Chapitre treize : Où l'histoire s'achève
À la télévision, la présentatrice a un petit air affolé. Comme tous depuis ces évènements surnaturels, survenus deux mois auparavant, et dont tous ne cessent de parler. Évènements ayant jeté la lumière sur plusieurs notions effrayantes. La première, la moins dérangeante de toutes, rejoint la paranoïa répendue sur un gouvernement opaque et cachottier. Celui-ci a donné raison aux appeurés puisqu'il a mené en effet en cachette depuis une dizaine d'années des recherches sur... les mondes parallèles. Et voilà l'entrée en jeu d'une notion déjà nettement plus bizarre. Les mondes parallèles, jusqu'à l'avant veille n'existaient que dans les romans de science fiction, et voilà que leur existence non seulement est avérée, mais s'est également révélée être le sujet de recherches secrètes gouvernementales ! Mais le pire... implique, comme il se doit, les mutants. Ceux-ci ont volé le fruit des recherches gouvernementales, ce qui a mené à nul ne sait exactement quoi, à part à la peur.
Logan passe par là et éteind la télévision, que de toute façon personne ne regarde, le salon étant désert. Lui sait ce qu'il s'est passé. Il tente de ne penser qu'au fait que les plans de Magnéto, et ceux du gouvernement, quels qu'ils aient étés, ne pourront pas être mis en œuvre : tout à été perdu dans l'"accident". Personne ne pourra avant des années réussir à ouvrir à nouveau des portails pour atteindre les mondes parallèles. Mais ces pensées, les plus rassurantes possibles, ne l'empêchent pas d'avoir conscience du reste, de tout le reste.
Il passe devant la fenêtre et voit Kitty, Jubes, Colossus, Everett... tous ceux qui étaient présents s'entraîner, à l'écart des autres jeunes, le regard fixe. À présent, ils connaissent le sentiment que pendant des années Marie à été la seule à ressentir dans la fondation Xavier : cette sensation d'être en marge, décalé par rapport aux autres. Ils le sont ensemble, mais est-ce un bienfait ? Ils s'entraînent les uns les autres loin du quotidien, hantés par la vision apocaylptique du jour où ils sont devenus adultes. Les autres jeunes aussi ont peur, bien sûr. Mais ils n'ont pas conscience de cette force surhumaine, qui rôde quelque part dans l'univers, à la recherche de mondes, de toujours plus de mondes pour assouvir son appétit, de cette force dévastatrice qui a déjà dévoré un monde, et plus important encore, Jean. Il refuse d'y penser, et ne peux s'empêcher de toujours y revenir. Ses yeux s'attardent quelques instants encore sur ces anciens adolescents aux yeux cernés, qui s'entraînent quand les autres jouent. Mais il finit par reprendre a route, vers ce qu'il n'aurait jamais cru avoir à faire, vers ce qu'il n'aurait jamais cru accepter de faire…
XXX
Marie soupire, son diplôme de Psychologie à la main. Elle attendait ce jour depuis longtemps, l'imaginait… Elle s'était même représenté la scène, elle courant se jeter dans les bras de Logan pour lui faire partager sa joie à l'idée d'être diplômée, de pouvoir enfin entrer dans la vie active, d'avoir un semblant de vie normale ! La naïveté de cette pensée la fait rire… Une vie normale, quelle ineptie. Ses pensées remontant à deux mois auparavant lui semblent provenir d'une époque bien plus ancienne où elle était plus jeune, plus inconsciente. Autour d'elle, les gens n'ont pas l'air plus réjouis qu'elle, ils s'empressent d'oublier ce qu'ils ont tous entendus ces derniers temps, les phénomènes bizarres. Déjà la majorité rejette les faits, les taxant de canulars inventés par les mêmes paranoïaques à la source des ovnis, du bug de l'an deux mille… Ils ont raison, cela ne sert à rien de s'angoisser, autant continuer à vivre tant qu'on en a l'occasion. Marie aimerait bien faire comme eux. Un rire attire son attention, et elle en reconnait l'émettrice. Cette fille a été sa voisine pendant les cours, elles s'entendaient bien. Elle a l'air heureuse, dans les bras d'un monsieur muscle à l'acnée tenace et aux dents blanches, elle aussi a dû avoir son diplôme. Elle se retourne, voit Marie, lui sourit et brandit fièrement son bout de papier.
- Marie ! Alors, toi aussi ? Avec Sean on va fêter ça, tu viens avec nous ?
- Merci, non. Ma famille m'attend.
- Oh, tu fêtes ton diplôme en famille, tu as bien raison ! J'espère qu'on continuera à se voir, tu as mon numéro ?
Marie lui donne le sien sans hésiter. Elle aussi espère continuer à les voir, elle et son ami, elle aura bien besoin de leur fraîcheur pour atténuer le poids qu'elle sent sur ses épaules. Des gens encore capable de rire, c'est salvateur.
En pénétrant dans le Parc de ce que depuis des années elle considère comme son chez elle, la fondation pour jeunes du professeur Xavier, Marie se sent au bord des larmes. Elle et Logan se sont trouvé un appartement en ville, ils vont y vivre. Elle n'aurait pas pû continuer à habiter ici, plus maintenant. Elle ne sait pas si elle aura le courage d'y remettre les pieds avant un moment. Oh, bien sûr, Logan y viendra tous les jours (il est bien plus fort qu'elle) pour ses cours, et ses amis viendront les voir chez eux, mais elle… Elle ne sait pas. Depuis qu'ils ont trouvé cet appartement et font leurs cartons, elle a toujours les yeux humides devant cette grille.
Elle arrive devant la maison et trouve côte à côte sur les marches Ororo et Kurt. Elle a sa main dans celle de l'Elfe, il a son bras autour des épaules de la Déesse, comme n'importe quel couple d'amoureux dans le monde. Cepandant leurs regards ne sont pas tournés plein d'espoir vers le jour qui se couche, non, ils ne remarquent même pas le changement de luminosité. Leur regard et leurs pensées plongent dans les profondeurs de la terre, comme pour s'y cacher, le plus profondément possible.
Elle sent son cœur se fendre un peu plus en les regardant. Tornade a perdu sa meilleure amie ce jour-là, Kurt a perdu sa mère. Chacun a vu la personne qu'il continuait a aimer malgré les différences, malgré la distance, se transformer en monstre. Seront-ils assez forts pour s'aimer encore dans ces circonstances ? Le poids sur les épaules de Marie s'accentue, encore un peu. Elle pose sa main gantée sur les leurs pour les faire revenir à la réalité et repars avant d'avoir vu leur réaction, par peur d'avoir à nouveau le cœur qui chancelle.
Elle les aime tellement tous les deux, celle qu'elle pouvait choisir comme mentor à la place de la trop parfaite et trop aimée Jean, et l'Elfe qu'elle en est venue à considérer comme un frère... Tous deux se noient dans leurs tâches, lui prend très à cœur son nouveau poste de professeur (depuis les évènements, ils sont en manque de trois professeurs, Marie elle-même a dû quelques fois prêter main forte. Les vacances calmeront quelques peu les choses et à la rentrée Xavier reprendra son poste, ils ne sont donc à la recherche que d'une personne...), et elle ne voit quasiment plus le jour entre ses propres cours et le temps qu'elle passe là où se rend Marie.
Elle reprend sa route, vers ce lieu qu'elle ne connaît que trop bien, et qui ne lui rappelle que trop l'absence de sa précédente reine, l'infirmerie. Hank y règne à présent, et soigne avec succès le Professeur Xavier, qui se remet peu à peu, malgré de fréquentes migraines qui l'inquiètent secrètement. Elle leur sourit à tous deux, et cela la surprend de réussir à suffisemment soustraire à l'attraction terrestre ses lèvres pour leur imprimer ce léger mouvement.
- Logan ?
- Il n'est pas encore arrivé.
La porte s'ouvre, elle le sent derrière elle. Cette chose qui écrase sa tête et sa nuque, qui la fait se voûter s'allège un peu. Il l'effleure du bout des doigts, elle se laisse aller contre lui, il l'etreint plus fort. Elle aimerait fermer les yeux et se laisser glisser dans son amour, oublier le monde extérieur pour l'éternité. Pourra-t-elle un jour cesser de vouloir la lune ?
Un sentiment de répulsion, de peur et de rejet s'empare d'elle au moindre regard vers la porte si blanche du fond de l'infirmerie. Elle et Logan s'y dirigent pourtant, lentement, la main dans la main. Logan y passe beaucoup de temps, presque autant qu'Ororo, un peu moins que Hank. Le professeur n'est pas encore en état de s'y rendre, mais son cerveau si réceptif est déjà trop près de Lui.
Logan presse doucement l'épaule de Marie avant de pousser la porte blanche. La pièce est très lumineuse, la vue est très belle, sur le Parc où les enfants jouent. Dans cette pièce, Jean se reposait entre deux patients, entre deux tâches. Souvent il l'y rejoignait, et eux seuls savent tout ce qui a pu s'y dérouler... Peut-être est-ce à cause de tous ces souvenirs communs que Scott refuse de quitter cette pièce. Marie ne peut se retenir de plisser les narines à l'odeur d'urine. Il va falloir le changer. Scott ne bouge pas plus, dans son coin en dessous de la fenêtre, que la dernière fois qu'elle l'y a vu. Ses yeux, si vifs, si pleins d'autorité autrefois (cette époque lui paraît si lointaine... il ne s'est déroulé que deux mois), sont à présent vides, dénuées de la moindre étincelle d'intelligence. Le professeur n'a pas encore pû s'y essayer suffisement, mais il n'arrive pas à l'atteindre.
Les enfants, et pas seulement eux, ont à présent peur de l'infirmerie. Dans les contes pour se faire peur le soir, on peut déjà entendre des rumeurs sur "la pièce hantée derrière la porte blanche". Les seuls à pénétrer dans cette antre "hantée" régulièrement sont Hank, Ororo et Logan. Marie et Kurt y ont été deux fois chacun. Personne d'autre n'y a mis les pieds depuis que Scott y réside.
Comme les deux autres fois, Marie se sent clouée à l'entrée, tandis que Logan s'approche et tapotte gentiment l'épaule de Scott. Lui, entre tous, s'occuper de Scott ! Mais il le fait bien, et elle sait qu'il s'en sent en quelque sorte responsable (ils ont eut l'amour de Jean en commun).
Elle trouve le courage de s'approcher, sert le corps de son ancien ami dans ses bras et se penche pour murmurer à son oreille.
- Au revoir, Scott.
