ATTENTION : Ce chapitre contient une scène d'attouchements sexuels non-consentis et la mention d'un suicide.

Je suis responsable de ce que j'écris, pas de ce que vous lisez.


On ne peut jamais prédire à l'avance de quelle façon une personne va réagir après avoir vécu un évènement traumatisant. D'autant plus que cela diffère suivant si elle est victime, témoin, ou bien encore proche d'un des acteurs de cet évènement. Paranoïa, déni, renfermement...et comment savoir quelle est la bonne façon de l'aider ? Comment savoir quoi dire et quoi faire pour ne pas aggraver la situation, pour ne pas la perdre à tout jamais ?

Nami et Vivi avaient vécu un évènement traumatisant et elles savaient qu'elles avaient besoin d'en parler ensemble. Elles avaient chacune tenté d'aborder le sujet durant les derniers jours qui s'étaient écoulés, mais n'avaient pas trouvé le meilleur moyen de commencer la conversation. Nami était devenue angoissée de savoir Vivi toute seule à la maison. Son patron, compréhensif, lui avait donné trois jours de congés. Puis, elle avait refusé de quitter la maison si Igaram, le fidèle majordome de la famille Nefertari, n'était pas là pour veiller sur la belle bleue. Quant à cette dernière, elle pouvait passer des heures assise sur une chaise longue sur leur balcon à regarder les marques qu'elle avait aux poignets. Des marques laissées par la corde avec laquelle Orochi l'avait privée de ses mouvements. Elles mettaient un peu de temps à s'effacer mais elle espérait qu'elles seraient bientôt invisible pour pouvoir enfin mettre cette histoire derrière elle. Elles ne pourraient pas avoir une vie saine en continuant à vivre dans la crainte que toute cette histoire ne recommence.

Vivi avait demandé à Zoro des nouvelles d'Orochi : il lui a appris que la famille de son voisin avait entendu parler de cette affaire, ainsi que de ses problèmes d'argent. Les Kurozumi avaient une assez mauvaise réputation à Fuschia et dans les quartiers alentours, et comme ils ne voulaient pas que cette histoire traîne en longueur, ils avaient pris leurs dispositions pour qu'Orochi déménage et soit suivit par un professionnel. Zoro lui a assuré que, par sécurité, la police veillerait quelques temps à ce qu'il ne revienne plus dans le coin. Mais elle n'était plus inquiète à ce sujet, et était soulagée qu'il soit aidé pour ne plus jamais blesser les autres, ou bien se blesser lui-même.

Elle avait réussi à dire tout ça à Nami, mais elle ne l'avait pas pris aussi bien qu'elle. La rouquine se fichait de savoir qu'Orochi aille mieux ou non. Elle le haïssait pour s'en être pris à une jeune femme qui ne voulait que l'aider et qui n'avait jamais rien fait à qui que ce soit. Elle ressentait tellement de haine envers cet homme qu'elle ne parvenait pas à aller de l'avant, et c'était pour ça qu'il devenait impératif qu'elles s'ouvrent l'une à l'autre sur cette affaire.

Aussi un matin, Vivi décida qu'il était grand temps qu'elle prenne son courage à deux mains et qu'elle lance enfin cette conversation. Elle avait eu du mal à s'endormir, et s'était réveillée à quatre heures sans parvenir à retrouver le sommeil. Elle s'était donc levée, avait nettoyer la cuisine de fond en comble tout en réfléchissant à la meilleure façon de s'exprimer à sa conjointe, puis avait préparé le petit-déjeuner et attendu que Nami vienne la retrouver. Quand la professeure arriva et croisa le regard de sa petite-ami, elle sut immédiatement qu'elle ne pourrait pas échapper à la discussion cette fois-ci. Aussi prit-elle siège en face de Vivi, sans pour autant toucher au petit-déjeuner. Son estomac était bien trop noué pour ça. Vivi lui adressa un regard emplit de compassion, et prit la parole.

-Nami, je voudrais qu'on prenne le temps de discuter. Je comprends que tu ais encore peur, c'est aussi dur pour moi. Mais on doit aller de l'avant, je ne peux pas rester terrée à la maison.

-Mon but c'est pas de t'empêcher de sortir, répondit doucement Nami. C'est juste que le quartier n'est pas sûr en ce moment, je m'inquiète.

-Je comprends ! Je t'assure que je comprends ! Mais j'ai simplement manqué de vigilance, ça aurait pu arriver à n'importe qui !

Elle se pencha en avant pour attraper l'une des mains de Nami et la serrer doucement dans les siennes.

-On ne peut pas s'arrêter de vivre.

-Non tu as raison. On ne peut pas continuer comme ça, c'est clair.

-On peut discuter pour trouver une solution. Je suis persuadée qu'avec le temps...

-J'ai déjà pensé à quelque chose.

Vivi cessa de parler, même si le ton réservé de Nami ne la rassurait pas. La rousse déglutit, sachant que ce qu'elle s'apprêtait à dire n'allait pas plaire à sa petite-ami. Elle-même avait eu beaucoup de mal à prendre cette décision, mais rien ne lui importait plus que de veiller à la sécurité de sa bien-aimée. Elle posa son regard sur les marques visibles aux poignets de Vivi ; elle portait tout le temps des vêtements à manches longues depuis ce jour, mais là ses manches étaient légèrement retroussées par sa position. Elle s'en voulait encore terriblement pour ses décisions ce soir-là, ne pouvant s'empêcher de se dire qu'elle n'avait pas agis comme il fallait, que Vivi aurait pu être sauvée bien plus tôt.

-Je ne suis pas capable de te protéger...

-Quoi ? Nami mais enfin...

-Je me disais que peut-être...on devrait aller ailleurs quelques temps. Le temps que tout cette histoire étrange se calme.

-Mais enfin, nous ne pouvons pas ! Et ton travail ?

-Alors tu devrais retourner chez ton père. Sa maison est sûre, il y a un bon système de sécurité, et tu ne seras jamais seule.

Brusquement, Vivi retira ses mains de celle de Nami, et recula sa chaise. Bien qu'elle s'attendait à un désaccord clair et net, Nami fut quelque peu surprise par sa réaction.

-Vivi...

-J'ai quitté la maison de mon père pour vivre ma vie, pour être indépendante ! Je ne peux pas retourner là-bas chaque fois qu'il m'arrive quelque chose ! Je dois pouvoir me prendre en mains moi-même !

-Bien sûr, oui je suis d'accord ! Mais il s'agit de ta sécurité...

-Ça ne règlera pas les choses !

-Écoutes, je...il faut que j'y aille. Reste ici et attend Igaram, d'accord. On en reparlera ce soir.

-Non, Nami !

-Je suis désolée.

Nami se leva et partit, sans prendre la peine de petit-déjeuner. Même après avoir entendu la porte d'entrée claquer, Vivi resta là sans bouger durant plusieurs minutes. Et puis, elle sut ce qu'elle avait à faire. Elle attrapa son téléphone portable et envoya un message à Igaram pour le prévenir que Nami restait à la maison, et qu'il n'avait donc pas besoin de venir ; elle s'excusa bien évidemment pour le dérangement. Puis elle rangea le petit-déjeuner au frigo pour plus tard, nettoya à nouveau la cuisine et se prépara à sortir. Elle avait grand besoin de prendre l'air, et de parler à quelqu'un. Beaucoup de ses amis étaient probablement au travail, mais il y en avait un qui était très sûrement chez lui.

Décidant d'aller lui rendre visite, elle prit ses clés, son portable et son portefeuille et quitta la maison en fermant derrière elle.


Shuraiya ayant passé la nuit au bureau, pour une affaire urgente sans doute liée au mystérieux dossier trouvé l'autre fois dans son bureau, Sanji avait décidé de dormir lui-aussi ailleurs qu'à la maison. Usopp avait immédiatement accepté de l'accueillir, et avait insisté pour lui laisser son lit. Ils n'étaient pas encore arrivés au stade où ils étaient suffisamment à l'aise pour dormir ensemble.

Ils avaient passé toute la soirée de la veille, jusque tard dans la nuit, à parler de tout et de rien, de leurs rêves, de leurs ambitions et de leurs goûts. Ils arrivaient encore après des semaines de discussion à en apprendre l'un sur l'autre mais ils n'en avaient jamais assez. Très franchement, Sanji doutait de s'en lasser un jour. Quand il était avec Usopp, il avait enfin le sentiment de vivre une vie de couple comme il l'avait toujours souhaité. Il était dorénavant capable de faire la différence entre une vraie relation basée sur des sentiments partagés et ce qu'il avait avec Shuraiya si tant était qu'on puisse dire qu'ils avaient quelque chose. Bien sûr le fait que son mari et lui ne s'aimaient pas n'était pas une excuse pour justifier cette relation ; le jour de son mariage il avait juré fidélité et il ne tenait pas sa promesse. C'était mal et dangereux, mais il avait souffert si longtemps que le fait de se sentir vivant était devenu plus important que sa parole donné à des gens qui méprisaient son existence. Parmi ces choses qu'il avait confié à Usopp, il lui avait avoué que si, à l'avenir, l'artiste avait des doutes envers lui et surtout envers sa fidélité, il comprendrait ; difficile d'accorder sa confiance à quelqu'un dont on sait qu'il pouvait nous trahir pour l'avoir déjà vu faire. Mais Usopp lui avait répondu que ça n'arriverait pas, avec un ton si déterminé que Sanji savait qu'il serait inutile de remettre le sujet sur la table. "Je suis sûr de te connaître assez pour savoir que je peux te faire confiance quoi qu'il arrive", c'était ses propres mots. Il ne se pardonnerait jamais s'il devait trahir cette confiance.

Ce matin, il s'était levé tôt pour faire le petit-déjeuner, qu'Usopp avait littéralement engloutit avec appétit. Sanji lui avait déjà demandé ce qu'il avait préféré parmi tout ce qu'il lui avait préparé, et même si le peintre n'avait pas su s'arrêter sur un plat, il avait laissé entendre qu'il appréciait particulièrement le poisson. Alors durant son temps libre, pendant qu'Usopp travaillait sur quelques commandes, il prenait possession de la cuisine pour tester de nouvelles recettes à base de différents poissons. Pour plaisanter, son amant lui avait dis que son poids allait finir par tripler ; en attendant, il était toujours partant pour goûter sans qu'on ait besoin de le forcer.

Alors qu'ils terminaient ensemble de débarrasser la table et de faire la vaisselle, le téléphone de Sanji se mit à sonner. Usopp étant plus près de l'appareil, il l'attrapa afin de le lui donner. Il croyait que ce serait un appel de Shuraiya, et fut donc surpris de constater que c'était en réalité son père qui cherchait à le contacter. Il pinça les lèvres comme pour empêcher le moindre son de sortir de sa bouche et tendit le portable au blond, qui le déclina poliment.

-Laisse-le sonner.

-Tu...tu ne veux pas répondre ? C'est peut-être important...

-Mon père ne m'appelle que pour exprimer des reproches. Il n'y a que son business qui compte pour lui et je ne suis pas concerné.

-Mais si tu ne réponds pas, il va peut-être venir ici.

-Il enverra ma sœur à la limite. Même si j'étais hospitalisé, il ne ferait pas le déplacement.

Usopp posa un peu trop brutalement le téléphone sur le comptoir, et il adressa des excuses perplexes à Sanji en vérifiant qu'il n'avait rien cassé. Sanji fronça les sourcils et attrapa un chiffon pour s'essuyer les mains en se tournant vers lui.

-Ça te dérange que je parle de ma famille.

-Non Sanji c'est pas c'que je...c'est juste que...j'ai dû mal à croire que s'il t'arrive malheur...

-Je m'y suis fais.

-Ça aussi j'ai du mal à le croire ! Tu ne peux pas sérieusement dire que cette indifférence ne te blesse pas.

Sanji haussa les épaules et partit s'adosser au comptoir à côté d'Usopp.

-Ça fait mal au début. Mais ça a toujours été comme ça, je ne m'en formalise plus.

-C'est désolant.

-C'est ainsi mais ça n'a pas d'importance. Quand je divorcerai, ils me renieront et je n'aurai plus à m'en faire si je ne leur conviens pas.

Usopp fut surpris par ses paroles, car pour la première fois Sanji évoquait le divorce non pas comme un rêve utopique, mais bien comme une chance possible qu'il avait l'intention de saisir. Sanji y pensait de plus en plus depuis qu'il avait rencontré Kaya. Ce serait dur, et même s'il arrivait effectivement à divorcer, il se retrouverait sans rien ; il ne pouvait pas demander à Usopp de subvenir seul à leurs besoins à tous les deux. Il allait devoir essayer de trouver un travail et attendre patiemment le meilleur moment pour partir. De plus, il ne pouvait pas s'en aller sans découvrir ce que trafiquait son crétin de mari.

Il grogna en repensant à la violence de leur dernier échange, puisque bien qu'il se soit écoulé plusieurs jours depuis, il ne lui avait toujours pas reparlé autrement que par des SMS brefs. Heureusement, ses pensées furent vite détournées par les mains d'Usopp sur ses joues et son sourire lumineux. Il inspira profondément pour s'apaiser, et s'apprêta à entamer un sujet plus sérieux lorsqu'il se sentit tiré en avant, sa bouche prise d'assaut par les lèvres du brun. Il écarquilla les yeux de surprise, inhabitué à un tel déferlement de passion, mais ne tarda pas à y répondre en y insufflant tout son amour. Petit à petit, ils se laissèrent entraînés par l'instant présent, et se dirigèrent presque inconsciemment jusqu'au canapé où Sanji se laissa tomber en attirant Usopp avec lui. L'artiste se retrouva au-dessus de son amant, qu'il entoura de ses bras pour le serrer contre lui. Sanji écarta un peu ses jambes pour lui laisser de la place et se mit à haleter lorsqu'Usopp descendit ses baisers dans son cou.

-Ggh Usopp...

-Oh mon dieu !

Les deux hommes sursautèrent et s'éloignèrent l'un de l'autre en vitesse, tournant la tête vers l'entrée. Vivi les regardait, ses mains plaquées contres ses joues rosies par la gêne, l'air profondément désolée. Elle venait d'assister à une scène dont elle savait qu'elle n'aurait pas dû la voir. Usopp resta interdit quelques secondes, puis se leva d'un bond et se dirigea vers elle. Sanji se redressa et essaya de calmer les battements accélérés de son cœur.

-Pardon, s'exclama Vivi. J'ai toqué mais...j'aurais dû attendre dehors ! Je ne voulais pas vous déranger !

-Ce...c'est pas ce que tu crois !

-Euh...es-tu l'amant de Sanji?

-Bon d'accord c'est ce que tu crois... Mais on va t'expliquer !

Doucement, il lui prit les mains et l'entraîna dans le salon. Elle prit place sur le canapé, à côté de Sanji qui n'osa pas encore la regarder dans les yeux. Usopp vint se placer debout en face d'elle, et chercha ses mots un instant. Remise de ses émotions et simplement désireuse de comprendre l'échange qu'elle venait de surprendre, elle l'encouragea d'un regard doux.

-Sanji et moi sommes...tombés amoureux. C'était pas prévu et on n'avait pas l'intention d'entretenir une relation ! Mais il s'est passé des trucs et on avait vraiment besoin l'un de l'autre. Je peux pas te donner plus de détails en fait. J'ai bien conscience que c'est confus dis comme ça...

-En fait, je crois que je comprends.

Elle tourna la tête vers Sanji et tendit sa main pour la poser sur l'avant-bras droit du jeune homme. Ce dernier plongea dans son regard, et n'y vit ni dégoût ni colère, juste une immense compassion.

-Je sais comment Shuraiya te traite et ce n'est pas normal. Je suis très contente parce que vous méritez d'être heureux tous les deux, et ensemble ça serait merveilleux !

-Merci Vivi-chan...

-Mais je ne peux pas m'empêcher d'être inquiète. Oh je me doute bien que je ne peux pas vous conseiller à ce sujet mais...tu ne risques pas de t'attirer des ennuis ?

-C'est pour éviter ça que nous devons garder cette relation secrète jusqu'à ce que je trouve une solution.

-Jusqu'à ce qu'ON trouve une solution, le reprit Usopp.

Sanji le remercia d'un regard tellement rempli d'amour que Vivi ne put que sourire et espérer que tout se passerait bien pour eux. En tout cas, ce n'était pas elle qui leurs mettrait des bâtons dans les roues.

-Ne vous en faites pas, je ne dirai rien à personne, c'est juré !

-Merci de ta compréhension Vivi ! C'est très important pour Sanji et moi !

Soulagé, Usopp s'autorisa enfin à s'asseoir et prit place également à côté de la jeune femme.

-Mais dis-moi, pourquoi es-tu venue ? Tu as besoin d'un service ?

-Oh eh bien en fait...Nami et moi avons eu un petit différent ce matin et je souhaitais juste discuter avec quelqu'un. J'étais allé toquer chez toi Sanji mais comme il n'y avait personne je suis venue ici. Mais je devrais y aller, je ne veux pas vous déranger !

-Non, non, ne t'en fais pas ! Tu peux rester ici ! Racontes-nous ce qu'il s'est passé...

Un peu hésitante, elle confia malgré tout à ses deux amis ce qu'elle avait sur le cœur depuis son enlèvement. Ce qu'elle n'osait pas dire à Nami, ce qu'elle savait que Nami n'osait pas lui avouer, et ce qui avait été proposé par son amante quelques heures plus tôt. Elle n'attendait bien sûr pas d'eux qu'ils lui apportent une solution toute faite, car quoi qu'il en fut c'était à Nami et elle de prendre une décision. Elle avait simplement besoin d'une oreille attentive pour écouter ce qu'elle avait tant envie de laisser sortir.

Son monologue terminé, il ne s'écoula pas une seconde avant que Sanji ne se lève et se dirige vers la cuisine. Vivi le suivit des yeux tandis qu'il commençait à sortir ingrédients et ustensiles nécessaires à la confection de délicieuses pâtisseries qui sauraient à coup sûr remonter le moral de la belle bleue.

-Reste assise Vivi-chan, sourit Sanji. Pour retrouver le sourire, je ne connais rien de mieux qu'une douceur au chocolat.

-Merci, c'est très gentil.

-Je vais prévenir Nami que tu es là, dit Usopp. Faudrait pas l'inquiéter encore plus. Mais bien sûr tu peux rester ici jusqu'à ce soir ! Même si on va finir par se sentir un peu à l'étroit dans cette petite maison.

Il éclata de rire puis s'éloigna avec son téléphone pour envoyer un message à Nami. Vivi se sentit un peu plus détendue à présent qu'elle avait pu se confier à ses amis. Décidant de ne pas rester inactive, elle se leva et proposa de leur faire des cocktails aux fruits rafraichissants pour accompagner la cuisine de Sanji. Ce dernier tenta de la convaincre de simplement se détendre, mais les activités à plusieurs étaient toujours plus amusantes.

Et la récompense, qu'elle fut ou non sous la forme de succulents gâteaux, en était toujours bien meilleure.


Dans sa vie, Robin avait plusieurs fois eu l'occasion de faire la connaissance de mauvais garçons. Elle en avait rencontré tout au long de sa scolarité : des élèves peu fréquentables qui se laissaient submergés par leurs problèmes, ou qui se moquaient des leçons des adultes en préférant l'amusement. D'ailleurs, aujourd'hui encore elle était confrontée à ce genre de cas avec les étudiants qu'elle accueillait dans ses cours. Certains s'étaient montrés subtils dans la formulation mais étaient parvenus à lui faire comprendre qu'ils n'étaient là que pour se rincer l'œil. Robin était bien consciente d'être une belle femme, mais pas de chance pour eux, elle savait rester professionnelle en toute circonstance. Et les mauvais garçons ne se trouvaient pas que dans les salles de classe. Elle en croisait aussi dans les rues, dans les transports en communs, etc. Elle les évitait autant qu'il le lui était possible, et jusqu'à aujourd'hui elle n'avait pas eu de problèmes.

La première fois qu'elle avait rencontré Franky, elle avait cru qu'il s'agissait d'un mauvais garçon. Son look était pour le moins inhabituel, il n'avait pas sa langue dans sa poche, et n'était pas non plus d'un comportement exemplaire. Elle avait d'abord été tentée de se tenir loin de lui car elle ne voulait pas s'attirer plus de problèmes. Mais quand il l'avait abordé, elle ne s'était pas sentie en danger. Le contexte familial dans lequel elle avait grandie l'avait rendu très méfiante et c'était justement ce sentiment d'apaisement qui l'avait poussé à lui laisser une chance.

Finalement, il n'avait d'un mauvais garçon que l'apparence, comme une coquille pour se protéger lui-même. A Robin, il s'était dévoilé entièrement, et il avait espéré la même chose d'elle bien qu'à son propre rythme. La première fois qu'elle lui avait parlé de son enfance, elle-même en avait été surprise. Elle ne s'attendait pas à être capable de confier ses plus profondes blessures. Il avait écouté sans juger, et quand elle s'était tue, il avait dit simplement : "Je comprends".

Même après avoir rencontré sa famille, même après avoir vu comme tout ça pouvait la toucher, il était resté près d'elle. Ils étaient devenus un pilier l'un pour l'autre, et tant qu'ils avanceraient ensemble tout ne pourrait qu'aller bien.

Alors quand elle ne pouvait rien dire à l'homme l'ayant pourtant toujours protégé, elle ne pouvait pas se sentir plus vulnérable.

Elle avait envie de tout lui raconter, mais elle avait peur des conséquences. Elle ne croyait pas que Franky la rejetterait pour ça, non. Ce n'était pas son genre. Ce qui l'effrayait en fait, c'était qu'elle croyait connaître Spandam et qu'elle se rendait finalement compte qu'elle se fourvoyait complètement. L'homme qui exerçait sa domination sur elle était sûrement capable du pire, et elle ne savait pas encore ce que cachait le mot "pire". Si elle en parlait à Franky et qu'il s'en mêlait, Spandam essaierait-il de se venger de son mari ? Allait-il s'en prendre à son entreprise, à son frère, à lui directement ? Elle ne s'était pas assez méfiée de lui et ça avait été sa première erreur. Elle avait joué avec le feu et il commençait à la brûler. Elle voulait tellement parvenir à garder la tête haute malgré tout, mais aujourd'hui quelque chose se brisa en elle.

Spandam la faisait venir régulièrement dans son bureau, elle y allait toujours par crainte des conséquences de son absence. Quand ils n'étaient que tous les deux, il cherchait à l'embrasser, il la caressait, parfois tentait de passer ses doigts sous son chemisier. Robin ne bougeait pas, ne le laissait pas croire que ça lui faisait plaisir, et surtout ne lui rendait jamais la pareille. Quand elle entrait dans la pièce, elle ne faisait que prier pour pouvoir vite en ressortir. Spandam semblait essayer de la persuader de se laisser faire, lui susurrant à l'oreille qu'il saurait la rendre heureuse et qu'elle n'avait qu'à ne plus lutter. Or il était d'un naturel impatient, et sa tendance à prendre ce qu'il désirait par la force prit le dessus sur son semblant de tendresse.

Aujourd'hui, au lieu de la laisser prendre place sur la chaise face au bureau comme d'habitude, il l'a agrippé très fermement par le poignet pour la plaquer contre le mur juste à côté de la porte. Il ne voulait pas lui laisser le temps de comprendre ce qu'il comptait faire avant qu'il n'ait commencé. Il attrapa le deuxième poignet de Robin et leva ses deux bras au-dessus de sa tête afin de les tenir tous les deux en une seule main. De l'autre, la droite, il commença à caresser la cuisse gauche de Robin, et ce fut à ce moment-là que la gravité de sa situation lui sauta aux yeux. Immédiatement, elle commença à se débattre et à tenter de libérer ses poignets. Il ne fit que resserrer sa poigne et lui murmura à l'oreille de se laisser faire, d'une voix emplit d'une douceur répugnante. Il glissa doucement sa main entre ses jambes pour les écarter, et comme elle résistait, il força l'ouverture avec son genoux, trouvant une autre utilité à ses doigts qui allèrent pincer sa poitrine.

Durant toutes ces années passées avec Franky, jamais Robin ne s'était retrouvée dans une situation similaire. Son mari était un romantique passionné pour qui la prendre sauvagement contre un mur n'était pas envisageable. Ce n'était pas en soi un comportement qui le dégoûtait ou contre lequel il était opposé tant que les deux partis étaient consentants ; ce n'était juste pas ainsi qu'il se voyait traiter son épouse. Pour lui, le sexe correspondait à faire tendrement l'amour avec la femme de sa vie dans un cadre confortable. Lui maintenir les poignets, bloquer ses mouvements, donner la priorité à son plaisir personnel plutôt qu'à celui de sa partenaire, tout cela n'avait rien d'excitant à ses yeux. Pour Spandam, c'était visiblement l'inverse.

Robin se pensait perdue, croyait fortement qu'elle ne parviendrait pas à s'en tirer cette fois. Mais le téléphone portable de Spandam sonna, signe qu'il avait reçu un mail. En grognant, et bien qu'en la maintenant toujours, il sortit son mobile de sa poche et prit connaissance de la notification.

-Merde, ma réunion a été avancée.

Robin laissa échapper un petit gémissement, qu'il prit peut-être pour de la déception, mais qui témoignait en réalité de son espoir d'être rapidement relâchée. Un sourire carnassier prit place sur les lèvres de Spandam, et il leva une de ses mains pour la poser sur la joue de sa proie. Aussi doux fut son toucher, ce n'était qu'une brûlure dégoutante à ses yeux.

-On dirait qu'on va devoir remettre ça...

Le ricanement qui suivit son propos la fit frissonner, et lorsqu'il la relâcha pour prendre ses affaires et rejoindre ses collègues pour la réunion, elle ne parvint pas encore à bouger. Ça pouvait paraître étonnant que son premier réflexe ne fut pas de prendre ses jambes à son cou, et elle l'aurait fait immédiatement si elle avait pu. Mais il lui fallait un temps pour se rendre compte de ce à côté de quoi elle venait de passer, et pour vraiment se dire qu'elle était sauvée. Du moins pour l'instant. Au bout d'une minute qui lui parut être une éternité, et malgré ses jambes chancelantes, elle réussit à se reprendre et à quitter le bureau. Elle essaya de ne rien laisser paraître lorsqu'elle croisait d'autres personnes. Mais à la fin, tandis qu'elle approchait de la sortie de l'établissement, elle se mit à courir sans même en avoir vraiment conscience pour rejoindre le parking. Elle voulait rentrer chez elle au plus vite, là où elle serait en sécurité. Arrivée à sa voiture, elle s'engouffra précipitamment à l'intérieur et se pressa d'attacher sa ceinture puis de démarrer avant de s'en aller.

Elle roulait vite, bien plus vite que la limite de vitesse autorisée en agglomération, mais elle s'en fichait ; la seule chose qui comptait à cet instant, c'était de mettre le plus de distance possible entre elle et l'université. Heureusement pour elle, il y avait assez peu de circulation à ce moment-là, et elle ne croisa presque personne le temps de son trajet. Elle arriva chez elle et se gara précipitamment dans l'allée devant son garage, un peu en biais. A peine le moteur eût-il été coupé qu'elle eut l'impression d'étouffer et elle s'empressa de sortir de sa voiture en claquant la portière. Elle prit quelques minutes pour reprendre son souffle et calmer les battements de son cœur qui n'avaient cessé d'accélérer. Elle ferma les yeux quelques secondes, puis se dirigea vers sa maison calmement, malgré tout pressée de pouvoir enfin s'y réfugier. Mais ce ne serait pas pour tout de suite, car quelqu'un l'interpella soudainement.

-Robin ? Est-ce que tout va bien ?

Elle ne parvint pas à cacher son sursaut de surprise, et elle se tourna vers Ace dont elle avait reconnu la voix. Il était à quelques mètres d'elle, sur le trottoir, la regardant fixement, étonné et inquiet, tenant à la fois un sac de courses et la main de Haiko. Le petit garçon semblait ne pas comprendre pourquoi son père s'était arrêté subitement pour interpeller leur voisine. Robin hésita un instant, se mettait à trembler, et s'approcha lentement de Ace. Le pompier fronça les sourcils et donna doucement ses achats à son fils en lui demandant de rentrer à la maison et qu'il allait bientôt arriver. Obéissant, Haiko fit ce qu'on lui avait demandé sans poser de questions. Une fois son jeune garçon partit, Ace prit doucement les mains de Robin dans les siennes et la regarda droit dans les yeux.

-Dis-moi ce qui ne va pas...

-Je...il...il s'est passé quelque chose...

-Tu as été agressée ? Quelqu'un s'en est pris à toi ?

Il voyait une immense peur et une profonde douleur visibles sur les traits de son amie. Avec tout ce qu'il arrivait ces derniers temps, il s'attendait au pire ou tout du moins il croyait que c'était le cas. Mais malgré toutes les hypothèses qui lui traversaient l'esprit, il fut choqué par les quelques mots qu'elle parvint à prononcer.

-J'étais avec Spandam...

-Comment ? Spandam ?

-Oui et il...il m'a enfin il a essayé de...

Elle avait du mal à parler, et Ace pensa que s'exprimer au milieu de la rue là où pouvaient trainer des oreilles indiscrètes en étant une des causes. Il tapota doucement une de ses mains pour qu'elle arrête là sa phrase et lui parla d'une voix se voulant la plus apaisante possible.

-Franky est là ?

-Non.

-Alors viens chez moi.

Robin eut envie de refuser, se doutant qu'il devait avoir des choses à faire, pour une fois qu'il ne travaillait pas. Mais son besoin de ne pas se retrouver toute seule la poussa à accepter son offre d'un hochement de tête. Ace tendit un de ses bras dans sa direction, l'invitant à s'y accrocher le temps du trajet, aussi court fut-il. Elle apprécia cela. En arrivant chez Ace, il l'invita à prendre place à la table de la cuisine. Il lui prépara un chocolat chaud, qu'elle but tranquillement le temps que le jeune homme range ses courses.

Il s'assit ensuite en face d'elle, sans dire un mot, car c'était à elle de prendre la parole en premier. Il fut un peu surpris lorsque la première chose qu'elle lui demanda fut de lui parler de l'époque où il était marié à Spandam. Il ne lui donna cependant qu'une réponse vague, parlant plus du début que de la fin de leur relation. Au fil de l'évocation de ses souvenirs, le visage de son amie resta neutre, une façade pour ne pas laisser entrevoir les raisons de son interrogation. Lorsqu'il s'arrêta quelques secondes en se demandant s'il avait dit ce qu'elle voulait savoir, elle prit la parole et lui raconta lentement sur un ton un peu hésitant ce qui lui était arrivé plus tôt. Elle avait tellement besoin de s'épancher qu'elle tenta même de lui expliquer pourquoi elle n'avait pas parlé de tout ça à son mari.

Ace l'écouta attentivement, son cœur se serrant un peu plus à chaque mot prononcé. Il n'arrivait pas à croire que l'homme qu'il avait connu, qu'il avait aimé et épousé, était capable de commettre de telles atrocités. Ça ne correspondait pas aux souvenirs qu'il avait de lui. Quand bien même les derniers mois avaient été difficiles, et tout en sachant que Spandam avait beaucoup de défauts, il avait l'étrange impression qu'elle lui parlait d'une toute autre personne. Il était tellement choqué par ce qu'il entendait qu'il ne se rendit pas tout de suite compte qu'elle avait terminé. Face à son silence, Robin se demanda un instant si elle avait bien fait de lui en parler. Elle espérait qu'il n'allait pas se sentir coupable à ce sujet, étant clair pour elle qu'il n'avait absolument rien à voir avec les gestes de Spandam envers elle. Elle chercha ses mots quelques secondes et s'apprêta à reprendre la parole afin de le soulager de toute responsabilité, mais il la coupa d'un ton si sûr de lui qu'elle fut surprise.

-Je vais faire ce qu'il faut Robin. Il ne te touchera plus.

-Ace, ce n'est pas...

-Tu ne dois pas te retrouver seule avec lui à nouveau. Tu vas rester avec moi jusqu'au retour de Franky.

Doucement, il prit l'une de ses mains dans les siennes et lui fit un sourire rassurant. Un sourire qui s'apparentait à celui d'un grand frère protecteur, et Robin ne put que sourire à son tour. Ace n'était peut-être pas parfait, mais tout le monde rêverait de l'avoir comme frère aîné.

-Merci infiniment...

Elle avait de nouveau la sensation de pouvoir pleinement respirer. Elle ne savait pas ce que comptait faire Ace, et ignorait comment elle devait elle-même régler cette histoire, mais elle préféra ne pas y penser pour le moment. Ce n'était pas son genre de remettre les choses à plus tard, elle avait même tendance à gronder gentiment Franky lorsqu'il le faisait trop souvent. Mais parfois ça faisait un bien fou.

Une brève sonnerie retentit soudain : celle du téléphone d'Ace. Il avait reçu un message. Il sortit l'appareil de sa poche et le déverrouilla afin de prendre connaissance du SMS. Il écarquilla les yeux et se leva d'un bond, surprenant Robin qui se douta immédiatement que quelque chose de grave était arrivé.

-Que se passe-t-il ?

-C'est un message de Luffy. Il me dit que Marco est à l'hôpital !


-D'après les informations que Shanks a recueilli, cet entrepôt est la planque de Demalo Black.

Cachés derrière des caisses de bois entreposées sur la jetée, Marco et Zoro attendaient le bon moment pour se faufiler dans le supposé QG de leur cible. Ils n'étaient que d'eux, car puisqu'il valait mieux pour eux qu'ils ne se précipitent pas, l'objectif était de réunir un maximum d'informations pour organiser une plus grande opération prochainement. Ils tentaient une autre approche afin d'éviter de refaire la même erreur que la première fois.

Marco était assez inquiet à l'idée que ça se passe mal. Outre le fait qu'il ignorait s'ils auraient à nouveau une telle occasion, le souvenir de l'échec cuisant de leur dernière tentative restait profondément encré dans leur esprit. Il tourna la tête vers Zoro à côté de lui et baissa lentement les yeux vers la partie visible de sa poitrine qui laissait entrevoir sa cicatrice au torse. Il ne pouvait pas le laisser passer à côté de la mort une seconde fois. Il était responsable de lui et il avait bien l'intention de le protéger.

-Allons-y.

Ils entrèrent par une petite porte à l'arrière et progressèrent sans faire le moindre bruit. Ils firent d'abord un repérage des lieux, Marco prenant des notes pour reproduire un plan suffisamment précis une fois de retour au poste. Ils firent également quelques photos bien qu'elles furent d'assez mauvaise qualité Cependant, même s'ils avaient parcourus presque tout l'entrepôt de long en large, ils n'avaient croisé personne, et cela les intriguait grandement. Pourquoi était-ce si peu surveillé ? Comment pouvaient-ils se déplacer aussi facilement dans leur planque ?

-Tu crois qu'on s'est trompé, chuchota Zoro.

-Ça m'étonnerait...essayons de trouver un bureau où quelque chose dans le genre. Faudrait mieux ne pas s'attarder ici.

Ils poursuivirent leur route dans l'espoir de trouver un bureau remplit de documents révélant les ressources et éventuellement les futures actions du gang. Pourtant, toutes les pièces qu'ils visitaient étaient ou bien complètement vides ou bien ils ne pouvaient y trouver que des informations futiles. A chaque seconde qui passait, ils trouvaient la situation de plus en plus étrange. Quelque chose clochait, c'était certain.

-Si tu veux mon avis, chuchota Marco, il n'y a plus personne ici.

-Tu penses qu'ils ont changé de QG ?

-Ils ont dû se dépêcher de changer d'endroit dès que Shanks a attrapé l'un des leur. Ils savaient qu'on finirait par venir ici.

-On trouveras rien alors. On ferait mieux de s'en aller et chercher une nouvelle piste.

Marco hocha la tête et donna une tape amicale sur l'épaule de Zoro. Il avait senti dans son ton qu'il était déçu et fâché par la tournure des évènements. Malheureusement, pour ce type d'enquête, ce n'était pas forcément quelque chose de rare. Néanmoins, c'était la deuxième fois que ce gang se cachait dans un port ; s'ils trouvaient pourquoi, ils auraient de précieux indices pour affiner les recherches.

Ils revinrent sur leur pas en direction de la porte par laquelle ils étaient entrés. Ce fut lorsqu'elle entra dans leur champ de vision, tout au bout du couloir, que Zoro éprouva un étrange mauvais pressentiment. Comme s'ils étaient observés. Il tourna la tête et vit une ombre se reflétait sur la porte ouverte de l'une des pièces devant laquelle ils venaient de passer. Il se retourna et porta une main à son arme. Son geste attira l'attention de Marco qui se retourna également et repéra l'ombre à son tour. L'ennemi comprit qu'il l'avait repéré et sorti de sa cachette, visant Zoro de son arme. Personne d'autre ne bougea, Marco en conclut qu'il était seul. Sans doute était-il sensé s'assurer que son chef n'avait rien oublié et que les policiers ne trouveraient rien qui puisse leur porter préjudice. Zoro tenta de tirer et s'aperçut que son arme était déchargée, alors en grognant il s'empressa de remettre des balles. L'homme saisit sa chance avant que Marco ne puisse le menacer de son arme. Tout ce que pu faire l'agent de police, c'est protéger Zoro en prenant la balle à sa place.

-Marco !

Le blond tomba à genou, tenant son ventre alors que son uniforme s'imbibait un peu vite de sang. Les dents serrées, Zoro visa l'autre homme et lui tira dans la cuisse à deux reprises sans hésiter. Le type s'effondra, faisant tomber son flingue qui glissa loin de lui. Tout en le surveillant du coin de l'œil, Zoro s'accroupit auprès de son ami pour constater les dégâts.

-Merde, faut t'emmener aux urgences immédiatement !

En essayant de faire attention, il redressa Marco en passant un bras autour de ses épaules dans l'optique de le mettre debout. Il commença à prendre la direction de la sortie, saisissant son téléphone de l'autre main pour prévenir les urgences. Le criminel à terre se mouva à son tour, et Zoro eut des sueurs froides en le voyant ouvrir sa chemise, dévoilant un système explosif qui n'attendait plus qu'à être déclenché.

-Vous pensiez qu'on allait vous laisser partir, ricana-t-il en lançant le compte à rebours.

-Fils de pute !

Faisant fi des dommages qu'il pourrait infliger à Marco, il s'empressa de le relever et de marcher aussi vite que possible pour sortir d'ici. Bien que faiblement, Marco essaya de le repousser.

-Laisse-moi et barre-toi d'ici Zoro...

-Même pas en rêve !

-Aucun de nous ne s'en sortira si je te ralentis ! Dépêche-toi !

-La ferme et met toute ton énergie à rester en vie !

Comme ils n'avançaient pas et que l'autre rampait jusqu'à son arme, Zoro prit Marco sur son épaule et sprinta jusqu'à la sortie, défonçant la porte d'un coup de pied qui manqua lui faire perdre l'équilibre. Au moment où l'explosion retentit dans tout le bâtiment, les deux policiers se jetèrent à l'eau dans l'espoir de ne pas être touchés. En tenant Marco d'un bras, Zoro nagea jusque là où ils avaient laissé leur voiture. L'eau de mer piquait affreusement la blessure de Marco, mais il avait appris à endurer toutes ces années. Une fois sortis de l'eau, Zoro appela Shanks et activa le haut parleur pour tout lui raconter tandis qu'il se déshabillait afin de donner le haut de son uniforme à Marco pour qu'il fasse un point de pression sur sa plaie. Avant de raccrocher, Shanks lui assura que des troupes seraient là d'ici quelques minutes. Il appela ensuite l'hôpital pour prévenir de son arrivée et leur demander de se préparer à prendre en charge Marco. Ce dernier respirait lentement et tourna son regard vers Zoro.

-Je te remercie de m'avoir aidé...mais tu aurais dû penser à toi d'abord...

-Tu devrais pas parler Marco.

-La dernière fois déjà en sauvant quelqu'un tu as failli y rester.

-Tu as pris cette balle à ma place Marco. J'allais pas te laisser crever là-bas.

-Je voulais pas que ça se reproduise.

-Ferme-là maintenant.

Zoro comprenait bien la culpabilité de Marco quant à ce qui était arrivé lors de l'intervention précédente. Shanks aussi s'en voulait et ça juste parce que Zoro était sous leur commandement. Ils n'en avaient jamais parlé, mais Zoro l'avait vu dans la façon qu'ils avaient de le regarder parfois. Lui ne leur en voulait pas parce qu'il prenait ses propres décisions. Mais voir Marco dans cet état lui faisait comprendre un peu mieux pourquoi ils se sentaient coupables.

Quand ils arrivèrent à l'hôpital et que des brancardiers l'emmenèrent vers le bloc opératoire, Luffy s'apprêtait à rentrer chez lui, ayant terminé sa journée de travail. En voyant Marco se faire emmener et Zoro raconter à un médecin ce qu'il s'était passé, il sentit son cœur se serrer et il s'empressa d'envoyer un message à Ace pour le prévenir de l'état de Marco. Il alla ensuite chercher dans les vestiaires un t-shirt afin de le prêter à Zoro puisque ce dernier ne pouvait pas remettre le haut de son uniforme en l'état.

En attendant des nouvelles de son collègue, Zoro était assit sur une des chaises de la salle d'attente. Il avait un gobelet de café dans les mains, mais il avait la gorge bien trop nouée pour parvenir à le boire. Quand il entendit la voix de Luffy appeler son nom, il redressa la tête brusquement dans la direction du brun. Pour une raison qu'il ignorait, il fut soulagé de le voir. Luffy vint s'asseoir à côté de lui et tendit le t-shirt dans sa direction.

-Tiens, tu devrais le mettre avant d'attraper froid.

-Je n'attrape jamais froid. Mais merci, j'apprécie...

Il posa son café le temps d'enfiler le vêtement ; il était un peu petit pour sa morphologie, pourtant ce n'était pas lui qui mettait Zoro mal à l'aise. Il but une gorgée du café qu'il trouva vraiment insipide, aussi le délaissa-t-il définitivement. Il passa une main sur son visage et prit une grande inspiration avant de tourner son regard vers Luffy. Il le surprit en train de le détailler de la tête aux pieds, et l'agent devina rapidement qu'il cherchait d'éventuelles blessures sur son corps. Cette attention le fit sourire.

-J'suis pas blessé Luffy.

-Pas physiquement en tout cas.

-On peut dire ça...

-Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

-Ils avaient changé de planque avant notre arrivée. Mais un type nous attendait et il a tiré sur Marco avant de se faire exploser.

C'était la première fois qu'il avait à faire à ce genre de "stratégie" de la part d'une personne s'opposant à la police. La dernière fois, l'explosion avait causé plus de dommages mais était dû à un accident, et non à un homme mettant fin à ses jours volontairement pour attirer deux autres personnes dans la mort avec lui. Psychologiquement, l'impact n'était clairement pas le même.

-Tu as dû aider Marco à sortir, non ?

-Ouais, je l'ai porté...

-Tu lui as sauvé la vie alors. Puisque vous êtes revenus en vie tous les deux ce n'est pas totalement un échec.

Zoro lui adressa un petit sourire et hocha la tête. C'était une bonne façon de voir les choses. Et puis, c'était Law qui avait pris en charge l'opération de Marco et il lui faisait totalement confiance pour remettre son partenaire sur pieds.

Il fallut à peu près une vingtaine de minutes à Ace pour arriver, accompagné de Haiko et Robin. Il avait l'air très inquiet, et il se précipita vers Zoro dès qu'il le vit. Par égard pour Haiko, le policier ne donna pas trop détails en expliquant ce qu'il s'était passé et il essaya de les rassurer du mieux qu'il pouvait quand bien même il n'avait jamais été très doué pour ça. Robin s'en sorti nettement mieux que lui.

Ils restèrent là au moins deux bonnes heures à attendre, parfois en silence et parfois en discutant d'un sujet peu intéressant mais qui avait le don de leur changer les idées. Puis Law vint les prévenir que l'opération s'était bien déroulée et que ça ne laisserait qu'une petite cicatrice à condition qu'il prenne un peu de repos les prochains jours le temps de la cicatrisation. Il les autorisa ensuite à aller le voir en faisant attention de ne pas le brusquer.

En les voyant tous entrer dans la chambre qu'on lui a attribué le temps de son séjour, un sourire attendri naquit sur les lèvres de Marco qui tenta de se redresser autant que possible sans faire sauter les points de sutures. Il ne put retenir une petite grimace cependant. Haiko se précipita vers lui et demanda d'une petite voix la permission de monter sur le lit. Ace s'apprêta à refuser de peur que ça ne gène Marco, mais ce dernier répondit le premier et donna son autorisation au jeune garçon. Luffy sourit et poussa Ace jusqu'à la chaise à côté du lit pour le forcer à s'asseoir. Puis il déclara que Robin, Zoro et lui allaient chercher des boissons et il entraîna les deux personnes mentionnées hors de la pièce.

-J'ai l'impression qu'il voulait nous laisser seuls, rit Marco.

-C'est pas qu'une impression, grogna Ace. Mais dis-moi comment tu te sens ?

-Bien je t'assure. Je suis sûr que je pourrais reprendre le boulot dans trois jours.

-Ça va pas non ?! Faut que tu te reposes !

Marco rit et caressa les cheveux de Haiko qui s'était couché à côté de lui en posant sa tête sur les genoux du policier. De son autre main, il entremêla ses doigts avec ceux de Ace et le tira un peu plus près de lui.

-Vous serez là pour veiller sur moi tous les deux ?

Il avait presque murmuré cette demande. Haiko avait déjà fermé les yeux et était sur le point de s'endormir. Les deux hommes se regardèrent tendrement dans les yeux. Ace lui répondit sur le même ton et avec un sourire bienveillant.

-Oui bien sûr.


-Une balle dans le bide ?! Sérieux ?!

-Parle moins fort sinon je te raconte plus rien...

En soupirant profondément, Law laissa tomber dans le chariot le paquet de pâtes qu'il tenait à la main et avança vers le prochain rayon. Kid le suivit de près en poussant leur cadis. La supérette avait récemment rouvert ses portes et la sécurité avait été renforcée par la mise en place de plus de caméras et la présence d'agents. Malgré tout depuis les événements de l'autre fois, Kid était intransigeant sur le fait qu'il n'était plus question que l'un d'eux fasse les courses tout seul. Même si c'était pour pas grand-chose, ils devaient le faire ensemble quand bien même cela forçait le roux à fermer son garage plus tôt. Law aurait pu répliquer que ça ne changerait pas vraiment les choses, il préféra ne rien dire. D'abord, si ça aidait son fiancé à être plus serein, ce n'était qu'un petit prix à payer. Et puis comme ça il n'était pas obligé de porter les sacs.

-C'est quand même pas rien. Il faisait quoi pour finir dans cet état ?

-Aucune idée. J'aurais dû lui poser la question pendant que je lui charcutais le ventre.

-Pourquoi t'es toujours aussi sarcastique ?

-C'est le monde qui me force à être comme ça.

Il se pencha vers les conserves, souriant lorsqu'il entendit les marmonnements mécontents de Kid dans son dos. Malheureusement, ils furent vite remplacés par un son beaucoup plus agaçant et tellement aigüe qu'on ne le croirait pas provenant d'un être humain. Et ce qui rendait ce rire encore plus insupportable, car c'était bel et bien un rire, c'était qu'il provenait d'une personne que Law avait espéré ne jamais revoir. Il se redressa brusquement et se tourna vers le "parasite" qui venait de les rejoindre.

-Porche...

-Ça alors, quelle coïncidence de vous croiser ici...

Connaissant l'animal, y avait peu de chances que ce soit véritablement une coïncidence. Law lança un peu brutalement une boîte de conserve dans le cadis, et ce geste de colère n'échappa pas à Kid.

-Comment allez-vous depuis la dernière fois ?

-Toujours ensemble, grogna le chirurgien.

-Surprenant !

Elle ricana et s'approcha de Kid avec un petit sourire aguicheur. Kid la regarda comme s'il ne la voyait même pas.

-Je voulais te remercier encore une fois pour être venu réparer ma voiture l'autre fois...

-Tu pourrais peut-être ma payer dans ce cas.

-Bien sûr. Qu'est-ce que tu préfères comme moyen de paiement ?

Elle n'avait pas été perturbée par le ton sec que Kid avait employé. Seul Law en avait été surpris. Les fois précédentes, Kid n'avait pas paru avoir de l'animosité envers elle. Alors à moins qu'ils se soient revus depuis l'intervention à domicile à laquelle il avait accompagné son fiancé, ce dont il doutait fortement, le roux devait être fâché de voir que la présence de la jeune fille déplaisait à Law.

-Je préfèrerais que tu m'envoies un chèque par la poste.

-En fait je voulais dire...

-Va falloir qu'on te laisse, Law et moi avons des projets pour ce soir. Ça serait bien qu'on ne s'éternise pas ici.

Il tourna le cadis dans l'autre sens de sorte à pouvoir tourner le dos à Porche, puis commença à s'éloigner. Il ne prit pas la peine d'attendre Law sachant que ce dernier n'allait pas se faire prier pour vite le suivre. Malgré tout, le brun prit son temps pour le rejoindre, et ce non sans jeter un regard lourd de fierté envers sa rivale.

Ou plutôt son ancienne rivale, car elle venait de subir un échec cuisant. Et ça, c'était la meilleure fin possible.


L'auteur se demande pourquoi elle n'a pas encore tué Spandam.

Je suis vraiment désolée pour la très longue attente ! (depuis avril ?! qu'est-ce que c'est que ça ?!). Je me suis dépêchée de finir ce chapitre aujourd'hui parce que je ne serai pas dispo du reste de la semaine et je voulais pas vous faire attendre jusqu'à la semaine prochaine.

Du coup, la scène de Kid et Law est très petite...

En revanche, je suis très très fière de la scène de Robin !

Cependant, les thèmes lourds font que j'ai un peu peur de la réception de ce chapitre. Alors vraiment n'hésitez pas à me faire vos remarques qu'elles soient positives ou négatives !

En espérant que ça vous a plu !