Me voilà devant un tas de poussières plus grand que celui qui recouvre le dessus de mon armoire. Pourquoi est-ce que cette fois encore je n'ai pas su retenir ma langue ? Voilà le résultat, ici pour une longue journée à chercher tout ce qui est sauvable. Qui aurait cru que le grenier des Weasley serait le plus grand refuge de batraciens de toute la Grande-Bretagne ? Même la maison des Blacks avait plus belle allure.

Le fait est que maman a décidé d'aménager cette vieille pièce représentant si bien la vieillesse de notre maison. Et le problème et que je suis le seul à pouvoir me charger de ça. Pourquoi ? Parce que papa travaille, les jumeaux également, Bill et Charlie sont repartis et Ginny… Merlin, je me suis fait avoir, Ginny est aussi apte que moi à prendre un chiffon et une baguette.

Aussi vite que j'aurais voulu le faire depuis longtemps, je descends quatre à quatre les marches de ce fichu escalier de bois, sautant les dernières en sachant que j'aurais ainsi moins de risques de me casser un membre. Puis, mes yeux se fixent sur cette porte de bois décorée d'une pancarte demandant de frapper avant d'entrer. Et dire qu'elle l'avait fait alors qu'elle n'avait que huit ans, elle pourrait grandir et décrocher cette immondice. Typique des filles… Et m'arrêtant sur le pas de la porte pour me remémorer toutes ces choses que j'avais à lui dire, je respire une dernière fois et entre le plus vivement possible, serrant les dents et préparant mon plus beau visage de frère en colère. Sauf que…

Encore une fois, je me sens débile et regrette rapidement ce geste futile et agressif. J'aurais préféré mourir étouffé par toute cette poussière que maman m'avait demandé de faire disparaître plutôt que de voir les larmes couler pour la énième fois sur le visage de Ginny. Pourquoi pleure-t-elle ? La lettre étendue à ses pieds m'en donne une vague idée et puis, finalement, peu importe la raison, le fait est qu'elle est là, essuyant ses larmes sur mon maillot des canons de Chudley.

Je soupire une fois de plus, hésitant entre l'envie de fuir ses problèmes de filles que de toutes façons je ne pourrais comprendre, et mon devoir de frère. Et puis, la vue de mon t-shirt se froissant sous ses mains me décide enfin. Je m'assois en essayant de ne surtout pas croiser son regard et à mon grand damne, sens sa tête se poser sur mon épaule. Mais Merlin que fait-elle ? Visiblement, elle ne doit vraiment pas aller … Et moi qui reste là, les bras le long du corps, je ferais tout pour qu'un troupeau d'hippogriffes passe à quelques centimètres de nous. Ou mieux, que Hermione passe à ce moment là et prenne le relais, comme elle le fait si souvent. Si je n'étais pas si sûr de la rendre plus mal qu'elle ne l'est déjà, j'aurais déjà appelé à l'aide depuis longtemps. Quelle idée aussi, tout ça pour un fichu t-shirt qui n'est même pas de la dernière saison de quidditch. Je l'entends renifler et je sens presque ses larmes (enfin j'espère), transpercer mon t-shirt plein de poussières. Si je ne me dépêche pas de faire quelque chose, je risque de voir ma peau se friper à force d'humidité.

Voyons, qu'aurait fait Charlie s'il m'avait vu dans un tel état ? Non, impossible. Je ne suis pas aussi sensible pour m'abaisser à pleurer en public. Au pire, je me serais cloîtrer dans ma chambre et… nom de… c'est ce qu'elle a fait. Une nouvelle fois, je me sens idiot et je ne sais toujours pas quoi faire pour mettre fin à ce carnage. Lorsque :

- Pourquoi est-ce qu'il ne veut pas comprendre ?

Pris sur le fait, je bafouille des syllabes qui n'ont aucuns sens avant de me résoudre à me taire. Je ne vois pas vraiment de quoi elle veut parler, enfin, j'espère ne pas avoir à le comprendre.

- Finalement, peut-être que c'est mieux comme ça. Je devrais faire comme lui non ? Me butter et l'oublier une bonne fois pour toute.

Avec toute la bonne volonté du monde, je ne peux pas ne pas comprendre. Mais je n'ai aucune envie de l'entendre débiter sa vie amoureuse à mes oreilles qui espèrent la voir rester innocente à vie. J'ai envie de lui dire que finalement, les hommes sont des crétins et que personne ne sera jamais assez bien pour elle, mais elle me devance.

- De toute façon, vous êtes tous les mêmes. Les concessions, c'est toujours du même côté. Et puis, si vous n'étiez pas si renfermé ! Si vous acceptiez de dire une fois pour toute, le fond de votre pensée sans vous sentir bête, peut-être que… Mais pourquoi j'te dis ça moi !

C'est la question que j'aurais voulu lui poser depuis qu'elle a commencé à débiter des flots de paroles qui à mes yeux n'ont ni queue ni tête. Et la voilà qui repose une nouvelle fois sa tête sur mon épaule et machinalement, je m'arrête de respirer pour ne pas la gêner. Je ne pense pas pouvoir tenir très longtemps de cette manière, et ma main qui pend sur le côté commence à être engourdi par des fourmillements. Alors, sans trop savoir ce que ça allait donner, je la relève et la place dans son dos et à la manière de deux bons amis, je la tapote en espérant qu'elle ne se moque pas de moi.

Finalement, ce n'était peut-être pas une si mauvaise idée car elle se relève bientôt, séchant ses larmes d'un geste vif et assuré. Et je reprends mon souffle, content de cette bouffée d'air qui me vaut un regard étonné. Je lui sourie maladroitement, priant Merlin pour qu'elle ne me demande pas d'explications et la regarde quitter sa chambre. Je retrouve bien là ma Ginny, combattante, elle a eu vite fait de reprendre le dessus.

- Ron…Tu es dans ma chambre.

Comme si j'aurais pu l'oublier, voilà dix minutes que je me bats contre cet encens qui pollue l'atmosphère, que je touche un dessus de lit aussi doux que la peau d'un bébé. Je me relève en boitant sous les fourmillements et sens une nouvelle fois son regard se poser sur moi.

- Ron ?

Je m'arrête en fuyant son visage et met mes mains dans mes poches, pour ne pas qu'elle croit que je suis embarrassé. Pourquoi le serais-je ?

- Merci.

Non, merci Merlin de l'avoir fait aussi gênée que moi. En moins de temps qu'il ne le faut pour dire « de rien », elle a déjà rejoint la salle de bain et fermé la porte par deux sorts bien ficelés. Moi je remercie Harry d'être ce qu'il est et espère ne pas faire vivre ça à aucune sœur de meilleur ami. Puis je remonte les marches en pensant qu'une fois de plus, j'avais perdu la bataille.