Merci pour les reviews ! Bon, en route pour Colorado Springs !

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7 – John resta six semaines à Vancouver. Officiellement, le temps que ses fractures guérissent ; officieusement, pour rester un peu avec Rodney, le temps que le gamin se remette de ses émotions.

La première nuit de Rodney à l'hôpital avait été calme, essentiellement grâce à la drogue que ses ravisseurs lui avaient injectée. La seconde, calme aussi, tout simplement à cause du choc, de la prise de conscience avec la réalité : il avait été sauvé, il était en vie, il allait bien. John connaissait ça, les lendemains de missions un peu difficiles, comme une sorte de « gueule de bois ». La troisième en revanche …

L'infirmière de garde avait confié à John que ses hurlements avaient réveillé une bonne partie des patients. Et c'était avec un air clairement excédé sur le visage qu'elle lui avait dit qu'ils n'avaient pas eu d'autre choix que de lui donner un léger sédatif. John n'avait jamais frappé une femme. Jamais. C'était la première fois qu'il résistait à l'envie de le faire.

Il était entré dans la chambre de Rodney après avoir réussi à balbutier un « merci » à cette infirmière qui aurait fait mourir de honte Florence Nightingale (14). Evidemment, il avait trouvé un Rodney un peu groggis, et le faire sourire avait été un challenge. Mais il y était arrivé.

Et ça lui plaisait. Faire sourire Rodney était devenu une mission quotidienne. Sa mission. La plus importante qu'il ait eu depuis un bon moment.

Voir le gamin sourire était presque aussi agréable que de voler un F16.

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Aujourd'hui, ils étaient allés au H. R. MacMillan Space Centre de Vancouver.

John lui avait parlé des effets de l'espace sur le corps humain. Beurk. La tête qui gonfle, les os qui se dissolvent (15), quelle horreur ! Voilà de quoi le convaincre à jamais de ne pas devenirastronaute. Trop dangereux. Non, il serait astrophysicien. Rodney laissait la joie des voyages dans l'espace à d'autres ! De toute manière, il était trop intelligent pour devenir un simple astronaute.

Rodney engloutissait sa seconde glace – vanille et noix de pécan, son parfum préféré – lorsqu'il remarqua que John le regardait fixement et avec un drôle d'air. Rodney connaissait bien cet air, c'était celui qu'arboraient les adultes lorsqu'ils avaient une mauvaise nouvelle à vous annoncer. Il reposa sa cuiller avec un soupir. Soudainement, il n'avait plus très faim. Il se sentait un peu écoeuré en fait.

« C'est pour quand ? »

John releva la tête de son café et haussa un sourcil.

« Qu'est-ce qui est pour quand ? »

Rodney soupira. Bruyamment cette fois. Il se cala dans sa chaise, les bras croisés sur la poitrine.

« Ton départ. »

John le dévisagea un instant, tiraillé entre deux sentiments contradictoires, l'envie de mentir et celle de dire la vérité. Il se rappela ce que lui avait dit Mme Dickory. Ne lui mentez pas, vous causeriez plus de mal que de bien. Il soupira à son tour et opta pour la vérité.

« Dans trois jours. »

Rodney hocha la tête.

« Okay. »

John le regarda un moment jouer avec sa glace, Rodney avait touillé la vanille et s'évertuait à écraser les noix de pécan. Un massacre à la Haagen Dazs. Il soupira. Ils savaient tous les deux que ce petit jeu du « grand frère » ne durerait pas éternellement.

John tourna la tête vers la fenêtre du salon de thé où ils étaient installés.

Il avait déjà commencé à rassembler ses affaires chez Clara, la cousine de Carson. Ce dernier était passé la voir avant de partir sur Atlantis et après ce qui s'était passé près de Hope, l'écossaise, un petit bout de femme énergique, avait invité John à rester avec son cousin. C'avait été six semaines spéciales, différentes. John n'avait jamais eu le sens de la famille mais avec Rodney, il avait expérimenté quelque chose qui en était proche. Quelque chose qui lui avait presque fait regretter de ne pas avoir été plus proche de son frère aîné (2). Mais maintenant, il fallait qu'il rejoigne Colorado Springs.

Et il ignorait s'il reviendrait un jour sur Terre.

John se tourna vers Rodney qui était toujours très consciencieusement en train de réduire sa glace en une bouillie infâme.

« Que veux tu faire demain ? »

Rodney leva les yeux vers lui et haussa les épaules.

« Rodney, nous avions déjà parlé de tout ça … »

« Je sais, mais ça ne veut pas dire que ça doit me plaire pour autant. »

Et avec ça, il se leva, rejetant sa chaise assez brusquement pour la faire tomber et sortit en trombe du salon de thé. John soupira. Rodney avait raison, ce n'était pas parce qu'ils avaient déjà discuté de son départ que cela serait facile à accepter pour autant.

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John repéra Rodney assis sur un banc face à l'océan. Il s'assit près de lui et ils observèrent la vie du port devant eux. Gens pressés, bateaux en partance, mouettes folles.

« J'aimerais partir avec toi. »

John soupira.

« Rodney, tu sais très bien que c'est impos-… »

Il fut abruptement coupé par Rodney.

« Je dit juste que c'est ce que j'aimerais … Je sais que ce n'est pas possible, ça n'empêche pas de … de rêver ou tout simplement de le dire à voix haute, non ? »

John se tut. Mme Dickory avait raison, Rodney était un peu trop intelligent. Et un peu trop sensible. Même s'il le cachait parfois sous une attitude rebelle, voir franchement désagréable. Enfin, avec les autres. Jamais avec John. Il ne comprenait pas très bien pourquoi d'ailleurs, mais ils avaient tous les deux tout de suite « accrochés », sans aucun doute en raison de ce qui s'était passé … John se leva.

Vancouver était une ville étrange. Elle était à la fois une mégalopole, comme il y en avait tant en Amérique du Nord et une ville qui avait su garder son identité, voire un certain charme (16). Il se demanda si tout ça allait lui manquer … là-bas. Perdu dans ses pensées, il ne remarqua pas que Rodney s'était lui aussi levé et s'était approché de lui. Il fut surpris de sentir deux bras se glisser autour de sa taille. Il sourit et pris lui aussi Rodney dans ses bras.

« J'aimerais tant que tu restes. »

La voix était un peu étouffée. John caressa les cheveux de Rodney.

« Moi aussi, moi aussi. »

Ils restèrent là un long moment, enlacés. Et pour les passants, ils donnaient l'image parfaite d'un père et de son fils.

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Deux jours plus tard

Rodney referma son ordinateur avec un petit sourire aux lèvres. Il le rangea soigneusement dans sa mallette. C'était un cadeau de John. Un portable, avec plus de mémoire que les deux malheureux PC du foyer réunis ! Et surtout avec un WIFI.

Il n'avait pas été très difficile de fouiller par ci par là et de découvrir la myyyyyystérieuse destination de John et de Carson. Le relevé téléphonique du portable de John. Simple comme bonjour. Pas difficile non plus de trouver un vol pour Colorado Springs, petite ville tranquille abritant une garnison. Juste le temps de se faire ouvrir un compte en banque bidon, avec de l'argent on ne peut plus bidon lui aussi et hop, il était l'heureux acheteur d'un aller pour Colorado Springs !

Rodney ne savait pas très bien ce qu'il allait faire là-bas. Il était peu probable que ce soit la destination finale de ses deux nouveaux amis … amis. Il sourit. C'était la première fois qu'il avait des amis. Des gens avec qui parler, vraiment. Même si ses conversations avec Carson tournaient soit au pugilat – comme si la médecine était une science exacte, humpf, à peine une science ,oui ! – ou à la reddition – qui a décidé que tant qu'on n'avait pas quinze ans, on devait se coucher à horaire fixe et qui plus est, ridiculement tôt ! – Rodney l'aimait bien. Et bien sûr, il y avait John.

John était … différent. Il ne cherchait pas à faire de lui quelqu'un de bien, enfin, pas dans ce sens là. Il ne cherchait pas à tout prix à ce qu'il fasse du sport ou qu'il aille jouer dehors parce qu'il faisait beau, ou qu'il regarde un match de hockey plutôt que de se plonger dans un bouquin, bref, tous ce que les adolescents « bien » font. Il ne cherchait pas à le changer en quelque chose qu'il n'était pas et qu'il ne serait jamais.

Il le laissait être lui. Et ça, c'était mille fois plus que tout ce que les gens, soi disant bien attentionnés à son égard, avaient essayer de faire. Même Jeannie. Oh, Rodney l'aimait beaucoup mais … il soupira, se leva et rangea la mallette sous son lit. Jeannie voulait qu'il change, qu'il devienne ungarçons normal. Mais Rodney savait qu'il n'était pas normal, enfin pas au sens ou on l'entendait généralement. Et il en était ravi. Ressembler à ces bandes d'idiots sans cervelles, non merci !

Il regarda son billet d'avion. Décollage à 17 heures 30 mn. Parfait ça lui laissait encore un peu de temps.

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John et Carson étaient prêts. John était dans le taxi attendant que Carson se détache de Clara. Oui, oui, "détacher" était le mot : ils étaient littéralement glués l'un à l'autre ! Carson avait un sens de la famille hyper développé et les adieux duraient depuis maintenant une bonne vingtaine de minutes. Qu'est-ce que ça avait du être lorsqu'il avait dit au revoir à sa mère ! John soupira.

Ces adieux avec Rodney avaient été un peu moins mélodramatiques. Ils étaient allés au cinéma, puis manger une pizza et John l'avait ramené à Saint James. Pas de pleurs, mais il n'en n'avait pas vraiment attendu, enfin, si peut-être … Il passa la tête par la fenêtre de la voiture.

« CARSON ! L'avion ne va pas nous attendre éternellement ! »

Il vit le médecin écossais lui décocher un regard noir puis fit – pour la millième fois au moins – un baiser à sa cousine et enfin, vint le rejoindre dans le taxi. John lui jeta un coup d'œil lorsqu'il s'assit. Carson avait les yeux un peu rouges. Yep, définitivement rouges. Il lui donna un petit coup de coude.

« Allez Carson, haut les cœurs ! L'aventure nous attend ! »

Carson lui offrit un petit sourire, se tourna pour faire un signe de la main à Clara, puis poussa un soupir tonitruant. John leva les yeux au ciel : oui franchement il se demandait ce qu'avait du être les adieux écossais avec Mme Beckett.

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Le vol d'était passé sans encombre. Rodney avait eu un peu peur à l'aéroport mais le document qu'il avait présenté avec son passeport et son billet avait satisfait tout le monde. Internet, merveille des merveilles ! Vous pouviez y trouver tout et n'importe quoi. Notamment des formulaires de sortie de territoire pour mineur. Faire un faux avait été un jeu d'enfant.

Il avait réservé un taxi à l'arrivée et une chambre dans un hôtel pas trop loin du complexe militaire de Cheyenne Mountain.

Maintenant, il fallait qu'il trouve un moyen d'entrer.

TBC (… et ce sera pour le prochain chapitre, ainsi que le départ pour Atlantis !)

(14) J'ai déjà présenté cette femme extraordinaire dans une autre fic' (mais laquelle, pas la moindre idée). Elle a en effet « créé » le métier d'infirmière (avant elle les infirmières étaient des filles de bonnes familles, sans formation, juste dévouées) mais aussi une remarquable mathématicienne !

(15) Véridique : l'état d'apesanteur et de micro-gravité ont de bien étranges effets sur notre physiologie !

(16) Alors là, je n'en ai pas la moindre idée ! Je ne suis jamais allée au Canada.