CHAPITRE 12: Une mission particulière

D'un commun accord, Anae et Severus avaient décidé de garder le secret aussi longtemps que possible.
Bizarrement, Lucius resta très silencieux, pendant toute la journée. Anae qui le connaissait par cœur comprit rapidement ce qui se passait, mais elle n'eut pas un moment de libre pour en parler avec lui..
La nuit était tombée depuis longtemps et la jeune sorcière n'arrivait pas à trouver le sommeil. Enervée, elle se tournait et se retournait dans son lit. Elle finit par abandonner et se leva. Elle s'enroula dans une épaisse couverture, déposa un rapide baiser sur la tête de Slaz et se glissa hors du dortoir sur la pointe des pieds. Elle descendit dans la salle commune, dans l'espoir qu'après la lecture d'un ou deux chapitres sur la révolte des Gobelins, son calme revienne enfin.
La salle commune n'était pas vide, une silhouette était appuyée contre une fenêtre et regardait les jeux de la lune, des étoiles et des nuages. En entendant quelqu'un arriver, elle se retourna. Un rayon de lune éclaira le visage de Lucius. Anae lui sourit et s'approcha de son ami.
- Toi non plus tu n'arrives pas à dormir ? demanda Anae.
Lucius secoua la tête.
- Tu as perdu ta langue ?
Lucius ne répondit pas et s'appuya de nouveau contre la vitre glacée. Anae vint se coller contre lui et partagea sa couverture.
- Tu vas prendre froid. Ne fais pas cette tête. Tu veux qu'on en parle ? Je sais ce qui ne va pas, Lucius …
Toujours le même silence rompu par un profond soupir. Anae appuya sa tête contre l'épaule de son ami. Il la prit dans ses bras.
- Parle-moi, je n'aime pas te voir ainsi.
- Que veux-tu que je te dise, répondit-il d'une voix triste. Ce qui est fait est fait… Laisse-moi me faire à cette idée. Quand …
Il s'interrompit quelques minutes, inspira fortement.
-Quand … je vous ai surpris l'autre soir, j'ai eu la sensation de te perdre à jamais…
-Comment peux-tu penser une seule seconde à ça, s'insurgea Anae. Ce qu'il y a entre Severus et moi ne remettra jamais en cause notre … amitié …
Lucius soupira de nouveau.
- Je croyais que tout était clair, Lucius … on en avait parlé il y a peu de temps.
- Oui, je le croyais aussi.
- Je ne sais pas encore où toute cette histoire va me mener, ce que je ressens pour Severus est très fort, tout comme le lien qui m'unit à toi. Je ne veux pas vous perdre. Ni toi ni lui, c'est clair ?
- Je sais, Anae, je sais. Il me faut juste un peu de temps.
- Pardonne-moi, Lucius. Jamais, je n'ai voulu te blesser, ni te faire souffrir. Tu comptes tant pour moi.
Ils restèrent enlacés un bon moment, sans mot dire.

Le lendemain, Lucius avait retrouvé sa bonne humeur, mais Anae savait que ce n'était qu'une façade. Mais elle ne pouvait plus rien faire pour adoucir sa peine. La seule chose qu'elle pouvait faire pour lui était de rester le plus discrète possible. Elle s'arrangeait pour retrouver Severus pendant les interclasses, loin de tous regards ; et lorsque les cours étaient finis, le plus souvent, ils se donnaient rendez-vous dans cette petite salle abandonnée.
Pendant toute cette période, les nouvelles relayées par la Gazette du Sorcier étaient de plus en plus mauvaises : de nombreux assassinats avaient été perpétrés, les meurtriers signaient souvent leurs forfaits en laissant flotter au dessus du lieu du crime, une tête de mort ; cette marque servait à annoncer les monstruosités qui étaient inexorablement commises sans aucune chance d'y échapper. On parlait de plus en plus de ces partisans qui agissaient au nom d'un puissant mage noir : Lord Voldemort. Ce nom devint rapidement synonyme de massacres, de sang versé en abondance. Ses Mangemorts n'épargnaient aucun sorcier ni aucun moldu, fidèles à appliquer les préceptes du Seigneur des Ténèbres. Cela faisait plusieurs années qu'on faisait allusion à ce mage noir et à ses partisans, que des attentats anti-moldus et anti-sang-de-bourbe était commis, mais depuis quelques mois, ces atrocités se répétaient avec des fréquences de plus en plus rapprochées. Chaque jour apportait son lot de morts et de souffrance. Une période troublée s'était installée pour de bon.
A Poudlard, on commentait ses nouvelles avec un certain détachement : ici les élèves se sentaient à l'abri : après tout, Dumbledore était le plus grand mage et seul un fou pourrait oser venir semer la mort et la désolation à Poudlard. Cependant, cela n'empêchait pas chacun d'avoir son opinion. Une grande majorité de Serpentards semblait favorable aux idées de Lord Voldemort, même s'ils cachaient leur jeu. Le noyau dur était centré autour d'Anae, Lucius, Severus, Narcissa, Bella et son ami Rodolphus. Leurs parents étaient, depuis peu ou depuis longtemps, des Mangemorts et leur progéniture suivait leur trace.
Une sortie à Prè-au-Lard était prévue et sous les conseils d'Anae, le petit groupe de Serpentards s'était inscrit sur la liste des élèves désirant s'y rendre.
- Que mijotes-tu, Anae, demanda Narcissa.
- Vous verrez bien. De toute façon, il y a trop d'oreilles indiscrètes ici.
Ils se retrouvaient souvent dans la salle abandonnée et le sort Inmagica leur permettait de pratiquer quelques sortilèges sans peur de se faire découvrir. Cependant ils n'osaient pas trop parler de choses importantes à Poudlard, malgré le sort d'Impassibilité, craignant que quelqu'un puisse passer à travers.
Le samedi de la sortie, une troupe impatiente d'élèves faisaient la queue devant Rusard qui vérifiait que l'autorisation leur avait été donnée de partir.
Dans la rue principale, tout le monde se dispersa.
Bellatrix et Rodolphus partirent de leur côté.
-Alors, Anae, où nous conduis-tu ? demanda Lucius, qui n'avait pas été mis dans la confidence.
-Allons faire un tour à la Cabane Hurlante, proposa-t-elle, mystérieuse.
Ils prirent le chemin de cette maison, située à l'extérieur du village. Depuis tout temps, les villageois racontaient qu'elle était hantée, des fantômes, qui selon les rumeurs étaient de plus en plus actifs depuis quelques années. Narcissa n'était pas très rassurée, mais Lucius s'empressa de la rassurer en lui expliquant qu'en plein jour, ils ne craignaient pas grand-chose. Et effectivement, la cabane était calme et déserte, sans aucune trace de fantôme. Les meubles dans les pièces étaient brisés, mais c'était la seule chose d'étrange.
-Alors, demanda Severus qui serrait Anae contre elle. Que faisons-nous maintenant ?
- Pour le moment, rien, expliqua Anae. En fait, je dois chercher un Portoloin.
-Attends, c'est quoi, cette histoire, interrogea Lucius.
- Je n'en sais pas plus. Le message que m'avait apporté Hécate, la semaine dernière, me demandait de venir ici lors du prochain week-end, un Portoloin m'attendrait.
Lucius regarda Anae d'un drôle air, comme s'il commençait à entrevoir ce qui était caché derrière tout ceci.
Pendant ce temps, Anae faisait le tour de la pièce. Elle poussa un petit cri de triomphe et se saisit une tasse ébréchée.
- Attendez-moi ici je n'en ai pas pour très longtemps.
Il y eut un craquement sourd et Anae disparut.
Elle revint une heure plus tard, chargée d'un paquet peu volumineux mais qu'elle tenait avec précaution.
- Alors ? demanda Severus.
Avant de répondre, Anae se saisit de la tasse qui l'avait fait voyager et la jeta au sol, elle se brisa en mille petits morceaux.
-Mieux vaut être prudent.
Elle posa son paquet au sol, ses amis se rendirent alors compte que sa manche droite était tachée de sang. Soucieux, Severus remonta le tissu et tous purent découvrir une longue balafre qui courait sur son avant-bras. Quelques gouttes de sang perlaient encore.
- Que t'est-il arrivé ? s'inquiéta Severus.
- Rien de grave ! Eh ne faites pas cette tête ! C'était nécessaire, je vous expliquerai tout !
Elle s'accroupit et défit précautionneusement le paquet, après avoir enlevé plusieurs couches de tissu, enfermé dans une boîte, ils découvrirent un œuf.
-Mais, c'est un vulgaire œuf de poule, s'étonna Lucius.
- Pas si vulgaire que ça, Lucius, répliqua Anae. Et puis ce n'est pas un œuf de poule, mais un œuf de coq.
- Ce n'est pas possible, un coq n'a jamais pondu d'œuf !
- Détrompe-toi, Narcissa, dans des cas très très rares, cela peut arriver.
Anae fit une pause, dévisagea gravement ses amis.
- Bien sûr, je vous demande le plus grand secret.
- On ne dira rien !
- Bon, en plus d'avoir été pondu par un coq, continua Anae, cet oeuf a été couvé par un crapaud !
Les yeux des Severus se mirent à flamboyer :
- Ne me dis pas qu'il y a là dedans un basilic ?
- Eh bien si !
- Mais que vas-tu en faire ? Tu ne comptes tout de même pas le garder ? Ce ne serait pas très prudent.
- Non, rigola Anae.
Puis d'un ton encore plus mystérieux, elle ajouta :
- Une petite expédition nocturne, ça vous tente ?
- Je vois où tu veux en venir, s'écria Lucius avec un grand sourire. Je marche !
Même s'ils ne savaient pas ce qui les attendait, Severus et Narcissa suivirent Lucius.
- Je vous expliquerai tout cette nuit, je préfère ne prendre aucun risque … Disons, minuit, dans la salle commune, je pense qu'il n'y aura plus personne. Bon, nous ferions mieux d'y aller, ne restons pas trop longtemps ici, on pourrait finir par nous remarquer.
Anae rangea l'œuf dans sa boîte qu'elle empaqueta dans les nombreuses couches de tissu, puis délicatement, elle la cacha dans un sac qu'elle avait pris dans cette intention.
Ils passèrent le reste de la journée à flâner dans les rues de Pré-au-Lard, ils s'arrêtèrent chez Honeydukes pour boire une Bièraubeurre.
Puis tous les élèves retournèrent à Poudlard.
Plus aucun bruit ne se faisait entendre, la salle commune était déserte. Quatre silhouettes se découpèrent dans un rayon de lune et sortirent en silence. Les couloirs étaient déserts, aucun fantôme n'y rodait. Pourtant le silence n'était pas complet ; des petits bruissements se faisaient entendre, le vent gémissait, des grattements couraient derrière les murs.
Anae conduisit ses amis vers le deuxième étage. Elle s'arrêta devant la porte des toilettes des filles.
- J'espère que Mimi Geignarde ne sera pas là !
- Qui est Mimi Geignarde, chuchota Lucius.
- C'est le fantôme qui hante ces toilettes, expliqua Narcissa. Personne ne vient ici car quand Mimi Geignarde pique une crise, tout est inondé.
Avec précaution, Anae entrouvrit la porte et s'engouffra à l'intérieur, suivie de ses amis.
- Ouf, soupira-t-elle. C'est tranquille.
- Je n'aurai jamais pensé que l'entrée puisse être ici ! s'étonna Lucius
- Tu vas nous expliquer, Anae, demanda Severus.
- Laissez-moi vous raconter une petite histoire. Je crois que vous connaissez tous le début : les quatre fondateurs de Poudlard, la dispute entre Salazar Serpentard et Godric Gryffondor … Avant que partir, Salazar construisit une chambre secrète connue sous le nom de Chambre des Secrets. Il y enferma un monstre que seul son héritier pourrait commander. Ce monstre était un basilic, il y a quelques décennies, la Chambre a été de nouveau ouverte, mais le Basilic qui s'y trouvait était très vieux, il est mort depuis. L'héritier de Serpentard, non seulement a la possibilité d'ouvrir la chambre et de se faire obéir du monstre, mais il a aussi la charge de s'assurer qu'un Basilic repose toujours dans cette chambre. Cet héritier, c'est le Seigneur des Ténèbres, et bien sûr, c'était hors de question, qu'il vienne en personne ici. C'est pour cela qu'il m'a chargée de venir déposer l'œuf qui doit éclore dans quelques heures.
- Mais, demanda Severus, comment feras-tu pour ouvrir cette Chambre ? Le sang de Serpentard ne coule quand même pas dans tes veines ?
Lucius dévisagea Anae d'un regard curieux et amusé, en écoutant sa réponse.
- C'est l'explication de ça, commenta-t-elle en montrant la coupure de son bras.
Puis elle sortit une petite fiole au liquide rougeâtre, qu'elle brisa sur un lavabo. Le sang, car c'était ce qu'elle contenait s'évapora aussitôt. Anae prononça quelques mots en Fourchelang. Il y eut un grand bruit sourd. Une ouverture obscure apparut.
- Si certains veulent faire demi-tour, c'est le moment … annonça Anae avant de s'engouffrer dans l'obscurité.
Personne ne retourna sur ses pas. Ils firent une longue chute dans le noir. Ils atterrirent dans une pièce circulaire, immense.
- Lumos, crièrent les quatre Serpentards.
Plusieurs boyaux s'ouvraient devant eux. Sans hésiter, Anae s'engagea dans un étroit conduit. A chaque pas, ils écrasaient des milliers de petits os tout desséchés. Narcissa eut un sursaut de dégoût et se colla contre Lucius. A chaque bifurcation, Anae savait exactement où tourner, elle était la seule à ne pas être perdue. Ils arrivèrent dans une longue salle, dont le plafond était si haut, que la lumière de leurs baguettes ne pouvait atteindre. Une forme sombre gisait devant eux. Anae s'approcha de l'énorme masse : c'était tout ce qui restait de l'ancien habitant de la Chambre des Secret : le corps immense d'un monstrueux serpent presque momifié.
- Mais c'est un vrai monstre, cria Narcissa. Il est vraiment mort, j'espère !
Lucius ne put s'empêcher de rire. Anae se tenait immobile face à la gueule de la bête, elle l'observait attentivement, en silence. Severus vient se glisser derrière elle, l'enlaça tendrement.
- Impressionnant !
Anae acquiesça. Elle se dégagea doucement de l'étreinte de son ami, lui prit la main et l'entraîna dans une longue galerie. Au bout, un mur barrait l'accès. Deux serpents y étaient sculptés.
- Nous y sommes.
Elle ajouta quelques mots en Fourchelang, les deux serpents se séparèrent et le mur s'ouvrit sans un bruit. Ils débouchèrent dans une salle aux proportions gigantesques. Le sol suintait d'humidité, de chaque côté se dressaient d'impressionnantes statues de serpents qui étaient enroulés autour de hauts piliers. Tout au fond de la salle trônait une monumentale idole de Salazar Serpentard. Avec un certain respect et intimidés, ils s'avancèrent jusqu'aux pieds de la statue.
Anae s'agenouilla devant la masse de pierre et sortit l'œuf. Elle murmura d'autres paroles en Fourchelang, la bouche de la statue s'ouvrit. Anae jeta un sort de Lévitation et fit monter l'œuf jusque devant l'ouverture béante. Il disparut à l'intérieur, la bouche se referma.
- Mission accomplie !
Elle se retourna vers ses amis avec un grand sourire.
- Joli héritage … divulgua Lucius.
Il lança un regard complice à Anae et enchaîna :
- … Pour l'héritier de Serpentard…

A leur grand soulagement, les toilettes étaient toujours désertes, ils les quittèrent rapidement de peur de tomber sur son fantôme. En arrivant sur le palier du premier étage, ils entendirent des rire étouffés. Lucius s'arrêta et interrogea du regard ses compères. Le plus silencieusement possible, il prirent un couloir qui menait à la salle de cours de DCFM. Rapidement, ils reconnurent les voix : c'était Sirius et ses camarades qui, d'après le tapage qu'ils faisaient devaient préparer un mauvais tour. Les Serpentards restèrent aux aguets.
- Alors, Cornedrue, tu as bientôt fini ?
Les Serpentards eurent un regard dubitatif à la mention de ce nom. Ce fut la voix de Potter qui répondit :
- Oui, voilà, voilà. J'ai fini de jeter mon sort : le premier Serpentard qui franchira cette porte se retrouvera recouvert de Bombabouses ! Encore une de tes merveilleuses idées, Patmol ! C'est excellent ! J'espère que ce sera pour cette grande gueule de Malefoy, ça lui rabaissera enfin le caquet.
Lucius voulut bondir sur les Gryffondors, Anae, Severus et Narcissa eurent besoin de toutes leurs forces pour le retenir.
- Tu n'as rien entendu ? demanda soudain la voix de Lupin. Queudver, vérifie donc sur la carte que nous sommes tout seul.
- Mais, je n'ai pas la carte, répondit Pettigrow, je croyais que tu l'avais.
- Non !
- Est-ce que quelqu'un a la carte, interrogea Black. C'est malin, ajouta-t-il voyant que personne ne répondait. Bon, on ferait mieux de filer.
Des bruits de pas se firent entendre et diminuèrent rapidement.
- Les sales petites ordures, jura Lucius. Je vais aller réduire en miettes le piège qu'ils ont préparé.
- Non, attends, s'exclama Anae, j'ai une meilleure idée : retournons-le contre eux. Laisse-moi faire !
Elle s'éclipsa furtivement et revint au bout de quelques instants.
- Voilà, annonça-t-elle. Je me suis arrangé pour que ce soit un de ces quatre idiots qui prennent tout ! Maintenant retournons à notre salle, ce serait dommage de se faire prendre maintenant.
Ils se retrouvèrent sans encombre dans les cachots. Une porte cachée dans un mur s'ouvrit et ils entrèrent dans leur salle commune. Severus et Anae s'y attardèrent quelques instants. Quand Lucius et Narcissa eurent disparu de leur vue, Anae vint se blottir dans les bras du jeune sorcier. Ils s'embrassèrent longuement. Lorsque leurs lèvres se séparèrent, Anae appuya sa tête sur l'épaule de son ami qui la serrait très fort contre lui.
- Le Seigneur des Ténèbres te fait sacrement confiance pour te confier une telle mission.
- Bah, c'est tombé sur moi, mais elle aurait très bien pu échoir à Lucius … C'était mon tour … Et puis, ce n'était pas si compliqué que ça !
- Il y avait quand même des risques.
- Pas vraiment : une fois dans la Chambre, nous étions en sécurité : personne ne connaît son emplacement, pour Dumbledore et les autres, ce n'est qu'une légende. Donc aucun risque ! A part le Seigneur des Ténèbres, nous sommes les seuls à connaître l'entière vérité…