Commentaire : Ok, au départ il ne devait y avoir que 3 chapitres, finalement ce 4ème chapitre devait être le dernier chapitre, puis il a été repoussé en avant dernier chapitre une fois arrivé au milieu, puis il s'agira finalement de l'avant-avant dernier chapitre. Plaignez-vous à l'auteur qui a constamment des nouvelles idées pour rallonger l'histoire. En même temps, cette idée était bien mieux que celle de départ pour rejoindre la partie A de l'histoire avec la partie B. Bref, encore un chapitre qui se consacre surtout aux relations Tomoki/Xue (Feilong). Non pas que je n'ai rien d'autre à raconter mais c'est somme tout important. Pi c'est moi qui décide d'aboooord !
Chapitre 4 – It's All Tears
Tomoki
s'éveilla en sursaut, le souffle rapide et irrégulier.
Il jeta un regard paniqué autour de lui alors que les images
de son cauchemar peinaient à disparaître. Encore une
fois…
Pris de
tremblements en dépit de la chaleur nocturne, il s'assit
dans le lit et tira le drap à lui, le ramenant jusqu'à
ses épaule en sueur. Il plia ensuite les genoux pour se
recroqueviller sur lui-même. Il chercha à reprendre une
respiration normale, à calmer les battements désordonnés
de son cœur, mais en vain.
Lorsqu'une
main s'abattit sur son bras, il poussa un cri et s'écarta.
Fixant le visage de Xuě Fēng comme s'il voyait un fantôme,
les souvenirs la nuit lui revinrent peu à peu en mémoire
et l'embarras prit feu en lui.
« -
Tu as fait un cauchemar, » fit l'homme dont il ne voyait
presque pas le visage dans l'obscurité. C'était une
constatation pure et simple. Une certitude. Tomoki ouvrit la bouche
pour nier mais abandonna finalement et ferma les yeux. Cela ne
servait strictement à rien. « Ce n'est pas la
première fois. Tu dors mal depuis plusieurs jours. »
Le garçon
posa un regard étonné sur son interlocuteur.
« -
Tu le savais ? » s'exclama-t-il plus fort qu'il
ne l'avait voulu. Baissant de ton, il ajouta : « Je
ne voulais pas t'inquiéter avec ça. »
Xuě Fēng
se mit à rire sans raison. Son bras encercla les épaules
de Tomoki et l'attira à lui, contre son torse nu. Le jeune
homme se laissa faire sans protester, bien qu'intérieurement
il n'était pas très à l'aise. Son regard
tomba sur la cicatrice qui marquait la poitrine de son amant et,
hésitant, il l'effleura des doigts.
« -
Nous avons tous nos blessures. Peut-être qu'en parler te
ferait du bien. »
Tomoki
secoua négativement la tête. Il ne voulait pas se
rappeler. Pas de ça.
« -
Alors ces cauchemars te hanteront sûrement jusqu'à ta
mort, » ajouta Xuě Fēng dans un soupir.
« -
Peut-être… Mais chaque fois que j'y pense… »
Son cœur
paraissait toujours sur le point d'exploser et il avait envie de
pleurer. Comme il avait pleuré ce jour là alors que le
sang de sa mère avait giclé sur sa peau. Rien que cette
pensée le paralysait et il se raidit, tentant de se focaliser
sur autre chose.
Alors que les doigts de Xuě Fēng caressait son épaule, il se
remémora la nuit qu'ils venaient de passer.
Cette tentative de meurtre l'avait tellement ébranlé…
Il avait cherché à trouver le réconfort le plus
primaire qui soit, dans les bras de l'homme qu'il aimait. Cela le
remplissait de honte. Et pourtant, il avait adoré ça.
Et il était persuadé que c'était le cas aussi
de son protecteur.
Il avait aimé sentir les mains de son amant sur son corps, ses
baisers et la douceur moite de sa langue. Etre lové contre
lui.
Il avait laissé ses doigts courir sur sa peau et ses muscles,
sur la cicatrice qui avait piqué sa curiosité sans
qu'il n'ose demander la raison de sa présence. Il avait
écarté les cuisses pour l'accueillir entre elles et
nouées ses jambes autour de sa taille. Il avait eut peur au
moment de leur union car c'était sa première fois et
il l'avait murmuré timidement au creux de son oreille.
La douleur l'avait tout d'abord envahi et avec elle le refus.
Puis un doux plaisir l'avait emporté et fait gémir à
chaque mouvement en lui.
Jamais il n'avait pensé que cet acte qui l'avait jusqu'à
présent dégoûté puisse être aussi
intense et délicieux.
Après que l'extase l'ait submergé, il s'était
senti épuisé mais satisfait. Son dernier geste avant de
s'endormir avait été de se blottir contre Xuě Fēng.
« - C'est quelque chose dont je n'ai parlé avec
personne, excepté mon… Père, à l'époque, »
murmura soudainement Tomoki. « J'ai essayé
d'oublier. J'y suis même parvenu durant des années.
Mais j'ai commencé à y repenser ces derniers mois,
sans réellement m'en apercevoir. Et mes cauchemars sont
revenus. Enfin… Mes souvenirs. »
Tomoki fut pris à nouveau d'un frisson et il posa sa joue
dans le creux de l'épaule de Xuě Fēng.
« - Ma mère n'était qu'une prostituée.
C'est ce qu'ils m'ont répété durant toute
ma vie. Une prostituée de luxe mais une prostitué quand
même. La famille de mon père me haït, parce que je
suis né à cause d'une aventure qu'il a eu avec une
prostituée de Hong Kong. Et que cette aventure a causé
son divorce avec une japonaise riche, elle. »
Il n'était qu'un enfant illégitime, protégé
pour le moment par son père, mais qui n'obtiendrait jamais
rien. Si son père venait à mourir, aucun membre de la
famille Imaya prendrait la peine de lui offrir une tombe digne de ce
nom. Ils le méprisaient, tous sans exception.
« - Au départ, ils ont voulu cacher son existence
et la mienne. Mon père l'entretenait par pitié. Il
l'avait racheté par pitié. Je crois qu'ils se sont
aimés mais seulement au début, avant ma naissance. J'ai
grandi à Hong Kong sans rien savoir de lui mais, quand j'ai
eu six ans… Elle est morte. Elle a été assassinée.
Ils ont voulu m'assassiner aussi.
« - Qui donc ? » demanda Xuě Fēng alors
que Tomoki était devenu silencieux.
« - Ma famille… A l'insu de mon père… Ma mère
voulait que mon père me reconnaisse. Qu'il fasse au moins
cela pour assurer mon futur. Elle ne réclamait rien de plus.
Ni argent, ni mariage. Seulement ça. C'était déjà
de trop. Ils ont envoyé un tueur. Elle a essayé de fuir
avec moi mais c'était inutile. Il nous a rattrapé et
lui a tiré dessus. Il y avait tellement de sang. »
Sur ces dernières phrases, la voix de Tomoki s'était
faite tremblante. Alors qu'il racontait, il revivait en même
temps les évènements. Sa mère avait reçu
une balle en pleine poitrine mais elle n'était pas morte sur
le coup. Elle agonisait alors que son sang s'écoulait sur le
macadam de cette ruelle.
« - Il allait me tuer aussi. Mais… Je ne sais pas
comment il a su… Tout ce que je sais, c'est qu'il est arrivé
et qu'il m'a protégé. Ce fut le seul jour où
il a réellement fait quelque chose pour moi et agit en tant
que père. Ou je l'ai vu avoir un geste tendre pour ma mère
en la prenant dans ses bras alors qu'elle mourrait. »
Tomoki fut soudainement soulagé par ce qu'il venait de dire.
Pour autant, il savait que ce n'était pas cela qui mettrait
fin définitivement à ses cauchemars et à la
douleur qu'il éprouvait à ce souvenir.
« - Et cette cicatrice, d'où vient-elle ? »
osa-t-il demander au bout de quelques secondes. Il se redressa sur un
coude pour essayer de mieux voir Xuě Fēng.
Celui ne répondit pas immédiatement et la pénombre
dans laquelle était plongée la chambre empêchait
de voir quelle expression avaient ses traits.
« - Un homme m'a tiré dessus, »
expliqua-t-il succinctement.
« - Est-ce qu'il était important pour toi ? »
s'enquit Tomoki, sans réellement savoir ce qui lui prenait
de demander cela.
Un rire bas secoua Xuě Fēng durant un court instant et il posa la
main sur son front.
« - Certainement pas. »
Tomoki porta son doigt entaillé à ses lèvres
tout en poussant un petit cri de douleur. Il venait de se couper,
avec ce fichu couteau de cuisine. Le poivron rouge, qu'il essayait
de vaillamment de trancher en morceaux depuis quelques minutes,
semblait de moquer de lui. Levant son « arme »,
il la planta dans le légume récalcitrant et eut une
exclamation victorieuse quand il commença à ressembler
à de la purée.
« - N'est-on pas censé en faire des lamelles ? »
Le japonais fit un bond et faillit s'entailler un autre doigt. Xuě
Fēng était penché par dessus son épaule et
observait d'un air perplexe le massacre.
« - Que fais-tu de si bon matin… A part torturer un de
mes pauvres poivrons ? » railla-t-il en se
redressant.
« - Je ne le torture pas ! » s'exclama
tout de go Tomoki. Il se retourna, le couteau brandit en direction de
son petit ami. Lorsqu'il se rendit compte de son geste, il fit
disparaître l'instrument de cuisine derrière son dos
avec un sourire embêté. « J'essayais de me
rendre utile en cuisinant.
« - Je vois ça… » murmura Xuě Fēng
en jetant un regard circulaire sur la cuisine. De l'eau bouillait
dans une casserole et il y avait un tas de légumes qui
attendaient avec impatience de subir le même sort que leur
compagnon. Effrayant.
« - Mais en fait, il semblerait que je ne sois pas très
doué, » précisa Tomoki en baissant la tête
avec une mine piteuse.
« - On ne dirait vraiment pas, » susurra
l'autre avec un sourire en coin.
Le jeune homme lui jeta un regard noir, lui signifiant d'arrêter
de se moquer de lui. Toutefois, sa mauvaise humeur disparut lorsque
Xuě Fēng prit sa main pour examiner son doigt blessé.
« - Je devrais y mettre un pansement, »
constata le garçon, quelque peu perplexe face au regard que
venait de lui lancer son amant. Il allait encore se mettre à
rougir à ce train là. Non, il se mit à rougir
lorsque Xuě Fēng lécha tout simplement le bout de son doigt.
Poussant un cri proche du « yiiiiiiik », Tomoki
fit un bond sur le côté, laissa le couteau tomber à
terre et récupéra sa main. « C'est
dégoûtant ! Je vais mettre un pansement et ne
refais pas autre chose de ce genre. »
Alors qu'il quittait la cuisine, Tomoki entendit Xuě Fēng éclater
de rire. Malgré sa colère, il ne put retenir un
sourire, qu'il effaça bien vite une fois dans le salon.
Son regard s'arrêta inévitablement là où
le tueur était mort.
Il n'y avait plus aucune trace de sang sur le carrelage. Il était
sûr que toutes les rainures avaient été curées
avec soin. Quant au tapis blanc, il avait disparu pour être
remplacé par un neuf, strictement identique. Efficace le
nettoyage mais il se demandait, non sans dégoût, ce
qu'avait pu devenir le corps. Il imaginait le pire, comme un
broyeur écrasant la chair et les os, et cela lui mettait le
cœur au bord des lèvres.
Contournant le lieu du crime, il se rendit dans la salle de bain et
trouva de quoi faire un pansement. Il resta ensuite dans la chambre,
n'osant pas en sortir. Il ne savait que faire. Il était sûr
que s'il sortait sans avoir aucune activité précise
en tête, il ne pourrait que se planter devant cet endroit bien
précis et laisser son imagination le rendre malade.
Alors, jusqu'à ce qu'une délicieuse odeur vienne
lui titiller les narines, il fit ce qu'il pouvait faire de mieux :
dormir.
Le repas fut quelque peu silencieux… Et tendu du côté
de Tomoki. Soucieux, il se contentait de fixer la nourriture ou les
baguettes qu'il tenait dans sa main. Sans aucun doute cette
attitude n'échappa pas à Xuě Fēng mais celui-ci se
garda de toutes remarques. Il entama tout d'abord une conversation
à sens unique sur des choses banales avant de tomber lui aussi
dans un silence imperturbable.
Lorsqu'ils eurent finit, Tomoki voulu débarrasser mais en
fut empêché. Contrarié de ne pouvoir aider, il
alla s'asseoir dans le canapé du salon et fit selon son
habitude lorsque quelque chose l'agaçait : autrement
dit, il bouda. Lorsque, quelques instants plus tard, Xuě Fēng vint
le rejoindre, il se contenta d'un soupir et resta obstiné
dans son mutisme.
« - Ai-je fait quelque chose de mal ? »
demanda le chinois d'un ton perplexe.
Tomoki ne donna pas immédiatement réponse. Sa première
intention étant en fait de ne rien révéler quand
à ce qui le préoccupait. Mais il changea d'avis en
cours de route et fit d'une voix un peu hésitante :
« - Je me sens totalement inutile, »
révéla-t-il en serrant ses mains l'une contre l'autre
avec nervosité. « Ici je ne sers à rien,
n'est ce pas ? »
Il releva les yeux, non sans insistance. Il attendait visiblement une
réponse, dissipant ses craintes. On lui venait en aide, on lui
sauvait la vie mais il ne savait absolument rien faire pour payer sa
dette. Alors que Xuě Fēng le fixait sans rien dire et sans révéler
ce qu'il pouvait penser sur son visage, il baissa la tête et
se mordilla la lèvre.
« - Alors je suis vraiment inutile ? »
s'inquiéta-t-il en se souvenant combien il avait été
incapable avec ce fichu poivron. Cela avait quelque chose d'humiliant
pour lui. Il ne savait pas faire quelque chose d'aussi simple que
de découper un légume à la noix.
Xuě Fēng posa la main sur sa tête, caressant ses cheveux. Le
geste rassura à peine le jeune homme car il ne savait s'il
devait le prendre comme une preuve d'affection ou de pitié.
« - Les gens ne sont pas des outils. On ne mesure pas leur
importance selon leur utilité.
« - Mais tu m'as sauvé, » protesta
Tomoki. « Et tu sembles savoir faire tant de choses. Tu
m'héberges aussi. Et moi je ne fais rien de bien. »
Xuě Fēng se pencha en avant, fronçant des sourcils. Puis un
sourire éclaira son visage et cela ne disait rien qui vaille
au pauvre Tomoki.
« - Mais voyons, il y a des choses que tu fais très
bien. Cette nuit, c'était très intéressant… »
Il n'en fallu pas plus pour le faire virer d'une belle couleur
tomate. L'insinuation était bien trop évidente.
Beaucoup trop… Tomoki quitta la mélancolie dans laquelle il
avait plongé pour la colère.
« - C-comment peux tu dire ça comme ça ? »
s'offusqua-t-il en se levant du canapé. « Je ne
suis donc bon que pour ça à tes yeux ?
« - Une chose est sûre : la colère te va
bien mieux que l'apitoiement. Je n'aime pas les gens qui se
plaignent de leur sort. Ces gens là sont faibles. »
S'il y avait bien une chose que Tomoki ne voulait pas, c'était
déplaire à Xuě Fēng. Hélas, il ne savait guère
comment changer son attitude. Etait-il possible d'arriver à
ne jamais ressentir de l'inquiétude ? De ne jamais
avoir envie de pleurer ? De ne plus être… Faible ?
Etait-il faible à ses yeux ?
« - Tomoki, je suis heureux de t'héberger et je
ne te demande aucunement d'être utile en quoique ce soit. Ce
qui arrive n'est pas de ta faute et t'aider est la moindre des
choses. Je ne veux rien en échange de cela. Absolument rien.
Alors, ne pleure pas sur des futilités, par pitié. »
Des futilités ? Tomoki eut un sourire amer. Il était
presque prêt à reconnaître que cela en était.
Ce n'était pas vraiment la voix de la raison qui le poussait
à accepter cela, mais plutôt celle bien moins sage de
l'amour. Il voulait croire en ce que lui disait Xuě Fēng.
« - C'est que… Depuis que je suis enfant, je n'ai
jamais rien su faire d'utile, » insista-t-il malgré
tout. « Je ne veux pas devenir un poids pour les autres.
Ma… Ma famille me reproche déjà assez de choses. Je
ne veux pas non plus que… Tu me trouves ennuyeux, inintéressant. »
La main de Xuě Fēng effleura sa joue et lui fit relever le visage.
Tomoki se sentit rassuré lorsque leurs lèvres se
touchèrent délicatement. Elles s'effleurèrent
tout d'abord, pouvant donner l'illusion d'une curieuse
appréhension, mais, si appréhension il y avait, elle
s'effaça lorsque leur échange se fit plus intense.
Leurs langues se touchaient et se caressaient dans un ballet qui
semblait ne pas trouver de conclusion.
Lorsqu'ils rompirent le baiser, Tomoki se laissa retomber sur le
canapé. Il était quelque peu essoufflé. Mais Xuě
Fēng ne voulait visiblement pas lui laisser de répit. Ses
lèvres s'emparèrent à nouveau des siennes, non
sans un côté impérieux. Etrangement, cela ne
déplaisait pas au japonais. Il aimait pourtant la douceur
mais, en cet instant, cette impression de possessivité qui se
dégageait de son amant ne le dérangeait aucunement.
Cela le rassurait, car il se sentait désiré, aimé
et protégé.
Les mains de Xuě Fēng passèrent sous son T-shirt et le jeune
homme eut un frisson de plaisir lorsqu'elles montèrent le
long de ses reins et son dos. Il chérissait ce contact sur sa
peau, la sensation des doigts qui cherchaient à effleurer ses
points sensibles pour le faire gémir.
Il en oubliait ses inquiétudes et le motif de sa colère.
Tomoki se laissa allonger, les mains croisées sur la nuque de
Xuě Fēng. L'homme était installé à
califourchon sur lui, les jambes pliées de chaque côté
de ses hanches. Guidé par son désir, le garçon
commença à déboutonner la chemise de son amant.
Ses doigts volèrent rapidement sur la cicatrice, puis sur l'un
des boutons de chair rosé qui venait d'apparaître une
fois les pans grands ouverts. Tomoki n'était pas grand
expert à ce jeu là mais avait vite compris quelles
choses pouvaient faire frémir son partenaire. L'une de ses
mains se glissa dans les longs et doux cheveux noirs pendant que
l'autre continuait son exploration, descendant entre les deux
pectoraux.
Lui était si fragile pour un garçon, mais de Xuě Fēng
émanait une grande force. Ses muscles étaient bien plus
développés, son allure était on ne peut plus
féline. Mais ses cheveux et la finesse de son visage lui
donnait un charme délicat. Il était absolument
charismatique en plus d'être beau et un seul de ses regards
suffisait à faire fondre Tomoki.
Il
l'aimait vraiment. Plus que tout. Sa raison avait beau lui souffler
qu'il ne le connaissait que depuis un peu plus d'une semaine, il
ne pouvait s'en empêcher. Il était convaincu que ses
sentiments étaient partagés. Que Xuě Fēng ne le
couvrait pas seulement de baisers et de caresses parce qu'il le
désirait, mais bien parce qu'il l'aimait.
Poussant
un léger grognement, Tomoki se redressa en se frottant les
yeux d'une main. Assis sur le lit, il jeta un coup d'œil à
côté de lui et se rendit compte que la place était
libre. Il était seul. Ce qui n'était pas forcément
pour lui plaire. Soupirant, il posa les pieds par terre et s'apprêta
à se lever, quand un bruit attira son attention. Avant même
d'avoir pu analyser ce dont il s'agissait, il s'immobilisa et
tendit l'oreille avec curiosité.
C'était
la voix de Xuě Fēng qui lui parvenait depuis le bureau. La porte de
la salle de bain était ouverte et il n'y avait que cette
pièce entre la chambre et le bureau.
Tomoki
attrapa le drap pour le jeter sur ses épaules et s'approcha
de la salle de bain. Il n'avait pas spécialement l'intention
d'espionner Xuě Fēng, c'était avant tout la douche qui
l'intéressait. Pourtant, la discussion titilla son attention
et il ne pu s'empêcher d'écouter.
Xuě Fēng
paraissait vraiment irrité. C'était même la
première fois qu'il l'entendait parler d'une voix aussi
dure et autoritaire.
« -
S'ils remettent en question mon autorité, alors ils en
subiront les conséquences… Je n'ai pas le temps pour ça,
j'ai des choses plus importantes à régler… Tes
excuses ne m'intéressent pas. S'il se passe quoique ce
soit durant mon absence, je te tiendrai pour premier responsable.
Alors tu as tout intérêt à faire très
attention. Tu n'aimerais pas me mettre en colère, n'est ce
pas ? »
Au
silence qui s'ensuivit, Tomoki déduisit que Xuě Fēng avait
du raccrocher. Il se demanda si celui-ci avait des problèmes à
son travail et si c'était à cause de lui. Après
tout, depuis qu'il avait emménagé, Tomoki n'avait
pas vu son amant aller une seule fois travailler, comme s'il
s'était offert des vacances très prolongées.
Toutefois, cette réflexion ne l'éclairait guère
sur le motif de la discorde. Xuě Fēng avait l'air de s'en
prendre à des personnes qui devaient certainement travailler
pour ou avec lui. Mais à part ça…
D'un
autre côté, il se demandait s'il devait réellement
s'en soucier. Surtout qu'il se voyait mal poser des questions et
demander à Xuě Fēng quel était le motif de la
querelle.
Alors
qu'il s'apprêtait à entrer dans la cabine de douche,
la porte s'ouvrit et il eut tôt fait de récupérer
le drap pour se cacher derrière. C'était idiot. Il
agissait comme un idiot, surtout après ce qu'ils avaient
fait, mais il n'avait pas spécialement envie de rester nu
devant lui.
« -
Qu'es-tu encore en train de fabriquer ? »
questionna Xuě Fēng alors que le visage de Tomoki réapparaissait
peu à peu de derrière le drap blanc.
« -
Oh euh… Je m'apprêtais à prendre une douche ! »
s'empressa-t-il d'affirmer en hochant vigoureusement de la tête
pour donner plus de poids à ses paroles. Au regard soupçonneux
qu'adoptait à présent Xuě Fēng, Tomoki se mit à
paniquer. « Ne crois pas que je t'espionnais, parce ce
n'est pas le cas… Et d'ailleurs je n'ai rien entendu… Enfin
si tu disais quelque chose, ce que j'ignore totalement. Tu disais
quelque chose ? C'est dingue comme les murs sont épais
et… »
Tomoki
s'arrêta de parler en voyant Xuě Fēng sourire. Ce qui fit
qu'il s'emmitoufla un peu plus dans son drap, avant de lancer un
regard circonspect. C'était quoi ça ? Le sourire
qui signifiait « tu n'aurais pas du écouter,
maintenant tu en sais trop et je dois te tuer » ? Il
eut soudainement un éclair de compréhension et ses
sourcils se froncèrent avec sérieux.
« -
N'y pense même pas, je prend cette douche seul.
« -
Pourquoi suis-je si incompris ? » rétorqua Xuě
Fēng tout en poussant un très long soupir.
Tomoki
oublia totalement le mystérieux coup de fil pour ne conserver
en mémoire que l'insatiable perversité de son petit
ami.
Lorsque
Tomoki eut terminé, il se rendit directement dans le salon,
mains dans les poches. Plus flemmard que jamais. Vivre là
n'avait vraiment rien de reposant, entre ses cauchemars et… Euh…
« Le reste », comme il préférait
l'appeler.
Une fois
dans la pièce, il jeta un regard aux stores baissés,
protégeant la pièce de la lumière agressive du
soleil. Il y régnait pourtant une moiteur désagréable.
Il détestait vraiment Hong Kong pour son climat.
Il
aperçut, de dos, Xuě Fēng assis dans le canapé. Un
étrange bruit métallique se faisait entendre. Comme un
cliquetis, il avait du mal à l'identifier.
S'approchant
de son petit ami, il se pencha par dessus le dossier pour voir ce
qu'il faisait et il recula vivement. Tomoki n'aimait pas
spécialement les armes à feu. Non, à vrai dire,
il les détestait. Voir Xuě Fēng en train de nettoyer un
pistolet, c'était tout sauf une vision réjouissante.
Elle faisait exploser des images de violences devant les yeux de
Tomoki. Il s'imaginait le pire. Il était doué pour
ça.
Il fut
pris d'un rire nerveux alors que Xuě Fēng remontait
consciencieusement l'arme :
« -
Si je ne te faisais pas confiance, je penserais que tu es en fait un
tueur à gage, » tenta le garçon en
contournant le canapé.
Xuě Fēng
tendit l'arme devant lui, fermant l'un de ses yeux, et visa le
mur sans tirer.
« -
Je te l'ai dit. Je dois parfois protéger des gens.
Mais… C'est vrai que cela doit certainement bien payer. »
Tomoki se
mit à nouveau à rire mais d'une façon toujours
aussi peu convaincue :
« -
Tant que tu ne te crois pas dans un John Woo, »
répliqua-t-il en faisant mine de s'en aller.
« -
Vu ta situation, tu devrais apprendre à te défendre, »
lança Xuě Fēng en rechargeant l'arme.
Le garçon
se retourna, plissant les paupières non sans une soudaine
hostilité. Son regard tomba sur le pistolet noir et il ne put
s'empêcher de frissonner. D'horreur.
« -
Je pense que ma situation n'est pas à ce point…
Désespérée. »
Le
chinois tourna enfin la tête dans sa direction. Ses yeux
marrons se faisaient inquisiteur. Il se leva et porta la main à
son col de chemise pour défaire l'un des boutons. Puis il
tint l'arme à feu à deux mains, l'une autour du
canon et l'autre sur la crosse.
« -
Ce n'est pas un film, ni un jeu. Si tu meurs, c'est pour de vrai.
Et dans la vie, les choses se finissent rarement bien si tu refuses
de mettre les chances de son côté. Ils enverront un
autre tueur. Lorsqu'il te trouvera, il ne se demandera pas si
quelqu'un sera attristé de ta mort, si cela est bien ou mal,
si tu n'es pas un peu jeune pour mourir. Il le fera. Il obéira
aux ordres qu'on lui a donné, car il a bien plus peur de son
maître que de tuer un gamin. Je ne peux pas te protéger
si tu ne m'aides pas. Tu es faible. »
Le ton de
Xuě Fēng était dur et froid. Il ne laissait aucunement place
au compromis.
Tomoki
observa de nouveau l'arme, plus pour échapper au regard de
son petit ami que par réel intérêt pour celle-ci.
« -
Tu travailles pour une entreprise de sécurité, non ?
Pourquoi tu n'utilises pas ces ressources pour m'aider ?
« -
Ca ne marche pas comme ça.
« -
Alors autant que je réclame la protection de la police, »
s'exclama Tomoki avec un ton plus emporté. « Je
ne veux pas tuer quelqu'un ! »
Un
sourire se dessina sur les lèvres de Xuě Fēng. Un sourire
plutôt étrange car il n'avait rien d'heureux.
« -
La police est corrompue. Elle se bat contre elle-même, contre
ceux qui ont préféré s'allier aux mafia. Ton
père est bien protégé, bien entouré.
Personne ne sait où il se trouve en dehors de quelques
personnes bien informées. Même toi tu l'ignores alors
que tu es son fils. Si tu vas voir la police, aura-t-il le temps de
t'amener à lui pour te protéger ou bien te
trouveront-ils avant ? »
Tomoki se
sentit aussitôt abattu. La police… Corrompue ? Alors que
lui restait-il à faire, à par s'asseoir dans un coin
et pleurer ? Et se désespérer aussi. Il était
tellement dépassé. Pourquoi cela devait-il lui arriver
à lui ?
A voir
l'expression d'anéantissement qui venait de s'afficher
sur le visage du jeune homme, celle de Xuě Fēng se fit plus
intraitable.
« -
Ne sois pas faible, Tomoki. Si tu l'es, ils ne feront qu'une
bouchée de toi. Je peux t'apprendre à te défendre.
Si l'on t'attaque à nouveau, tu sauras quoi faire. Si je
n'étais pas arrivé à temps, tu serais mort et
cela m'aurait beaucoup peiné. »
Xuě Fēng
prétendait ne pas aimer les personnes faibles mais sa mort
stupide l'aurait pourtant attristé ? Tomoki releva la
tête et renifla alors qu'il essuyait les quelques larmes qui
venaient de couler sur ses joues. Il trembla presque face au regard
déterminé et dur de son amant. Pour lui, cela devait
être simple de tuer les gens qui le menaçaient. Le
garçon se demanda combien de personne il avait du tuer. Pour
en protéger d'autres.
Tomoki
tendit les mains pour prendre l'arme. Elle était froide et
il fut surpris par son poids. Il faillit la laisser tomber de
surprise. C'était lourd. Désagréable au
toucher. Le canon lui faisait penser à la gueule d'un
monstre.
Il savait
à peu près comment marchait une arme à feu.
Merci les films. Il y avait un cran de sûreté pour
éviter qu'un coup ne parte au mauvais moment et, pour tirer,
il fallait tirer ce cran. Ensuite il y avait la gâchette que
l'on devait presser. Avec les pistolets, on mettait les munitions
par la culasse et chaque balle se chargeait immédiatement
après qu'un coup ait été tiré, jusqu'à
ce qu'il n'y en ait plus. Il fallait alors éjecter le
chargeur et le remplacer.
Bien
entendu, tout cela ce n'était que de la théorie et il
se sentait comme un yaourt moisi pour ce qui était de passer à
la pratique.
« -
Il peut contenir un chargeur de 15 balles, de calibre 19mm, »
lui apprit Xuě Fēng en reprenant l'arme pour la décharger
et lui montrer ledit chargeur.
« -
C'est très intéressant, » commenta Tomoki
qui avait plutôt envie de s'enfuir en courant. « Et
si on allait au cinéma ? Hein ? »
Au
regard que lui adressa Xuě Fēng, Tomoki comprit que tout ces plans
romantiques de dîner aux chandelles après un film
venaient de s'effondrer.
