Auteur : Epayss

Titre: Les loups se cachent pour mourir


Renouvellement du cycle

La neige disparut à l'arrivée du mois de mars. Les bourgeons sortirent de leur dormance, ravivés par la sève montante des arbres. Les premières fleurs, petites et chétives, percèrent le sol encore dure, quêtant un peu de chaleur et de réconfort après le long hiver. On revit des oiseaux, s'attardant dans la plaine à la recherche de matériau pour leur nid. Le paysage auparavant figé se ranima comme le lac sortait de sa prison de glace et recommençait à se remplir petit à petit, au gré des fontes des hauts sommets. Sur ses vaguelettes scintillaient les rayons d'un pâle soleil de printemps. Mais un soleil qui faisait chaud au cœur, qui malgré le froid ambiant, réchauffait la fourrure et éblouissait les pupilles. La plaine avait enfin révélé son vrai visage. On aurait presque préféré qu'elle reste recouverte de neige. L'herbe n'avait pas encore repoussé, et on apercevait dans tous ses détails les multitudes d'ossements répartis ça et là sur la terre. Ici une mâchoire, là un morceau de colonne vertébrale, là encore un fémur brisé. Usés pour la plupart par les successions de gel et dégel, les pluies et les éboulis, beaucoup avaient pris une couleur grisâtre ou beige, quand ils n'étaient pas recouverts de boue.

Harry au début était très embarrassé de devoir marcher sur tous ces os, les faisant craquer sous ses pas. Il y en avait tant dans certaines zones qu'il était impossible de les éviter, malgré la finesse de ses pattes de loup-garou. Au moins dans la forêt il y en avait beaucoup moins.

Avec la venue des beaux jours, Harry passa de longues heures à inspecter la vallée dans ses moindres recoins, chose dont il n'avait jamais eu le désir pendant les semaines hivernales qu'il avait passé. Il était maintenant temps de sortir un peu, tant qu'il était encore pleinement un loup-garou – c'était ce que lui avait conseillé son ami loup. Il avait ainsi appris à maîtriser les pentes abruptes et à braver les vents des hauteurs ; à se trouver des places de choix sur les branches basses de certains arbres, et à se laisser caresser par les rayons passant entre les branches encore dénudées ; à repérer les fameux arbres fruitiers que Carin et le loup avaient plantés. Beaucoup étaient encore bien trop jeunes pour donner une nourriture substantielle, mais les premiers qui avaient été planté avaient à présent une taille tout à fait raisonnable, et donneront des fruits dans quelques semaines.

Prochaine Pleine Lune...

Elle allait se lever tôt cette fois-ci. La nuit venait tout juste de tomber quand Harry sentit les premières douleurs au niveau de sa poitrine. De gros nuages sombres lui masquaient la Lune, et déversaient une pluie glacée et cinglante. Qu'importe le temps, Harry avait décidé que cette nuit, il allait faire son choix, et prier pour que la Lune l'entende.

Quand la douleur s'intensifia, il tâcha de faire le vide dans son esprit pour éloigner la douleur. Le tout était de rester calme, de ne pas succomber à la folie et la douleur.

« Tout ça c'est dans ta tête. Tu ne souffres pas, c'est dans ta tête. » se répétait Harry.

Il gardait son attention toute tournée vers le ciel, ses yeux perçant les cieux comme pour défier la Lune qui s'y cachait. Comme s'il voulait lui montrer qu'il n'avait pas peur.

Il resta immobile au centre de la prairie, sous la pluie battante, les poils collés à ses os et les pattes s'enfonçant dans la boue. S'il n'attrapait pas une pneumonie le lendemain, il aurait de la chance. Quoique, la pneumonie n'existait peut-être pas chez les loups-garous.

De longues minutes passèrent, et Harry sentait le pouvoir de la Lune s'accroître au fur et à mesure. Mais il résistait. Pas question de fuir, l'idée de retirer la Pierre pour se soustraire à la douleur ne lui passait même plus par la tête. Il savait qu'il pouvait vaincre. C'est alors que la pluie s'arrêta soudainement, et le temps de cette accalmie, les rayons de l'astre apparurent dans une trouée, un halo de lumière blanche l'entourant, la faisant paraître plus imposante encore.

« Te voilà enfin. » se moqua Harry dans son for intérieur.

Il prit la Pierre entre ses pattes antérieures, se soulevant légèrement sur les postérieures pour se maintenir en équilibre, et, tirant sur la chaîne, tendit la Pierre vers la Lune.

« Fais-moi redevenir un être humain ! Je t'en conjure Pierre de Lune, je n'ai peut-être pas la pouvoir de te renvoyer à ta Mère, mais toi tu as le pouvoir de me rendre ma liberté ! »

Tu peux aussi être un loup à part entière.

« Je veux redevenir un homme ! Je veux rentrer à Poudlard, revoir mes amis. Toutes mes attaches sont là-bas. Ron, Hermione, Dumbledore… J'ai promis de revenir. Et je suis prêt à subir la transformation inverse. »

Un nuage passa devant la Lune, et Harry se retrouva dans l'obscurité, piétinant sur place pour rester en position debout, ses muscles dorsaux tiraillant de plus en plus en raison de l'effort fourni. Mais il resta ainsi. Il avait l'impression qu'il ne fallait pas rompre le contact et attendre une réponse. Seulement il fallait attendre que la Lune reparaisse. Ce qu'elle fit quand le nuage se fut évanoui.

Soit. Si c'est ce que tu désires.

La Pierre, illuminée pleinement par l'éclat de sa Mère, envoya alors un premier pulse dans les pattes de son hôte. Harry sentit comme une décharge électrique parcourir les nerfs de ses pattes antérieures, puis la nausée envahit son cœur. Il fut obligé de lâcher la Pierre et de revenir sur ses quatre pattes, la sensation désagréable gagnant progressivement tous ses membres. La Pierre irradia une seconde fois, envoyant une nouvelle nausée à Harry. Cette fois Harry ne sentait plus de douleur, mais il avait l'impression de perdre tous ses repères. La tête lui tournait, et c'est quand il sentit des cailloux s'enfoncer dans ses flancs qu'il sut qu'il était tombé au sol. Au moins il ne pourrait pas tomber plus bas, et ne fit pas d'effort pour se relever.

Bientôt il sentit comme si ses membres se paralysaient. Et un froid glacial l'envahit, accentué par la pluie qui s'était remise à tomber.

Il ne sut combien de temps il resta là, couché dans la boue. Mais quand la Lune se fut couchée, toute la pression qui s'exerçait sur lui se relâcha, et il put se relever. Il se sentait plein de courbatures et tout son corps lui était douloureux, mais c'était déjà moindre qu'avant.

On était en pleine nuit encore et la pluie avait été remplacée par une fine bruine.

Le loup-garou promena son museau sur chacun de ses membres. Hormis la saleté de son pelage, il était… comme avant. Pas un changement. Est-ce que sa demande avait fonctionné ? Il semblait que oui puisque la Pierre avait réagi, mais… « Attendons quelques jours avant de conclure quoi que ce soit. » se dit-il.

Harry profita de la proximité du lac pour prendre un rapide bain qui le débarrassa d'une bonne partie de la terre qui avait imprégné ses poils. Puis, transit de froid, il se dépêcha de rentrer dans la grotte pour se sécher au coin du feu. En le voyant revenir, le loup ouvrit juste un œil puis retourna à ses rêves.

Le lendemain ça n'allait pas mieux, et de même les jours suivants. Harry se sentait malade, courbatu, fiévreux même et du coup laissait toutes les tâches habituelles à son ami loup. Celui-ci n'en faisait rien, car il avait déjà connu ça chez Carin. Fort heureusement les premiers légumes et féculents furent bientôt récoltables, et c'était nettement moins fatiguant que la chasse. Notamment de petites pommes de terre que le loup s'efforçait d'entretenir pour en avoir maximum une fois le printemps arrivé. Ce n'était pas tâche facile – il avait dû perdre 60 de ce qu'ils avaient planté avec Carin, mais au moins il y en avait suffisamment pour pouvoir faire quelques repas avec de temps à autre. Un peu d'eau dans une casserole, le tout posé sur le feu, et ça cuisait tout seul. Ce n'était certes pas excellent mais ça changeait de la viande, et les deux loups s'accoutumaient très bien de ce changement. Un peu de sel, beurre ou crème fraîche aurait accompagné le plat à ravir mais il fallait se contenter de ce goût plutôt fade mais nourrissant. De temps en temps, le loup ramena quelques pommes à la grotte, à l'attention d'Harry. Mais à l'instar de son compagnon, le loup-garou ne parvenait pas à digérer le fruit, sans compter le goût infecte qu'elles avaient sur sa langue.

Les premiers changements phyiques ne furent visibles que deux semaines après la Pleine Lune de Mars. Des oreilles moins mobiles, des pattes moins agiles, une queue un peu plus courte. Bientôt Harry savait qu'il ne pourrait plus se déplacer du tout, cloué au sol par les modifications de son anatomie, jusqu'à ce que de nouvelles jambes soient formées.

Le loup s'occupait bien de lui, même s'il avait des soucis à se procurer de la viande. Les courses folles dans la forêt n'étaient plus de son âge. Mais par nécessité, il arrivait tout de même à capturer quelques animaux. Avec la sortie de l'hiver, le gibier était en effet devenu plus nombreux, et les jeunes et fragiles animaux commençaient à apparaître hors de leur abri.

Puis Avril vint, avec le retour partiel d'un soleil radieux, souvent entrecoupé par de grosses averses. Néanmoins la vallée s'était parée aux couleurs du printemps. Des fleurs avaient poussé entre les os du cimetière, l'herbe avait finalement repoussé et proposait ainsi une belle prairie d'herbes folles, et puis les feuilles des arbres étaient apparues, et on pouvait maintenant entendre leur bruissement quand le vent venait les frôler. Malheureusement Harry ne pouvait pas trop profiter de cette jolie période. Ses promenades, au début raccourcies, étaient maintenant inexistantes du fait de sa paralysie, et de toute façon la beauté du nouveau paysage ne parvenait pas à effacer la douleur qui le parcourait à chaque seconde, et un peu plus la nuit quand la Lune était levée. Et beaucoup plus quand la Pleine Lune était revenu en plein milieu du mois d'Avril.

Cela s'était passé comme à la précédente. La pression de la Pierre s'était accrue au fur et à mesure que la Lune s'était levée dans le ciel. Sauf que cette fois-ci, Harry était resté dans la grotte. Et son ami avait veillésur lui, tentant de répondre à chacune des demandes de son compagnon paralysé. La nuit avait duré très longtemps, la Lune ne semblant jamais vouloir s'évanouir derrière les montagnes. Cependant, dès l'instant où Harry avait fermé les yeux et s'était endormi de fatigue, il avait oublié tout de la douleur et la Pierre avait profité de la moindre résistance de son corps pour augmenter sa pression de métamorphose.

L'énergie que lui octroyait la Lune, elle l'utilisait pour réaliser la transformation inverse, et plus le corps était en bonne santé et opposait une faible résistance, plus la transformation était aisée à réaliser.

Harry ne garda qu'une mémoire très floue et sans souvenirs précis de cette période.


Quand il se réveilla le lendemain, son premier réflexe fut de porter sa patte à ses yeux, pour se soustraire à la lumière qui l'éblouissait. Il s'étonna moins de pouvoir bouger à nouveau librement que de sentir ce qui ressemblait à des doigts se poser sur son museau.

Le loup-garou se redressa et s'assit. Pas immédiatement, car il perdit l'équilibre plus d'une fois avant de parvenir à s'asseoir sur son séant. La raison était plus qu'évidente : il n'avait plus de queue à l'extrémité de sa colonne vertébrale, et la perte du membre était assez perturbant. Mais il n'y avait pas que ça. Ses pattes arrières avaient subi un allongement conséquent, et il devina vite qu'il pouvait à présent s'asseoir sans que les pattes antérieures ne touchent terre. Sa figure aussi avait changé : un museau sacrément raccourci, et la tête qui n'était plus dans le prolongement du corps, mais avait une position humaine.

Mais bien sûr, il n'était pas un humain. D'ailleurs, à se regarder comme ça, Harry se disait qu'il ne devait pas ressembler à grand-chose. A moitié-loup, à moitié-humain. Peut-être même un peu plus humain que loup maintenant, malgré la pilosité aiguë.

Son compagnon se réveilla quelques minutes après, et Harry perçut le contentement sur son visage.

« Tu peux bouger ? »

Harry hocha la tête.

« Alors on va chasser ? »

A nouveau hochement de tête, puis franc sourire sur son visage à demi humain.

Trois semaines plus tard…

Je suis un peu plus humain chaque jour. Je me tiens debout. Je n'ai presque plus de griffes. Mon visage ressemble de plus en plus à celui d'Harry Potter. Je suis encore couvert de poil; heureusement, car cela me tient chaud. Je ne peux plus chasser comme avant mais j'ai appris à fabriquer de petits pièges. C'est d'ailleurs indispensable car mon ami ne chasse plus. Il est tombé malade il y a une semaine, et ça le cloue dans la caverne. Alors maintenant c'est moi qui m'occupe de lui. Je lui dois bien ça. Mais je ne suis pas encore aussi doué que lui pour trouver à manger et entrenir le feu – il a manqué de s'éteindre plusieurs fois d'ailleurs. Sinon, que dire… Il pleut souvent ou alors il y a du brouillard. Avec la fonte des neiges le cours d'eau qui traverse la grotte a grossi, mais sans mettre en danger le foyer – ça doit être prévu pour éviter ça.

J'ai gardé mes yeux de loup au fait. Et ma capacité à communiquer avec mon compagnon. Et j'ai enfin retrouvé des nuits calmes, je ne me réveille plus sous le coup des douleurs des transformations que la Pierre me fait subir.

Une semaine de plus…

Le feu s'est éteint. Je n'ai pas pu l'empêcher. C'est pas trop grave puisqu'on n'est plus en hiver mais si mon ami ne se rétablit pas avant que je ne parte, lui rallumer son feu avec ma baguette ne servira à rien, puisqu'il ne pourra pas s'en occuper. Son état empire de jour en jour. J'ai l'impression… que cette fois il ne s'en remettra pas. Je ne veux pas qu'il meurt. Il s'est épuisé à s'occuper de moi quand je ne pouvais pas bouger, et je m'en voudrai de ne pas pouvoir le soigner à mon tour. Je lui donne désormais toutes mes rations de viande. Les autres aliments ont retrouvé un goût normal dans ma bouche, je me contente donc de ce que le loup ne peut pas digérer.

J'ai pu parler un peu avec lui cette après-midi. Il est heureux de me voir en forme. Il dit que je pourrai bientôt rentrer chez moi. Mais je ne peux pas le laisser dans cet état. Il me dit de ne pas m'inquiéter pour lui, mais c'est justement tout le contraire.

Et puis une autre Pleine Lune apparut dans le ciel, une nuit pluvieuse et froide. Ce fut la dernière étape, la finalisation de la lente métamorphose qui visait à me rendre ma forme humaine. Il ne restait plus grand-chose à transformer, et je laissais la Pierre me rendre mes yeux verts et la parole humaine, debout au milieu de la vallée. Et à la fin de la nuit, je sus que j'étais à nouveau moi, Harry Potter. Ces cheveux en bataille, cette forme de visage que mes mains et mes yeux connaissent par cœur, tout était redevenu comme avant. Alors seulement à ce moment-là, j'enlevais la Pierre. Je n'aurai plus à sentir cette lourde chaîne autour de mon cou, et ce poids qui se balançait à chacun de mes mouvements. Dès que je l'eus posée à terre, la Pierre se transforma et redevint ce qu'elle était auparavant : une roche grise, rugueuse et fragile.

J'avais vaincu la maladie, enfin. Toutes ces longues semaines de métamorphose dont je ne me souviens presque rien avaient finalement porté leurs fruits. Le soulagement m'envahit en même temps que la pluie s'arrêtait de tomber. De toute façon j'étais déjà trempé jusqu'aux os, mais c'était une agréable façon de montrer que tout finit par arriver. Après la pluie vient le beau temps, n'est-ce pas ? Ma pluie à moi vient de s'évanouir dans le ciel. Je vais pouvoir rentrer à Poudlard – enfin, quand mon ami sera de nouveau sur pied. Je ne suis plus à une semaine près maintenant. Bien sûr que j'ai hâte de revenir chez moi, mais je ne peux pas laisser un ami seul à la porte de la mort.

Je suis rentré à la grotte, la Pierre de Lune entre les mains. Malgré les lourds nuages qui plombaient le ciel nocturne, je sentais encore la présence de la Pleine Lune, comme un poids sur le cœur, une impression désagréable, mais qui ne me blesserait plus jamais. Il est fort probable que je reste sensible à sa présence longtemps, peut-être toute ma vie.

Je me dépêchais de revenir à l'intérieur de la caverne, transi par le froid et l'humidité. Mais je m'arrêtais immédiatement à l'entrée. Mes yeux avaient changé, et visiblement je n'avais plus la même acuité dans l'obscurité. Cette faille qui constituait l'entrée ne laissait voir qu'un trou noir béant dans la roche. Et évidemment, je n'avais pas pris ma baguette pour m'éclairer. Tant pis, il fallait donc y aller à l'aveuglette. De toute façon je connaissais le chemin par cœur pour l'avoir fait tant de fois, il suffisait que je me laisse guider par mon instinct en restant à quatre pattes. Ca ne m'empêcha pas de me cogner la tête contre les parois, jusqu'à ce que j'accède à la pièce principale. La respiration sifflante de mon ami était le seul bruit audible dans cette partie, et cela me permit d'éviter de lui marcher dessus en rejoignant ma couche.

Après avoir posé la Pierre sur ma couverture, je farfouillais dans mon sac pour trouver ma précieuse baguette. Au murmure d'un « Lumos », une lueur s'illumina à son extrémité et éclaira la grotte d'une lumière chaude.

Je m'approchais alors du loup, couché à quelques pas de ma couche. La peau sous ses poils était brûlante, et il réagit à peine quand je le caressais.

Il ouvrit les paupières et me regarda. Dans ses yeux je pouvais lire la joie et la fierté qui emplissait son cœur. Ce qu'il voyait devant lui, c'était un jeune homme. Plus un loup-garou. C'était le jeune homme qu'il avait recueilli il y a quelques mois, et qui avait réussi à se guérir. Et Harry décela un sourire sur sa face canine.

Puis ses yeux se perdirent dans le vide et le loup reposa la tête sur le sol. Sa respiration se refit bruyante et saccadée, comme s'il peinait à remplir ses poumons.

Harry vint alors remplir une casserole d'eau et y trempa une de ses chaussettes. Cela devrait aider à faire baisser la fièvre de son ami. Il voulut alors poser le linge au-dessus du crâne du loup mais celui-ci le repoussa d'un coup de patte. Le mouvement était faible mais résigné. Harry essaya une nouvelle fois mais sa main fut une fois de plus écartée. Il tenta alors de lui faire manger un morceau de viande crue, mais le loup la refusa.

C'est alors que ce dernier ouvrit encore une fois les yeux, et lançant un regard suppliant au jeune sorcier, lui signifia qu'il voulait qu'on le laisse tranquille.

Harry recula et regarda tristement son hôte. Ainsi il ne voulait plus être soigné. Il acceptait sa maladie et se laissait mourir. Le sorcier éteignit sa baguette, se promettant que le lendemain, il essaierait de faire entendre raison à son ami pour qu'il accepte d'être soigné.

Mais le lendemain, le loup ne rouvrit plus les yeux. Il les avait fermés pour toujours, sur l'image du dernier humain qu'il avait aidé à recouvrer son identité. Pour la première fois Harry prit son petit déjeuner seul dans la caverne. Mais sa gorge nouée l'empêcha d'avaler autre chose qu'un peu d'eau fraîche. Devant ses yeux pleins de larmes, le corps sans vie de son ami gisait, et Harry se sentait affreusement coupable de ne pas avoir pu le soigner à temps. Le loup n'avait pas dû s'éteindre il y a longtemps, au vu de la chaleur qui émanait encore de lui.

« Plus rien ne me retient ici maintenant. Je pourrai partir dans quelques heures. » se résigna le sorcier. « Mais avant, je me dois d'enterrer mon ami. »

Dès qu'il fut prêt il prit sa baguette et souleva le loup. Il était moins lourd qu'il n'y paraissait, les poils gonflant sa maigre silhouette. Il l'emporta solennellement dans la plaine, dans un coin où il n'y avait pas les ossements d'autres loups, sur les pentes herbeuses des montagnes. A cet endroit, on pouvait voir toute la vallée, hormis le renfoncement où se situait l'entrée de la grotte.

La terre gorgée de pluie était molle sous les pieds. Harry ne connaissait aucun sortilège pour creuser la terre. Il utilisa alors une casserole faute de pelle. La tâche n'était pas aisée, mais la terre trempée lui facilitait le travail. Il ne lui fallut pas plus de deux heures pour former un trou suffisamment grand.

Le sorcier se retourna vers le loup. Il lui caressa une dernière fois la tête puis le déposa dans la tombe.

« Voilà ta dernière demeure. Je n'ai jamais pu te remercier pour ce que tu as fait pour moi. Alors voilà, merci pour tout... Je vais pouvoir rentrer... maintenant. » Sa voix s'étrangla sur sa dernière phrase et il ne put s'empêcher de laisser les larmes glisser sur ses joues.


Il avait laissé la vallée derrière lui depuis plusieurs jours déjà. Et il avait l'impression de progresser plus vite qu'avant. Enfin, ce n'était sûrement pas une impression. Il avait gagné en endurance pendant ce long voyage, et puis, il n'y avait plus la neige et le froid pour freiner sa marche. Il se dit qu'il avait peut-être fait une erreur de retirer la Pierre si vite. Il aurait pu l'utiliser pour garder la rapidité et la force du loup. Mais ce qui était fait ne pouvait plus être défait.

Il lui sembla arriver aux environs de Poudlard en pas plus d'une semaine. Mais il devait continuer plus au Sud. En effet il ne rentrait pas dans l'immédiat. Il fallait auparavant faire un détour: il devait transmettre la Pierre. Et il savait exactement à qui. Depuis le début il avait pensé au Professeur Lupin. C'était de toute façon, le seul loup-garou qu'il connaissait.

Il ne savait pas exactement où il habitait, mais il sentait que son instinct parviendrait à le guider jusqu'à lui. La seule indication qu'il avait entendu, une fois, c'était « une maison au nord de la Grande-Bretagne. Dans les montagnes, un endroit bien sympathique ». Cela ne devait donc pas être très loin de Poudlard.


Les jours de marche se succédèrent, sans qu'aucune maison ne se profile à l'horizon. Harry se demandait s'il faisait bien de se fier à son instinct. Ce dernier n'était pas forcément quelque chose de très fiable. Le voyage était d'autant plus long qu'il n'avait plus rien à manger depuis déjà deux jours, et qu'il devait faire de longues pauses dans certains vallées pour trouver un peu de nourriture. Grâce à l'enseignement de son ami, il lui était aisé de trouver les plantes comestibles. Mais cette nourriture était loin d'être suffisante. Il ne servait plus à rien de faire demi-tour de toute façon, alors autant continuer de l'avant.

Deux semaines après avoir dépassé Poudlard, Harry entrevit le premier espoir. Là, à un kilomètre à peine, à moitié cachée par les arbres, il y avait une chaumière. De la fumée s'échappait par la cheminée, et Harry pouvait presque sentir la chaleur qui devait régner à l'intérieur. Lui-même était frigorifié et se sentait fiévreux. Depuis qu'il s'était remis à marcher tôt ce matin, il n'avait cessé de pleuvoir. Le sorcier était à bout de force, mais la vue de la maison le motiva pour avancer encore un peu. Depuis quelques jours il s'était remis à porter la Pierre. Etrangement, il avait l'impression qu'elle lui apportait un peu plus de force, même si elle n'avait pas été activée.

Il s'approcha de la maison, aussi vite que le lui permettait ses jambes fatiguées. Un éclair zébra le ciel au-dessus de lui, suivi presque aussitôt par un grondement effrayant. Harry sursauta sur place, et accéléra le pas. Il était totalement à découvert et risquait donc d'attirer la foudre, malgré la présence de sommets autour de lui. Quelques secondes plus tard la pluie redoubla de violence. Harry glissa sur l'herbe et dévala la pente sur plusieurs mètres. Il se releva péniblement et continua son chemin.

Quelques minutes plus tard, il arriva à destination et s'abrita sous le morceau de toit qui dépassait du mur. Harry s'appuya quelques instants contre la pierre pour reprendre son souffle. Ses jambes tremblaient… non, tout son corps tremblait. Il fallait qu'il frappe à la porte. Il ne savait pas s'il était arrivé au bon endroit mais de toute façon, s'il ne demandait pas ne serait-ce qu'un peu de nourriture, il ne serait bientôt plus capable d'aller bien loin.

Harry se mit en face de la porte, et frappa quelques coups. Il attendit 5 secondes… 10 secondes… luttant contre la fièvre qui le frigorifiait de l'intérieur et le brûlait en même temps… Pour se réconforter, Harry serra fort la Pierre de Lune contre son cœur. Puis il entendit des bruits de pas derrière la porte… Une clé dans la serrure, puis le panneau de bois coulissant sur ses gonds…

Une tête aux cheveux grisonnant apparut par l'embrasure de la porte :

« Harry ? Mais qu'est-ce qui t'est arrivé ? »

Le jeune sorcier aurait reconnu sa voix entre mille. Finalement il avait réussi. Son voyage se terminait ici. Il pourrait bientôt prendre un nouveau départ. Harry enleva la chaîne de son cou, et après un dernier regard à cette dernière, la tendit à l'homme qui se tenait devant lui :

« Tenez professeur, elle est à vous maintenant. »

Dès lors qu'il cessa d'être en contact avec elle, ses jambes de dérobèrent sous lui et il se laissa emporter dans un doux sommeil, de celui qui suit les plus pénibles des maladies.

Fin


Note: Voilà, c'est terminé. J'avoue que je suis plutôt contente d'en avoir fini. J'ai commencé cette fanfiction il y a plus de deux ans, et sur la fin j'avais envie de passer à autre chose, d'autant plus que l'idée de départ était de faire une fiction assez courte, et de la terminer en un an ou moins. J'ai été assez étonnée de voir en arrivant à la fin de l'histoire que l'effet rendu n'était plus le même que celui auquel j'avais pensé au début. Je comptais passer plus de temps sur la guérison et le retour, mais finalement, ça s'est trouvé raccourci. J'espère que ça vous a plu et n'hésitez pas à me donner un dernier commentaire sur cette fic, ça me fera très plaisir.

Je vous remercie d'avoir lu jusqu'au bout et de m'avoir soutenue à travers vos reviews.

Et Après?

Pour l'instant, je vais certainement arrêter d'écrire quelques temps, histoire de me détacher de cette fanfiction. Je pense que d'ici quelques semaines je vais revisiter certaines de mes anciennes fics, à savoir « Créatures Oubliées » et « Où comment Harry se fit encore avoir par le coup du portoloin » qui méritent bien d'être corrigées et améliorées. Ensuite je ne sais pas, à part peut-être pour quelques one-shot ou histoires courtes, je n'ai plus très envie de republier des fanfictions. J'ai un autre projet en tête, qui devrait s'étaler sur plusieurs années. Ce serait un écrit original et non une fanfiction. J'ai très envie d'écrire sur mon propre univers, mais cette fois ce sera quelque chose de sérieux. Et si un jour je parviens à le terminer, je le publierai certainement sur fictionpress.

A bientôt peut-être

Epayss