III

Le lendemain, ils se levèrent de bonne heure pour se rendre sur le chantier archéologique d'Evans. Le lit de camp n'avait pas contribué à rendre Lily de meilleure humeur. La poussière ocre qui se soulevait en nuages épais leur irritait les yeux. Lily marchait derrière, son chapeau cloche abaissé loin sur ses yeux pour la protéger. Indiana Jones repéra un ouvrier et se dirigea vers lui.

Où pourrais-je trouver le responsable du chantier, s'il vous plait ? Lui demanda-t-il en grec. L'homme le dévisagea.

Il n'y a plus d'activité ici depuis qu'Evans est mort. Mais des allemands sont arrivés il y a deux jours pour reprendre seuls les fouilles. Vous pouvez toujours aller les voir… Mais, ils n'aiment pas trop les américains. Et encore moins qu'on se mêle de leurs affaires.

Nous venons reprendre les travaux.

Ah, dans ce cas… Lily jeta un regard étonné à Indy.

Vraiment ? lui demanda-t-elle. Et quand ils se furent éloignés de l'ouvrier :

Non, mais maintenant oui. Nous pourrons ainsi mener notre enquête plus facilement.

Et vous avez des éléments concrets pour attester de notre présence ici ?

Ne vous inquiétez pas de cela. J'en fais mon affaire.

Les deux jeunes gens entrèrent dans les salles du palais de Cnossos. La plupart avaient été repeintes selon les théories qu'Evans avaient formulées d'après ses recherches, c'est-à-dire dans des teintes vives et en grande majorité rouges.

Personnellement, dit Lily, ce n'est pas là ma vision de l'archéologie. Il ne me serait jamais venu à l'idée de repeindre les temples grecs ou romains selon leurs couleurs d'origine. Je considère plutôt cela comme un sacrilège.

Tout a fait d'accord avec vous.

Je n'en suis pas si sûre. Vous ne vous privez pas de tout détruire sur les sites où vous êtes en mission.

Comment êtes-vous au courant de cela ? Répondit Indiana d'un air faussement vexé. Et puis, ce n'est jamais vraiment ma faute. Lily sourit pour elle en entendant tant d'hypocrisie.

Des voix résonnèrent dans une salle non loin.

Voilà nos allemands, dit Indy. Au détour d'un couloir, ils se trouvèrent nez à nez avec eux.

Professeur Jones ! Lança le plus grand. Vous ici ! J'aurais dû m'en douter ! Lily le dévisagea méchamment. Il portait un uniforme de colonel SS.

On vous trouve toujours là où il y a quelque chose d'intéressant à découvrir.

Je pourrais dire la même chose de vous. Le colonel se tut quelques instants, puis :

Et que me vaut l'honneur de cette visite ?

L'Université de New York nous envoie reprendre les travaux d'Evans.

Vraiment ?

Absolument. L'air certain d'Indiana convainquit momentanément le colonel.

J'aurais besoin de voir les notes d'Evans. Histoire de voir où il en était à avant de mourir. Indiana fit un pas en avant pour entrer dans la salle, mais l'autre homme, qui était petit et trapu, lui en barra l'entrée. Le colonel lança un regard dissuasif à son acolyte.

Voyons, Heiberg, Jones est un collègue.

Heiberg s'écarta et le colonel fit signe à Indiana de rentrer. La salle ressemblait plus à un quartier général qu'à une ancienne salle du trône. Evans avait dû en faire sa salle de travail, mais les allemands avaient achevé de la remplir avec leurs drapeaux et leurs armes nazis. Lily entra avec une moue de dégoût. Indy repéra un carnet de croquis sur la table faite d'une planche et de tréteaux. Il avança la main pour le saisir, mais le colonel le devança.

Les notes de ce pauvre Evans…Faites-en bon usage, dit-il en plaçant le cahier dans les mains d'Indy. Heiberg lança un regard contrarié et étonné au colonel.

Vous ne m'en voudrez pas mais nous resterons ici encore quelque temps. J'ai des ordres de mon côté. Nous mènerons donc nos fouilles en parallèle. Et… mais votre compagne n'a pas l'air ravi à cette idée, dit-il en regardant Lily.

Indiana donna un coup de coude à la jeune fille, et celle-ci afficha un sourire forcé.

Nous étions en train de quitter les lieux, dit le colonel en raccompagnant les deux américains de force vers la sortie. Lorsqu'ils se furent séparés, Heidberg lança au colonel :

- Pourquoi lui avez vous donné le journal ?

Vous ne croyez tout de même pas que je lui ai tout donné, Heidberg. Vous êtes un peu trop naïf parfois.., dit ce dernier, sarcastique, en sortant quelques pages arrachées de son uniforme.