J'ai retrouvé mes propres habits et il faut avouer que cela fait du bien de ne plus sentir ce froid sur les chevilles. Je regarde Hermione dire au revoir à sa famille et en fait de même, il est désormais temps de rejoindre le château, de reprendre les cours et de supporter l'humeur massacrante qu'est celle de Harry en ce moment. Mais chut, il paraît qu'il ne faut pas le blâmer.
Hermione passe devant moi et s'engouffre dans la voiture de son oncle, je sens déjà une envie de rejeter ces œufs me titiller l'estomac. Décidemment, je hais les voitures… Tout au moins, celles qui ne volent pas.
De nouveau, la route défile sous mes yeux et je tente de penser à autre chose. L'oncle Nigel semble lire sur mon visage cette agonie qu'est pour moi le voyage. Il me dit que ça va passer, que cette portion de route est très accidentée et qu'il faudrait penser à boucher les nids de poules. Aller savoir pourquoi chez les moldus, les poules pondent sur la route… Peut-être pour punir les hommes comme moi qui ont dégusté trop de leurs enfants au petit-déjeuner.
Je pose ma main sur mon estomac et tente de capter une fois de plus le regard d'Hermione. Je sais que ça ne va servir à rien et qu'elle doit m'éviter allégrement, je sais également que si par malheur son regard se tourne finalement vers moi, je vais le détourner. En clair, rien n'est plus pareil depuis cette nuit ou nous avons dormi ensemble. Enfin… ensemble… moi sur la couverture et elle sous. Le problème c'est que j'ai peur qu'elle me demande pourquoi j'ai fait ça et surtout, qu'elle croit que j'ai des sentiments amoureux pour elle. Et elle… je ne sais pas pourquoi elle me fuit et ça ne me prête pas à être confiant.
- Tu es sûre que ça va aller Hermione ?
L'oncle Nigel est en pleine conversation avec Hermione et quelque chose dans le ton de sa voix, me dit que cette journée ne risque pas d'être des plus faciles. Et j'en suis en effet fixé lorsque la voiture s'arrête devant ce qui n'est pas une gare mais une grande maison entourée de haies verdoyantes. Pas besoin de s'appeler Flamel pour comprendre que ceci est la demeure des Granger.
- Ne t'inquiètes pas…
Elle ouvre la porte de la voiture, me donnant cette bouffée d'air que j'avais tant attendue et je croise le regard de cet oncle. En un rien de temps, je me trouve sur le pas de la porte, à côté d'Hermione, me demandant pourquoi elle met tant de temps à ouvrir cette fichue porte. Je dois avouer que je n'ai jamais vu une maison aussi grande que celle-ci, chaque pièce me donne le tournis par sa grandeur. Je comprends à ce moment là que le métier de dentiste donne bien plus de prestige que ce que je pensais lui être dû.
Je ne sais pas quoi faire et à l'idée que cette maison restera désormais vide, je ressens cette sensation qui m'avait envahi en restant chez moi. Il est dur de voir des milieux transformés, et je comprends désormais ce qu'est l'âme de la maison. Je n'ai pas le choix, il faut que je m'occupe ou je vais finir par craquer. Ce qui ne serais pas une si bonne chose.
- Tu veux que je fasse quelque chose ?
Elle me fait signe que non et je continue mon boulot de chien fidèle : suivre à la trace ma maîtresse et regarder d'un œil intéressé toutes ces choses que je ne connais pas. Vu le temps que Hermione passe devant chaque objet, j'en arrive à douter du fait qu'elle ai vraiment vécu ici, puis notre escapade nous amène à ce qui semble être sa chambre. Semblable en tout point à celle Ginny, mais trois fois plus vaste, elle a cette qualité de sentir ce parfum discret que j'identifie comme étant celui d'Hermione. Rapidement, elle enfourne deux trois feuilles dans son sac et poursuit sa route jusqu'à une pièce où je ne mettrais pas les pieds. Car qu'il y a-t-il de plus glauque que de se retrouver dans une chambre ayant appartenue à un couple défunt ?
J'avance dans le couloir, la laissant à contre cœur, seule dans cette vaste pièce. Et moi-même je m'engage dans la salle de bain, découvrant que certains moldus ingénieux avaient eux l'idée d'installer des bancs dans les douches. Je reste là un moment, à contempler les boules de couleurs posées au dessus de la baignoire. J'en prends une dans mes mains et la fait tournoyer, m'amusant à voir son contenu se mouvoir à son tour. Etrange sensation, étrange parfum si enivrant. Je suppose que ceci doit être une savonnette moldue. L'envie me prend soudainement de sentir cette substance liquide, et continuant à faire rouler la sphère, je la presse doucement, puis de plus en plus fort, étant désormais certain qu'elle est bien plus résistante que prévu et qu'elle n'éclatera pas. Mais il est de notoriété publique que je n'ai jamais le flair pour ce genre de chose. Et je me retrouve avec du liquide suintant dans mes yeux et une envie d'hurler ma haine contre ces drôles de coutumes moldues. Il fait désormais noir et je suis incapable d'ouvrir les yeux… incapable de trouver une serviette… incapable de trouver la direction du lavabo.
- Ron !
Merci Merlin, je sens la main de Hermione m'amener je ne sais où, mais je sais que je le saurais d'ici peu de temps. Et en effet, après avoir passé ma tête sous cette eau qui en plus de m'avoir rafraîchie les idées a soigné mes yeux, je peux voir la peau de cette boule collée à mes doigts. Ce parfum qui m'avait tant attiré m'écoeure désormais.
- Ils ont des choses dangereuses les moldus ! J'ai failli perdre la vue avec cette savonnette !
Elle sourie. Sans doute se moque-t-elle de moi mais elle sourie. Elle va chercher le panier qui contient les traîtresses de boules et je me protège machinalement le visage quand elle en prend une dans ses mains.
- Ce sont des perles de bains Ron… Elles contiennent de l'huile qui adoucisse la peau. Tu la mets dans ton bain et la pellicule cède pour laisser s'échapper l'huile parfumée.
Je n'ai pas tout compris mais j'en déduis que c'est un truc de filles… que j'aimerais bien essayer.
- T'en veux une ?
- Non… c'est pour les filles ça !
- Comme tu veux… De toute façon, je vais en prendre quelques unes… si tu changes d'avis…
- Aucunes chances !
J'attrape au passage ce qui encombrait ses mains et la suit de nouveau dans les couloirs, elle se retourne vers moi et me dit :
- J'ai bientôt fini… Tu m'attends là ?
J'hoche la tête et la vois s'engouffrer dans ce que j'avais identifié comme étant un bureau après m'avoir laissé son sac. Puis je baisse mon regard vers ce que je tiens entre les mains. Les fameuses boules… J'en prends une et l'engouffre dans ma poche, ni vu, ni connu. Et des photographies mobiles… Je ne mets pas longtemps à reconnaître ses parents et mal à l'aise, je prends la décision de les ranger dans le sac d'Hermione. Puis j'en observe une autre… une petite fille dans une robe blanche, riant aux éclats. Merlin qu'elle paraissait heureuse.
Les minutes défilent et Hermione n'est toujours pas réapparue, alors je m'approche de la porte ou elle a disparu et l'entend parler… seule. Un adieu à ses parents et je me sens rapidement de trop. Essuyant les armes qui pointent dans mon regard, je m'éloigne de nouveau, maudissant le fait d'être si sensible en ce moment.
