Trois Ans...
par Aline

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Chapitre II
Réminiscences

Un bruit sourd le fit sursauter. Il fit un tour sur lui-même, en cherchant la provenance, mais le couloir sombre dans lequel il se trouvait paraissait parfaitement désert. Il reprit lentement sa marche, l'oreille et l'œil à l'affût du moindre son ou mouvement suspect. Un cri étouffé résonna dans le silence pesant et il s'immobilisa.

"Il y a quelqu'un ?"

Il demeura aussi silencieux et immobile que possible, mais aucune réponse ne lui parvint. Il attendit quelques instants, et il lui sembla entendre des pas précipités dans un corridor proche de celui où il se trouvait.

"Jenny ?"

Il sentit son cœur s'accélérer. Pour une raison qu'il ne parvint à définir exactement, une sensation de malaise s'empara de lui et il eut subitement l'impression de suffoquer. Il desserra le nœud de sa cravate et pressa le pas.

"Jenny ? Jenny où est-tu ? Je t'en prie, réponds-moi…"

Son cœur frappait douloureusement dans sa poitrine. Quelque chose se passait, il en était à présent certain. Et Jenny était en danger. Il s'arrêta à nouveau, la respiration haletante, tentant désespérément de localiser l'endroit où elle se trouvait. Mais plus aucun bruit n'était perceptible. Une goutte de sueur perla à son front.

"Jenny, s'il te plaît…"

Il s'interrompit brusquement, retenant sa respiration. Il aurait juré avoir entendu quelque chose. Un courant d'air traversa le couloir et une voix lui parvint, à peine audible, comme si quelqu'un avait chuchoté à son oreille.

"Rupert…"

"Jenny ? Jenny, est-ce que tu m'entends ?"

Une silhouette frêle de femme se dessina alors à quelques mètres de lui, sans qu'il parvienne toutefois à distinguer les traits de son visage. Il fit un pas dans sa direction mais, au même instant, le décor qui l'entourait s'évanouit et, sans qu'il comprenne comment il était arrivé là, il se retrouva chez lui, au rez-de-chaussée de son appartement. Il sentit son cœur manquer un battement. La chaîne stéréo jouait un air de Puccini et une bouteille de champagne trônait sur la table. Machinalement, son regard se porta sur l'escalier qui menait au premier étage. Des roses et des bougies étaient disposées sur les marches.

"Seigneur, pas ça…" souffla-t-il.

Était-il donc condamné à revivre cet instant atroce encore et encore ? Lentement, il avança en direction de l'escalier. Il savait ce qu'il allait trouver en haut et, même s'il refusait de subir ça une nouvelle fois, quelque chose en lui le poussait à monter malgré tout. L'ascension des quelques marches lui sembla durer une éternité. Ses jambes étaient en plombs et chaque pas lui demandait un effort colossal. Lorsqu'il parvint enfin à l'étage, il réalisa que la musique s'était arrêtée. Un silence pesant planait à présent dans la pièce. Il avala sa salive avec difficulté et se tourna lentement vers son lit. Comme il s'y était attendu, elle était là, étendue, la tête légèrement tournée vers lui. Un détail cependant attira son attention ; ses paupières étaient closes et sa poitrine se soulevait régulièrement, au rythme lent de sa respiration. Il la contempla un instant, incapable de faire le moindre mouvement. Elle paraissait si heureuse, si paisible. Un sourire se dessina sur le visage de Giles, et au même moment, elle ouvrit lentement les yeux. Leurs regards se rencontrèrent et elle sourit à son tour.

"Je t'ai attendu tellement longtemps," murmura-t-elle.

Il fit quelques pas pour la rejoindre, mais à l'instant où il s'apprêtait à s'asseoir auprès d'elle, elle disparut, le laissant seul dans la chambre.

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Mai 1998

La nuit était tombée depuis plusieurs heures et ni la lune, ni aucune étoile n'était visible dans le ciel chargé de nuages. L'homme avançait d'un pas rapide, peu impressionné par l'obscurité épaisse qui enveloppait la forêt. Après une demi-heure de marche environ, il s'immobilisa. Il avait atteint une petite clairière au milieu de laquelle s'élevait une cabane en bois. Il la rejoignit rapidement, frappa trois coups brefs à la porte et, sans attendre de réponse, pénétra à l'intérieur. La maisonnette était composée d'une pièce unique, mesurant au maximum une vingtaine de mètres carrés. Au centre, on avait tracé un large cercle blanc à l'intérieur duquel une vieille femme psalmodiait des vers dans une langue ancienne, entourée de bougies parfumées. Il l'observa quelques minutes puis porta son regard vers le fond de la pièce. Une jeune femme se trouvait là, étendue sur une fine couchette d'herbe et de paille, profondément endormie.

"Quelque chose n'a pas fonctionné," déclara l'homme en baissant à nouveau les yeux vers la vieille femme.

Celle-ci se tut instantanément, se tourna vers lui et le toisa de ses petits yeux brillants.

"Vous voyez bien que tout ça ne sert à rien !" s'exclama-t-il. "Ça fait plus de soixante jours, elle aurait dû se réveiller depuis longtemps !"

"Vous connaissiez les risques," grogna la vieille femme. "Vous saviez à quoi vous attendre bien avant d'entreprendre cet acte de folie."

Elle s'interrompit et posa les yeux sur le corps endormi de la jeune femme.

"Tout a fonctionné pour le mieux," reprit-elle. "Au-delà de toute espérance… Mais une telle entreprise prend du temps, ramener une personne du royaume des morts ne s'effectue pas en un jour. Faites donc preuve d'un peu de patience. Elle vit, son cœur bat. C'est bien ce que vous vouliez, non ?"

"Qu'importe que son corps vive si son âme ne trouve pas le chemin du retour ? Combien de temps cela va-t-il encore prendre ?"

"Un jour, une semaine, un an. Personne ne peut le prédire, pas même moi."

"Vous n'avez donc rien vu ?"

"Le futur est incertain," répondit-elle d'une voix mystérieuse. "Des événements décisifs sont sur le point de se produire. Nul n'est en mesure de savoir à quoi ressemblera le monde demain…"

"De quoi parlez-vous ? Quel rapport est-ce que ça…"

Mais la vieille femme ne l'écoutait plus. La tête baissée, elle avait recommencé à chanter à voix basse tout en se balançant d'avant en arrière. L'homme poussa un profond soupir puis il tourna les talons et quitta la cabane.

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22 février 2001

Giles se réveilla en sursaut, le corps couvert de sueur. Un rêve, songea-t-il. Ce n'était rien qu'un rêve. Il se redressa avec difficulté, le dos courbaturé d'avoir passé la nuit sur le canapé. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'il rêvait d'elle. Cette fois-ci, cependant, n'avait rien à voir avec les précédentes. D'habitude, il arrivait toujours trop tard, uniquement pour la trouver telle qu'il l'avait découverte ce soir-là.

Il se leva à contrecœur et prit la direction de la salle de bains. L'horloge suspendue au mur du salon lui indiqua qu'il était dix heures passées et qu'il avait par conséquent déjà plus de deux heures de retard. Il soupira en songeant qu'il s'agissait déjà de la troisième fois rien que depuis le début de la semaine, lui qui était d'habitude toujours si ponctuel. Anya et les autres finiraient inévitablement par se poser des questions, en admettant que ça ne soit pas déjà le cas. Connaissant les enfants, ils ne manqueraient pas de lui poser une pléiade de questions auxquelles il n'avait aucune envie de répondre.

Il se passa un peu d'eau sur le visage, constata au passage qu'il avait plus mauvaise mine encore que la veille, s'habilla rapidement et quitta son appartement. Lorsqu'il arriva au Magic Box, Anya était occupée avec un client hésitant entre deux articles.

"Bien sûr, celui-là coûte un peu plus cher," expliquait-elle avec un peu trop de conviction. "Beaucoup plus cher, en fait. Mais vous ne serez pas déçu, les résultats sont bien meilleurs qu'avec l'autre, cette camelote bon marché… Oh tiens, bonjour Giles ! Vous avez bien dormi ?"

"Bonjour, Anya," se contenta de grogner Giles en réponse.

Il rejoignit le comptoir d'un pas rapide et feignit de s'intéresser au carnet de comptes qu'Anya avait déposé dans le tiroir situé sous la caisse enregistreuse, bien que ce fût en réalité le cadet de ses soucis.

"Je peux vous poser une question ?" lui demanda Anya après que le client dont elle s'occupait eût quitté la boutique.

"Et bien, j'imagine que tu le feras même si je te dis que non," répondit Giles sans lever les yeux vers elle.

"Exact. Je me disais que, puisque vous avez le droit d'arriver en retard à peu près tous les matins, je pourrais partir un peu plus tôt, cet après-midi. À quatre heures, par exemple."

"Bien sûr, fais comme tu veux…"

"Vous êtes sérieux ? Oui, bien sûr que vous êtes sérieux, vous êtes toujours sérieux. Surtout en ce moment, vous n'avez pas particulièrement l'air d'humeur à rigoler."

Giles releva la tête et dévisagea la jeune fille.

"Je te demande pardon ?"

"Vous êtes plutôt grognon depuis quelques jours. Mais c'est pas grave, Willow dit que c'est en rapport avec…"

"Anya, merci, ça suffit. Je ne suis pas, heu, grognon, et même s'il s'agissait effectivement de la vérité, et bien ça ne regarderait que moi. Et maintenant si tu veux bien m'excuser, j'ai du travail qui m'attend."

Sur ce, il reposa le carnet qu'il tenait toujours à la main, tourna les talons et disparut une fois de plus dans l'arrière-boutique. Anya poussa un profond soupir et haussa les épaules.

"Et après il ose prétendre ne pas être grognon," maugréa-t-elle, tout en se remettant au travail.

Giles ne se montra guère de toute la journée. De temps à autre, il émergeait de la remise le temps de chercher un ou deux livres, puis retournait s'isoler à l'arrière du magasin, généralement sans avoir prononcé une seule parole à l'adresse d'Anya. Il ne prit même pas la peine de la réprimander, comme il en avait l'habitude, au sujet des remarques parfois déplacées dont elle faisait bénéficier les clients. Lorsque Alex passa la chercher en fin d'après-midi, il s'étonna que Giles lui ait accordé si facilement ce qu'elle lui avait demandé.

"Tu sais, je crois que Buffy avait raison, hier. Sauf qu'il est pas juste bizarre, il est carrément inquiétant !"

"Ça lui passera," rétorqua Anya en haussant les épaules.

Elle referma la caisse enregistreuse avec un claquement sec et sortit de derrière le comptoir.

"Pour l'instant, ce qui m'inquiète le plus, c'est d'imaginer le désordre qu'il risque de mettre dans les comptes… J'ai passé une heure à tout recompter la dernière fois…"

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And if you ask me
I'll keep saying that I'm fine
So just don't ask

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Un courant d'air la fit frissonner et elle resserra son manteau sur sa poitrine. Les nuits californiennes étaient douces comparées à celles de la forêt roumaine où elle avait passé les trois dernières années, mais l'atmosphère qui régnait en cet endroit lui rappelait trop de mauvais souvenirs et lui donnait froid dans le dos. Elle ignorait ce qui l'avait poussée exactement à venir ici. Pour la première fois depuis son arrivée, elle avait ressenti le besoin pressant de sortir, de quitter cette chambre d'hôtel où elle avait l'impression de devenir folle. Elle n'avait pas vraiment réfléchi à un endroit où elle voulait se rendre en particulier et avait marché au hasard à travers la ville, évitant soigneusement les lieux trop fréquentés. Elle ne s'était arrêtée qu'en atteignant l'entrée de l'un des nombreux cimetières de Sunnydale et avait hésité quelques minutes avant d'y pénétrer, sans être certaine toutefois qu'elle désirait réellement voir ce qu'elle allait y trouver.

Elle arpenta les allées désertes qui séparaient les tombes pendant plusieurs minutes, sans vraiment savoir dans quelle direction elle se dirigeait et lorsqu'elle se figea finalement, le sang se retira de son visage. Elle se trouvait devant une pierre tombale blanche, sur laquelle se détachaient quelques lettres formant un prénom et un nom qui avaient, autrefois, été les siens. Au pied de la pierre reposait un bouquet de roses passées. Une seule personne pouvait les avoir laissées là, et un sourire amer se dessina sur les traits de la jeune femme. Alors il n'a pas oublié, songea-t-elle avec tristesse et gratitude à la fois.

Pendant toutes ces années, jamais elle n'avait cessé de penser à lui et à tout ce qu'ils auraient pu vivre si le destin n'avait pas cruellement décidé de les séparer à l'instant même où elle avait à nouveau entrevu la possibilité d'un avenir commun.

Un craquement derrière elle la fit sursauter. Elle se retourna et jeta un regard inquiet autour d'elle, réalisant d'un seul coup qu'elle avait été suffisamment stupide pour ne pas avoir emporté de quoi se défendre en cas de besoin. Elle savait pourtant mieux que quiconque quel genre de rencontres indésirables une personne se promenant seule, de nuit et qui plus est dans un cimetière pouvait faire dans cette ville.

"Tu es perdue, ma jolie ?"

La jeune femme effectua un demi-tour sur elle-même et aperçut la silhouette d'un homme de forte stature se détacher d'un groupe d'arbre. Elle sentit son cœur accélérer et fit quelques pas en arrière.

"On ne t'a donc jamais dit qu'un endroit comme celui-ci n'est pas très fréquentable, à cette heure de la nuit ?"

Il avançait dans sa direction, et un rayon de lune lui permit d'entrevoir les traits terrifiants de son visage. Elle réprima un cri d'horreur et tourna les talons pour s'enfuir mais son pied se prit dans une racine qui dépassait du sol, elle trébucha et s'étala de tout son long sur la terre humide. La créature qui s'approchait d'elle émit un rire guttural.

"C'est presque trop facile," grogna-t-il.

Le cerveau de la jeune femme fonctionnait à cent à l'heure tandis que le souvenir obscur d'une expérience similaire, survenue des années plus tôt, s'imposait douloureusement à sa mémoire. Elle se releva rapidement, jeta un regard derrière elle et se mit à courir aussi vite que ses jambes le lui permettaient. Le vampire qui la poursuivait s'avéra néanmoins beaucoup plus rapide qu'elle, et il ne lui fallut que quelques enjambées pour la rattraper. Elle grimaça de douleur lorsque ses doigts se refermèrent sur le bandage qu'elle portait au poignet. D'un geste brutal, il la força à se retourner et l'immobilisa à l'aide d'une seule main. Elle leva vers lui un regard terrifié. Des images défilaient à toute vitesse devant ses yeux, tandis que le vampire savourait les quelques secondes précédant l'instant où il achèverait sa victime. Ce furent néanmoins quelques secondes de trop. Dans un ultime effort pour le repousser, elle parvint à libérer l'un de ses bras et asséna à son agresseur un puissant coup dans les côtes. Surpris par cette attaque à laquelle il ne s'était pas attendu, le vampire poussa un grognement et la projeta violemment à terre. Elle avait à peine eu le temps de se relever qu'il était à nouveau sur elle. D'une seule main, il lui saisit brutalement les poignets et lui immobilisa les bras derrière le dos, rendant vaines toutes ses tentatives pour se libérer.

"Tu pensais vraiment pouvoir m'échapper ?" grimaça-t-il.

Un sourire sadique déforma ses traits davantage encore. La jeune femme sentit son sang se glacer dans ses veines et une larme se forma au coin de son œil. Pendant des mois et des mois, elle aurait préféré ne jamais avoir été ramenée de l'au-delà. Et à présent, alors qu'elle recommençait peu à peu à retrouver goût à la vie, elle s'apprêtait à la perdre à nouveau, aussi stupidement que la première fois.

"Ne t'inquiète pas chérie, ça ne prendra que quelques secondes."

Elle ferma les yeux et, au même moment, une vive brûlure se fit ressentir dans son cou, tandis que le monstre y enfonçait avidement ses canines.

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Buffy jeta un coup d'œil à sa montre et ne put retenir un soupir ennuyé. Il était vingt-trois heures et elle n'avait jusque-là rencontré qu'un seul vampire dont elle s'était débarrassée en quelques secondes.

"J'aurais mieux fait de rester à la maison," soupira la jeune femme.

Elle donna un coup de pied dans une pierre qui roula jusqu'à la route. Elle avait initialement prévu de ne pas patrouiller davantage qu'une heure, mais Giles avait une fois de plus insisté sur l'importance du devoir qu'elle devait accomplir. Il jugeait qu'elle devait se montrer particulièrement vigilante en ce moment, avec Gloria qui rôdait en liberté, mais elle aurait trouvé plus utile de rester auprès de Dawn afin d'être en mesure de la protéger en cas de besoin.

Elle était sur le point de quitter le cimetière pour rentrer chez elle lorsqu'un bruit sur sa droite attira son attention. Elle retint son souffle et se dissimula dans l'ombre d'un arbre. Quelques secondes plus tard, une ombre surgit d'un tombeau. La jeune fille s'arma d'un pieu et s'apprêtait à lui bondir dessus lorsqu'elle suspendit brusquement son geste. La créature s'était mise à chantonner et Buffy reconnut immédiatement cette voix.

"Spike ?" s'exclama-t-elle en sortant de l'ombre.

"Tiens, la Tueuse, quelle surprise," répliqua le vampire d'un ton léger en se tournant vers elle. "On ne t'a jamais appris que c'est très impoli de surgir comme ça derrière les gens ?"

"Et toi, on ne t'a jamais appris que c'est très impoli de… dévaliser les tombes ? Qu'est-ce que c'est que ça ?"

D'un signe de la tête, elle désigna les objets que Spike tenait fermement contre sa poitrine et qu'il tenta vainement de dissimuler.

"Oh, rien du tout. Juste un peu de bric-à-brac que j'ai trouvé là-dedans… Les habitants sont de toute façon trop morts pour en avoir encore l'utilité."

La jeune fille poussa un soupir excédé et reprit sa ronde, sans plus se préoccuper de Spike. Celui-ci ne l'entendait toutefois pas de cette oreille. Il laissa tomber les objets qu'il avait emportés et décida de la suivre.

"Puisque je suis là, je pourrais aussi bien te donner un coup de main pour patrouiller."

"Je me passerai volontiers de ton aide, merci bien."

"Inutile de le prendre comme ça, tout ce que je veux, c'est te rendre service."

"Écoute Spike, je n'ai vraiment pas besoin qu'on me rende service. Et surtout pas toi."

"Je vois. Voilà qui m'apprendra une fois encore à me la fermer. C'est incroyable ce que tu peux être désagréable quand même."

"Je ne suis pas désagréable. C'est toi qui es insupportable. Est-ce que tu ne commences pas à en avoir assez de me suivre partout où je vais ?

"Mais c'est totalement faux, je ne te suivais pas du tout. Je passais par là c'est tout, il faudrait arrêter de te considérer comme le centre de l'Univers !"

"Je ne me… Oh et puis je ne sais même pas pourquoi je discute avec toi, fiche-moi la paix tu v…"

"Chut !"

"Quoi ?"

"Tais-toi, j'ai entendu quelque chose…"

Buffy jeta un coup d'œil autour d'elle, mais ne remarqua rien d'inhabituel.

"C'est tout ce que tu as trouvé pour…"

La jeune fille s'interrompit. Un grognement sourd venait de retentir, étouffé par la distance, mais la Tueuse l'identifia sur-le-champ. Sans la moindre hésitation, elle se précipita dans la direction de laquelle il provenait. Elle sauta par-dessus quelques pierres tombales, contourna un groupe de buissons et aperçut enfin le vampire. Il était déjà penché sur sa victime lorsqu'elle se jeta sur lui et le projeta au sol. Surpris, il lâcha sa proie qui roula à plusieurs mètres de lui, inconsciente.

"Qu'est-ce que… ?" s'exclama le vampire.

Il se releva et se tourna vers Buffy, qui se tenait déjà prête pour le combat.

"La Tueuse," grimaça le vampire. "Tu tombes bien fillette, j'avais besoin d'un peu d'action. L'autre était une proie beaucoup trop facile, ça n'avait rien d'amus…"

Il n'eut pas eu le temps d'achever sa phrase. La jeune fille lui asséna un puissant coup de poing en plein visage, l'envoyant une nouvelle fois à terre. Lorsqu'il se redressa, il ne rigolait plus et jeta à la jeune fille un regard et un grognement qui se voulaient tous deux terrifiants.

"Tu sais ce qu'il y a de particulièrement énervant avec toi ?" lui demanda Buffy, loin de se laisser impressionner par son adversaire. "C'est que tu parles beaucoup trop !"

Le vampire se jeta violemment sur elle, mais elle esquiva agilement son attaque et, entraîné par son poids, il mordit à nouveau la poussière.

"Alors, tu fais moins le fier maintenant hein ?"

Le combat qui s'ensuivit ne dura pas plus de quelques minutes. Si le vampire s'était certes avéré posséder une grande force, il manquait singulièrement de souplesse et d'agilité et se révéla un adversaire sans grande surprise; lorsque Buffy lui porta le coup final, elle avait le sentiment d'avoir à peine eu le temps de se dégourdir les jambes. Elle passa rapidement une main sur ses vêtements pour en retirer la terre et la poussière, puis se dirigea vers l'endroit où la victime du vampire avait été projetée. Celle-ci avait repris ses esprits et tentait avec difficulté de se remettre sur ses pieds.

"Est-ce que ça va ?" s'enquit la jeune fille.

Elle lui tendit une main pour l'aider à se relever, mais lorsqu'elle fut debout, leurs regards se croisèrent et Buffy laissa échapper un cri de surprise. La jeune femme la dévisagea avec effroi pendant quelques secondes puis, sans même prendre la peine de la remercier, elle fit quelques pas en arrière avant de tourner les talons et de quitter le cimetière en courant. Buffy demeura immobile pendant quelques instants, incapable de croire ce qu'elle venait de voir. C'était impossible, tout simplement inconcevable. Et pourtant… Elle prit alors d'un seul coup conscience de l'endroit où elle se trouvait. Elle jeta un rapide coup d'œil autour d'elle et son regard s'arrêta finalement sur une pierre tombale déjà usée sur laquelle elle parvint à déchiffrer deux mots : Jennifer Calendar.

à suivre...