Attention, rien ne m'appartient. Les personnages appartiennent à J.K Rowlings et l'histoire à DragonLight

Résumé: En mission dans le passé pour Dumbledore, Harry voit son amant sous un nouveau jour, celui de professeur.

Ratings : R

Correctrice : AnthaRosa et Ishtar.

Attention, c'est un slash: SS/HP

Chapitre quatorze : Une rivière d'âme

Le passé

En sécurité sous la cape d'invisibilité de Lucius, Severus se promenait dans les couloirs à la recherche d'une porte : celle qui le conduirait aux appartements d'un certain professeur. En temps normal, il ne contournerait pas le règlement ainsi mais puisqu'il avait appris que d'autres le faisaient, violer les règles ne le dérangeait plus autant qu'avant : surtout si ça le conduisait au professeur Tyler.

Severus avait réfléchi à ce que Lupin lui avait dit cette nuit-là à l'infirmerie. Peut-être avait-il raison. Il devait faire confiance à quelqu'un et s'il voulait entretenir une relation avec le professeur Tyler, quoi de mieux que d'aller discuter avec lui quand il en avait besoin ? De cette façon il n'aurait à raconter l'histoire qu'une seule fois et à une seule personne.

Il tourna à une intersection et suivit le chemin que le professeur Tyler empruntait toujours pour se rendre à ses quartiers ; du moins c'est ce qu'il pensait. L'autre chemin que Tyler prenait ne conduisait nulle part : on arrivait juste à un vestibule, pas de porte, pas de couloir. Le château était vraiment un endroit étrange. Il en eut la preuve lorsqu'il essaya d'ouvrir la première porte qu'il trouva dans le corridor. Eh bien, essayer n'était pas le mot correct. La porte s'était effectivement ouverte – sur un mur de briques. La suivante était vide et lorsqu'il ouvrit la troisième, toute sorte d'objets de nettoyage tombèrent. Heureusement, il put refermer la porte avant que le balai, le sceau et le reste ne tombent bruyamment sur le sol et ne le trahissent.

Sur la dernière porte du couloir se trouvait une plaque sur laquelle on pouvait lire, « Professeur Octavian Tyler ». C'était si évident qu'il pensa de prime abord que ça devait être une blague. Aucun professeur n'annonçait à ses élèves (dont la majorité ne l'aimaient vraiment pas s'ils ne le détestaient carrément pas) où il dormait. C'était demander une myriade de blagues. Il décida tout de même de prendre le risque et posa ses doigts sur la poignée, recevant une décharge électrique pour prix de ses efforts.

Frapper serait bien sûr plus sage qu'essayer d'entrer subrepticement, surtout si les conséquences étaient pires la seconde fois. Il frappa trois fois et attendit que la porte s'ouvre pour lui permettre d'entrer. Du moins l'espérait-il.

Les secondes devinrent des minutes et pour passer le temps, il joua avec le coin de sa cape. Cette porte était peut-être un piège, mais son instinct lui disait que ça ne l'était pas et qu'il devait attendre – patiemment – qu'elle s'ouvre. Tyler ne laisserait pas quelqu'un devant sa porte toute la nuit. C'était inconcevable. Non ?

Alors qu'il s'apprêtait à faire demi-tour, la porte s'ouvrit sur un professeur Tyler aux yeux bouffis. Severus déglutit, deux pensées lui traversèrent l'esprit. La première est qu'il l'avait réveillé, la seconde suivit de près : il allait mourir dans d'horribles souffrances.

« Enlevez cette cape ensorcelée. Je vous ai entendu à travers cette maudite porte. »

Severus poussa un petit cri, et maudit son indiscipline. Il enleva la cape.

« Bon sang, n'auriez- vous pas pu être au moins une personne normale pour vouloir discuter au milieu de la nuit ? »

Severus entendit les mots marmonnés et se rendit compte de son erreur. Il reprit confiance en lui rapidement. Il n'avait pas réveillé Tyler. Il était bourré. Lui parler quand il était soûl serait peut-être plus facile que s'il était à moitié endormi.

Les longs cheveux de son professeur n'étaient pas attachés. Ils tombaient en une cascade désordonnée sur son visage. Une mèche s'était collée contre sa lèvre inférieure et les doigts de Severus le démangeaient tant il avait envie de la remettre en place, mais il préféra se retenir. Il ne fallait jamais mettre des doigts ou des mains à portée d'animaux dangereux. Il risquait de se faire mordre. Severus détacha son regard du visage de Tyler et regarda ailleurs, ses yeux se posèrent sur une cicatrice depuis longtemps soignée qui décorait le biceps du bras de son professeur. Il déglutit et posa les yeux sur ses pieds nus. Severus ne comprenait pas pourquoi, mais il y avait quelque chose d'étrangement intime à voir une personne pieds nus. Son visage devint cramoisi et il détourna à nouveau les yeux.

« En avez-vous assez vu? »

« Hum- »

Un acquiescement. « Que faites-vous ici, M. Snape? »

« Euh, je, euh, j'avais besoin de parler à quelqu'un et vous me paraissiez le meilleur candidat. » Les mots sortirent de sa bouche les uns après les autres, pêle-mêle. C'en était presque embarrassant.

« A trois heures du matin ? Ne pouviez-vous pas venir à une heure décente ? »

Severus était à court de mots alors il haussa les épaules, tournant son visage et ses yeux vers le sol. Cette réaction était seulement à moitié naturelle. Il savait que pour avoir ce qu'il voulait, il valait mieux paraître timide et anxieux. Même s'il l'était effectivement aussi. « Je… Je ne pouvais pas dormir. »

« Et vous avez tout naturellement pensé que le reste du château serait réveillé parce que vous aviez le caprice de parler à quelqu'un à cette heure-ci ? Typique. » Tyler paraissait ennuyé et pour la première fois depuis qu'il avait quitté la salle commune sous la cape d'invisibilité de Lucius, Severus pensa que ce n'était peut-être pas une bonne idée d'être venu voir Tyler après tout.

« Je suis désolé, monsieur. Je --»

« Je vous présente mes excuses pour mon manque de patience. » Tyler se frotta les yeux. Il soupira. « J'admets que ce n'est pas le meilleur moment mais si vous avez vraiment besoin de parler, j'écouterai. » Il fit un pas en arrière pour lui permettre d'entrer. Le jeune homme s'avança, refusant de lui laisser le temps de revenir sur sa proposition.

« Asseyez-vous. »Tyler lui désigna une chaise près du canapé. Elle avait l'air beaucoup plus confortable que les meubles de la salle commune de Serpentard et il s'effondra dessus avec un soupir de bien-être. Son bras entra en contact avec un livre posé sur le bras de la chaise. Curieux, il le prit et le feuilleta. Toutes les pages étaient blanches.

« Il n'y a rien d'intéressant là-dedans. » Tyler le regardait les yeux plissés. Il s'était installé sur le canapé.

Severus le dévisagea. Il déglutit et le regarda à nouveau. Tyler avait un pied sous lui et l'autre était étendu sous le siège. Un de ses bras était posé le long du canapé et ses doigts brossait rythmiquement le tissu en les fléchissant. Ce qu'il allait dire lui sortit de la tête quand Tyler porta un verre à demi rempli d'un liquide couleur ambre à ses lèvres. Il se lécha les lèvres et regarda Tyler soupirer et se détendre.

« Vous avez dit vouloir me parler. Alors parlez. »

Severus toussa. Sa bouche était sèche et les mots ne sortaient pas, mais il s'obligea à prononcer la première phrase. Les mots vinrent ensuite plus facilement jusqu'à ce qu'il ait terminé l'histoire qui l'avait conduit ici au milieu de la nuit. Il lui dévoila chaque peur, chaque inquiétude, chaque question qu'il s'était posée encore et encore. Il lui parla de la brûlure de la Marque noire qui flétrissait sa peau. Il lui parla des raisons qui l'avaient poussé à rejoindre les mangemorts. Toutes les raisons, sauf une. Le fait que Tyler ait été l'impulsion finale ne passa pas ses lèvres. Elle resta informulée dans un coin de son esprit.

Tyler, de son côté, n'avait pas bougé. Son visage était un masque blanc, pas une seule émotion – pas même le dégoût auquel Severus s'attendait – ne traversa son visage. Severus en était content. Il semblerait que les rumeurs le concernant soient vraies. Que la guerre fasse rage autour d'eux ne semblait pas l'affecter. Qu'importe qui serait vainqueur, Voldemort, Dumbledore ou le Ministère de la magie. Tyler n'était ni d'un côté ni de l'autre. Cette impartialité attirait Severus. Il n'était pas venu pour être jugé. Du moins c'est ce qu'il croyait.

Mais chaque mot qui sortait de ses lèvres demandait au professeur Tyler de le faire.

Hpsshpss

Harry s'appuya contre les coussins, buvant une gorgée d'un autre verre de firewhisky tout en écoutant l'histoire sortir de la bouche de Severus. Il ne se souvenait pas du nombre exact de verres qu'il avait ingurgités. Cette pensée s'effaça alors que l'histoire lui était contée. Il fit en sorte que son regard n'exprime rien et écouta, fasciné, les raisons qui avaient conduit Severus à rejoindre les rangs du Seigneur Noir.

C'était un sujet que son Severus évitait à tout prix. Harry ne l'avait jamais obligé à en parler, mais ça ne l'empêchait pas d'être curieux et de vouloir tout connaître de l'homme auquel il s'était uni. Harry n'interrogerait pas Severus et en retour Severus ne mettrait pas son nez dans sa vie. Ils ne forçaient pas l'autre à révéler des choses qu'ils valaient mieux oublier et s'ils mouraient sans tout connaître de l'autre, alors il en serait ainsi. Il pouvait l'accepter. Ce n'était pas nécessaire. Ce qu'ils savaient l'un de l'autre n'était pas important parce que ce qui comptait était qu'ils se comprennent.

Peut-être maintenant allait-il céder et révéler certains faits dont il n'avait jamais évoqué l'existence. Ce serait juste, après tout, maintenant que ce jeune homme avait divulgué l'un des secrets les mieux gardés de Severus.

Harry se demanda si Severus, son Severus, s'était rendu compte à quel point il était aveugle à l'âge de seize ans. Presque immédiatement, Harry s'admonesta. Bien sûr que Severus savait. Il serait certainement le premier à l'admettre, s'il admettait un jour ce genre de choses.

Ce jeune homme était inconscient de toutes les horreurs qu'avaient commises Voldemort. Il était impétueux, jeune, idiot et Harry faisait tout pour que ses yeux n'expriment aucune critique. Ce n'était pas totalement de la faute de Severus. Seulement en partie sa faute. S'il devait en croire les mots qui sortaient difficilement de sa bouche pour raconter une histoire que Harry était presque certain d'avoir le droit d'entendre.

Il semblerait que M. Jédusor aime à convaincre ses partisans de sa moralité avant de leur montrer le côté le plus brutal de son régime. Les joies de la torture et du meurtre des Sang-mêlés et des moldus étaient cachées aux jeunes gens impressionnables comme Severus (et à l'occasion aux femmes). Alors au lieu d'une histoire remplie de soupirs horrifiés – Harry devait admettre qu'il les attendait à moitié – , il avait été régalé de toutes les bonnes choses que le Seigneur des Ténèbres essayait d'accomplir. Severus était perplexe. Il ne comprenait pas pourquoi on pourrait vouloir s'opposer à lui et comment on pouvait croire ces épouvantables mensonges : les enlèvements et les tortures dont on parlait ne pouvaient être que faux.

La poitrine d'Harry se serra en entendant ces paroles. La tristesse menaça un bref instant de prendre le dessus, de le submerger mais il ne se laissa pas faire. Son esprit ressassait toutes les conversations qu'il avait eues avec le Severus plus âgé. Son Severus se sentait ridicule. Il critiquait toutes les décisions qu'il avait prises en grandissant sans jamais lui dire ce qu'elles étaient, simplement qu'elles étaient mauvaises, mauvaises, mauvaises. Et qu'elles ne valaient pas la peine de les répéter. Harry connaissait tant de choses à son sujet, mais pas cela. Pas ce qu'il découvrait en écoutant ce que disait la jeune version de son amant.

L'aveuglement de ce jeune Severus était une faiblesse et son Severus détestait montrer toute forme de faiblesse à qui que ce soit et en particulier à Harry. Même si Severus n'était plus aveugle, il l'avait été et c'était suffisant pour le cacher à Harry. Du moins c'est ce que Harry pensait. Son Severus regardait toujours une situation sous toutes ses coutures et ne mettait jamais les pieds quelque part, ailleurs que dans les réunions de mangemorts, sans savoir exactement où ils les mettaient. Dans l'avenir, Severus verrait ces réunions comme une punition. Harry avait toujours pensé que c'était une punition pour avoir choisi de suivre le Seigneur des Ténèbres, mais maintenant, à écouter la jeune version de son amant, il n'était plus certain d'avoir raison.

L'esprit de Harry n'était pas concentré sur une seule chose ; tant de conversations lui traversaient l'esprit qu'il ne pouvait s'empêcher d'établir des corrélations qu'il n'aurait jamais faites s'il avait été plus sobre et s'il avait parfaitement contrôlé ses pensées.

Le jeune Severus arrêta de parler et inclina la tête, attendant que son professeur dise quelque chose. Harry passa ses doigts dans ses cheveux et décida qu'il ne savait pas ce qu'il devrait dire. Ce qu'il voulait dire était "reste loin de cet horrible monstre !" mais Severus n'avait pas besoin de ce conseil. Il avait besoin de parvenir par lui-même à la conclusion que Voldemort était bel et bien un monstre et non l'homme qu'il prétendait être aux yeux de ses partisans. Harry devait pourtant dire quelque chose et décida de dire ce qu'il avait toujours cru.

« M. Snape, vous semblez essayer de vous convaincre, vous, que vous avez pris la bonne décision. Pas de me convaincre moi. » Il s'arrêta. « Tout ce que j'ai à dire est qu'aussi longtemps que vous le faites pour de bonnes raisons, aussi longtemps que c'est une cause à laquelle vous croyez et aussi longtemps que vous pouvez agir pour cette cause et continuer de vous regarder dans une glace, alors c'est une décision que vous devez assumer. Personne d'autre ne peut choisir pour vous la vie que vous devez mener. Après tout c'est vous qui devrez vivre avec la personne que vous deviendrez, et ce le reste de votre vie. Et si vous ne supportez pas la personne que vous avez décidé de devenir alors votre vie sera un véritable enfer. »

Harry était arrivé au bout de sa capacité à rester cohérent. Il remua donc légèrement et essaya de se lever pour escorter le jeune M. Snape à la porte. Il ferma les yeux et étira les bras tout en courbant le dos. Il expira lentement, baissa les bras et ouvrit les yeux. Severus avait les yeux écarquillés. Ils étaient emplis d'émotions conflictuelles et manquaient de la confiance qu'il associait à son Severus. Harry haussa les épaules et passa ses jambes sur le rebord du canapé.

Severus détourna le regard. « Vous devez penser que je suis un idiot, professeur. Il semblerait que tout le monde me voie comme une personne incapable de prendre ses propres décisions. Je pense que j'étais simplement inquiet d'avoir pris une décision trop hâtive. » Severus déglutit. « Je sais que mon Seigneur essaye de changer les choses pour le mieux et je sais que tout ira probablement pour le mieux. Il doit être mieux renseigné que je ne le suis. Je ne suis qu'un sixième année, et pourtant… » Les yeux de Severus oscillaient entre Harry et le sol.

Harry était presque certain que Severus ne s'était même pas rendu compte qu'il parlait pour ne rien dire. C'était un changement rafraîchissant par rapport à son Severus qui pesait chaque mot avec soin. Un vrai sourire éclaira le visage de Harry et Severus cessa de babiller.

Harry pencha la tête pour le regarder. Il ne se faisait pas confiance pour dire ce qu'il voulait. Quand il buvait trop de firewhisky – et il était presque sûr d'en avoir trop bu – il se ridiculisait. Ce qu'il était déterminé à éviter ce soir.

« Je ne vous avais jamais vu sourire avant, professeur. Même lorsque votre ami est venu vous voir. Je ne pensais pas que vous pouviez sourire ainsi. »

Le sourire de Harry ne s'effaça pas, il s'agrandit. Peut-être Albus avait-il raison, pensa-t-il, ce voyage ressemblait presque à des vacances. Passer du temps avec un Severus qui n'avait pas autant de soucis que le sien était un changement bienvenu. Aussi longtemps que rien ne se passait entre eux, il était parfaitement acceptable de parler à ce jeune homme, n'est-ce pas ?

« Tout le monde se laisse aller de temps à autre, je pense. Je crois que vous m'avez vu dans un de ces moments-là. » Harry se leva et chancela légèrement alors que le sang lui montait au cerveau. Etant sobre, Severus se précipita pour prendre Harry par le coude et l'empêcher de tomber. Un hochement de tête. « Bien, je pense que vous devriez partir, M. Severus. »

« Peut-être devriez-vous vous allonger, professeur. Vous n'avez pas l'air bien. » La main de Severus tira Harry, essayant de l'emmener vers le canapé pour qu'il puisse s'asseoir, mais Harry ne voulait pas s'asseoir alors il tirait pour se libérer et tomba sur Severus.

Fronçant les sourcils, Severus se tourna vers lui et Harry posa une main sur sa joue. La confusion voila les traits à la fois familiers et étrangers du visage du Serpentard et Harry fronça à son tour les sourcils. « Tant de perdu. De si beaux yeux emplis d'émotion. Je suis -- » Harry se rapprocha. « Désolé. » Sans penser aux conséquences de ses actes, il couvrit l'espace qui les séparait et couvrit de ses lèvres celles de Severus.

Hpsshpss

Severus s'étira quand il se réveilla, savourant la douleur qui parcourait son corps. Il était endolori à certains endroits mais c'était une sensation plaisante. Il avait passé la nuit avec le professeur Tyler – Non. Octavian. Un sourire endormi étira ses lèvres et il roula pour pouvoir voir son professeur. Son sourire s'accentua, il aimait le son de ces mots. Son professeur.

Octavian, pourtant, n'était pas dans la pièce. Il descendit du lit et s'approcha de ses vêtements, empilés sur une chaise près de la porte qui conduisait à la salle de bains. L'eau coulait.

Il savait maintenant où était son professeur.

Toutes pensées concernant Octavian sous la douche s'évanouirent lorsque ses yeux tombèrent sur la note posée sur la pile de vêtements.

/M. S Snape,

Je vous conseille de quitter mes appartements immédiatement. Vous voyez, je suis à nouveau sobre. Pour votre propre sécurité, je vous suggère de rester aussi loin de moi que possible pour le restant de l'année.

J'espère que vous serez parti avant mon retour. Sinon, vous risquez pire qu'une retenue avec Rusard.

Professeur O Tyler/

Il froissa le papier, regarda la salle de bains avec des yeux noirs et jeta le papier roulé en boule. Il se serait senti mieux si le papier avait fait un son satisfaisant mais même pas, et Severus ne put que bouillonner intérieurement. Comme un enfant. La pensée lui laissa un goût amer dans la bouche alors qu'il mettait ses vêtements.

Ce n'était pas terminé. Tyler le désirait, il en était sûr. Il ne l'aurait pas pris s'il ne l'avait pas voulu. Maintenant qu'il savait ce qu'il lui fallait pour passer outre ses défenses (une grande quantité d'alcool pour l'enivrer) il avait prévu de lui rendre une autre visite tardive.

Tyler n'avait jamais rencontré un Severus déterminé auparavant.

Hpsspss

Harry entendit la porte de la chambre claquer, suivie de peu par un son étouffé : la porte d'entrée avait aussi été claquée. Il était seul.

Il se laissa lentement glisser sur le carrelage et grogna. Qu'il avait été stupide de boire autant. Plus qu'il ne l'aurait fait si Severus avait été là, mais c'était précisément la raison pour laquelle il avait bu : Severus – son Severus n'était pas là.

Même s'ils n'avaient jamais célébré leur anniversaire, ils ne l'avaient jamais ignoré non plus. C'était ainsi, comme tout ce qui était entre eux. Et la nuit dernière, c'était leur anniversaire. Harry soupira et gratta de ses ongles la marque à l'intérieur de son poignet droit.

Tout ce serait bien passé si le jeune Severus n'était pas apparu à sa porte. Il aurait simplement fini la bouteille de whisky et se serait probablement endormi en lisant sur le canapé, tout en pensant que Severus lui manquait et en essayant de ne pas y penser. Mais rien de cela ne s'était passé. Harry avait écouté le jeune Severus parler de ce qu'il avait fait et il avait fait quelque chose d'idiot.

Ses yeux le piquaient, mais il refusait de pleurer. C'était facile sous la douche avec l'eau qui tombait sur sa tête, le long de son visage en longs ruisselets. Il était furieux et en colère contre lui et contre la situation mais il n'allait pas verser une larme pour ça. Il gratta sa peau, souhaitant laver la culpabilité mais il ne le pouvait pas. La culpabilité ne partait pas ainsi. Elle tachait sa peau d'une manière que lui seul pouvait voir.

Bien sûr, l'ironie était que son Severus savait exactement ce qui allait se passer entre 'le professeur Tyler' et son jeune lui, mais il ne pouvait s'empêcher d'avoir l'impression de l'avoir trompé. C'était un cercle vicieux, il le savait, mais il ne pouvait pas s'arrêter d'y penser. Chaque fois qu'il regardait sa cicatrice, il se sentait coupable et en colère contre lui-même. Puis ses pensées revenaient à son Severus et il se demandait s'il était furieux contre lui d'avoir manqué de self-control et pour s'être donné au Severus de seize ans.

L'eau refroidissait, mais il resta où il était, tête basse, laissant l'eau la marteler, agrippant de sa main gauche son poignet droit où la marque de leur union semblait l'accuser.

Hpsshpss

Le futur : été entre la sixième et la septième année de Harry

« Arrêtez de faire l'enfant. »

« Je ne fais pas l'enfant. » Un sifflement aigu remplit la petite salle. « Ca fait mal ! »

« Je vous ai à peine touché. Vous savez, ce serait beaucoup moins douloureux si vous restiez tranquillement assis. »

« Votre comportement avec les malades laisse à désirer, Potter. » Severus essaya de s'éloigner de la main qui se rapprochait de lui.

Levant les bras au ciel de frustration, Harry le regarda avec des yeux noirs. « Voulez-vous arrêter de bouger ! Ce n'est qu'un baume sans ingrédients risquant d'être douloureux. Vous devriez le savoir puisque vous l'avez FAIT ! » Il agrippa l'épaule de Severus avant qu'il ne puisse se reculer brusquement, mais l'homme le plus âgé remua pour se libérer.

« Ca piquait la dernière fois. » C'était un fait. « Qu'essayez-vous d'appliquer dessus de toute façon ? D'après ce que je sais ça pourrait être tout à fait inapproprié pour une plaie. Et -- »

Harry leva les yeux au ciel. Il n'y avait pas de pire patient au monde que Severus Snape. Et il était coincé avec lui.

« — je n'ai pas besoin de votre aide. Je suis parfaitement capable de prendre soin de moi. En fait, je le faisais avant même votre naissance, alors si vous vouliez gentiment laisser tomber, je m'occuperai de ça moi-même. »

Alors c'était comme ça , décida Harry. Il agrippa le bras de Severus, le tira vers lui, provoquant un gémissement de douleur de la part de l'autre homme dont il massa l'épaule tuméfiée de ses doigts enduits de pommade.

« Pour répondre à votre question, » Lui dit Harry en reculant et en relâchant son bras. « Ce baume endort la douleur et désinfecte. Et c'est votre écriture bien soignée, monsieur. Quant à la douleur la première fois, vous ne vouliez pas rester assis et ouvriez la plaie en tirant sur la chair et le muscle. Je ne vous aide que parce que vous ne pouvez pas atteindre l'entaille. Si vous le pouviez, je vous laisserais lécher vos blessures comme l'animal blessé que vous êtes. Monsieur. »

Il contourna Severus et se pencha pour regarder la dilation de ses pupilles.

« Que faites-vous maintenant ? » Il ne ferma pas les yeux malgré la sécheresse de la voix. Probablement parce qu'il ne lui faisait pas confiance, pensa Harry amèrement.

« Votre vision est-elle floue ? »

« Non. »

« Bien. » Harry se leva, prit un tissu propre sur la table et essuya l'excès de pommade qui n'avait pas été absorbée par la peau. Jetant un charme de guérison, il regarda la peau se recoudre - le seul signe qu'il y avait effectivement eu une plaie fut la ligne rouge qui commençait à s'effacer mais ne partirait jamais complètement. Une cicatrice de plus sur un homme qui en avait déjà tant.

Harry suivit la ligne de ses doigts pour être sûr que le sort avait refermé la plaie proprement mais aussi parce qu'il ne pouvait pas s'en détourner. Quelques instants de plus et Severus l'ensorcellerait, l'envoyant valser à travers la salle, mais pour l'instant, Harry pouvait poser ses doigts sur la peau tendre et le muscle tant qu'il prétendait que c'était pour vérifier la cicatrisation de la plaie.

Severus n'arrêta pas de se plaindre et Harry ne s'en étonna pas. Il ignora simplement toutes les insultes, les grognements et les plaintes concernant le fait qu'il ne fasse rien correctement. C'était ainsi que Severus gérait la douleur. C'était à l'opposé de la manière dont Harry gérait la sienne.

La première fois que Severus l'avait sorti du pétrin, Harry avait cinq entailles parallèles le long de sa poitrine et une plaie au couteau sur le côté. Il s'était automatiquement roulé en boule et avait fermé les yeux pour essayer d'arrêter même de respirer. Il avait haleter de douleur quand Severus l'avait porté et mit en sécurité. Une fois guéri, Severus s'en était pris à lui parce qu'il lui avait fait croire qu'il était mort.

Bien entendu c'était probablement simplement parce qu'il avait pensé que la mort d'Harry signifiait l'échec de la mission.

« Etait-ce si affreux ? »

Harry haussa les épaules. « Je pouvais voir l'os mais c'était l'omoplate et une partie que l'on voyait de toute façon à travers le muscle. Je n'en sais pas suffisamment pour vous dire si le muscle a été gravement endommagé. » Les doigts et les mains de Harry parcoururent le dos de Severus une dernière fois. « C'est guéri maintenant, et – j'ai pu me tromper. »

« Hum ? »

« J'ai cru sentir l'odeur du laurier-rose, mais vous n'avez aucun symptôme de son poison. » Harry fit une pause. « Qui aurait pensé que j'apprendrais un jour quelque chose de vaguement intéressant sur les potions ? »

« Gamin. »

« Ce que vous venez de dire est horriblement puéril, professeur. Je pensais que vous gardiez ce genre de commentaires pour mon parrain. »

Severus plissa les yeux mais ne dit rien. Il prit la main de Harry et la tira pour qu'il se place devant lui. Harry gigota pour libérer sa main de Severus et se recula.

« Nous devrions regarder cette plaie ouverte, Potter. »

« Je peux le faire moi-même. » Harry se frotta les yeux. Il avait regardé trop longtemps la blessure de Severus. Ses yeux étaient fatigués et l'épuisement dû au manque de sommeil devait commencer à se faire sentir : il se sentait hagard.

Severus le regardait fixement. Harry sentit ses cheveux se dresser sur sa tête et quand Severus ouvrit la bouche, les mots étaient brutaux et durs : « Vous avez dit avoir senti l'odeur du laurier-rose ? »

Lorsque Harry hocha la tête, il fut pris de vertige et se cogna contre la table. Il se releva d'une main et de l'autre se frotta les yeux tout en soupirant. Il était simplement fatigué.

« Ne vous est-il pas venu à l'esprit que vous pourriez avoir été empoisonné ? »

Harry perdit l'équilibre quand il inclina la tête pour regarder Severus et tomba en avant. Severus le rattrapa avant qu'il ne touche le sol.

Hpsshpss

Les premières choses qu'Harry vit en se réveillant furent les craquelures familières du plafond : il les avait vues si souvent en se réveillant dans le passé. Il soupira et jura avant de se lever. Il fit des yeux le tour de l'infirmerie.

« Vous, M. Potter venez de me prouver que vous êtes encore plus idiot que je ne l'avais pensé. Je vous assure que si, sur mon échelle de valeur, vous étiez auparavant juste au-dessus du manque total d'intelligence, vous êtes maintenant définitivement tout en bas, même si Longdubat est peut-être encore juste en-dessous de vous. »

Harry déglutit, pencha la tête en arrière et ferma les yeux. « Je vous ai dit que j'avais cru sentir l'odeur du laurier-rose. Ce n'est pas moi le maître des potions qui aurait pu l'identifier à un kilomètre. » Il se tourna sur le flanc et regarda Severus. Il fut surpris de le voir assis sur une chaise à côté de son lit, un livre à la main. Il était apparemment là depuis longtemps. Une émotion douce-amère qu'il ne voulait pas examiner le submergea. « Combien de temps suis-je resté inconscient ? »

« Une semaine. » Court et brutal. Le ton de Severus était à la limite de la colère.

« Désolé, » Dit Harry immédiatement sur un ton penaud. « Je n'aurais pas du réagir ainsi. J'aurais dû pouvoir vous dire que j'avais été empoisonné. »

Severus acquiesça. « Je vous ai enfoncé les symptômes dans la tête et vous trouvez encore le moyen d'être empoisonné et de ne pas en reconnaître les effets. » Severus expira, les dents serrées. « Vous avez de la chance que j'ai été là, espèce d'idiot. J'ai apparemment complètement perdu mon temps en vous entraînant à identifier les poisons les plus dangereux grâce à leur odeur. »

« Ce n'est pas comme si vous aviez fait cela par pure bonté d'âme, espèce de chauve-souris géante ! Non que vous en ayez une. Dumbledore vous a demandé de m'entraîner. » Harry se retourna, tourna le dos à Severus et ferma les yeux.

« Vous êtes le gamin le plus impertinent que j'ai jamais rencontré, Potter. »

« Où nous envoie le Directeur la prochaine fois ? Je veux sortir d'ici. »

« Qu'est-ce que vous rend si sûr que vous travaillerez encore avec moi ? »

Harry n'entendit que le venin de sa voix. « Eh bien il ne va pas me laisser y aller seul. Et ce n'est pas parce que j'ai fait quelque chose de stupide qu'il va rappeler Sirius ou Remus de mission pour 'jouer les baby-sitters' comme vous dites si bien. J'ai peur que cet honneur ne vous revienne. »

Severus l'ignora. « Nous reprendrons où nous nous sommes arrêtés. Entre vos visions et ma marque nous devrions pouvoir suivre Voldemort jusqu'à son nouveau quartier général. »

« Planque. » Harry plissa les yeux et croisa les bras. Du coin de l'œil il vit Severus lever les yeux au ciel et réprimer un soupir.

« Très bien, Potter, sa planque. Puisque vos visions se renforcent quand on s'approche de lui et que la douleur associée à votre cicatrice et à ma marque augmente, nous devrions être capables de déterminer l'endroit où il se cache. »

« C'est stupide, stupide, stupide. Nous devrions construire des défenses et non planifier une attaque. On est toujours plus fort quand on joue sur son propre terrain. »

« Je n'ai jamais dit que je comprenais les décisions du Directeur. » Severus se releva en un mouvement fluide. « Quand vous serez prêt, je vous attendrai devant la grande porte. »

La porte de l'infirmerie claqua derrière lui et Harry sauta du lit. Il n'était pas pressé de retourner sur le terrain avec Severus, mais il préférait éviter un sermon de plus sur la ponctualité. Il prit sa chemise et sentit l'odeur des épices et des ingrédients de potions. Son sac devait être planqué dans les quartiers privés de Severus. Il soupira et se surprit à regretter de ne pas avoir pu passer lui aussi la semaine dans les quartiers de Severus. Même si Severus, lui, ne le voulait pas, bien entendu.

En se dirigeant vers le hall d'entrée, les pensées de Harry restèrent focalisées sur son étrange relation avec Severus. Ils suivaient tous les deux le plan idiot – d'après lui – de Dumbledore depuis la fin de l'année scolaire et à chaque semaine de plus passée ensemble Harry tombait de plus en plus amoureux de Severus. Lorsqu'il était optimiste, il pensait que peut-être Severus le trouvait un peu attirant, mais ces moments étaient courts et rares.

Et quand il arriva en bas de l'escalier principal, Harry n'eut pas de raison d'être optimiste. Severus le regarda avec des yeux noirs et lui demanda d'arrêter de traîner. Harry leva les yeux au ciel et allongea le pas. Il s'arrêta devant Dumbledore qui lui tapota gentiment l'épaule et leur souhaita bonne chance.

Harry le voua, lui et son sourire bienveillant, aux gémonies.

Hpsshpss

« Potter. » Severus voulut donner une petite fiole à Harry, mais le jeune homme ne leva pas les yeux de la page qu'il regardait. « Potter. »

Le Gryffondor soupira d'un air désintéressé, garda ses yeux collés sur le livre et l'ignora, les lèvres pincées de dégoût.

« Potter. » Le ton de Severus passa de l'impatience à l'énervement et la fiole fut brusquement posée à côté du dîner auquel Harry n'avait pas touché.

« Arrêtez de m'appeler Potter. Je vous assure que la façon dont vous prononcez ce nom avec dégoût ne m'atteint pas puisque je ne sais presque rien sur ma famille ; je refuse de considérer mes gardiens comme membres de ma famille. Ils ne sont déjà pas terribles comme gardiens, alors comme famille ! »

« Potter. »

« Si vous voulez une réponse, essayez avec un nom différent. » Harry tourna une page. « Vous pouvez m'appeler Harry, mais non, vous ne le faites jamais, professeur. Alors pourquoi pas Black, Weasley ou Lupin ? Au moins j'ai l'impression d'appartenir à ces familles. » Se plaignit Harry. « Mais je doute que vous utilisiez l'un de ces noms. »

« Buvez cette putain de potion, Pot – Harry, » Grogna Severus. « Il reste du laurier-rose dans votre organisme et c'est pour ça que vous êtes déprimé. »

« Merci, professeur. » Répondit-il en hochant la tête, avant de retourner à son livre. Severus était certain qu'il ne lisait pas un traître mot mais il continuait à ignorer la fiole et la potion. Néanmoins, il prit une cuillerée de cet horrible hachis parmentier quand Severus poussa l'assiette contre son coude pour la cinquième fois. Il ne devrait pas dorloter le gamin, mais Dumbledore lui avait confié Harry et il n'allait pas manquer à son devoir.

« Normalement on bouge les yeux quand on lit un livre. »

« Pas si le livre n'est qu'un prétexte pour éviter une conversation. »

Severus tapota contre le bois de la table et réprima un grognement. Maudit gamin. Il agissait comme un enfant qui n'aime pas le goût des médicaments. « Pourquoi ne prenez-vous pas la potion ? »

Harry haussa les épaules et tourna la page. « C'est ainsi que je devrais me sentir. »

« Développez. »

« Je ne suis pas un essai sur lequel vous pouvez écrire vos commentaires alors vous n'avez qu'à vous débrouillez avec ce que je dis, que j'en dise beaucoup ou non. » Il referma sèchement le livre et se leva pour partir mais Severus lui attrapa le coude fermement et ne le relâcha pas. « Laissez-moi partir, professeur. »

« Si je dois passer le reste de ce satané été en votre compagnie, je mérite de savoir ce qui vous rend insupportable, et vous le serez, M. Potter, si vous ne buvez pas cette fichue potion. »

« Vous me trouvez déjà insupportable de toute façon. Vous me l'avez dit de mille façons différentes depuis que j'ai onze ans. De plus, » Poursuivit Harry, « qu'est-ce qui vous donne le droit de savoir quoi que ce soit à mon sujet ? Ce n'est pas comme si ça vous intéressait. Vous me le faites clairement comprendre chaque jour ! » Il dégagea son bras et passa la porte de la petite chambre d'hôtel.

Severus prit brusquement la fiole et se leva pour suivre Potter, faisant grincer la chaise contre le sol et la laissant tomber à terre dans un mouvement de colère. S'il arrivait à mettre les mains autour du cou du garçon, il le secouerait suffisamment pour --

Severus s'arrêta en entrant dans la chambre, écoutant la porte claquer avec une grande satisfaction.

Potter était sur son lit, allongé nonchalamment sur le ventre, ce maudit livre sur son oreiller à la page qu'il ne lisait pas depuis vingt minutes. Le gamin ne pouvait même pas lire les pages dans l'ordre. Il était inutile de se demander pourquoi il était aussi nul dans ses cours.

« Ne savez-vous pas déjà tout ce que ces livres ont à offrir, Potter ? » Grogna Severus. « Vous avez oublié votre fiole. »

Harry l'ignora. Severus s'abandonna à sa nervosité et fit les cents pas. Chaque pas résonnait contre le sol. Il ne jeta certainement pas de coups d'œil vers la courbe des fesses de Harry dont le pantalon trop serré aurait été plus utile pour étrangler le cabot qui le lui avait donné. Après que Severus l'ait poignardé avec la dague attachée à la cuisse de Harry, encore un cadeau dont le garçon n'avait pas besoin.

« Mme Pomfresh a exigé que je vous donne cette potion pendant le dîner. Je vous conseille de la prendre. Je n'ai aucune envie de voir la maîtresse de l'infirmerie de Poudlard me tomber dessus pour se venger. »

« Et en quoi cela me concerne, exactement ? » Il roula sur le dos et regarda Severus en plissant à moitié les yeux.

Severus avait l'impression que la pièce était trop petite et la température trop élevée. S'occuper de Potter lui provoquerait un anévrisme avant la fin du mois, et pourtant, l'espace d'un court moment, il avait pensé qu'il pourrait passer l'été entier avec un Potter étonnement supportable.

Enlevant une mèche de son visage pour la énième fois, Severus abandonna. Il ne pouvait pas savoir ce qui se passait dans la tête de Potter et par-dessus tout, il n'avait pas encore compris comment se comporter avec lui depuis l'incident qui s'était produit aux alentours de Noël dernier.

Des pensées comme celles-ci l'emmenaient sur un terrain dangereux et il censura l'image qui lui venait à l'esprit d'Harry devant lui, les lèvres entrouvertes, sur le point de l'embrasser, en secouant brusquement la tête. Il n'avait pas le temps pour ce genre de chose. Il s'assit sur le bord du lit et lui tendit la fiole.

Harry la prit et en avala le contenu en une gorgée.

« Pourquoi me laissez-vous faire tout ce que je veux ? »

« Depuis quand est-ce que je vous permets cela ? J'avais l'impression que j'étais constamment en train de vous empêcher de le faire. » Severus se tourna pour le regarder et Harry soutint son regard.

« Ca dépend. En tant que professeur vous êtes complètement merdique. »

Severus le regarda avec des yeux noirs, mais Harry ne tressaillit pas. « A Noël dernier, Dumbledore vous a demandé de vous occuper de moi et depuis lors vous êtes mon mentor dans l'Ordre. En tant que tel vous me laissez faire ce que je veux. Je vous ai crié après, vous ai traité de tous les noms auxquels j'ai pu penser et j'en ai même cherché d'autres dans un livre -»

« Quel livre? »

« Les 1001 manières d'insulter Votre Maître des Potions par Fred et Georges Weasley. Il y a un chapitre bonus sur les autres professeurs. »

Severus grimaça. « Pourquoi me dites-vous ça, vous vous rendez compte -»

« Qu'allez-vous faire? La plupart des insultes sont assez faciles à mémoriser et même si vous demandez à MacGonagall de confisquer tous les exemplaires de la salle commune, vous ne pouvez pas prendre les exemplaires individuels à moins que els élèves ne les apportent en cours et ils seraient vraiment stupides de faire une telle chose. Sans mentionner le fait que Fred et Georges enverraient immédiatement de nouveaux exemplaires. » Harry haussa les épaules. « De plus, je suis le seul à vous insulter en face. Presque tous les autres ont bien trop peur pour le faire, ou sont trop occupés à vous lécher les bottes. »

« Laissez mes Serpentards en dehors de ça. » Il ferma le poing contre sa cuisse et jura. « Vais-je un jour échapper à ces deux fléaux ? »

« Non. »

Severus prit une profonde inspiration et se détourna. « Parce que vous êtes suffisamment grand pour prendre vos propres décisions. »

La réponse fut longue à venir et il savait que ce changement brutal de sujet en était de toute évidence la cause. « Et si je prends la décision de vous insulter et de vous rendre malheureux ? »

« C'est votre choix et je sais que c'est vous qui l'aurez fait. »

« Comment savez-vous que Sirius ne me récompense pas à chaque fois que je vous insulte ? »

« Bien que ça ressemble à ce que ferait votre corniaud de parrain, j'en doute. J'apprécierais cependant que vous me donniez la raison de votre soudaine hostilité envers moi. Vous avez été… supportable jusque-là cet été et j'avais espéré que ça continue ainsi, aussi peu probable que ça paraisse. »

« J'ai décidé que je ne voulais plus que l'on ait confiance en moi. » La réponse était calme et Severus ne savait que dire. Il ne s'attendait pas à cela et n'avait jamais très bien su faire face aux imprévus. Qui arrivaient souvent dès qu'il était question de Potter.

Severus inspira profondément alors qu'Harry remuait pour changer de position sur le lit. Il était habitué à son incapacité à rester tranquille ; il bougeait tout le temps en cours et ça n'aurait pas dû lui faire de l'effet, mais pour une raison ou une autre, cela lui en faisait et Severus ne savait pas comment gérer ça. Il regarda les doigts de Harry frôler le sol en essayant de chasser des particules de poussière. « Et qu'y a-t-il de mal à ce que les gens aient foi en vous ? »

« Je finirai par faire défaut à quelqu'un. Je ne veux pas être ce que l'on attend de moi. »

« Et à votre avis, qu'attend-on de vous? »

« Que je sois un Gryffondor tout le temps. »

Severus ne dit tout d'abord rien. Qu'y avait-il à dire ? « Excusez-moi ? »

« Il y a des qualités en moi qui ne sont distinctement pas Gryffondor par nature. »

« Vos qualités Serpentard. » Severus acquiesça mais conserva prudemment une expression aussi neutre que possible. Il avait remarqué ces qualités il y a des années. La capacité de Harry à se fondre dans l'ombre et à se faire oublier, la ruse qu'il montrait dans certaines situations. Il avait un cerveau et semblait même parfois l'utiliser, même si Severus ne voulait pas l'admettre. Il n'avait pas l'ambition d'un Serpentard, et gardait des tendances Gryffondors dans la vie de tous les jours.

On devait regarder attentivement pour voir ces traits puisque Harry les cachait derrière sa témérité Gryffondoresque.

« Vous saviez ? Vous saviez que le choixpeau avait voulu me placer à Serpentard ? »

« Je le remercie tous les jours qu'il ne l'ait pas fait. Un Lion né dans la Maison des Serpents ? J'aurais perdu toute crédibilité en tant que Directeur des Serpentards. »

Harry sourit d'un air satisfait. « Non, ce n'est pas vrai. Vous auriez appris à vivre avec moi. Vous êtes un Serpentard, vous savez vous adapter. »

« Magnifique. » Un autre trait Serpentard qu'Harry possédait en quantité industrielle. Peu importe ce qu'il devait subir, Severus savait qu'il s'adapterait à la situation et en sortirait relativement indemne.

Harry se leva et se dirigea vers la fenêtre mais ne regarda pas dehors. Il n'y avait rien à voir puisque la première chose qu'avait fait Severus en arrivant avait été de fermer les volets.

« Faire défaut à autrui ne devrait pas être important du moment que vous ne vous faites pas défaut à vous-même. »

Harry se retourna et s'appuya contre le rebord de la fenêtre. « Parfois je suis plus Serpentard que Gryffondor, mais dans ce cas-là, je suis plus Gryffondor que Serpentard. Un Serpentard recherche avant tout son propre intérêt. Un Gryffondor fait passer l'intérêt d'autrui avant le sien. Vous êtes comme moi à ce niveau-là, » Une pause, « Severus. » Severus ne dit rien quand il utilisa son prénom. Il ne fit qu'hausser un sourcil devant son audace. Harry baissa un peu la tête et poursuivit. « Je reconnais que j'ai les qualités des deux Maisons en moi, mais personnellement je ne veux pas choisir à laquelle j'appartiens le plus. Je préfère être Sans Maison plutôt que d'être considéré comme l'archétype d'une Maison. Je sais que les gens veulent me voir choisir et qu'ils s'attendent à ce que je choisisse Gryffondor. Comment puis-je être l'un ou l'autre quand je peux sentir que je suis les deux ? »

Severus se leva et se plaça devant Harry. Il prit son menton entre ses doigts et inclina son visage pour le regarder dans les yeux. « Vous n'êtes d'aucune et des deux. La réponse à votre question est en vous. Soyez ce que cela, » Severus posa sa main libre sur le cœur de Harry, « vous dit d'être. » Severus voulait être brusque, abrupte et cruel. Il se maudit dix fois de paraître bêtement se soucier de lui.

Severus voulut se reculer mais avant qu'il ait pu le faire, Harry avait posé une main sur la sienne ; « Et voilà le problème. Je veux être libre d'être moi-même, mais je sais que certaines personnes proches de moi n'accepteront pas la manière dont je me vois et les personnes avec lesquelles j'ai choisi de m'associer. » Il baisa la main et recula. « Je veux aimer qui je veux. »

Severus acquiesça, les muscles de sa mâchoire se crispèrent. « Alors faites-le, » Gronda-t-il. « Ne laissez personne vous arrêter. »

« Ce n'est pas si facile. Vous voyez, je pense que je vous aime, mais vous, vous allez m'arrêter. »

« Il n'y a aucun avantage pour moi là-dedans. » Severus avait commencé à reculer, mais il s'arrêta. Leur place était inversée, Severus n'aurait jamais admis ce qu'Harry avait dit ; savoir que le rejet était imminent lui aurait scellé les lèvres.

Severus était certain que tout cela était une erreur. Il était simplement l'objet d'un béguin mal placé. Harry finirait par le comprendre et par avancer.

Harry déglutit, ses yeux se fermèrent lentement et ses épaules s'affaissèrent. « J'avais raison. » Il secoua la tête, leva des yeux brillants d'insubordination et d'insolence. Exactement ce à quoi Severus s'attendait de sa part après des années passées à être son professeur.

Harry haussa les épaules et essaya de passer devant lui, mais il lui attrapa le bras et le tordit jusqu'à ce qu'il lui fasse à nouveau face. « Vous devriez savoir qu'avec moi vous n'avez jamais raison, Potter. »

« Vraiment ? » Il n'y avait aucun défi dans les yeux de Harry, juste de la lassitude et du renoncement. Ce fait dérangeait Severus, mais il ne l'admettrait jamais. Jamais.

Prenant une profonde inspiration, Severus laissa sa main libre caresser la joue de Harry avant d'incliner la tête et de couvrir de ses lèvres celles du jeune homme. Une petite voix lui disait qu'il faisait la plus grosse erreur de sa vie, mais il n'arrivait pas à s'en soucier surtout lorsque Harry ouvrit la bouche pour répondre à son baiser.

Il y avait quelque chose entre eux. Une chose tangible qui existait, faisait son chemin autour d'eux et les liait à un niveau complètement inapproprié. Severus l'aurait empêché, s'il avait su comment et s'il n'avait pas voulu garder cela. C'était de la folie, une folie douce et amère et il s'agrippait à elle alors qu'il rapprochait Harry de lui et approfondissait le baiser.