Disclaimer: JKR ! That's all folks !
Note: Chapitre 3 (et final, pour le moment) de ma mini fic. Celui-ci, il est pour Frudule, parce que je l'adore et que l'inspiration lui revient.
Bonne lecture :)
Comme Ron s'y était attendu, le repas de Harry n'était pas loin d'être infect. Les pommes de terre avaient baigné trop longtemps dans leur saumure de conservation et même revenues dans la graisse, elles restaient spongieuses et sans goût. Les haricots avaient attaché dans le fond du poêlon et le jambon en boîte était très loin d'avoir la saveur du frais. Il s'était évidemment abstenu de toucher au corned-beef et avait contemplé, mi-amusé mi-écœuré, ses deux amis tentant discrètement d'évacuer la bouillie brunâtre de leurs assiettes.
Sans mentir, seule la cuisine d'Hagrid pourrait peut-être se révéler pire que celle d'Harry. C'était à se demander comment ses moldus n'avaient pas passé l'arme à gauche pour intoxication alimentaire depuis les années où Harry s'occupait du petit-déjeuner des Dursley.
Il fallait croire que le Survivant se débrouillait mieux dans l'environnement d'une cuisine moldue…
Pendant tout le repas, Ron avait regardé Hermione du coin de l'œil, espérant que sa mélancolie passée était plus ou moins dissipée. La jeune fille découpait consciencieusement son jambon en petits carrés qu'elle jetait furtivement à Coq et à Hedwige. Les volatiles n'avaient pas l'air de se plaindre de la qualité du menu et déchiraient à coups de bec les fibres trop tendres du jambon en boîte.
Chacun restait plus ou moins silencieux et seuls les bruits de mastication et de déglutition meublaient la conversation.
Ron se demandait si ses amis étaient dans le même état d'esprit que lui et si ce moment de célébration ne les avait pas plutôt plongés dans une profonde réflexion.
Même si le jeune homme avait tenu bon face à son amie tout à l'heure, il devait avouer qu'à lui aussi, sa famille manquait.
Ce n'était pas tant l'idée d'une table bien mieux garnie qui le taraudait, même s'il était évident que les 18 ans d'Hermione au Terrier auraient eu une toute autre dimension, mais, il ne pouvait pas s'empêcher de penser que là-bas aussi, la guerre faisait toujours rage.
Ils avaient dû renoncer à se faire délivrer la Gazette par Hedwige, la chouette d'Harry attirerait bien trop l'attention, mais ils restaient quand même encore en contact avec les membres de l'Ordre, qu'ils avaient renoncé à nommer « du Phénix » depuis le jour où Fumsec avait dit adieu à son maître.
Hedwige, et parfois Coq, faisait encore quelques aller-retour entre le Square Grimmault et leur campement.
Ils devaient tous être prudents et Ron savait juste que ses parents et Ginny avaient à nouveau emménagé au quartier général de l'Ordre peu de temps après leur départ. Les jumeaux logeaient toujours au-dessus de leur boutique de Farces pour Sorciers Facétieux et Bill et Fleur avaient loué un petit studio à proximité de Gringotts. Percy restait Percy et Charlie était toujours en Roumanie.
Aux dernières nouvelles, tout le monde, même Percy, était sauf.
Mais les dernières nouvelles remontaient déjà à plus d'une semaine et tellement de choses pouvaient se passer en aussi peu de temps…
Parfois, Ron enviait Harry.
Souvent pour de mauvaises raisons, parce qu'après tout, pouvait-on vraiment envier à Harry une vie entière, moins un an, sans connaître l'amour de ses parents, pouvait-on lui envier le calvaire des dix années passées aux mains des Dursley, pouvait-on lui envier d'avoir vu mourir tous ceux qui auraient pu le guider et lui offrir soutien et affection, pouvait-on lui envier d'être l'Elu… pouvait-on vouloir s'approprier sa terrible destinée au moment du combat final ?
Non, mille fois non !
Mais…
Harry avait un but et s'était arrangé pour ne pas laisser ses attachements prendre le dessus.
Ron aussi avait un but, être là, aider… ou du moins faire tout ce qu'il pouvait pour.
Et protéger Hermione.
Et Harry évidemment !
Mais avant tout, protéger Hermione.
Alors, peut-être que la protection commençait en la laissant en dehors, en lui épargnant ses sentiments pathétiques, en la laissant libre…
Il savait pertinemment qu'à partir du moment où il ferait à son amie sa terrible confession, il n'y aurait plus de retour en arrière possible… Il fallait absolument qu'elle l'aime !
Si elle le rejetait, si elle lui riait au nez, il serait incapable de reprendre le lendemain la recherche des Horcruxes comme si de rien n'était. Il aurait trop mal, il aurait trop honte pour oser encore croiser son regard.
Il fallait qu'elle l'aime !
Parce que, même si l'idée de rester dans ce sécurisant statu quo était tentante, il savait fort bien qu'Harry ne lui permettrait pas, qu'il le houspillerait jusqu'à ce qu'il se rende.
Alors, il devrait en effet lui parler, ce soir…
Mais pour ça, il aurait besoin d'un fameux coup de main !
« Vieux, c'était un repas vraiment très… intéressant. » lança-t-il au jeune homme brun qui achevait d'écraser ses pommes de terre.
Harry lui décocha un regard noir et grommela un truc inaudible entre ses dents qui ressemblait très fort à « …ingrat…f'ra toi-même… prochaine fois… » mais le rouquin ne releva pas.
Hermione essayait visiblement de ne pas pouffer derrière le col de son cardigan mais ses yeux noisette brillaient d'une lueur espiègle qui la trahissait.
« Oui bon, ça va hein ! Il reste des fruits en conserve pour le dessert… Vous devriez les trouver bons, je n'y ai absolument pas touché ! » ronchonna Harry.
La poitrine d'Hermione tressauta en silence un court instant avant que la jeune fille ne laisse échapper le fou rire qu'elle retenait depuis un moment.
« Oh Harry, ne te vexe pas ! C'était très gentil de t'occuper de tout ça… mais il faut bien avouer que c'était vraiment immangeable. » lui dit-elle en essuyant ses yeux en larmes d'avoir trop ri.
Le jeune homme fit une moue un peu boudeuse mais ne résista pas longtemps à l'apparente bonne humeur de la brunette.
« Ok, c'était infect, je le reconnais. Mais on a toujours la flasque de whisky pur feu de Bill pour faire passer le goût… ça s'impose non ? »
Les yeux de Ron scintillèrent à l'annonce de l'alcool et il répondit un « Ouais » satisfait à son ami.
Les deux garçons se retournèrent vers la jeune fille qui se mordillait les lèvres en regardant avec appréhension la petite bouteille qu'Harry venait de sortir de son sac.
« Oh… je ne sais pas si… enfin, je ne bois pas d'alcool, je n'aime pas ça… »
« Tu n'en sais rien si tu n'en as jamais goûté, Mione… » dit le rouquin.
Harry fronça les sourcils. « Mione ? »
« Mione, ouais, c'est un diminutif d'Hermione… » répliqua Ron.
« Oui, je me doute de ça. C'est juste que… » commença Harry, puis remarquant du coin de l'œil que les joues de leur amie avaient soudainement pris une teinte rosée, il secoua la tête. « Rien, laisse tomber. »
« Bon, on se le boit, ce whisky ? Un petit verre chacun, ça ne peut pas nous faire de mal ! » reprit le Survivant.
« Un tout petit verre, Hermione… » insista le rouquin.
« Oui, pas plus qu'une larme, c'est juré ! » promit Harry.
La jeune fille eut un demi-sourire légèrement exaspéré, ouvrit la bouche puis la referma sans former un seul son. Enfin, après avoir écrasé ses deux paumes l'une contre l'autre, elle hocha la tête dans un signe de reddition.
« Brillant, Mione ! Tu vas aimer ça, je t'assure… »
La sorcière regarda son ami avec des yeux ronds. « Tu en as déjà bu ? »
« Euh ouais, bien sûr, plusieurs fois… La dernière fois, c'était le jour où… euh… le jour où je… »
« Le jour de l'anniversaire de Seamus ! Je m'en souviens très bien ! » intervint Harry.
Ron eut un clignement d'yeux en direction de son ami. Harry devait très bien se souvenir de la dernière fois où ils avaient bu du whisky de feu et il savait aussi bien que lui que ça n'avait pas été à l'occasion de la petite fête organisée par l'Irlandais dans le dortoir des garçons en l'honneur de ses 17 ans, quelques jours avant la Toussaint.
La dernière fois où Ron et Harry avaient partagé quelques gorgées de whisky pur feu s'était déroulée en décembre de l'année avant, le soir de la victoire de Gryffondor contre Serpentard. Le soir où Ron avait reçu une volée de canaris enragés en pleine figure. Le fameux soir du début de ce qu'il avait fini par appeler « l'incident Lav' Lav' ».
Il y avait certains souvenirs que Ron préférait garder dans l'ombre, à défaut de pouvoir totalement les effacer de sa mémoire.
Harry lui rendit son clin d'œil.
« Ouais, les 17 ans de Finnigan, c'était une chouette petite fête… » murmura le sorcier roux.
Hermione poussa un profond soupir en regardant tourner le liquide ambré dans son gobelet.
« Vous les garçons, vous avez eu plus l'occasion que moi de vous amuser quand nous étions à Poudlard… » souffla-t-elle en direction de ses amis. « J'étais convaincue que j'aurais tout le temps d'en profiter une fois les ASPICs derrière nous… Ca fait vraiment bizarre de savoir que je n'obtiendrai jamais mon diplôme. »
« L'école ouvrira à nouveau. » affirma Harry avant d'avaler d'un trait le contenu de son gobelet.
« Ouais… » confirma Ron sans quitter la jeune fille des yeux.
« Oh, et puis… ça n'a pas tellement d'importance tout ça ! Je veux dire, le fait que je ne me sois pas autant divertie que vous à l'école, parce que les ASPICs, évidemment, c'est important ! Mais je ne peux pas dire que je regrette les surprises-parties avec mes camarades de chambrée… » murmura Hermione en grimaçant.
Ron la dévisagea d'un air anxieux, il n'avait vraiment pas envie qu'elle se remette à penser à ses deux voisines de dortoir en l'instant précis, et surtout pas à une certaine sorcière blonde à la voix haute perchée et aux déhanchements chaloupés.
« Bah, tu n'as rien manqué, tu sais, Hermione… La fête de Seamus était plutôt quelconque en fait ! » lui assura Harry.
Ron poussa un sifflement moqueur. « Quelconque ? Tu délires, vieux ! Tu dis ça maintenant parce que tu as été écrasé par la supériorité Weasley ce jour-là mais si je me souviens bien, tout le monde était d'accord pour dire que c'était un anniversaire foutrement grandiose ! »
Hermione s'agita faiblement en entendant le jeune homme jurer mais elle était trop occupée à renifler son verre avec anxiété pour le reprendre sur son vocabulaire.
« Supériorité Weasley… pfff, qu'est-ce qui ne faut pas entendre ! » marmonna le jeune sorcier en levant les yeux au ciel.
La brunette s'était enfin décidée à tremper les lèvres dans son verre d'alcool et plissait le nez en signe de déplaisir.
Elle n'aperçut pas tout de suite les sourires amusés des deux garçons qui en étaient déjà à leur deuxième gobelet mais dès qu'elle s'avisa de leurs mines moqueuses, elle s'envoya tout le contenu de son verre sans ciller.
Elle eut beaucoup de mal à retenir la toux qui grondait en elle, rendue impérieuse par l'absorption trop rapide du whisky mais fit néanmoins bonne figure face à ses deux amis qui se réjouissaient trop visiblement de sa réaction.
« Bon, racontez-moi un peu cette fameuse fête d'anniversaire, que je juge si j'ai manqué une occasion désastreuse ou foutrement grandiose, comme dit Ronald… » s'écria la jeune fille en appuyant les mains sur ses hanches.
Le rouquin eut l'air choqué d'entendre ses propres mots dans la bouche de son amie mais le jeune sorcier brun éclata de rire.
« Okay ! Mais c'est moi qui raconte, parce que Ron va encore tout déformer à son avantage ! » décida Harry.
« Absolument pas ! » rétorqua le jeune roux mais il fit un signe de la main à son ami pour l'inviter à commencer.
« Alors, voilà… Finnigan avait reçu un colis vraiment énorme de friandises pour ses 17 ans et Dean Thomas avait réussi à se procurer deux bouteilles de whisky pur feu à sa dernière visite au Chemin de Traverse, avant la rentrée scolaire. Je me souviens que Mc Gonagall nous avait refusé de célébrer l'anniversaire de Seamus dans la salle commune, soi-disant parce qu'il y avait des élèves qui devaient travailler sur leur dissertation de transfiguration… »
La jeune fille fronça les sourcils d'un air désapprobateur sans provoquer le moindre effet sur le discours de son ami.
« Donc, nous étions tous les cinq, Finnigan, Dean, Neville, Ron et moi, coincés dans notre dortoir avec ce paquet de sucreries vraiment gigantesque et nos bouteilles d'alcool… Et Seamus a proposé qu'on fête quand même ça tous ensemble et nous a suggéré d'organiser quelques petits jeux pour pimenter le tout… »
« Ouais ! » appuya Ron en remplissant à nouveau le verre de son ami et le sien.
A cet instant, les deux jeunes gens se jetèrent un regard entendu, il n'était pas certain qu'Hermione apprécie vraiment à leur juste valeur les « jeux » d'une bande de mâles de 16 à 17 ans sensiblement éméchés. Il garda donc pour lui le récit des exploits de Neville à l'épreuve de la saucisse et du goulot de bouteille de bièraubeurre et l'épouvantable massacre de Dean Thomas au match de collecte d'œufs frais dans le caleçon au cours duquel il avait décimé toute une batterie de futurs poussins.
« Bref, des jeux un peu idiots… » poursuivit Harry. « Le plus idiot était sans conteste le concours d'attrapage au vol de choco-grenouilles ! »
« Le quoi ? » demanda la jeune fille en écarquillant les yeux.
« Le concours d'attrapage au vol de choco-grenouilles. » répéta Harry. « Un peu crétin comme nom hein ? »
« Tsss, vieux, n'essaie pas d'influencer Hermione… Tu trouves le jeu crétin parce que tu as perdu ! » intervint le rouquin en souriant.
Le sorcier brun remonta les branches de ses lunettes qui avaient glissé imperceptiblement sur son nez et avala une nouvelle gorgée de whisky pur feu.
« Mouais… toujours est-il que le concours se jouait par équipe de deux. Dean faisait équipe avec Ron et j'étais avec Seamus. Neville s'occupait de compter les points. »
« Mais les points de quoi ? » interrogea la sorcière.
« Attends, j'y viens ! Donc, le jeu consistait en l'attrapage au vol de choco-grenouilles, comme je l'ai déjà signalé, c'est-à-dire que un membre de l'équipe devait envoyer à son équipier des choco-grenouilles sur une durée de temps très réduite et que l'autre devait les attraper… »
« Et les avaler ! » précisa Ron.
« …et les avaler avant son adversaire. Au bout du temps imparti, Neville devait nous donner le décompte des choco-grenouilles remportés et désigner le vainqueur… »
« Et tu as perdu ! » annonça le rouquin avec un sourire ravi.
« Et j'ai perdu, ouais… » acquiesça le jeune homme. « Au décompte final, Ron avait attrapé, et avalé, cinq choco-grenouilles, et moi… »
« Zéro ! »
« Ouais ouais, c'est ça… » grommela Harry.
« Mais c'est totalement débile ! » s'esclaffa Hermione.
« AH ! » éructa le sorcier brun en tendant le bras vers son ami.
« Ca ne diminue néanmoins pas l'exploit de Ron… » reprit la jeune fille.
« AH toi-même ! » lança le rouquin.
« Pfff, y a rien à faire, tu as dû lui dire un truc pour qu'elle soit toujours de ton côté… » chuchota Harry à voix basse.
A sa plus grande satisfaction, le visage du jeune roux prit soudainement une belle teinte couleur brique.
« Admettons, admettons… » déclara le Survivant à son amie. « On peut dire aussi que je déteste perdre, c'est l'exacte vérité… mais je maintiens quand même que c'était un jeu crétin ! »
Le jeune homme jeta un coup d'œil aux 18 bougies à présent illuminées puis se souleva d'un geste un peu maladroit.
« Je crois que je vais aller ruminer le souvenir de ma défaite quelque part par là. » dit-il en désignant un point vague au-delà de la clairière éclairée. « Je me sens l'envie de m'éclipser un moment… » ajouta-t-il à l'intention de Ron qui se figea et s'étrangla avec sa gorgée d'alcool.
« Tu n'es pas obligé, Harry, tu peux rester avec nous, tu sais ! » lança très vite le jeune homme à moitié suffocant.
Le sorcier brun détacha les brins d'herbe qui s'étaient accrochés à son jeans et secoua la tête d'un mouvement rapide. « Naaan, ça va me faire du bien de marcher un peu… une petite heure, tout au plus, histoire de me dégourdir les jambes. »
« Mais tu n'as pas peur de quitter le campement ? » s'étonna Hermione en dévisageant son ami.
« Je vais prendre Hedwige avec moi, ça lui fera plaisir de chasser un peu… Et puis j'ai ma baguette au cas où… Je ne serai pas très long, compris Ron ? »
Le rouquin eut un regard suppliant pour son ami mais ce dernier lui renvoya un sourire narquois.
Avec une pointe de désespoir dans la voix, le jeune homme lui répondit un « Compris, vieux… » qui ressemblait assez bien à de la résignation.
Ron et Hermione regardèrent leur ami siffler sa chouette et s'éloigner d'un pas mal assuré de la clairière.
Si le rouquin avait cru pouvoir un instant trouver le courage d'affronter ce qui allait suivre dans le fond de son verre de whisky, l'impression renaissante d'avoir ses boyaux grignotés par une ribambelle de mulots le convainquit dans son erreur de jugement.
Il était seul avec Hermione.
Seul et même pas saoul.
Seul et désespérément perdu devant son expression un peu surprise.
Il était seul avec Hermione pour plus ou moins une heure et il devait dans un laps de temps aussi ridiculement court lui faire comprendre tout ce qu'il ressentait pour elle depuis qu'il s'était enfin aperçu que sa meilleure amie était une fille.
Et une fille bougrement jolie, par-dessus tout !
Son amie était plongée dans la contemplation des flammes mourantes du feu de bois mais son souffle paraissait aussi saccadé que le sien.
Ron, de son côté, était convaincu que son cœur manquait un battement sur trois.
Il ne se souvenait pas d'avoir déjà été aussi seul dans un moment aussi terrifiant…
Il savait pourtant qu'il ne fallait pas qu'il tarde à parler à Hermione, Harry ne lui laisserait certainement pas plus de temps que ce qu'il avait dit et son amie finirait par se lasser d'admirer le feu de camp.
Rassemblant tout son courage de Gryffondor, Ronald Weasley se résolut à tourner la tête vers la jeune fille.
« Hermione… hum… je… » dit-il en s'éclaircissant la gorge.
La brunette posa sur lui ses grands yeux noisette et Ron eut la certitude que ce n'était pas un sur trois mais bien deux battements sur trois que son cœur loupait à présent.
« Oui, Ron ? »
« Je… enfin, tu… enfin… Joyeux anniversaire ! » bredouilla-t-il d'un ton faussement enjoué.
« Oh… merci, c'est très gentil. C'était vraiment adorable ce que vous avez fait pour moi ! Je… »
« Oui ? »
« Non rien… je suis… je suis très heureuse d'avoir partagé ça avec vous. »
« Moi aussi, Mione. » chuchota le jeune homme. « Enfin, moi et Harry aussi, je veux dire ! » se reprit-il immédiatement.
« On dit Harry et moi, Ron… »
« Oh oui, merde oui, tu as raison ! » bafouilla le sorcier. « Harry et moi… »
Un sourire timide s'ébaucha sur les lèvres de la jeune fille.
« En fait, non, ce n'est pas vraiment ce que je voulais te dire… » poursuivit Ron. « Enfin, si, bien sûr, j'avais bien l'intention de te souhaiter un joyeux anniversaire, mais… »
« Mais tu l'avais déjà fait cet après-midi. » précisa Hermione d'une voix douce.
« Oui, voilà exactement ! Ca ne sert à rien de me répéter sans cesse, tu vas croire que je débloque, tout ça… enfin, tu comprends quoi ! »
« Oui, je crois que je comprends… » murmura la jeune sorcière sans quitter son ami des yeux.
Le regard insistant de son amie troublait Ron à un point qu'il en venait à se convaincre que son cœur devait avoir complètement oublié comment il était sensé battre et que ça ne semblait pas le tracasser plus que ça.
Il n'arrivait plus à distinguer d'où provenait la chaleur cuisante qui l'envahissait à l'instant, s'il était trop proche des braises du feu de camp où s'il était en train d'expérimenter un cas d'Incendio spontané.
« Merlin ! C'est pourtant pas compliqué… C'est… c'est… je… je… Rhaaa ! »
Le jeune homme roux se leva d'un bond fit trois pas pour enjamber le tronc d'arbre contre lequel reposait Hermione puis fit le tour du feu de camp jusqu'à la pierre plate en se tenant la tête entre les mains.
Hermione, légèrement inquiète, le regardait aller et venir en grommelant à voix haute.
« … pas compliqué… un peu de courage bon sang… lui dire… sinon Harry… » l'entendit-elle raisonner.
Puis, dans un mouvement aussi rapide que lorsqu'il s'était levé, il vint s'accroupir à côté d'elle et parla très vite en plongeant ses yeux cobalt remplis d'incertitude dans les siens.
« Mione… Hermione… ce que j'essaye de te dire depuis un quart d'heure, c'est que… que… Oh, que je suis un con et un abruti fini ! »
La jeune fille souleva la main pour lui toucher l'épaule mais Ron arrêta son geste.
« Attends, laisse-moi parler… je n'aurai certainement plus jamais le courage de t'expliquer tout ça et Harry a raison, je vais exploser si je ne le fais pas ! »
Hermione laissa retomber son bras le long de sa cuisse mais ne dégagea pas sa main de celle de Ron. Au contraire, elle accentua la pression et cligna des yeux pour inviter son ami à continuer.
« Hermione… je ne sais pas trop comment t'expliquer ce que je ressens parce que je ne sais pas vraiment depuis combien de temps je le ressens. Parfois, j'ai l'impression que je n'ai découvert ça qu'hier et à d'autres moments, je crois que je le sais depuis toujours… enfin, depuis le jour où tu as débarqué dans notre compartiment du Poudlard Express… »
Le jeune homme prit une profonde inspiration. « Hermione… je… l'an dernier, je… l'an dernier, j'ai fait tout ce que j'ai fait à cause de toi ! Voilà c'est dit ! »
« Ronald Weasley, de quel droit ose-tu me rendre responsable de tes actes de l'année passée ? » s'écria la jeune fille en relâchant sa main.
« Non, Mione, non ! S'il-te-plaît ! Merde, non… ce n'est pas ce que j'ai dit ! » répondit le rouquin d'un ton alarmé. « Je veux dire que si je me suis comporté comme un idiot sans nom l'an dernier, c'est parce que… parce que j'étais jaloux… parce que j'étais blessé… parce que j'avais peur… parce que j'étais fou amoureux de toi et que ça faisait trop mal de savoir que de ton côté, tu… »
Des larmes s'échappèrent des yeux noisette de son amie et Ron maudit instantanément sa fichue maladresse et son épouvantable insensibilité. Il avait tout foutu en l'air, elle allait le détester ! Et il ne pourrait à aucun moment lui donner tort parce qu'en ce moment précis, il se détestait avec une force sans égal.
« Je t'en prie, ne pleure plus. Hermione, je t'en supplie ! Je te laisserai en paix, je ne te parlerai plus, j'arrêterai même de respirer si tu veux… mais ne pleure plus. » murmura-t-il la voix cassée.
La jeune sorcière brune s'essuya les yeux malhabilement puis souffla à voix basse : « Je ne pleure plus, Ron. C'est fini, tu peux te remettre à respirer… »
Ron passa sa main sur la joue de la jeune fille et lui sourit douloureusement.
« Je ne te ferai plus jamais pleurer, Hermione, je te le jure ! »
Elle posa sa petite main sur la sienne. « Ne jure pas, Ron ! Bien sûr que si, tu me feras encore pleurer… Et évidemment, tu me trouveras encore autoritaire et horripilante… Et tu m'en voudras encore et parfois même je te détesterai… comme je t'ai détesté l'an dernier… parce que j'étais jalouse… parce que j'étais blessée… parce que j'avais peur et que j'étais follement, déraisonnablement amoureuse de toi… »
Le jeune homme s'écarta d'un bond, comme s'il avait été brûlé par un fer rouge.
« De-de moi ? »
« Oui… »
« Merlin… c'est brillant ! Foutrement brillant ! »
La jeune fille eut un petit rire nerveux et posa un doigt sur la bouche du jeune roux.
« Chut… ne dis plus rien… plus de gros mots… plus d'hésitations… plus rien… »
« Mais… »
« Chut ! Harry va bientôt revenir et je crois que je n'ai pas encore eu tous mes cadeaux d'anniversaire, Ron… il serait peut-être temps de me donner celui que j'attends depuis si longtemps… »
Ronald Weasley dévisagea son amie avec un regard confus, puis, voyant son visage s'approcher tout doucement du sien, il saisit enfin à quel cadeau elle faisait allusion.
Avec une lenteur et une précaution infinie, il effleura de sa bouche les lèvres douces et tendres d'Hermione.
Il développa des trésors de patience pour éviter de la brusquer et de la meurtrir et ce n'est que quand il la sentit s'enhardir qu'il osa approfondir le baiser.
Leurs gestes étaient maladroits, les mains de Ron s'égarèrent dans les cheveux broussailleux de la jeune fille, leurs dents s'entrechoquèrent plus d'une fois et il cogna involontairement son nez contre celui d'Hermione mais rien ne lui avait jamais semblé plus parfait, plus naturel, plus juste.
Et quand Hermione ouvrit délicatement les lèvres pour offrir le passage à sa langue en poussant un petit gémissement plaintif, il faillit presque défaillir d'émerveillement en prenant conscience que c'était lui, Ronald Weasley, le sixième fils d'Arthur et de Molly Weasley, qui avait la chance inouïe d'embrasser une fille aussi admirable qu'Hermione Granger.
Il aurait voulu que leur baiser dure jusqu'au petit matin mais Hermione, tout comme lui, était inquiète de la réaction d'Harry s'il les trouvait ainsi enlacés à son retour.
« Je t'aime. » lui souffla-t-il au moment de relâcher ses lèvres.
« Moi aussi. » murmura-t-elle en retour dans un sourire.
« Il faudra dire à Harry… »
« Oui, il faudra lui dire… »
« Mais éviter de lui montrer… »
« Oui… ce serait plus délicat… à cause de Ginny notamment. »
« Oui, je sais… A cause de Ginny. C'est difficile pour lui. »
« Je suis certaine que c'est difficile pour elle aussi. »
« Oui, tu as raison. Ca ne doit pas l'aider d'être enfermée dans la maison des Blacks sans même pouvoir espérer retourner à Poudlard cette année… »
« Oh oui, dans cette horrible maison, avec l'affreux portrait de la mère de Sirius comme compagnie… OH MON DIEU ! »
« Quoi, qu'y a-t-il ? » s'étonna Ron, surpris par l'air foudroyé de son amie.
« OH MON DIEU ! Comment ai-je pu être aussi stupide ? La réponse était là depuis des semaines et je n'ai rien vu ! »
« Mais de quoi parle-tu ? Hermione ! »
La jeune fille se mit à genoux et attrapa d'une main l'Almanach de Willipet que Ron avait reposé sur la pierre plate près du tronc abattu.
« R.A.B ! Ron, c'était là depuis le début et je n'ai rien vu ! R.A.B, Regulus Arcturus Black… le frère de Sirius ! Celui que Voldemort a fait exécuter quand il a découvert son repentir ! C'est lui ! R.A.B, c'est lui, j'en suis absolument persuadée ! Oh Merlin, nous devons retourner au Square Grimmault, c'est là qu'il faut fouiller ! Le pendentif doit y être caché depuis tout ce temps ! »
La jeune fille tournait à toute vitesse les pages du livre pour retomber sur le passage en question et, au bout d'un moment, pointa du doigt un paragraphe et bondit sur ses pieds.
« Harry, il faut prévenir Harry ! »
« Il ne doit pas être très loin, je crois que j'entends le hululement d'Hedwige d'ici… » observa Ron.
Hermione remit une mèche de cheveux derrière son oreille et porta son regard vers l'endroit d'où semblaient provenir les cris de la chouette.
« Viens ! » dit-elle en attrapant dans la sienne la main du jeune sorcier roux.
« Jusqu'au bout du monde… » murmura le jeune homme à voix très basse.
Et il attacha son pas à celui de la petite sorcière brune qui venait de lui donner en un seul baiser mille raisons de se croire aussi fort, valeureux et drôle que toute sa fratrie réunie.
