Attention, rien ne m'appartient. Les personnages appartiennent à J.K Rowlings et l'histoire à DragonLight
Résumé: En mission dans le passé pour Dumbledore, Harry voit son amant sous un nouveau jour, celui de professeur.
Ratings : R
Correctrice : AnthaRosa et Ishtar.
Attention, c'est un slash: SS/HP
Chapitre dix-neuf : Rêves, espoir et amour
Le passé
Harry faisait rarement attention au courrier du matin. Il ne s'était pas abonné à la Gazette du Sorcier dont les articles ne montraient pas suffisamment d'intégrité journalistique, et les magasines de Quidditch de cette époque étaient trop anciens pour lui. Il ne recevait jamais de lettres pour d'évidentes raisons. Mais ce matin-là, quelque chose attira son attention.
Un Faucon Pèlerin vola jusqu'à la table des Serpentards, un rouleau attaché à une serre. On ne voyait pas cela tous les jours. Les faucons étaient rarement utilisés pour distribuer du courrier parce qu'ils étaient peu fiables. Leur mauvais caractère n'en était pas responsable ; c'est juste qu'ils ne distribuaient pas d'eux-mêmes la lettre à la bonne personne. Le destinataire devait faire un signal au faucon. Et donc l'expéditeur et le destinataire devaient tous deux connaître le faucon.
Harry attendit.
Quelques instants après, un sifflement retentit à la table des Serpentards et le faucon se posa sur le bras tendu de Severus Snape. Harry plissa les yeux et essaya de deviner qui avait pu lui envoyer une lettre par faucon. Il lui fallut un moment pour rassembler les pièces du puzzle : son grand-père.
Il le regarda dérouler le rouleau et observer les lignes. Lucius essayait de se pencher pour voir ce qui était écrit mais Severus le repoussa. Le jeune homme avait blêmi. Il se leva rapidement et quitta la Grande Salle, sa robe virevoltant derrière lui.
Hpsshpss
Severus courut jusqu'au lac, le parchemin qu'il avait reçu ce matin serré dans sa main. Il s'installa sous son arbre préféré, un grand hêtre près du lac. Il était suffisamment grand pour le cacher si on le cherchait. Il ne voulait parler à personne.
Sa vie tombait en morceaux.
/ Severus,
Dire que je suis déçu serait en dessous de la vérité. Je suis furieux. Je n'ai jamais pensé que tu pourrais t'humilier à partager les passe-temps qui ont occupé ton père ces dernières années. Quand il m'a parlé de tes derniers exploits, je me suis demandé si c'était bien moi qui t'avais élevé. Je sais que j'ai perdu ton père ; t'ai-je aussi perdu ?
J'ai décidé de suivre Tom Jedusor longtemps avant qu'il ne soit connu sous le nom de Lord Voldemort. Grâce à cela, j'ai une position plus stable que celle de ses serviteurs qu'il nomme mangemorts. Pour une raison quelconque, ils trouvent ce titre admirable. Je le trouve repoussant et bien loin de la respectabilité d'un sorcier. Si j'avais su alors ce que je sais maintenant sur Voldemort, je n'aurais jamais choisi de le suivre.
Je te dis maintenant que Voldemort n'est pas sain d'esprit. Il est obsédé par la destruction de tous les moldus et de tous les sorciers et sorcières qui choisissent de s'associer avec ceux qui sont au bas de l'échelle dans notre société. Bien que je sois d'accord avec lui au sujet des moldus, des sang-mêlés et des sang-de-bourbe, je pense qu'il va débarrasser le monde sorcier de leur nuisance de la mauvaise manière.
Le meurtre n'est pas un passe-temps approprié pour un gentilhomme bien né. Pourtant il y prend plaisir. Je ne peux pas comprendre pourquoi tu as choisi de le suivre.
Je refuse d'avoir un meurtrier dans ma maison. C'est la raison pour laquelle ton père n'a pas le droit d'entrer dans le manoir. Cette interdiction est maintenant valable pour toi. Je ne veux ni te voir ni entendre parler de toi avant que tu n'aies trouvé un moyen de te sortir de la merde dans laquelle tu te trouves.
Ton père a gracieusement accepté de t'accueillir dans sa résidence de Londres. Je sais que tu n'aimes pas rester près de lui, mais souviens-toi : 'on récolte ce que l'on a semé'.
Solvanius Snape
Severus froissa le parchemin.
Il n'était plus le bienvenu chez lui. Le refuge du manoir lui était refusé. En fait, il devait vivre dans l'appartement de son père. On aurait aussi bien pu l'envoyer en enfer.
Il se rappelait les dernières vacances qu'il avait passées avec son père. Il avait à peine survécu aux crises de colère de son père qui le prenaient quand il était ivre. Sans parler du fait qu'il avait dû se promener sur le Chemin de Traverse puis à Piccadilly Circus en attendant que la pute que son père avait ramenée chez lui cette nuit-là parte.
Il soupira. Il avait d'autres options. Il n'était pas obligé de passer les vacances d'été avec son père. Peut-être pourrait-il convaincre sa belle-mère de le laisser rester avec elle en Italie. Il ne put réprimer un sourire ironique à cette pensée. Qui cherchait-il à tromper ? Ca n'arriverait jamais. Elle le détestait, lui et toute sa famille. Tout ça à cause de son père.
Il y avait toujours Lucius. Il était certain de pouvoir convaincre son ami de l'inviter pour une longue période, ce qui pourrait signifier l'été tout entier, ou presque. Lucius passait une grande partie de son temps seul. Ses parents voyageaient sans cesse et il partait rarement avec eux.
Mais cela l'aiderait-il ? Il avait perdu l'approbation de son grand-père. Tout ça à cause d'une erreur qu'il regrettait déjà. Rester avec Lucius ou avec son père ne l'aiderait pas à quitter le cercle des mangemorts.
Il serra les dents. Un serviteur. Voldemort pensait qu'ils étaient tous ses sous-fifres. Il n'était pas étonnant que son grand-père ne soit pas d'accord avec lui. Il avait toujours appris à Severus à être son propre maître, à n'être le subordonné de personne. Il aurait dû réfléchir plus longtemps à ce qu'il faisait.
Il n'avait aucun moyen de se sortir de cette situation. Du moins, il n'en voyait pas. Il n'y avait qu'une personne vers laquelle il aurait pu se tourner. Tyler. Mais il refusait de s'humilier en en lui demandant de l'aide. Pas après leur dernière conversation.
Hpsshpss
Harry regarda par la fenêtre de son bureau. Il avait entendu ses collègues dire que Severus n'avait assisté à aucun de ses cours de la journée. Personne ne l'avait vu – du moins personne ne disait l'avoir vu. Il avait l'impression que Hagrid devait le savoir mais il ne pouvait pas exiger qu'il lui dise où Severus se cachait.
Il avait réussi à ce que Severus le laisse tranquille. Ce n'était pas le meilleur moyen, mais il restait loin de lui. Et pourtant il savait que quelque chose n'allait pas. Il ne devrait pas s'impliquer mais il ne pouvait pas laisser Severus ainsi, blessé.
Harry se détourna de la fenêtre et décida d'explorer les alentours de Poudlard.
Hpsshpss
Severus ne remarqua pas qu'on s'était assis à côté de lui avant d'entendre son nom. Il sursauta et se retourna vers la personne qu'il ne voulait précisément pas voir. « Professeur Tyler. »
« M. Snape. » Tyler appuya sa tête contre l'arbre et regarda le ciel. « J'ai entendu dire que vous ne trouviez pas vos cours très attirants aujourd'hui. »
« J'avais des choses plus importantes à faire. »
« Comme quoi ? »
« Ne faites pas comme si ça vous intéressait, professeur. » Railla Severus.
« Mais je m'inquiète pour vous. »
« Parce que je suis simplement un autre putain d'élève ? »
Le professeur eut un regard songeur. « Pas exactement. Bien que je regrette certaines choses, vous ne pouvez plus n'être qu'un élève pour moi. » Severus leva la tête mais Tyler ne parlait plus. « Ce qui ne veut pas dire que je me soucie plus de vous que d'un autre élève. Du moins pas à ce point. » Les yeux de Tyler étaient lointains comme s'il était perdu dans ses souvenirs.
Severus ne répondit pas. Il ne savait ni quoi dire ni comment réagir. Il avait essayé de cacher la rougeur qui couvrait ses joues, en tournant la tête. Il avait une chance – pas maintenant —mais il avait encore une chance. Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais la referma rapidement.
Il ne voulait pas que Tyler lui explique pourquoi ils ne pouvaient pas être ensemble maintenant. Il les avait suffisamment entendues. Et il ne voulait pas compromettre ses chances pour le futur. Tyler pouvait revenir sur ses paroles. Le silence se prolongea. Severus avait besoin de dire quelque chose. Pour interrompre les pensées de Tyler. Ou pour arrêter les siennes. « Ce n'est qu'un problème de gosse, professeur. Et vous n'êtes pas intéressé par les enfants. »
« Je leur enseigne. Ou faisiez-vous référence à autre chose ? »
« Ca n'a pas d'importance. »
« Je ne suis pas d'accord. »
Un soupir douloureux. « Bien entendu que vous n'êtes pas d'accord. »
« Voulez-vous m'expliquer ce commentaire ? »
« Pas vraiment. »
Severus l'entendit remuer mais il refusa de tourner la tête pour voir si Tyler se levait pour partir. Il continua à observer le lac. « Je pense qu'il vaudrait mieux. »
« N'est-ce pas ce à quoi vous vous attendiez ? Une réponse puérile émanant d'un enfant ? »
L'homme à côté de lui ne répondit pas. Peut-être qu'enfin quelque chose se passerait comme il le voulait et que Tyler le laisserait tranquille.
« Je ne suis pas un enfant, vous savez. »
« Vous le croyez sincèrement ? »
« J'ai seize ans. »
Il entendit un doux rire. « Ce qui ne veut pas dire que vous pensez comme un adulte. »
« Ce n'est pas vrai. Je pense comme un adulte. J'ai pris des décisions d'adulte, non ? »
« Que considérez-vous comme une décision d'adulte ? Devenir un mangemort ? »
Il acquiesça. C'était une décision qu'il avait prise seul, même s'il avait eu l'aide de Lucius.
« Ce n'était pas une décision d'adulte. C'était une décision stupide. » Severus pouvait pratiquement entendre le dédain dégouliner des mots.
« Je suis responsable de la mort de quelqu'un. »
« Ah. Alors être responsable d'une mort rend adulte ? Je ne pense pas. »
Severus resserra sa prise sur sa lettre. Sa voix ne fut qu'un murmure. « Si. Et ça fait aussi de moi un meurtrier. »
« Etre 'responsable' d'un meurtre et le commettre sont deux choses totalement différentes. Mais ça ne fait pas de vous un adulte. »
Severus jeta un oeil vers son professeur et le vit se frotter les yeux d'un air fatigué. Il ne comprenait pas comment Tyler pouvait penser que tuer une personne ne faisait pas de lui un adulte. Severus se sentait adulte après cette réunion. Et la lettre de son grand-père….
« Si être responsable d'une mort est le point de départ de l'accession à l'âge adulte, alors je le suis devenu à quelques mois. Mes parents ont été tués à cause de moi. »
« Ca n'a pas de sens. Vous ne pouviez pas vous savoir que vous étiez responsable. »
« Très bien, je vous l'accorde. La première fois que j'ai tué une personne de mes propres mains, j'avais onze ans. La fois suivante, j'étais responsable d'une mort, j'avais quatorze ans. »
Severus se tourna finalement vers Tyler et le regarda d'un air choqué. « Onze ans ? »
« Je ne le voulais pas le faire et je ne l'avais pas prévu. Mais il essayait de me tuer. » Tyler se tut et regarda le lac. « Vous vous considérez comme un adulte parce que vous avez assisté à un meurtre alors dites-moi, quand avez-vous tué une personne de vos propres mains en connaissant la portée de votre action et les conséquences qui en découlent ? »
Severus regarda le sol. « Jamais. »
« Je vois. La première fois que je l'ai fait, j'avais seize ans. J'ai utilisé le sort de mort. »
Severus ne savait pas quoi dire. Etre capable d'utiliser le sort mortel, de le réussir avant d'être un sorcier complet était étonnant.
« Ne me dites pas qu'être capable de tuer une personne de sang froid est une qualification pour accéder à l'âge adulte. Ca ne l'est pas. Et je ne m'en sentais pas un après. J'avais l'impression d'être un meurtrier même si c'est arrivé parce que je me nous défendais moi et des compagnons plus jeunes. »
Severus se frotta les yeux.
« Si vous ne vous basez que là-dessus pour dire que vous êtes un adulte alors je vous suggère de reprendre le proverbe qui dit qu'il faut tout reprendre à zéro. »
« Excusez-moi ? »
« C'est simplement une expression moldue. »
Ils retombèrent une fois de plus dans le silence. Les yeux de Tyler étaient toujours dans le vague.
« Et si vous deviez vous prendre en charge ? Est-ce que cela compte ? »
« Quoi ? »
« Mon grand-père a décidé qu'il ne pouvait pas nourrir un meurtrier. Je dois vivre avec l'autre meurtrier de la famille, mon père. »
« Et votre père n'est pas vraiment intéressé par votre bien-être. »
Ce n'était pas une question et Severus ne la prit pas comme telle. Il se tourna pour pouvoir regarder Tyler. On aurait dit qu'il pensait à quelque chose, mais à quoi ? A part ce qu'il avait laissé entrevoir après la réunion des mangemorts, Severus n'avait pas parlé de sa famille. « Mon père ne s'intéresse à personne d'autre qu'à lui. »
« Etes-vous proche de votre grand-père ? »
« Il est la seule personne que je considère comme faisant partie de ma famille. » Il lui tendit la lettre. Tyler la prit et la regarda. Il la lut silencieusement. Severus essaya de ne pas le regarder, mais ses yeux revenaient sans cesse sur l'expression songeuse et inquiète de l'homme plus âgé.
« Vous n'êtes pas un meurtrier. » La voix de Tyler était si dure que Severus en frissonna.
« Je pense que ça dépend de la personne à qui vous parlez. »
Tyler ne répondit pas. Severus espérait qu'il le ferait.
« Puis-je réparer cela ? »
« Réparer quoi ? »
« Tout. Ma vie. » Severus soupira. « Pendant que j'y suis, pensez-vous que je puisse arrêter de vous aimer ? »
« Un béguin n'est pas de l'amour. Vous aimez ce que vous pensez voir en moi, pas ce qu'il y a vraiment. » Tyler remua jusqu'à ce se retrouver accroupi sur la pointe des pieds. Ses yeux verts brillaient d'une douleur que Severus ne comprenait pas. « Quant à votre autre question, c'est votre vie. Personne, moi y compris, ne peut vous aider à la réparer. J'ai peur que vous ne soyez livré à vous-même. » Tyler se leva et Severus l'observa disparaître vers le château.
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Cette nuit-là, Severus se promenait en haut de la Tour d'Astronomie. Les cachots des Serpentards lui paraissaient oppressants et il ne voulait pas essayer de sortir en douce du château pour s'asseoir près du lac ; la vue qu'on avait de la tour était tout aussi belle.
Il poussa la porte et regarda autour de lui. Il pensait qu'il n'y avait personne. Il avait tort. Assis sur le sol, le dos contre le mur, se trouvait le professeur Tyler.
« M. Snape. » Il avait les yeux fermés.
« Comment avez-vous su que c'était moi ? »
« Vous êtes le seul élève à sortir régulièrement après le couvre-feu. » Un œil vert s'ouvrit pour le regarder. « Qu'est-ce qui vous amène ici ? »
Severus se lécha les lèvres. Il était monté ici pour réfléchir, mais il ne voulait pas le lui dire. « Je ne sais pas. »
« Je vois. »
Le silence régna un moment. Severus ne pouvait pas réfléchir avec Tyler appuyé contre le mur.
« Rêvez-vous? » Lui demanda Tyler d'une voix calme.
« Parfois. Je m'en souviens rarement. »
Le coin de la bouche de Tyler se releva. « Ce n'est pas ce dont je parlais, mais c'est tout de même amusant. »
Severus inclina la tête. « De quoi parliez-vous ? »
« J'ai abandonné mes rêves il y a longtemps. »
« Pourquoi ? »
Tyler sursauta comme s'il avait été ailleurs et qu'il avait oublié que Severus était dans la pièce. Comme s'il parlait à une autre personne. « Seuls les idiots ont des rêves. » Sa voix était beaucoup plus forte qu'elle ne l'avait été.
« Ce n'est pas vrai. Si vous n'avez pas de rêves, alors qu'avez-vous ? »
Tyler ne répondit pas, mais Severus ne s'était pas attendu à une réponse.
« J'ai toujours rêvé de devenir un expert en potions et de travailler avec mon grand-père. Récemment, j'ai rêvé de pouvoir et de respect, choses que je n'avais pas l'impression d'avoir. J'ai pensé que si je les avais alors vous voudriez de moi. » Severus soupira. « J'ai passé trop de temps à réfléchir à ce genre de choses. »
Tyler ouvrit les yeux; si Severus s'était attendu à une réponse, mais les yeux froids de son professeur lui firent comprendre qu'il n'y en aurait pas.
« J'espérais que vous finiriez par me remarquer. A me voir autrement que comme un élève. Me voir comme un égal. » Severus ne le quitta pas des yeux. « J'avais espéré que vous m'aimeriez. C'est cet espoir qui me fait avancer. Parce que je vous aime. »
L'expression de Tyler ne changea pas. Il continua à regarder Severus avec des yeux froids, presque dénués d'émotion.
« Et ce n'est pas non plus un béguin. Ca ne peut pas l'être. C'est trop douloureux quand vous dites que ce n'est pas de l'amour. »
Tyler plissa les yeux qui devinrent plus brillants. Severus était enfin parvenu à obtenir une réaction de cet homme, mais maintenant il n'était plus sûr d'en vouloir une. « Vous pensez que c'est douloureux ? » Tyler secoua la tête. « Vous parlez de rêves, d'espoir et d'amour. Vous ne savez pas vraiment ce que c'est. Vous pensez que tout est aussi simple ? Ca ne l'est pas. » Tyler se leva et fit face à la fenêtre ouverte. « Ne faites pas de moi votre espoir. »
Severus le regarda simplement. A cet instant, Tyler semblait beaucoup plus vieux qu'avant.
« Ne comprenez-vous pas ? La vie n'a rien à voir avec les rêves. La vie est douloureuse, obscure et futile. Et si vous avez encore quelque chose à espérer une fois que vous réaliserez ça, alors vous comprendrez ce qu'est l'espoir. »
« Mais - »
« Et l'amour. La seule chose que vous avez compris est qu'être amoureux est douloureux, mais il ne l'est pas pour les raisons que vous m'avez données. L'amour est beaucoup plus que cela. L'amour c'est se battre, s'il le faut, jusqu'au bout. C'est faire n'importe quoi pour celui qu'on aime. C'est mourir pour lui. » Tyler se retourna pour le regarder.
Et Severus se rendit compte que son professeur aimait profondément quelqu'un. Ou avait été amoureux. Même si Tyler essayait de le cacher, il voyait la douleur dans ses yeux.
« L'amour n'est pas toujours une expérience heureuse. C'est quelque chose pour lequel vous devez vous battre parce que cela ne finit pas toujours bien. Seuls les imbéciles croient aux contes de fée. »
« Professeur ? »
Tyler secoua la tête. « Ne dites rien. »
Severus acquiesça. Que pouvait-il faire d'autre ?
« Vous êtes un jeune homme brillant, Severus Snape. Vous êtes fier et, si je ne me trompe pas, résolument loyal. Vous devez simplement choisir à qui et à quoi vous voulez être loyal. »
Tyler s'éloigna de la fenêtre et s'approcha de lui. Severus ferma les yeux, ne sachant à quoi s'attendre.
Il sentit une main froide toucher sa joue. Il ouvrit les yeux et vit Tyler à quelques centimètres de son visage.
« Je ne vous aime pas et j'en suis désolé. Mais je suis sûr que je pourrais aimer l'homme que vous deviendrez un jour. »
Et avant que Severus ne puisse faire ou dire quoi que ce soit, Tyler posa ses lèvres contre les siennes un bref instant. Puis il brisa le baiser et partit.
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Le Futur : Harry a 20 ans
Drago s'arrêta dans le couloir et regarda un groupe d'élèves qui se dispersaient à la vue de Severus. On aurait dit que celui-ci était redevenu celui qu'il était avant. Quand il n'était pas encore avec Harry.
C'était un changement assez subtil et il n'était visible que si on le connaissait bien. Les rides autour de ses yeux étaient plus profondes, comme s'il n'arrêtait jamais de menacer les gens de son regard. Il n'était pas aussi indulgent avec les élèves mais ce n'était pas nouveau. Il n'avait jamais été indulgent avec eux. Il enlevait plus de points. Drago avait entendu des rumeurs disant qu'il enlevait des points même à sa propre Maison.
Pour la plupart des résidents de Poudlard, rien n'avait l'air de sortir de l'ordinaire chez le Maître des potions. Drago doutait qu'il l'aurait lui-même remarqué s'il n'avait pas aussi bien connu l'homme.
Il observa Severus marcher avec raideur dans le couloir, et s'approcher de lui. « Severus. »
Severus s'arrêta et haussa un sourcil.
« Comment vas-tu ? »
Severus cligna des paupières.
Drago s'éclaircit la gorge. « Je vois. As-tu vu Harry dans les parages ? »
Ce commentaire lui valut ce que les élèves appellaient 'le regard de la mort qui tue' (je sais que c'est redondant, mais c'est plus familier et donc plus adapté ici) et un grognement. Severus tourna immédiatement les talons et continua son chemin.
Drago secoua la tête. Ca aurait pu mieux se passer.
Cela faisait plus d'une semaine qu'il n'avait pas vu Harry. Severus ne lui avait pas parlé de lui depuis. Si quelque chose s'était passé entre eux, Drago était certain qu'il l'aurait su. Pas de Severus. Cet homme ne parlait jamais de sa relation avec Harry à une autre personne qu'avec son amant. Mais d'Harry. Après tout, à qui d'autre qu'à son ancien camarade de classe pouvait-il se plaindre de la grande chauve-souris à laquelle il s'était attaché ?
Il était possible que rien ne se soit passé et qu'Harry soit en mission. Le Ministère le faisait travailler plus durement encore qu'auparavant et ça impliquait en général de nombreuses piles de papiers inutiles, et pas du vrai travail.
Il n'y avait qu'un moyen de découvrir le fin mot de l'histoire. Si une personne savait ce que faisait Harry, c'était la belette.
Drago descendit rapidement le hall et entra dans le bureau de Granger. Si la belette savait quelque chose alors Granger le saurait aussi.
Lorsqu'il entra, Granger leva la tête de ce qu'elle écrivait. Elle plissa les yeux en le regardant passer à côté des piles de parchemins et des placards remplis. Il s'arrêta devant son bureau, prit la pile de parchemins qui se trouvait dessus et, sans regarder autour de lui, il la laissa tomber sur le sol sans remarquer qu'ils s'étaient éparpillés. Il s'assit.
« Que veux-tu, Malfoy ? »
Drago lui fit son sourire le plus charmeur. « Vous êtes absolument ravissante aujourd'hui, Mlle Granger. » Il se pencha en avant, prit une de ses mains pour la baiser, mais elle enleva brutalement sa main.
« Garde tes sales pattes loin de moi ! »
Drago essaya de paraître désolé, mais il n'avait pas encore maîtrisé cette expression. « Je suis vraiment désolé. Ne sommes-nous pas censé faire une recherche pour Albus, aujourd'hui ? »
Granger souffla d'exaspération. « Nous étions censés le faire il y a deux jours. J'ai terminé. Ne t'inquiète pas, j'informerai Dumbledore des conclusions que j'ai trouvées quand je le verrai cet après-midi. »
Drago ne répondit pas. Maintenant qu'il n'avait plus à s'inquiéter de cette recherche, il pouvait se concentrer sur le meilleur moyen d'exprimer sa requête.
« Tu n'es pas obligé de rester, » Continua-t-elle. « En fait, Malfoy, je préfèrerais que tu partes. N'as-tu personne d'autre à ennuyer ? »
Drago eut un sourire en coin. « Non pas vraiment. Je n'ai que toi. »
« Sors d'ici ! »
Parfait. « Dès que tu m'auras dit comment contacter la belette. »
Granger posa brutalement sa plume. « Je ne connais aucune belette. En fait, le seul rongeur que je connais est une fouine et elle est assise devant moi. »
« Très drôle. »
« C'est aussi mon opinion. »
Drago regrettait une fois de plus de ne pas avoir réussi à contacter Harry tout seul. « Comment puis-je parler à M. Weasley ? »
Granger lui sourit diaboliquement. « Lequel ? Ils sont nombreux tu sais. Plusieurs travaillent au même Ministère. Je suis certaine que tu peux trouver celui que tu cherches à son bureau. »
Il la regarda avec des yeux noirs.
« Par exemple, le M. Weasley peut se trouver au bureau des Détournements de l'Artisanat Moldu. »
« Ne m'oblige pas à le dire. »
Hermione cligna des yeux d'un air innocent. « Dire quoi ? »
« Bien. » Il inspira profondément. « Comment puis-je contacter Ronald ? »
« Je suppose qu'il est resté dans le même bureau toute la semaine. »
« C'est-à-dire ? »
« Dans le bureau de Harry. »
Drago la regarda fixement. « Que fait-il là-bas ? »
« De la paperasse j'imagine. »
« N'est-ce pas le travail de Harry ? »
Granger mordit sa lèvre inférieure. « Ca le serait si quelqu'un savait où il était. »
Ca sentait mauvais. « Que veux-tu dire par là, Granger ? »
Elle soupira et posa ses mains sur son bureau. « Je veux dire qu'il a disparu. »
Drago eut l'impression de manquer d'air. Il inspira plusieurs fois. « Ca ne t'inquiète pas ? »
Les yeux d'Hermione étincelèrent. « Bien sûr que je suis inquiète ! Il est l'un de mes meilleurs amis. Et sans un – crétin comme toi, nous saurions probablement où il est. »
Il était presque sûr qu'elle avait voulu le traiter de quelque chose de pire qu'un crétin. « Qu'ai-je fait ? »
Elle leva les yeux au ciel. « Laisse-moi réfléchir. Peut-être l'as-tu trompé ? »
Il passa une main dans ses cheveux. Quand ce n'était pas Sirius ou Remus qui lui rabâchaient qu'il avait brisé le cœur de Harry, c'était quelqu'un d'autre. Quand ces idiots allaient-il aditionner deux et deux ? Ce n'était pas si dur que ça de voir que lui et Harry n'avaient jamais été ensemble. « Ce n'est pas ce que tu penses. Harry moi ne nous voyions plus aussi souvent qu'avant. Il préfère ne pas passer tout son temps libre avec moi. »
« Parce que tu l'as trompé. »
« Parce qu'il est tendu à cause de son travail. » Il se leva. « Es-tu certaine de ne pas avoir eu de ses nouvelles ? »
Elle reprit sa plume. « Absolument. »
« Je m'en vais alors. »
« Bon débarras. »
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Drago regarda la porte du bureau que Weasley venait de lui claquer au nez. Leur conversation n'avait pas duré plus de cinq minutes. Apparemment, Weasley devait effectivement faire toute la paperasse de Harry. Ses yeux rouges et ses traits tirés l'attestaient. Ce n'était pas la première fois que Drago se demandait combien de kilomètres de parchemin passaient par ce bureau.
Mais ce là n'était pas la question. Weasley ne l'avait pas du tout aidé. Tout ce qu'il avait dit était, « Personne ne sait où est Harry, espèce de connard, et c'est de ta faute. » Et il avait poursuivi par, « Sors de mon bureau. »
Drago n'avait pas pu s'empêcher de répondre qu'il n'était pas dans son bureau. C'était alors qu'il avait pris la porte brutalement en pleine figure. Personne ne lui montrait aucun respect.
Il lui restait une personne à voir. Maugrey. Drago se dirigea vers son bureau avec une légère appréhension. Maugrey n'aimait pas vraiment les Malfoy, après tout.
« Entrez dans mon bureau, la fouine. » L'homme était aussi bizarre que Dumbledore et était capable de voir à travers les portes et les capes d'invisibilité. Au moins, Drago savait comment Maugrey y parvenait. Ce maudit œil.
Drago se posta en face du bureau. C'était le premier bureau dans lequel il entrait qui n'était pas couvert de parchemins éparpillés. Il pouvait voir le sol en bois.
« Que voulez-vous ? »
« Je me demandais si vous pouviez me dire comment contacter Harry. »
« Vous n'abandonnez jamais, hein ? Personne n'a pu vous donner de réponses alors vous venez ici. Dumbledore, Granger et Weasley n'avaient pas les réponses ? »
« Etes-vous de la même famille que Dumbledore par hasard ? »
« Ce vieux fou ? Certainement pas. » L'œil de verre de Maugrey se déplaça à l'arrière de sa tête. Ca avait toujours dérangé Drago. « Je ne sais pas où est Potter. Et si je le savais, je ne pourrais pas vous le dire. Il reviendra probablement. »
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Deux semaines après, Drago n'avait toujours pas eu de nouvelles de Harry et Severus était plus insupportable encore. Il avait essayé de prévenir Dumbledore que le Maître des Potions allait détruire Poudlard et devrait être envoyé en vacances, mais en vain.
Ca empira encore lorsque la Gazette du Sorcier en fit son scoop.
Il était assis entre Severus et Pompom pour le petit déjeuner, comme d'habitude, quand les hiboux apportèrent le courrier. Les professeurs et le personnel recevaient le leur en premier, c'est pourquoi Drago ne fut pas surpris quand la première chose qui tomba devant lui fut la Gazette. La surprise vint quand il lut les gros titres, « CELUI QUI A SURVECU A DISPARU avec quatre autres Aurors. »
« Accio, Accio, Accio Gazette du Sorcier ! » Severus ne devait pas voir ça. Il ne devait pas savoir ça. C'était mauvais. Des piles de journaux s'envolèrent vers lui ; peut-être n'était-ce pas une si bonne idée.
Enterré sous la pile de jouraux, il essaya de se rappeler le sort pour brûler le papier. Il devrait s'en souvenir, c'était si facile. « Pyro... »
On prit la Gazette qui se trouvait sur sa tête. Des yeux d'obsidiennes rencontrèrent les siens. « Incendio. » Tous les journaux prirent feu.
Ce n'était définitivement pas l'une de ses meilleures idées.
Drago se débarrassa des cendres et s'arrêta en entendant un grésillement.
« Ne vous en faites pas mon cher, je m'en charge. » Il sentit la main de Pompom dans ses cheveux.
« Tu as mis le feu à mes cheveux. » Il tourna la tête et vit Severus lire la première page de la Gazette. Oh merde.
Sans avertissement, Severus se leva et quitta la table, abandonnant la Gazette sur son assiette vide. Drago prit le journal et allait le réduire en cendres lorsque Albus le lui prit des mains.
« Allons Drago, partagez les nouvelles. » Le scintillement des yeux du directeur s'amoindrit rapidement. C'est lui qui jeta l'Incendio.
Hpsshpss
Quelques jours plus tard, alors qu'il se dirigeait vers la Grande Salle, Drago passa devant les sabliers qui comptaient les points de chaque Maison. En temps normal, il ne leur jetait qu'un regard rapide, juste pour être sûr que Serpentard était toujours en tête, mais là il s'arrêta net. Gryffondor était à 50 points en-dessous de zéro. (je sais que je rajoute un chiffre, mais je n'ai pas trouvé une autre tournure compréhensible et française ) Il avait cru qu'il était impossible que les points d'une Maison tombent en-dessous de zéro, mais le sablier en était la preuve. Les Poufsouffles n'étaient pas loin devant. Ils avaient un peu plus de vingt points. Les Serdaigles soixante-dix. Et les Serpentards… les Serpentards avaient à peine cent points !
Il s'approcha et regarda le décompte. La plupart des points avait été enlevés par Snape.
Ce n'était pas bon signe. Drago avait entendu dire que Severus enlevait des points à droite et à gauche pour la plus petite infraction. Mais qu'il enlève des points à sa propre Maison ? Quelque chose n'allait vraiment pas. Il avait la sensation écrasante que ça avait un rapport avec la disparition de Potter.
Il était censé aller à l'infirmerie mais il décida de passer par les cachots. Il fallait arrêter ce délire. Les professeurs essayaient de compenser la rapide perte de points, mais c'était tout ce qu'ils pouvaient faire. Presque tous étaient restés loin de Severus cette dernière semaine – y compris Drago.
Il ouvrit la porte de la salle de potions et entra. Gryffondors et Poufsouffles de cinquième année. Le pire du pire. « Professeur Snape ? »
Severus tournoya et regarda Drago. Il lui fallut toute sa volonté pour s'empêcher de déglutir inconsciemment. Il n'allait pas laisser Severus l'intimider. « Trente points en moins pour Serpentard, M. Malfoy. Que voulez-vous ? »
« Vous ne pouvez pas enlever des points à Serpentard à cause de moi, professeur. » Du moins il l'espérait. Il sourit presque de satisfaction mais se retint. « Je devais venir. Madame Pomfresh insiste. Elle dit qu'elle a besoin de vous à l'infirmerie. Elle était catégorique, je devais venir vous le dire immédiatement. »
« Vous dites n'importe quoi. Sortez de ma salle de classe, Malfoy. »
Il devait y avoir un moyen de faire sortir Severus de la salle de classe et de l'obliger à aller à l'infirmerie. Une fois là-bas, il ferait en sorte que Pompom lui administre un tranquillisant. Après tout, elle avait menacé de le faire toute la semaine. « Mais monsieur, elle a dit que vous aviez évité tout examen médical ces cinq dernières années et que vous deviez aller la voir. Des inspecteurs vont venir vérifier les dossiers médicaux du personnel demain. »
Severus grogna et se posta devant Drago. Le jeune homme dut incliner la tête pour le regarder en face.
« Alors que dieu vous aide, Malfoy ; si vous avez menti je vous utiliserai comme ingrédient pour potions. » Severus sortit de la salle à grands pas et Drago se remit à respirer. C'était la première fois qu'il prenait cette menace au sérieux.
Il se reprit et fit face à la classe. Ils le regardaient tous, les yeux écarquillés. « Que regardez-vous ? Je viens d'épargner à vos deux Maisons des points négatifs. » Drago prit un livre sur un bureau. Il le feuilleta et s'arrêta sur une page au hasard. « Celle-ci a l'air bien. Je ne sais pas ce que c'est, mais il y a des questions page 190. Répondez-y. »
Il reposa le livre et s'assit sur la chaise de Severus. Il prit un livre et le feuilleta. C'était un livre sur les 'Rituels Obscurs', Severus ne lisait pas ce genre de livres d'habitude. Il le referma et regarda la couverture. « 1001 potions que chaque Maître devrait connaître. »
Hpsshpss
Drago passa les jours suivants à éviter Severus à tout prix. Il n'aimait vraiment pas l'idée que ses organes servent à plusieurs des potions de Severus. Il préférait qu'ils restent à leur place.
Mais il allait devoir lui parler tôt ou tard. Son comportement ne pouvait pas durer. Que les élèves marchent sur des œufs avec lui était une chose, que les professeurs le fasse en était une autre. Pourtant c'était ce qu'ils faisaient tous.
De plus, s'il continuait à se comporter ainsi, on commencerait à se demander pourquoi. Et cela provoquerait beaucoup de questions que Drago n'avait pas envie que les gens se posent. Surtout pas Voldemort.
Il s'arrêta et frappa à la porte. Il ne savait pas si Severus répondrait ou non. Après tout, cet homme ne parlait à personne.
Cependant la porte s'ouvrit et il entra dans la pièce sombre. Il fallut un moment pour que ses yeux s'ajustent à la lumière mais quand ils le firent, il vit la tête de quelqu'un assis sur le canapé. Il fit le tour pour voir de qui il s'agissait.
Il s'arrêta au milieu de son avancée.
C'était Harry. Il avait l'air épuisé comme s'il avait fait traversé le Grand Lac à la nage et qu'il était passé dans la boue et les eaux usées.
« Quand es-tu revenu ? »
Un oeil s'ouvrit. Drago pouvait à peine dire qu'ils étaient verts tant les pupilles étaient dilatées. « Une demi-heure. J'essayais de dormir. Que veux-tu ? » Sa voix était rauque. On aurait dit qu'il avait reçu le Doloris trop souvent et qu'il n'avait pas eu accès aux bonnes potions après.
« Rien. Je m'en vais. »
L'autre oeil s'ouvrit. « Est-ce que tu vas bien ? »
« Moi oui. J'espère que toi aussi, bye. » Il partit rapidement.
Hpsshpss
Harry avait sombré dans un sommeil de plomb à la seconde où la porte s'était refermée derrière Drago. Le comportement de son ami était bizarre, mais pas suffisamment bizarre pour perdre le peu de temps qu'il avait pour dormir à y penser.
Il eut l'impression qu'une seconde à peine s'était écoulée quand il fut réveillé par le claquement de la porte. Severus devait être revenu. Il remua doucement et se tourna vers son amant.
Severus le regardait fixement, les yeux froids, les bras croisés sur sa poitrine. Ce qui rappelait beaucoup trop à Harry son comportement quand il était élève.
« Que fais-tu ici ? »
Harry haussa un sourcil. « Il me semble que je vis ici. » Harry s'affala sur les coussins.
« Vraiment ? J'ai cru que tu avais disparu. » Il avait étrangement accentué le dernier mot, ce qu'Harry ne comprenait pas entièrement. « Où étais-tu ? »
Il laissa ses yeux se fermer. Severus était certainement en colère parce qu'il n'avait pas pu rester en contact avec lui, rien de plus. Ca passerait. « Rio. »
« Rio ? As-tu aimé observer les garçons peu vêtus sur la plage, Harry ? »
« Je n'ai pas eu l'occasion d'aller à la plage, alors je dois dire non. »
« Mais tu as passé trois semaines là-bas ? »
Harry ouvrit les yeux. Le ton de Severus n'avait pas changé. Il avait toujours l'air aussi énervé. « Je n'ai pas passé trois semaines à Rio. J'ai passé une journée à Rio, nous avons rencontré des représentants du Ministère de l'Amérique du Sud et le jour suivant, un guide nous a emmenés en Amazonie. J'ai passé le reste de mon temps là-bas sauf hier quand je suis retourné à Rio pour revenir ici par Portoloin. » Harry bougea mais moins prudemment. Il grogna alors que la douleur parcourait sa poitrine.
« Que s'est-il passé ? »
« Zabini. L'idiot pensait que ce serait une bonne idée que j'adopte un foutu anaconda. » Harry imita la voix de Zabini. « Etre un Fourchelangue et tout. »
Harry regarda les mains de Severus tomber le long de son corps. « Tu étais en mission ? »
« Où aurais-je pu être d'autre ? » Et il se rendit compte que Severus avait cru qu'il avait tout fui. Il essaya tant bien que mal de se lever.
« Je ne sais pas. » Severus le regarda. Il savait de quoi il avait l'air. Il avait fait l'erreur de se regarder dans un miroir avant de s'effondrer sur le canapé. « Quelle était exactement cette mission ? »
Harry soupira. Il avait l'impression de faire à nouveau son rapport. Peut-être que pour une fois Severus apprécierait la version courte. « Voldemort a décidé qu'il devait améliorer son pouvoir de Fourchelangue. Oublie Nagini – pourquoi se contenter d'un énorme serpent quand il peut en avoir plus ? Il a essayé de contrôler de jeunes anacondas. Suffisamment grands pour ce qu'il voulait mais pas aussi dangereux que des adultes. Mais ils n'écoutaient pas très bien. »
« Continue. »
Harry reprit sa place sur le canapé. « Presque tout ce que l'on sait sur les anacondas est faux. Il y a une grand part de mysticisme dans les connaissances des originaires de l'Amazonie. Voldemort a pris cette information telle quelle. » Harry sourit en coin. « En d'autres mots, il n'a pas fait son travail. »
Severus répondit lui aussi par un sourire en coin. Mais le moment de complicité passa rapidement.
« Il semblerait que bien que dangereux – quel grand serpent ne l'est pas – ils ne sont pas les machines à tuer que l'on croit, ils n'ont besoin de manger que quatre fois par jour. »
« Il a essayé de leur donner trop à manger ? »
« En gros. Ils sont devenus indisciplinés et, puisqu'ils ne s'occupaient pas bien de ceux qu'ils avaient attrapés, les serpents se sont effrayés et ont attaqué tout ce qui était sur leur chemin. Voldemort avait l'air content. »
« Pourquoi l'un d'eux ne l'a pas mangé ? »
Harry éclata de rire. « J'aurais bien voulu. On n'a pas eu autant de chance. Quand nous sommes arrivés, Voldemort avait commencé à faire la même chose avec des adultes. Le plus grand faisaient près de quarante pieds de long. Je pense qu'il était devenu fou. Si tant est qu'un serpent le puisse. »
« Est-ce celui que Zabini souhaitait te voir adopter ? »
« Comment as-tu deviné ? Il m'a presque étouffé. J'en ai encore les côtes endolories. » Harry ferma à nouveau les yeux.
« Que penses-tu être en train de faire ? »
« J'essaye de dormir. »
« Ici ? »
Harry ouvrit à nouveau les yeux pour regarder Severus. « Il faudrait bien trop d'énergie pour aller jusqu'au lit. Y-a-t-il un problème ? » Ses yeux se refermèrent. Il sentit le canapé s'affaisser à côté de lui.
« Est-ce une si bonne idée ? »
« Je suis sûr qu'un lit serait beaucoup plus confortable, mais -»
« Non, être ici, dans les cachots. »
Il devait avoir mal entendu. Severus ne venait pas de prendre le même ton que lorsqu'il était élève, avant qu'il n'ait réussi à le convaincre qu'il l'aimait. Les nuances qu'il entendait étaient des illusions de son esprit extrêmement épuisé. « Je ne sais pas de quoi tu parles. »
« Je pense que si. »
Harry abandonna l'idée d'essayer de dormir. Il n'allait pas réussir. Il ouvrit les yeux et se tourna vers Severus, mit un pied sous lui et essaya de dissimuler une grimace de douleur. « Est-ce parce que je ne suis pas sûr de vouloir m'unir à toi ? »
« Non. »
« Alors de quoi s'agit-il ? »
Severus détourna la tête. Harry ne savait pas ce qui se passait. Severus n'avait jamais été…S'il ne savait pas que c'était impossible, il dirait que Severus se sentait anxieux.
Harry tendit la main et la posa sur la cuisse de Severus. Il sentit le muscle se crisper sous ses doits. « Parle-moi. »
« Je n'ai pas envie de parler à un idiot de Gryffondor pour l'instant. Je préfèrerais que tu partes. »
« Je sais que cet arrangement ne fonctionne pas. Je ne dors pas assez et je continue à te déranger quand je rentre à la maison. J'ai parlé avec Ron de l'éventualité de retourner dans son appartement. Puisque j'ai quelques jours de repos, je pensais rester ici et nous en aurions discuté plus tard. »
Severus repoussa la main de Harry et se leva. Alors ce n'était pas ce que Severus avait voulu dire et Harry venait sûrement simplement d'empirer les choses. Il se massa le front.
« Plus tôt tu partiras, mieux ce sera. »
Les ongles de Harry égratignèrent sa cicatrice et sa main se crispa en un poing. « Putain, que se passe-t-il Severus ? »
Severus allait se servir un verre, mais reposa la carafe en entendant les paroles de Harry. « Tu ne jures pas d'habitude. »
« Si quand je n'ai pas dormi plus de 20 heures en trois semaines et que je rentre pour découvrir que tu es en colère contre moi ! Qu'ai-je encore fait ? »
Severus leva son verre et but une gorgée.
Harry passa une main dans ses cheveux. « Dis-le moi, s'il te plaît. »
Severus se tourna pour le regarder, les bras croisés, et s'appuya contre la table derrière lui. « Tu es un Gryffondor stupide, idiot et insolent. »
« Je t'aime, aussi…. » Harry ferma les yeux, et la fin de la conversation qu'ils avaient eue trois semaines auparavant résonna dans ses oreilles. « Je -»
« Pars. Et pour ta gouverne, Potter, » Harry tressaillit, « le seul vieux fou de ce château est Albus. »
« Ce n'est pas ce que je voulais dire, Sev. » Harry se força à se lever et à s'approcher de Severus. Il lui prit les deux bras quand il fut à côté de lui. « Je t'ai entendu. Et ces trois mots m'ont permis de tenir bien mieux qu'une potion régénératrice ou qu'un autre stimulant que j'ai été obligé de prendre. Seigneur, Severus…
Aucun des deux ne bougea. Harry libéra les bras de Severus et le contourna. Il se servit un verre de whisky et l'avala. Il posa le verre sur la table et passa ses mains dans ses cheveux. « Un puits, Severus ? Tu n'as pas besoin de devenir un Puits pour me prouver que tu m'aimes. Tu n'as pas à me protéger. Tu m'as suffisamment bien entraîné pour que j'y parvienne tout seul. »
« Et si je choisis de le faire ? Si je choisis de te montrer ma loyauté d'une telle façon ? »
Harry baissa les yeux. « Je vois ça d'ici : L'Auror Harry Potter s'est fait tué en mission. A des kilomètres de là, à l'école de Sorcellerie de Poudlard, le professeur Severus Snape s'est effondré sur son bureau. Mort. Et personne ne comprend pourquoi. » Harry tourna le regard vers Severus. « Pourquoi me donner ce genre de pouvoir ? »
« Tu t'attends que je réponde à cette question ? »
« Non. »
« Tu as besoin de dormir. » Severus vint se mettre devant Harry. Il posa une main sur sa joue. « Tes yeux sont rouges et tu tiens à peine debout. Pourquoi n'es-tu pas resté dormir chez Weasley ? »
« Parce que je voulais te voir. » Harry ferma les yeux et s'appuya contre la main qui caressait doucement sa joue. « J'ai commencé à penser à quitter la division des Aurors. »
Il sentit l'autre main de Severus se poser sur le bas de son dos, et une gentille pression pour l'obliger à bouger. Il fit un pas en avant et sentit la main qui avait quitté sa joue lui tenir le coude. « Où est-ce que je vais ? »
« Au lit, M. Potter. »
Il s'appuya contre Severus mais n'ouvrit pas les yeux. « Alors je vais finalement dormir ? »
« Quand as-tu vraiment dormi pour la dernière fois ? »
« Une semaine avant que je ne parte en mission. »
Il se sentit pousser sur le lit. Il ouvrit les yeux et prit l'oreiller de Severus, le serrant contre sa poitrine. « J'y penserai, Severus. Mais si nous nous unissons, ce sera réciproque parce que je te suis loyal aussi. » Il regarda le visage de Severus et vit les rides de contrariété s'effacer légèrement.
« Je mettrai le livre dans tes affaires quand je t'aiderai à faire ta valise pour retourner chez Ron. Tant que tu travailles pour le Ministère, tu as besoin d'un endroit plus pratique pour dormir. »
Harry acquiesça avant de fermer les yeux. La dernière chose qu'il sentit avant de s'endormir furent des lèvres contre sa cicatrice. ♦
