Je tords mes mains dans tous les sens, réfléchissant à une manière plus censée de faire passer mon stress. Enfin stress… disons plutôt que je redoute le moment, de plus en plus proche, où je devrai faire face à Hermione et recevoir dans mon visage toutes ces choses qu'elle doit garder depuis un bon bout de temps maintenant. Finalement, je me demande si un sortilège de chauve furie mené de la main experte de Ginny, ne me ferait pas moins de mal.

Je n'ai pas peur, loin de là… C'est juste que l'habitude me lasse… Oui, c'est bien ça, l'habitude. Quoi que je fasse ou pas, elle trouvera toujours un truc à me reprocher, pire que la tante Edma en fait. Mais je suppose que je n'ai pas à me plaindre tant qu'elle n'en est pas arrivée au fameu : « Ronnie chéri, arrête de remplir ta bouche de cette manière ou tes joues vont finir par garder cette forme et tu vas ressembler à ton rat croûton. » Ronnie chéri, finalement, si ça sort de sa bouche, ça ne prendrait peut-être pas cette connotation ridicule, proche de celle que la voix suraiguë de ma vieille tante lui donne.

Et puis quelle idée… maman s'est décidée à faire venir Hermione à la maison pour les derniers jours de vacances. « Ginny a besoin de se changer les idées » a-t-elle dit. Je peux savoir comment Hermione va pouvoir lui changer les idées ? Et puis, Ginny n'a pas d'amis de son âge ? Que suis-je bête… les seuls amis que ma sœur n'ait jamais eu sont devenus ses « ex ». Résultat, je vais devoir supporter la bonne humeur de Hermione durant une semaine entière. Si encore maman avait eu la bonne idée de la faire dormir avec moi…

J'imagine déjà sa voix stridente me demandant de me lever, de faire mon lit et de ranger mes affaires qui comme chaque matin, seront en boule au pied de mon lit. Le rêve… mais hélas, j'en suis tiré par le bruit d'une porte que l'on ouvre et je me retrouve allongé sur le ventre, à faire semblant de lire un magazine que je connais désormais aussi bien que ma baguette. Il ne faut surtout pas que je lui donne cette impression, pourtant réelle, de l'avoir attendue.

Puis les minutes défilent sans que je ne l'ais vu passer devant ma porte pourtant grande ouverte. Mais que fait-elle ? Elle n'aurait quand même pas eu le culot de ne pas venir me dire bonjour ? Moi, son « ami ».

Je rampe un peu plus pour me rapprocher de la porte, histoire d'être à l'affût du moindre mot en sa provenance mais hélas, à peine ais-je eu le temps de me repositionner en une posture plus présentable que j'entends un « bonjour Ronald » venir jusqu'à moi. Merlin que je me sens idiot… Et sans me démonter, je bafouille un vague « 'lut » et feint de chercher cette chose invisible et inexistante qu'est le graal de chaque menteur pris sur le fait.

- Tu cherches quelque chose ?

La réponse et oui et non. Non je ne cherche rien de concret, oui j'aimerais trouver le moyen de me sortir de ce mauvais pas. Et dans un souffle de chance, je tends ma main sous mon lit, tâtonnant à l'aveuglette une matière qui aurait pu être perdue. J'en ressors une forme ronde indescriptible et la tend vers Hermione avec un :

- J'ai !

Elle me regarde avec cette air de dégoût que je lui connais si bien et me pousse à observer moi-même ma trouvaille. Une balle gluante et auto régénérescente, vestige des premiers essais de mes jumeaux de frères.

- Et je peux savoir à quoi ça va te servir ?

- Euh… rien… Je me demandais juste si je l'avais encore.

Elle hoche les épaules et s'éloigne de moi. Tout mon corps lui hurle de revenir, tout mon corps sauf ma bouche. Je rêve ou elle n'a fait aucune allusion à ma lettre ? Si ça ne ressemble pas à de l'indifférence alors je veux bien devenir un crac mol sur le champs. Mais je veux en avoir le cœur net. Me relevant avec tant de bien que de mal, et sans prendre la peine d'épousseter la poussière qui s'accroche à mon t-shirt comme Lavande à mon cou, je file vers la chambre de Ginny, m'arrêtant tout juste à la porte. Cette fichue pancarte me rappelle que la politesse voudrait me voir frapper avant d'entrer, alors je m'exécute.

Cette chambre est toujours aussi bien rangée mais à travers cette odeur semblable à celle se dégageant de la salle de Trelawney, se mélange un parfum bien plus exquise et enivrant que toutes les roses de la terre. Puis, je les voie, toutes les deux, assises en tailleur sur ce tapis si blanc que je serais certain d'y faire une tâche si je m'asseyais dessus. Elles me regardent, l'une sans doute étonnée de m'avoir entendue frapper à cette porte qui jusque maintenant n'existait pas à mes yeux, et l'autre simplement déçue de me voir apparaître. J'entends la première me demander :

- Tu cherches quelque chose.

- Euh… non… je… euh…

Nom de Merlin, calme toi Ron ou elles vont croire que tes capacités linguistiques se limitent à la cinquième lettre de l'alphabet. Je respire une bouffée de cette air si agréable et reprend :

- J'avais une question à poser à Hermione.

- Et pour ça il faut que je vous laisse ou…

- NON !

Sans le vouloir, ma voix s'est fait forte et assurée, j'affronte désormais le regard rieur de ma sœur et l'air révolté d'Hermione, puis j'essaie de me rattraper sans m'enfoncer d'avantage.

- Enfin, c'est pas la peine, j'en ai juste pour quelques minutes. Je… je voulais savoir si… si tu avais bien reçu ma lettre.

Je la vois passer par toutes les couleurs alors que moi-même je me cantonne au rouge et voit de la même façon Ginny s'en aller en disant simplement :

- Bon et bien je crois qu'il va faire meilleur être loin de cette chambre les cinq prochaines minutes.

J'ai envie de la suivre… encore une fois, je n'ai su retenir ma langue et je le regrette désormais. Encore plus, une fois que la porte de cette fichue chambre s'est refermée et que la voix de Hermione s'est élevée. Pourtant, Merlin sait combien la perspective de me retrouver seule dans une chambre avec elle était… comment dire… inespérée.

- Ronald, tu apprendras qu'il y a des sujets qu'il vaut mieux évincer, au risque de dégoûter son interlocuteur comme… comme la manière dont on tue un poulet avant de le faire cuire dans une marmite… ou… comment on se débarrassait des sorciers au moyen âge… les milles et une façon de castrer un être du sexe masculin… ou encore… comment se montrer désagréable dans une lettre.

Le ton de la conversation était donné…