- Ron qu'est-ce que tu as fait ?
Je ne mentirais pas si je dis que j'aurai préféré une autre chute que celle-là. Ca me fait mal de penser que ce baiser n'était qu'à sens unique et c'est bien ce que cette question veut dire non ?
- On n'aurait pas dû…
Voilà qu'elle se lève et tourne en rond devant moi. Déjà une chose de bien, si je continue à l'écouter elle va peut-être répondre d'elle-même à toutes ces questions qui me torturent.
- C'était… juste dans le moment hein ? Ca ne veut rien dire du tout… n'est-ce pas ?
Que veut-elle que je réponde à ça ? Que j'ai eu envie de faire ça une bonne centaine de fois quand on était à Poudlard et que je ne saurais dire pourquoi ? Que moi aussi je me demande si réellement j'avais le droit de rentrer de telle manière dans l'intimité de celle que je disais être mon amie ? Que je culpabilise à l'idée qu'un tel acte peut me la faire perdre à jamais ? Que j'en ai marre d'être pour elle un simple ami et que chaque jour que Merlin fait, je prie pour être… autre chose? Que j'ai peur de lui en demander chaque fois plus jusqu'à un point de non retour qui signerait la fin de notre « amitié ».
Je pourrais lui dire… si elle tournait ne serait-ce que deux minutes les yeux vers moi. Je dois lui dire…
- Hermione…
Elle se retourne vivement vers moi comme si elle découvrait pour la première fois que je suis là, capable de parler et surtout, doté d'un cerveau qui me donne la possibilité d'avoir des sentiments.
Son regard se lie au mien et pendant un instant, j'ai l'impression de ne plus pouvoir reculer, l'envie folle de tout lui dire pour partir en courant par la suite. Car c'est sûr, je ne pourrais pas survivre à ça. Mais hélas, déjà elle tourne son visage et j'entends sa voix faible murmurer :
- Le thé… le thé Ron… il va refroidir.
Je sais à ce moment là que tout est fini. Merlin mais que lui prend-t-elle pour être aussi… indélicate que moi ?
Je la regarde s'activer à verser le chocolat qu'elle prend pour un thé et je me décide à partir. Quand elle se retournera, je ne serai plus là mais au moins, je ne lui aurais pas dit tant de choses que je ne pense pas.
Les jours défilent et voilà trois semaines que je ne l'ai pas revu. La guerre s'intensifie de jours en jours et je me joins à Harry dans sa traque de Voldemort. J'avoue, j'avais du mal à comprendre pourquoi il voulait tant se mêler à ça alors qu'il lui aurait été plus facile d'attendre que les membres de l'ordre lui donnent des pistes fiables, tout en continuant de s'entraîner. Pourtant… il semblerait bien qu'il ait compris avant moi la portée de ces actions.
L'esprit occupé dans le moment nous fait perdre la notion de danger, Merlin que c'est agréable d'être égoïste. Au moins, je ne pense plus à Hermione et à l'idée farfelue que peut-être, j'ai des sentiments pour elle autre que… quel crétin c'est pas parce que c'est une fille et moi un garçon que forcément… c'est vrai quoi ! Faut réellement que j'arrête de voir une petite amie potentielle dans toutes les filles que je croise. Mais une voix me dit que Hermione n'est pas toutes les filles…
Fin juillet… le soleil brille… Ginny est toute excitée à côté de moi… et dans quelques secondes, Hermione va arriver comme quelques autres personnes pour fêter l'anniversaire de mon cher ami, dans ces temps perdus, chasseur de mangemorts.
- RoOoOoN !
Je me retourne vers ma chère petite sœur qui tient dans ses bras un chaudron qui menace de s'effondrer par terre. Je la défais de ce fardeau et encaisse ses remarques.
- Tu veux dire ce qui ne va pas ? Depuis ce matin, je me casse la tête pour te faire la conversation et y'a pas moyen de te décrocher un seul mot.
Tiens c'est marrant, je l'ai entendu mais j'ai pas envie de lui répondre. Je hausse les épaules et risque un coup d'œil dans ce chaudron où mijotent une substance orange et quelques formes gluantes qui semblent se battre entre elles. Heureusement que j'ai les mains prises car je les aurais sans doute glissées au fond de ma gorge pour rejeter ce goût amer qui m'empêche de respirer convenablement.
- Je le jette où ?
- Si tu le jettes je te tue Ronald Bilius Weasley.
Tiens c'est marrant, normalement, c'est Hermione qui m'appelle comme ça. Et encore une fois, mes pensées se sont tournées vers elle.
- C'est du punch… une boisson moldue…
Tiens donc… ils ont vraiment de ces idées les moldus… moi qui était content d'avoir survécu à la gastronomie française… Je me retiens un instant de lui demander ce qui flotte comme ça, persuadé de ne pas pouvoir retenir cette remontée acide au fond de ma gorge.
- Je pensais que c'était la dernière expérience des jumeaux…
- Ron…
Bon bah vu sa mine je ne vais peut-être pas lui avouer tout de suite que ce n'était pas une blague. J'ai réellement pris ça pour une expérience des jumeaux…
Je hais les fêtes… je l'ai déjà dit ça ? Surtout quand on manque de jus de citrouille. Pourtant, tout le monde s'amuse et moi je suis là, adossé à ce vieux chêne dans le fond du jardin, à regarder Harry bécoter Ginny… cette boisson moldue à des drôles d'effets. Le pire, c'est que je suis sûr que demain ils viendront encore nous dire qu'ils ne sont pas ensemble. Mais note à moi-même, vérifier que chacun d'eux rejoindra une chambre différente cette nuit et surtout, y restera.
Merlin… Hermione à neuf heures… je plonge le nez dans mon verre vide et attends patiemment qu'elle quitte mon champ de vision… sauf que…
- Tu veux que je remplisse ton verre… celui-là est visiblement vide…
Quel idiot, un verre transparent… la folie me guette.
Je lui fais un signe de la tête et la vois s'approcher du chaudron. Je n'ai pas le courage de lui dire que je ne boirais pas de cette soupe que déjà, le verre est de nouveau dans ma main. Je l'imite alors et dirige le liquide jusqu'à ma bouche, crispant les yeux, je me surprends à aimer finalement le doux goût sucré du nectar. Sans le gluant qui est resté dans le récipient, je dois avouer que ça vaut presque un bon jus de citrouille.
- C'est ton premier verre ?
- Oui…
- Ronald Weasley ne boit pas !
- Hermione Granger aurait-elle cru que j'étais un ivrogne ?
Elle sourit… Merlin, je l'ai fait sourire. Moi qui croyais qu'elle me ferait la tête après…
Et la soirée s'écoule plus paisiblement… je garde les yeux rivés sur les autres convives et je la laisse remplir mon verre en même temps que le sien. On ne fait rien de spécial… non on est juste deux amis, l'un à côté de l'autre, à oublier que nous ne sommes plus des enfants et que la mort nous guette.
- Tu sais que ça va faire bizarre si on reste là…
Merlin, qu'est-ce qu'elle va me proposer…
- Harry est le roi de la fête et maintenant qu'il a disparu…
Harry disparu ? Mes yeux parcourent rapidement les environs et je vois que en effet, il n'y a plus de traces de notre survivant… et plus de traces de Ginny. C'est peut-être là que j'aurais dû les suivre non ? Oh et puis à Salazar ces deux là… je me sens trop bien ici pour faire quoi que ce soit.
- Tu proposes quoi Miss Granger ?
- Hum… montre moi les progrès que tu as faits en danse…
Sûr qu'en temps normal, jamais je n'aurais accepté. Je suis incapable de danser… mais bon, faut croire que ce jus d'orange amélioré à des effets imprévus. Je soupçonne mes frères d'y avoir rajouté quelques substances magiques…
Je me sens emporté à des kilomètres de là et bien que la tête me tourne, je ne veux pas que ça s'arrête… La musique ralentit, son corps se colle au mien et les sensations qu'elle m'avait fait connaître réapparaissent d'elles mêmes.
Je ne peux plus rester impassible… c'est plus fort que moi, l'envie de goûter ses lèvres prend le dessus mais… je ne veux pas que ça recommence. Il ne faut pas que a recommence… pas qu'elle me rejette après m'avoir fait espérer. Ma main se pose sous son menton et elle se sépare de moi pour mieux me regarder. Ses yeux me transpercent et je découvre une autre personne. Elle attend de moi un geste… le geste.
Pourtant je ne bouge pas, bien trop effrayé. J'ai bu trop de cette boisson et je m'en veux. Si c'était ça qui me donnait cette envie tellement… tellement pas subite. Je sens une goutte tomber sur mon front. La pluie apparaît, comme pour me décider à aller plus vite.
- Hermione…
C'est idiot de l'appeler… son regard n'a pas bougé.
- Je… je vais t'embrasser… maintenant.
J'attends encore un instant et je suis presque surpris de ne pas la voir bouger. Pour la première fois, je n'ai aucune appréhension à mélanger mon désir au sien. Il pleut et je m'en fiche, je passe mon bras derrière elle et le monde disparaît. Ne pas rompre cette étreinte… jamais. Ne plus la perdre… Ne pas oublier.
Et une fois de plus, c'est elle qui part… je la ressers encore, et lève les yeux vers le ciel. Je suis trempé mais je sens encore son corps froid contre le mien. Elle n'est pas partie… pas cette fois. Ou pas encore.
- On ne peut pas rester là…
- Si on le peut.
Qui sait ce qu'il va se passer là-bas ? Si je le pouvais, je sortirais ma baguette et nous pétrifierais tous les deux. Mais je sais depuis mon dixième verre que je ne suis pas maître de mes mouvements. Alors je la laisse m'entraîner et je perds la notion du temps, trop absorbé par cette simple idée : ne pas oublier.
Les murs de ma chambre se dessinent dans mon esprit alors que mes mains découvrent le corps de cette fille qui me semblait inaccessible. Je ne pense plus… et me laisse transporter par la volupté de mon désir à son égard.
