Rapidement, tout le monde prit place autour de la table du salon. Une humeur joviale régnait et tout le monde riait face aux enfants qui commençaient à ressortir des anecdotes de famille. C'est dans cette bonne humeur que le repas se déroula. Les rires se mêlaient aux plaisanteries et taquineries, et chacun y allait de son bon gré pour rappeler des souvenirs de leur ancienne vie d'expat'. Seul Antoine était en retrait. Non concerné par ces histoires, le commissaire se sentait de trop. Et le pire, c'est qu'il voyait sa compagne participer à leurs plaisanteries sans se préoccuper de lui. Pourtant, Candice n'était pas dupe et s'était rendu compte de la froideur de son compagnon. Elle tenta à plusieurs reprises d'apaiser la tension en lui adressant un sourire mais ce fut vain.
« Eh mais ! Cette musique… commença Emma en fronçant les sourcils.
- Oh ! Mais c'est celle de notre mariage ça ! déclara Laurent avec fierté. Tu te souviens ? demanda-t-il à Candice en jetant un coup d'œil furtif à Antoine qui ravala sa salive.
- Ouais… Ça faisait un bail que je l'avais pas entendu… répondit-elle sans engouement en posant discrètement sa main sur la cuisse de son compagnon pour le rassurer.
- Tu m'étonnes ! Avec ta belle robe… Je me souviens… continua Laurent rêveur. J'te jure quand je t'ai vu dans ta robe tout à l'heure… J'avais l'impression de revenir 30 ans en arrière.
En réaction, Antoine se leva et récupéra des assiettes avant de se diriger vers la cuisine sous les yeux gênés de Candice.
- Oh venez ! On ressort les albums de famille ! proposa Léo.
Antoine leva les yeux au ciel.
- Hâte de revoir papa avec ses longs cheveux ! plaisanta Emma. Tu les as mis où maman ? demanda-t-elle à Candice qui s'était levée pour débarrasser la table.
- Euh… Dans le carton, près du canapé. »
Gênée et compréhensive, elle rejoignit son compagnon en cuisine. Elle s'approcha doucement et son ignorance lui fit comprendre qu'il était vraiment agacé. Elle se posa derrière lui et l'attrapa par la taille pour le forcer à se retourner.
« Quoi ?
- Arrête… Je vois bien à ta tête que ça t'énerve…
- Donc lui il a vu ta robe ?
- Antoine…
- Il veut peut-être prendre ma place aussi non ?
- Arrête j'te dis ! le gronda-t-elle gentiment.
- J'vais aller me coucher ! Toute façon ça sert à rien que je reste, j'ai rien à raconter.
- Ah non ! protesta-t-elle.
- Et quoi ? J'vais passer la soirée à vous voir rigoler devant vos souvenirs de famille ? Non merci. Marmonna-t-il en se retournant.
- Maman ! cria Léo. Faut que tu viennes voir ça là ! lâcha-t-il en éclatant de rire.
- On arrive… répondit-elle. Allez viens… »
Antoine souffla mais finit par suivre sa compagne jusqu'au salon. Il la vit les rejoindre et participer au visionnage des albums en rigolant à chaque cliché. Il les observa en silence et retourna dans la cuisine se servir un whisky. Candice l'observa revenir et s'asseoir dans le canapé. Elle lui adressa un petit sourire avant de s'approcher de lui et de s'installer à ses côtés. Il la fuyait toujours. La commandante rigola doucement et pinça ses lèvres. Elle attrapa son bras droit et le leva pour le passer sur ses épaules. Antoine finit par tourner la tête vers elle et la vit s'installer dans ses bras en souriant.
« Arrête de faire la gueule… » chuchota-t-elle doucement avant de l'embrasser tendrement. Satisfait, Antoine entrelaça ses doigts dans les siens et profita des caresses qu'elle lui prodiguait sur son bras.
« MAIS ! s'écria Sacha en se tournant vers eux. Vous avez grossi !
- Non mais oh ! répliqua Candice.
- Non je parle pas de vous ! Mais d'Antoine !
- C'est quand on faisait des soirées avec toute ton équipe, dans l'ancienne maison ! expliqua Emma en regardant la photo que tenait Sacha.
- Montre ! ordonna la commandante qui ne bougea pas.
Sacha tendit la photo à Candice et retourna voir le reste de la tribu qui rigolait déjà sur d'autres clichés.
- Je savais pas que t'avais ces photos… lâcha Antoine en récupérant la photo à son tour. Oh la dégaine… J'avoue que j'ai grossi quand même…. Constata-t-il.
- Mais non… T'es très bien ! contesta-t-elle en caressant son torse.
- Je me souviens de cette soirée… On avait tous fait un karaoké…
- Ouais… Pourtant je déteste ça…
- Et moi donc ! Mais Jennifer m'avait forcé à chanter…
- Hum… J'ai grossi aussi quand même… répondit-elle d'une moue boudeuse.
Antoine rigola doucement.
- Oh maman ! Regarde ! C'était sur la plage à Singapour, quand on était allés voir les cerfs-volants ! rappela Emma avec engouement en tendant le cliché à sa mère.
- Ah oui ! Je me souviens ! C'était quelques temps avant que j'apprenne pour ta secrétaire ! lâcha-t-elle fièrement en fixant son ex-mari qui tira la tronche.
Candice perdit son sourire et se redressa dans le canapé.
- Sa secrétaire !
- Oui bah quoi ? répondit Antoine perplexe.
- Si y a bien une personne qui devait tout savoir sur le principal… C'est elle ! En plus elle a tenté d'empêcher la perquise… Puis ce serait pas la première à tomber dans les bras du patron… Faut qu'on l'interroge !
- Eh bien demain matin, première heure, vous êtes chargée de l'interroger, commandant !
- Huuum… J'aime bien quand tu me parles comme ça ! chuchota-t-elle à son oreille avant de se réinstaller dans ses bras en souriant. »
. . . . .
« Vous aviez interrogé la secrétaire de direction ? demanda Candice en débarquant dans l'openspace.
- Euh… Oui ! réfléchit Marquez.
- Et ça avait donné quoi ?
- Pas grand-chose je crois… Elle est en poste depuis trois ans dans le collège, bien aimé des profs, efficace…
- Pourquoi t'as une idée ? demanda Val intriguée.
- Bah je sais pas… Je me dis qu'elle vit au quotidien à côté de lui donc ce serait pas étonnant qu'elle ait eu vent de quelque chose concernant cette histoire d'harcèlement…
- En tout cas, elle a rien dit à ce sujet…
- Hum… Peut-être qu'elle le protège… J'aimerais bien la voir… lâcha Candice.
- Bah on retourne au collège sinon ? proposa Mehdi.
- J'ai plutôt une autre idée… »
Candice expliqua son plan à ses collègues qui finirent par la suivre. Comme convenu, elle s'installa en salle de contrôle en fin de matinée et se contenta d'observer l'interrogatoire de la secrétaire.
« Je comprends pas trop pourquoi je suis là… commença la rousse avec hésitation.
- Vous inquiétez pas… On veut juste avoir quelques informations sur votre chef… répondit doucement Val.
- David ? Je croyais qu'il avait été innocenté ?! s'étonna-t-elle.
- Ah vous l'appelez par son prénom ? demanda malicieusement Ismaël.
- Bah oui… fin vous savez dans les bureaux ça rapproche…
- Ah oui ? répondit le lieutenant pour souligner le sous-entendu.
- Non mais ce que je veux dire, c'est qu'on bossait ensemble quasiment toute la journée quoi…
- Donc vous deviez être au courant de ce qu'il se passait ?
- Vous voulez parler de cette histoire d'harcèlement ? s'indigna-t-elle. Mais c'est totalement faux… La vérité c'est qu'elle a tout inventé parce qu'elle pouvait pas le voir.
- On a quand même des preuves formelles qui attestent qu'il y avait harcèlement. Votre chef lui-même a avoué.
- Pardon ? Il a avoué le meurtre ?!
- Non… Il a avoué pour le harcèlement. Le meurtre c'est pas possible il avait un alibi, il était avec sa femme.
- Sa femme ? demanda-t-elle dans un éclat de rire. Mais elle l'avait largué y a deux semaines. »
Antoine pénétra à son tour dans la salle de contrôle, il s'installa aux côtés de sa compagne qui scrutait l'écran les yeux plissés. Il l'observa en souriant. Visiblement elle était plongée dans ses pensées et n'avait pas prêté attention à son arrivée.
« Alors ça donne quoi ? …. Candice ? répéta-t-il face à son ignorance.
- Je suis sûre qu'ils étaient ensemble.
- Ah oui ? demanda-t-il amusé.
- Ça se sent… Elle parle de lui limite en l'idéalisant. Fin tu vois c'est une femme, et j'sais pas… t'es obligée de te sentir impliqué quand tu sais que la personne avec qui tu bosses est un pervers. Et elle rien quoi… Puis il venait de se faire larguer par sa femme…
- Donc son alibi tient plus… On dirait que j'avais raison non ? lâcha-t-il malicieusement.
- Mais on a aucune preuve de sa culpabilité Antoine !
- De toute façon il est encore dans nos locaux… Suffit de le cuisiner encore un peu…
- Moi je pense plutôt qu'il faudrait aller voir sa femme…
- Mais non Candice ! Elle aurait aucun mobile…
- Et alors ? Je te dis pas que c'est elle la coupable… Je te dis simplement qu'il faudrait lui parler… proposa-t-elle avec agacement face à sa réticence.
- Eh bah vas-y et moi je me charge du principal.
- Tu veux pas parier non plus ? demanda-t-elle complètement désabusée.
- Et pourquoi pas ?
- Hum… Ok… Alors si je gagne, j'ai le droit au petit-déjeuner au lit… déclara-t-elle fièrement.
- Vendu ! lâcha-t-il en quittant la salle. »
