais il n'avait pas tort : ils ne s'étaient guère vus depuis la rentrée, mis à part pendant les cours, et comme ceux-ci devenaient de plus en plus durs il n'était pus vraiment possible d'y bavarder. Mais pourquoi « Il faudrait que l'on parle de Ron. » Hagrid se doutait-il de quelque chose ? Ou peut-être que Ron lui avait parlé… Qu'est-ce que ça voulait dire ?

Harry était presque énervé tellement cette lettre lui paraissait absurde. Qu'est-ce que Hagrid pourrait bien lui dire sur Ron ? « N'importe quoi…» pensa-t-il en fourrant la lettre dans sa poche. Il jeta un rapide regard à la table des professeurs mais le demi géant n'y était pas.

Il irait le voir cet après-midi.

- Qu'est-ce qu'il y a ? s'inquiéta Hermione. Tu as l'air énervé tout d'un coup.

- Non, c'est rien, répondit-il d'un ton sec.

- De qui était la lettre ? demanda Ron.

Harry réfléchit. Il ne pouvait pas dire à Ron qu'elle était de Hagrid et qu'il l'invitait, sinon Ron viendrait aussi. Or, il paraissait évident que c'était plutôt à éviter…

- Des Dursley.

- Oh…

Le jeune sorcier se félicita intérieurement pour cette réponse. En plus d'empêcher les éventuelles futures questions, elle expliquait aussi sa mauvaise humeur. « Pour une fois qu'ils me rendent service ! » se dit-il avec un très léger amusement.

- Ne vous inquiétez pas, tout va bien, dit-il à Ron et Hermione avec un sourire rassurant.

Il ne voulait pas être de mauvaise humeur, Hermione avait déjà eu une journée assez difficile la veille, inutile d'en rajouter. Et il ne voulait surtout pas que Ron lui jette sans arrêt des coups d'œil anxieux et évite de lui parler pour ne pas risquer de l'énerver encore plus. Qu'il était mignon quand il faisait ça d'ailleurs, pensa Harry avec un sourire distrait.

- Harry, ça va ? demanda Hermione qui le fixait d'un air perplexe.

- Oh, euh…oui, ça va ! bredouilla-t-il en effaçant rapidement son sourire, les joues rosissantes.

Ron pouffa de rire. « Quel idiot ! » pensa Harry.