- Lèves-toi !

Je n'ai même pas entendu la porte de cette cabane s'ouvrir… même pas eu le temps de me réveiller tout à fait qu'une main forte vient de m'empoigner au col pour me forcer à quitter mon lit. Je lève alors les yeux vers le visage déformé par la colère qu'est celui de Harry. Je mets un certain moment à comprendre le pourquoi d'une telle colère et lorsque enfin je semble toucher au but, il a pris de l'avance et me remémore cette soirée que j'essaye de ne pas regretter.

- Tu es un salop ! Tu le sais ça ? Elle avait confiance en toi et…

- Et rien de ça ne serait arrivé si tu n'avais pas eu la bonne idée de nous tendre un piège !

- Un piège ? Quel piège ! Il n'y avait aucun piège là-dedans Ron ! Si tu ne voulais pas passer la soirée avec, t'avais qu'à repartir !

- Parce que c'est pas ce que vous souhaitiez ? Que je passe la soirée avec elle ?

- Pas de cette façon !

Sa main se resserre le long de ma gorge et je dois faire un effort considérable pour ne laisser passer aucune expression de douleur sur mon visage. Sûr qu'il a de la poigne…

- On est majeur… ce que je fais avec elle ne te regarde pas !

- Détrompe-toi ! C'est mon amie… par conséquent, je m'intéresse à elle et je… la protégerai. Je pensais que c'était pareil pour toi !

J'essaie de détourner ma tête et son bras me ramène tout de suite vers lui. S'il continue comme ça, je risque de ne pas pouvoir retenir ce poing qui me démange sérieusement. Mais je rétorque :

- J'ai grandi contrairement à toi…

- Si pour toi grandir c'est oublier les promesses que tu avais faites, alors je veux rester un enfant et continuer à respecter mes amis !

- Parce que tu crois qu'elle me respecte !

- Oh oui c'est elle qui s'est enfuie en te laissant pleurer comme un idiot !

- Elle n'a eu que ce qu'elle méritait…

Pas le temps de réagir que je vois son poing approcher dangereusement mon nez. Me voilà au sol, tenant dans mes mains mon visage douloureux et cherchant à retenir le sang qui s'en écoule.

Je me relève comme je peux, je sens la colère faire battre mes veines et il me faut une bonne dose de self contrôle pour ne pas l'envoyer paître avec les vaches. Mais son visage plus menaçant que le mien me fait douter de ma bonne conscience. Il avait peut-être raison finalement…

- Je ne m'excuserai pas cette fois Ron… si tu me demandes de faire un choix entre elle et toi… je le ferai, crois moi.

- Je l'ai toujours su…

- Joue pas la victime ! Tu vas bouger ton cul et aller la voir. Tu vas lui expliquer que tu crèves d'envie de construire quelque chose de sérieux avec elle… que tu crèves de peur de la perdre.

- Qui es-tu pour te croire capable de savoir ce que je ressens ?

- Ton meilleur ami Ron…

Le voilà qui me tourne le dos et disparaît de ma vue en me laissant seul avec ma mauvaise conscience. Rien n'est aussi simple… pas même le fait de lui avouer que je n'ai rien oublié de cette nuit là…

Pourtant je dois le faire et je suis désormais certain que je me fais passer pour le crétin si je reste ainsi. Depuis quand suis-je aussi menteur et trouillard pour ne pas oser aller voir une personne et lui dire en face ce que je pense d'elle ?

J'attrape ma veste au passage et disparaît dans un claquement.

Le Terrier est resté le même que celui que j'ai quitté la veille. Je me retrouve dans un jardin baigné par le soleil et oh malheur pour lui, Harry se trouve sur mon chemin. Je m'arrête un instant, respirant allégrement et tentant de trouver un moyen de détourner mon envie de meurtre. C'est ce que j'arrive à faire, non sans lui décrocher un coup d'épaule au passage et un :

- Reste pas là, ça ne te regarde pas !

Et comme un malheur n'arrive jamais seul, voilà la frangine qui se pointe. En un coup d'œil, je lui ai fait comprendre qu'elle ne devait pas rester ici, au péril de sa vie…

Je ne mets pas longtemps à trouver Hermione… sans doute par habitude je sais qu'elle passe des heures devant cette fenêtre de la chambre qui était la sienne durant un long moment.

En effet, elle est là…

J'ai beau faire tout mon possible, je n'ai pas la démarche d'un chat et elle ne met pas longtemps à s'apercevoir de ma présence. Elle se retourne et essuie ses yeux d'un geste las. Son regard change tout de suite d'attitude et me force à regarder ailleurs. Que dois-je faire ? Que dois-je dire ? Je ne suis pas le mieux placé pour avoir du tact, normalement, je me contenterais de la laisser parler mais là, pourquoi le ferait-elle ? Et dire qu'elle doit s'amuser à me voir torturé comme ça…

- Tu te souviens de l'anniversaire de Harry ?

Et voilà, la première bourde. Non elle ne s'en rappelle pas et c'est bien là le fond du problème… Je baisse la tête pour éviter de regarder ses yeux qui doivent lancer des éclairs et je reprends le plus dignement possible.

- Plutôt… tu te rappelles lorsque tu m'as dit que tu ne t'en souvenais pas ?

Elle hoche la tête et j'ai réussi à capter un peu plus son attention (si s'était possible…). Comme poussé par un vent favorable, je reprends, plus confiant :

- Je t'ai dit ensuite que je ne m'en souvenais pas non plus… Le fait est que c'est faux. Je me souviens très bien…

Elle s'assoit sur le rebord de la fenêtre et attend que je poursuive mon histoire, la tête entre les mains. Pourquoi me fait-elle ça ? Je n'ai qu'une envie, la serrer dans mes bras…

- Hermione… la nuit dernière n'était pas notre première fois.

Je sais, c'est un peu rapide et son soupir me le confirme. Ses sanglots reprennent et moi qui espérais l'entendre parler un peu, je désespère de devoir continuer cette conversation tout seul.

- Et je pensais que tu le savais…

Oups, je n'aurais pas dû dire ça… la voilà qui se lève de nouveau, les mains sur les hanches à la manière de ma mère lorsqu'elle voyait les jumeaux redescendre avec une couleur verdâtre sur leurs mains.

- AH OUI ! Et pourquoi est-ce que j'aurais menti sur une chose pareille, hein ? Y'a guère que toi pour faire ça… Si ça n'était pas important pour toi…

- Ca l'était ! Et c'est pour ça que j'ai… enfin… quand tu m'as dit que tu ne t'en souvenais plus…

- Tu veux savoir ce que je pense Ronald Weasley ! Je pense que ton ego démesuré te joue des tours depuis que tu es parti jouer les héros en Amérique. Arrête un peu de jouer les solitaires et prends conscience que tes actions touchent autre chose que ta petite personne !

- Parce que madame n'est pas trop concentrée sur sa personne pour voir qu'elle peut faire du mal en oubliant une chose comme ça !

- Espèce de crétin, si j'ai oublié, comment voulais-tu que je le sache !

- Tu es miss-je-sais-tout non ?

Et pour la seconde fois de la journée, je n'ai pas vu le coup arriver. Me voilà avec un nez déformé et une marque de main sur la joue. Pourtant, je reste stoïque en la toisant du regard. Je ne laisse apparaître aucune expression et à vrai dire, je ne sais pas quelle expression j'aurais pu laisser passer…

Elle, au contraire, a remonté ses mains à sa bouche et semble outrée d'un tel débordement. Je la vois à son tour partagée entre plusieurs sentiments, tantôt avançant une main vers moi, tantôt la reculant. Mais la voilà qui frôle ma peau et je n'ai pas le courage de la repousser.

- Tu… tu as mal ?

En plus elle se croit assez forte pour me faire souffrir… du moins, c'est ce que je pense jusqu'à ce que son doigt frôle mon nez et me rafraîchisse la mémoire.

- Je viens de me faire frapper par mes deux anciens meilleurs amis… je me sens complètement nul… et mis à part cette douleur là, je vais bien.

- Tu veux que je…

- Laisse ça comme ça…

Et je m'éloigne de cet endroit qui m'a si facilement remis les idées en place. Le fait est que je veux garder ces douleurs que je semble avoir méritées…