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Disclaimer : Tout est à JKR, lieux, personnages -sauf certains que vous reconnaîtrez aisément- créatures, etc... je ne tire aucun bénéfice de cette histoire, si ce n'est celui du plaisir que je prends à écrire et faire partager ce que j'écris… Bonne lecture.
En ce qui concerne les évènements mondiaux décrits dans le chapitre précédent : les idées véhiculées par Voldemort ne sont pas de son fait. Elles existaient bien avant lui (cf Salazar Serpentard… entre autres…) et existeront encore après lui. Ce sera aux générations futures à faire en sorte qu'elles ne prennent plus de telles proportions. Voldemort se sert de ces idées pour arriver à ses fins personnelles et ses méthodes sont quelque peu expéditives. Mais hélas, ce genre d'idées court depuis toujours et elles continueront à courir.
Quant aux évènements outre-atlantique, je ne veux vexer personne et je n'ai aucun compte à régler avec aucun représentant du continent américain, mais historiquement, et s'ils n'ont pas inventé la chasse aux sorcières (dans tous les sens du terme), ils l'ont consciencieusement appliquée et pratiqué les méthodes discriminatoires. De même la ségrégation est une pratique dont la société américaine a bien du mal à se défaire (d'ailleurs ce n'est pas pour rien qu'on a comparé les mangemorts aux membres du Klan) Je ne veux pas dire que la société américaine est la mère de tous les vices discriminatoires. Loin de là mon idée. Mais elle présente (même à notre époque) pas mal de similitudes avec celle des sorciers version JKR. Bien sûr il est plus facile de voir la paille dans l'œil du voisin que la poutre dans le sien… mais c'était tentant d'exploiter les magies des diverses communautés implantées aux Etats-Unis.
Chapitre 145
Les Jardins sous la Pluie
…
Harry se leva de table. Il avait besoin d'un peu d'air. Les visages autour de lui étaient graves. Les nouvelles de la Gazette étaient dans tous les esprits. Il attendit qu'Ellen vînt vers lui. Il avait quelques heures avant de devoir se rendre à la convocation de McGonagall, il espérait qu'il pourrait les passer en compagnie de la jeune fille. Soudain, il repéra derrière son amie la silhouette massive de Bulstrode. Elle marchait à grands pas. Il allait appeler Ellen, lever la main, faire quelque chose… quand la fille dépassa la Préfète sans même lui accorder un regard lorsqu'elle la bouscula de l'épaule. Harry souffla de soulagement. Il sourit à Ellen.
- J'ai cru… commença-t-il.
Il s'interrompit en riant maladroitement. Ellen prit son bras.
- Sortons d'ici, dit-elle.
Et tandis qu'ils se dirigeaient vers la porte, elle voulut savoir pourquoi Finnigan avait eu l'air si furieux contre lui. Harry haussa les épaules. Il hésita sur la direction à prendre.
- La salle des Quatre Maisons ? proposa-t-il.
Ellen fit une grimace.
- Les jardins sous la pluie alors ?
Elle hocha la tête.
- Va pour les jardins… Je vais chercher mon manteau.
- Et moi le mien… On se rejoint là-bas ?
Ils se séparèrent quelques instants. Harry monta à son dortoir pour prendre sa cape. Quand il redescendit, il croisa Rusard et sa bande de forçats dans le Grand Hall.
- Nettoyage du parc… annonça le concierge avec un large sourire sardonique.
- Mais… il pleut… râla une voix dans le groupe des condamnés.
- Oui, je sais… répondit Rusard.
Sous la galerie des arcades, Harry marchait lentement. L'air était frais. La pluie fine de novembre ne faisait aucun bruit dans le cloître solitaire. La lumière filtrait à peine à travers les nuages gris. Le silence était agréable après la Grande Salle tour à tour bruyante ou oppressante. Harry ferma les yeux un instant. Quand il les rouvrit, il était toujours aussi seul et il se prit à regretter l'absence de Dame Agnes. Il reconnut pour lui-même qu'il avait précédé Ellen de quelques instants dans l'espoir de retrouver le fantôme de Serdaigle en ses lieux favoris. Il était curieux de savoir ce que la Dame Grise pensait de cette nuit d'Halloween.
Un pas derrière lui.
- Hé Potter !
Harry se retourna. Ellen marchait résolument vers lui. Elle fut dans ses bras avant même qu'il les eût ouverts.
- Tu m'en veux encore pour cette histoire d'infirmerie ? demanda-t-elle.
- Non…
Il frotta sa joue contre la sienne. Elle le repoussa doucement.
- Tu as encore mal ? s'inquiéta-t-il.
- Non… Ça chatouille…
Il se mit à rire.
- Je me suis dépêché ce matin pour ne pas être en retard à notre rendez-vous… dit-il. Enfin, je croyais que nous avions rendez-vous… Mais c'est égal… Je vais peut-être me laisser pousser la barbe… On me prendrait davantage au sérieux avec la barbe, tu ne crois pas…
Elle levait vers lui un visage épanoui qui avait l'air de dire, que non, elle ne croyait pas qu'on pût davantage le prendre au sérieux avec une barbe.
- Pourtant, insista Harry, une barbe ça en impose… enfin, en général…
Ellen se mit à rire.
- Oui, en général… Mais si tu es le général… Je suis quoi moi ? Ton aide de camp ?
- Toi ? se moqua Harry bien qu'il ressentit un léger pincement au cœur en se remémorant sa conversation du matin avec Ron. Toi, tu es mon attachée diplomatique, spécialiste des négociations…
Il se pencha vers les lèvres qu'elle lui tendait et ferma les yeux. Elle mit ses bras autour de son cou et se serra contre lui.
- Harry ? dit-elle au bout d'un moment.
- Mmmm ?
- Fais comme si je n'avais rien dit, mais je crois qu'on est cernés…
Harry ouvrit les yeux. Il repoussa doucement Ellen et jeta un coup d'œil autour d'eux. Effectivement, à sa droite se tenait Sir Nicholas de Mimsy-Porpington et à sa gauche flottait Dame Agnes.
- Bonjour, fit Harry.
- Savez-vous que nous avons dû justifier notre action de la nuit de Samain auprès du Conseil des Fantômes, jeune homme ! dit sévèrement Sir Nicholas.
- Sir Nicholas… le gronda doucement Dame Agnes. Si vous devez blâmer quelqu'un, ce n'est pas Sire Harry. C'est moi qui vous ai convaincu de guider ces jeunes gens jusqu'à leur but… Et vous savez que nous avons eu raison. Le Conseil des Fantômes l'a reconnu également.
Nick Quasi-Sans-Tête s'inclina devant la Dame Grise.
- Vous avez été d'une éloquence inégalée, Dame Agnes, répondit-il galamment. Vous étiez d'une exaltation transcendante… et je crois que vous avez séduit jusqu'à Frère Théobald… Le Baron Sanglant a succombé quand vous avez lancé : La nuit de Samain ! La nuit de Samain Messires ! Vous ne parlez que de vous dévouer pour Poudlard ! Si vous souhaitiez faire quelque chose pour elle, c'est bien la nuit de Samain qu'il fallait le faire ! Et Sir Nicholas et moi n'avons fait que ce que nous croyions juste et bon pour Poudlard ! La Nuit de Samain est passée et nous sommes toujours là… Vous pouvez nous blâmer… Vous pouvez nous bannir… Vous pouvez choisir pour nos Maisons un autre esprit pour nous remplacer. Mais je tiens à dire que nul autre que Sir Nicholas de Mimsy-Porpington ne pourrait plus justement représenter Gryffondor, car il a agit sinon avec courage, du moins avec toute la ferveur de son cœur… Vous étiez magnifique, Dame Agnes… Et si nous n'étions des âmes trépassées, je vous aurais sur-le-champ demandée en épousailles.
Ellen mit sa main devant sa bouche pour s'empêcher de rire. Ce que n'eut pas la délicatesse de faire Dame Agnes.
- Sir Nicholas… soupira-t-elle. Si nous n'étions des âmes trépassées, vous ne m'accorderiez pas le moindre regard…
Elle chassa de la main les objections du fantôme et se tourna vers Harry, un peu plus grave.
- Je ne me suis trompée qu'en une chose, ajouta-t-elle. J'avais tort lorsque je prétendais qu'il était trop tard pour Severus Rogue. Il n'avait pas le cœur aussi sec qu'il le croyait lui-même. Et c'est tant mieux pour nous.
Elle sourit à Harry.
- Vous lui avez donné une chance, et lui il nous donne l'espoir depuis le fond de sa nuit. L'espoir, Sire Harry… Qui aurait cru que ce serait Severus Rogue qui nous le redonnerait…
- Oui…fit Sir Nicholas. Quel petit crétin désagréable il pouvait être quand il avait seize ans !
Il soupira tristement.
- Ne soyez pas affligé, reprit Dame Agnes. Au contraire réjouissons-nous de le savoir enfin en paix avec lui-même. Et gardons à l'esprit la leçon de son histoire. Lorsque tout est perdu, la lumière vient du fond de la nuit…
La Dame Grise se tourna à nouveau vers Harry.
- La Nuit que nous craignions tous s'est achevée, Sire Harry. L'aube que nous attendions s'est levée grâce à vous…
Harry fit une grimace dubitative.
- N'en doutez pas… assura Dame Agnes.
Elle s'approcha du jeune homme et posa ses lèvres de brume sur son front. Puis elle pencha la tête sur le côté et sourit à Ellie.
- Ellen McGregor ? dit-elle.
Sir Nicholas se pencha vers l'oreille du fantôme et lui murmura quelque chose que les jeunes gens n'entendirent pas. Dame Agnes sourit.
- Je sais très cher… mais vous vous trompez… J'ai l'excellent souvenir d'un jeune homme de Serdaigle qui portait le nom de McGregor.
Harry sentit Ellie se crisper contre lui. Il craignit un instant que la Dame Grise ne parlât de Quentin McGregor. Toutefois, elle se contenta de sourire encore avant de tendre ses doigts à Nick Quasi-Sans-Tête.
- Allons, mon ami, dit-elle enfin. Vous m'avez promis une promenade…
Sir Nicholas lui présenta courtoisement son poing et ils glissèrent ensemble dans l'allée déserte.
Harry et Ellen les regardèrent s'éloigner sous la pluie. Puis Ellen mit ses bras autour d'Harry et sa tête contre son épaule.
- Tu as froid ? demanda-t-il en entourant à son tour ses épaules de son bras.
Elle secoua la tête sans répondre.
- Tu es triste ?
Elle leva la tête vers lui, une interrogation au fond des yeux.
- Je n'ai pas le droit d'avoir simplement envie d'être près de toi ?
Harry se mordit les lèvres.
- Tu as demandé à Hermione quelque chose pour ta joue ? changea-t-il de sujet.
- Ce n'est pas important, répliqua Ellie. Et c'est comment le baiser d'un fantôme ? ajouta-t-elle pour couper court.
Harry se mit à rire doucement.
- Froid…
Il fit mine de frissonner. Elle toucha la cicatrice en écartant les mèches de cheveux sur le front d'Harry.
- Tu as mal ?
- Ce n'est pas important, répondit-il en détournant les yeux.
Il retira les doigts d'Ellen sur son visage.
- C'est étrange… dit-elle.
- Quoi ?
- De savoir que tu n'es jamais totalement avec moi…
- Ce n'est pas vrai ! se défendit Harry.
- Alors pourquoi ai-je l'impression que chaque fois que nos mains se touchent, tu vas t'enfuir en courant…
Elle mit sa paume à ce moment sur la paume d'Harry. Sa main était plus petite que celle du jeune homme, un peu moins large aussi, chaude et douce. Harry sentit des picotements dans ses doigts. Il retira sa main pour la frotter contre son manteau.
Ellen eut un sourire désabusé.
- Ce n'est pas qu'une impression, murmura-t-elle.
- Tu pratiques l'ancienne magie ? s'étonna Harry.
- Non.
- Pourtant tu en as en toi.
- Tout le monde en a un peu en soi…
Harry frotta sa main de plus belle contre l'étoffe de son manteau. Il secoua la tête avec véhémence.
- Non ! J'ai ressenti la même chose qu'avec Hermione et, elle, elle a assez de magie ancienne en elle pour pouvoir la pratiquer sans baguette…
Ellen secoua la tête.
- Je n'en sais rien… Ce que je sais, c'est que moi je n'ai pas envie de retirer ma main quand elle est dans la tienne. Au contraire.
Harry cessa de frictionner la paume de sa main. Ellen s'éloigna jusqu'au pilier. Elle tendit ses doigts sous la pluie. Harry frissonna. Il avait toujours cru que ce qu'il ressentait lorsqu'elle mettait sa main dans la sienne était de la magie. Il tressaillit encore. Le silence à nouveau emplissait les jardins et l'écho de sa pensée se faisait d'autant plus puissant. Il chassa cette voix qui ressemblait à celle d'Hermione qui ressassait sans cesse que l'amour c'était de la magie, et celle-là plus profonde encore qui persiflait à ses oreilles que le trouble qu'il éprouvait en la présence de la jeune fille venait de Celui-Dont-On-ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom.
- Tu n'as pas répondu à ma question, Harry… disait la voix d'Ellen.
Elle regardait le jardin embrumé, son bras passé autour du pilastre torsadé.
- Tu ne m'as pas dit ce qui arrivait à Finnigan.
Harry se rapprocha lui aussi du rideau de pluie fine. Il soupira.
- Rien de grave, murmura-t-il. Il se plaint qu'on lui a volé sa victoire…
Ellie tourna un sourire triste vers lui.
- Oh !... lui aussi… Et qu'est-ce que cela a à voir avec toi ?
Harry haussa les épaules.
- Je suppose qu'il lui fallait quelqu'un pour passer sa frustration…
Il sourit à son tour à Ellen.
- Et à propos de frustration… Qu'est-ce qui se passe avec Bulstrode ?
Ellen battit plusieurs fois des cils.
- J'ignore de quoi tu parles…
- Je t'en prie, Ellen… Hier, son chat était encore en vie et elle était prête à te sauter à la gorge… Ce matin, son chat est mort et elle ne t'accorde pas un regard…
- L'émotion sans doute, répondit la jeune fille du bout des lèvres.
Elle releva la tête avec défi :
- A moins que tu ne croies que je lui ai lancé quelque sortilège d'Hébétude en cachette…
- Tu en serais bien capable… Car je ne vois pas d'autre explication à ce changement soudain de comportement…
Il fit un pas vers elle, à nouveau sérieux…
- Ellen, fais attention avec elle… Et avec Wilford aussi…
- S'il te plait Harry ! le coupa-t-elle brutalement. Un sermon est la dernière chose dont j'ai besoin !
Elle s'appuya à nouveau de l'épaule au pilier. Harry s'assit sur le petit parapet de pierres. Il l'appela doucement et lui montra la place à côté de lui. Elle s'avança lentement et resta debout devant lui, le visage grave. Il prit sa main.
- Tu crois qu'ils ont pensé que cela pouvait arriver ?... demanda Ellen. Je veux dire… Tu crois que celui ou ceux qui ont fait ça au chat de Bulstrode ont pensé qu'il pouvait mourir ?
Ses yeux restaient fixés sur ceux d'Harry et il comprit que le chat de Millicent Bulstrode était bien loin de l'esprit de la jeune fille. Il serra un peu plus sa main dans la sienne.
- Il y a deux solutions, Ellen… Soit ils n'ont pas songé aux conséquences de leurs actes… Et je crains le pire, car il n'est rien de plus dangereux qu'un pouvoir tel que la magie noire en des mains inexpertes ou des esprits irresponsables… Soit ils savaient pertinemment ce qu'ils faisaient – le chat de Bulstrode, Green, Seamus, Justin, Susan qui était visée et toi… et là j'ai très peur aussi… Savoir que de tels êtres vivent parmi nous, qui n'hésitent pas à détruire de sang froid leurs camarades, me donne la chair de poule. Et savoir qu'ils pourraient se retrouver dehors à grossir les rangs des mangemorts… ne me plait pas non plus. C'est pourquoi je te le répète, pour la dernière fois c'est promis ! Je veux que tu fasses très attention, Ellen. J'ai bien vu le regard de Bulstrode hier… Elle m'a fait froid dans le dos…
Il prit une inspiration presque douloureuse avant de souffler presque pour lui-même :
- Elle m'a fait penser à Bellatrix Lestrange.
Il saisit les deux mains de la jeune fille et le frisson qui le parcourut n'avait rien à voir cette fois avec la magie ou quoi que ce fût d'autre qui émanait d'elle.
- Elle est folle et elle te déteste… murmura-t-il en l'attirant à lui.
Il mit ses bras autour de sa taille et sa joue dans le parfum de son manteau. Il sentit ses mains sur ses épaules, puis dans ses cheveux. Et sa voix, un peu lointaine qui disait :
- Mais que peut-elle bien faire de toutes façons… On lui a pris sa baguette… Et elle n'a pas d'amis…
Il y avait comme une interrogation dans la voix d'Ellen. Harry releva la tête. Ce n'était pas à lui qu'elle s'adressait. Elle regardait par-dessus ses cheveux en bataille vers les buissons de roses dénudés. Il la fit asseoir à côté de lui. Elle chassa du bout des doigts quelques gouttes d'eau sur la pierre près de sa main, dans un soupir.
Harry toucha le pansement qui dépassait de la manche du manteau d'Ellen.
- Je l'enlève ce soir, dit-elle.
Il mit sa main par-dessus celle de la jeune fille et elle ne retira pas la sienne. Ils restèrent un moment sans parler, sans même se regarder. La douceur triste des jardins berçait leurs deux cœurs. Ils éprouvaient les mêmes sentiments confus, ils en avaient tous deux conscience. Et Harry se disait qu'il était heureux malgré tout de ces instants volés à l'amère réalité, de ce contact ténu de leurs doigts. Il aimait son silence.
Ils entendirent bientôt un rire qui se voulait discret depuis le passage qui menait au château. Et une voix qui chuchotait, portée par les mystères de l'acoustique jusque sous la galerie.
- Allez, Ros, viens ! Il n'y a jamais personne par ici… surtout pas un dimanche matin par le temps qu'il fait…
Colin Crivey sortit dans la galerie, entraînant par la main une Rosalind Sheldon qui se défendait mollement. Il l'enlaça et l'embrassa sans se rendre compte de la présence d'Ellie et Harry sur la murette. Rosalind les vit la première. Elle repoussa Colin et ce dernier se trouva quelque peu interdit.
- Salut… fit-il.
Ellen leva l'index vers lui et un regard féroce.
- Vous ne nous avez pas vus. Nous ne vous avons pas vus.
Les deux jeunes gens s'éclipsèrent un peu plus loin sous les arcades. Harry pouffa à ses côtés.
Ellen se leva.
- Laissons-les… murmura-t-elle. Allons-nous promener…
Harry la suivit, bien qu'il objectât qu'une promenade sous la pluie n'était pas dans ses projets immédiats.
- La pluie est une douce amie pour les cœurs tristes, lui répondit Ellen. Et un petit sortilège de Impedire Pluvium nous fera un petit coin de parapluie…Ces Gryffondor ! Ils ne pensent jamais à rien !
Ils quittèrent l'abri du cloître et Ellie montra le ciel gris d'un geste désinvolte.
- Tiens, regarde, il ne pleut plus ou presque.
En effet une dernière goutte tomba sur son nez comme elle prononçait ces mots.
- C'est toi qui as fait cesser la pluie, dit-il en essuyant le visage d'Ellen.
Elle se mit à rire.
- Vous passez trop de temps en compagnie de Sir Nicholas, Sire Harry Cœur de Lion ! se moqua-t-elle.
Elle fit une révérence frondeuse.
- Je voulais juste faire un compliment, fit remarquer Harry, vexé.
- Tu as encore des leçons à prendre pour éviter le ridicule…
Elle rit de plus belle alors que le jeune homme levait les yeux au ciel. Elle l'embrassa sur la joue puis prit sa main pour l'entraîner vers le parc. Elle redevint grave tandis qu'ils marchaient sur le sentier boueux.
- Rusard va être furieux, avisa Harry dans un soupir. Nous allons mettre de la boue partout…
- Au contraire… il sera ravi de trouver une tâche supplémentaire pour ces imbéciles de Salamandres…
Harry laissa passer un moment avant de reprendre tandis qu'ils arrivaient dans le parc où justement les Salamandres se chargeaient de ramasser feuilles tombées et branches mortes :
- Au fait… Comment ça se passe pour eux, en bas, dans les cachots ?
Il évita de regarder vers Ellie.
- Ça pourrait être pire…
Elle secoua la tête.
- J'ignore ce que Dumbledore leur a fait – à moins que ce ne soit Londubat ! – mais même quand nous sommes entre nous, ils continuent à se taire. Il faut dire que personne n'a envie de leur parler non plus… Nous évitons tout commerce avec eux, de peur que nos paroles ne dépassent pas tant que cela nos pensées… Je ne dis pas que de temps en temps, un petit maléfice ne se perd pas de leur côté… mais rien de grave. Rien en tous cas qui nécessite l'intervention de Madame Pomfresh, et encore moins celle d'un conjureur de sort Première Catégorie… Quant à Malefoy et ses Salamandres… ils ne lèvent même pas les yeux sur eux. Certains espèrent encore en lui. Les imbéciles ! Ils tueraient pour un seul de ses regards. Pour une parole de leur maître… Leur Maître ! Il est plus que jamais bouffi d'orgueil… Il se gonfle de cet échec comme une baudruche qu'il est. Moins ses partisans sont nombreux plus il fait de bruit, chez les Serpentard du moins. Il se rit de Dumbledore à qui il croit avoir échappé. Il parle avec mépris du professeur Londubat. Il incite les autres à la révolte, tout en restant caché derrière la robe de… cette anguille de Nott…
Elle s'échauffait en parlant et Harry retira sa main de la sienne pour la poser sur l'épaule d'Ellen. Elle releva la tête vers lui.
- Désolée, murmura-t-elle. Mais parfois j'en viens à me dire que je prêterai volontiers ma baguette à certains qui lui reprochent de les avoir sacrifiés à ses plans tordus, si ce n'est à sa propre sécurité…
- C'est encore sur toi que cela retomberait, soupira Harry.
- Oui, et c'est ce qui me retient ! fit Ellen sur un ton qu'elle voulait léger.
- Parlons d'autre chose, veux-tu ? dit Harry qui n'avait guère envie de retourner ce sujet dans la plaie vive qu'était pour lui les méandres des cachots de Serpentard.
Ellen eut un sourire las qu'il ne vit pas.
- De quoi veux-tu que nous parlions ?
Il haussa les épaules. Il n'avait pas envie de parler. Il avait simplement envie d'être auprès d'elle. De marcher, épaule contre épaule, dans le parc déserté. Pourtant le silence aussi lui pesait, parce que ses pensées s'égaraient alors sur des chemins qu'il n'avait pas plus envie d'aborder. Et qu'il savait que les réflexions d'Ellen suivaient le même cheminement.
- Tu as lu la Gazette ce matin ? dit-il.
- Comme tout le monde…
- Et qu'est-ce que tu en penses ?
- Tu veux mon avis sur les faits ou tu veux que je te parle de mes opinions politiques ?
Ils passèrent à quelques pas de Crabbe et Goyle qui les regardèrent s'éloigner d'un œil mauvais. Ils n'y prirent garde, sauf qu'Ellie chuchota que Crabbe avait le même regard à présent pour Drago Malefoy.
- A cause de quoi ? voulut savoir Harry avec un sourire sardonique. De son père ? Des derniers évènements ? Ou parce que Malefoy a laissé Wilford prendre sa place ?
Ellie lui rendit un sourire complice, puis reprit sur le thème de la Gazette :
- Ça sent l'agitation organisée à plein nez, voilà ce que je pense de ces évènements mondiaux ! dit-elle.
- Et en ce qui concerne les raisons officielles de ces évènements ?
Ellen ne répondit pas immédiatement. Elle paraissait réfléchir tout en marchant lentement.
- Cet été quand j'étais en France… Je t'ai dit que j'y avais fait la connaissance d'un charmant jeune homme qui travaille au Ministère de la Magie Français ? Une véritable mine de renseignements ce brave garçon. Cela me fait penser que je n'ai pas répondu à ses condoléances d'une manière très diserte… je peux toujours mettre cela sur le compte de l'émotion qu'est-ce que tu en penses ?
- Tu veux le recontacter ? fit Harry.
- Ce serait un bon moyen de savoir exactement ce qui arrive en France, non ?
- Mais on sait ce qui arrive en France… ! Je voulais juste savoir si tu pouvais m'en dire plus sur la Loi de Brocéliande… puisque tu as des connaissances étendues en ce qui concerne la France…
Il avait parlé avec un peu trop de hargne à son goût et le petit sourire d'Ellen donna des couleurs à ses joues pâles.
- L'Edit de Brocéliande… corrigea Ellen. C'est un accord signé entre les représentants des Créatures Magiques et le gouvernement magique de France en décembre 1767 qui donne aux créatures signataires de l'acte les mêmes droits que les sorciers. Il concerne en particulier les Vélanes, les Vouivres –elles vivaient au grand jour à l'époque encore-, les Loups-Garous…
- Les Loups-Garous ? l'interrompit Harry.
- Oui, fit négligemment Ellie. Les Loups-garous ont les mêmes droits que les autres sorciers tant qu'ils ne sont pas sous l'influence de la lune. A charge pour eux de se débrouiller pour ne pas faire parler d'eux durant cette période, de se rendre inoffensif en quelque sorte… en solitaire ou en organisation, cela le Ministère s'en moque pourvu qu'on n'entende plus parler d'eux.
- Et si quelques-uns se rebellent ?
- D'après mon informateur… les communautés loup-garou de France se chargent de faire respecter cet Edit par leurs congénères réticents. La rage d'un seul pourrait mettre en danger des dizaines et des dizaines d'individus… Ils veillent à ce que chacun respecte le marché conclu avec le gouvernement. Bien entendu cela ne règle en aucun cas les problèmes personnels de chacun et les méfiances sont nombreuses, mais au moins cela calme-t-il les ardeurs révolutionnaires des Loups-Garous de France…
- Mais alors ? fit Harry les sourcils froncés. Pourquoi avoir recommencé à attaquer des villages… n'est-ce pas ce qu'a dit la Gazette ?
- Non, répondit Ellen. La Gazette fait seulement état de chasses aux loups-garous… par les détracteurs de l'Edit. Nulle part il n'est dit qu'elles s'appuient sur des faits qu'on leur reprocherait… En fait, oui… Ils leur reprochent d'être des…
- Des hybrides ? proposa Harry avec irritation.
- Les loups-garous ne sont pas des Hybrides. Ce sont des mutants une fois par mois. Un hybride est le croisement entre deux espèces. Et encore ce terme est-il mal appliqué aux sorciers. Puisqu'il sous-entend que l'union avec un tel individu resterait stérile ou du moins imparfaite… alors que nous avons les preuves qu'il n'en est rien. Tu te souviens sans doute de la Championne de Beaux-Bâtons…
- Fleur Delacour ?
Ellen accentua son sourire moqueur.
- Oui en effet tu te souviens d'elle…
- Elle était mon adversaire, je pourrais difficilement l'oublier… rougit Harry. Et puis c'est la fiancée de Bill Weasley…
- Elle a du sang de Vélane, continua Ellen sans paraître remarquer le hâle soudain du jeune homme. Or si les hybrides de vélanes et de sorciers étaient stériles, elle ne serait pas là, ni sa sœur non plus… et ton nom ne circulerait pas dans les dortoirs de filles de Beaux Bâtons depuis déjà quatre ans. Non, le terme d'hybride n'est pas plus approprié à mon avis que celui de créatures pour des Centaures… Je préfère pour ma part employer celui de métis.
- Pourquoi pas sang-mêlé ? demanda Harry avec un détachement qui eût pu passer pour de la froideur s'il n'avait serré en même temps la main d'Ellen dans la sienne.
- Parce que cela a une connotation quelque peu dépréciative que je trouve exagérée… Un peu de rigueur scientifique ne ferait pas de mal à tous ceux qui confondent déterminisme et insultes.
Harry hocha la tête. Il n'était pas certain de tout comprendre et il ne voulait surtout pas passer pour un Gryffondor inculte aux yeux d'Ellen.
- L'hégémonie sorcière sur le monde magique n'est certes pas une chose que je condamne. Continua cette dernière. Après tout je préfère être de ceux qui commandent, tu le sais… mais il ne faudrait pas oublier que le monde n'est qu'un équilibre délicat, comme le dit ton amie Hermione…
Harry lui jeta un coup d'œil en coin.
- Il faut de tout pour faire un monde, rappela-t-il en souriant.
- Oui, et surtout pour que commandent les sorciers il faut qu'il y ait d'autres individus à commander… Le pouvoir est tout aussi relatif que le reste de la vie. Et franchement je me pose des questions sur ceux qui affirment leur supériorité sur des êtres qui ne songeraient même pas à la leur disputer… je me méfie bien plus de ceux qui écrasent leurs elfes de maisons d'insultes et de coups que des pitoyables tentatives de Granger pour les faire réagir… Il en va de même pour ceux qui titillent la réputation des loups-garous et parlent avec hauteur aux Centaures… Il se pourrait bien que ces êtres qu'on traite en créatures n'appliquent à la lettre les ordres de leurs « supérieurs » et ne répondent à l'insulte par la sauvagerie. Ce dont je me satisferais pleinement si je n'étais moi-même comprise dans le lot des sorciers, car ce jour-là, il est plus que probable que personne ne reconnaîtra les siens…
A son tour ; Ellen regarda Harry de côté. Elle eut un sourire dont il n'eut pas conscience.
- J'ai l'impression que je t'entraîne un peu loin, Potter…
- Tu sais, moi, la politique qu'elle soit sorcière ou moldue… Et si tu prononces le mot de Gryffondor, McGregor, je ne te parle plus de toute ma vie…
Elle se mit à rire comme elle n'en croyait pas un mot. Il redevint sérieux.
- Mais qu'est-ce que tu penses réellement des lois qui séparent les êtres qui vivent dans le monde magique ? demanda-t-il.
Elle haussa les épaules.
- Les lois sont les lois, Harry… Elles sont froides et collectives… Elles oublient parfois qu'elles s'appliquent à des individus… La loi discrédite les loups-garous, or nous connaissions un loup-garou qui possédait en lui bien plus d'humanité que bien des sangs-purs… La loi fait des Centaures des créatures sans âme, or nous côtoyons Firenze qui est un esprit supérieur et un professeur plutôt cool, même si on ne comprend pas la moitié de ce qu'il raconte parfois… Les elfes de maison sont de pauvres créatures stupides nous dit la loi. Pourtant quand je pleurais parce que mes frères ne voulaient pas de moi dans leurs jeux de batailles, c'était une vieille elfe qui me prenait dans ses bras pour me consoler et me dire que quand je serai plus grande c'est moi qui conduirai les armées à la victoire…
Elle se tut une minute avant de reprendre sur un ton plus léger :
- Il n'y a que pour les Vélanes que je suis plus réservée…
- Pourquoi ? fit Harry un sourcil levé.
- Parce qu'elles font de la concurrence déloyale ! Voilà pourquoi !
Harry ne put s'empêcher de sourire. Il fit glisser son bras de l'épaule d'Ellen dans son dos et la serra contre lui.
- Mais une Serpentard aussi retorse que toi saurait quoi répondre à la menace effective que représentent ces créatures démoniaques…
- Des Etres, Harry… les Vélanes sont des Etres… Il faut vraiment que tu revoies ton Histoire de la Magie… Même un Gryffondor obtus doit savoir ce genre de choses… quoi que « créature » est un nom qui les qualifie parfaitement… En cela, je suis parfaitement d'accord avec la loi dite de la Prérogative de la Baguette !
Elle le défia d'un regard moqueur. Harry ne lui demanda pas de préciser ce qu'était cette loi. L'explication succincte donnée par la Gazette lui suffisait amplement.
- Tu crois qu'il pourrait arriver ici ce qui arrive en Espagne ? demanda-t-il avec gravité.
Elle hocha la tête :
- Les sorciers aux origines un tant soit peu moldues au ban de la société ? Bien sûr, si… Voldemort gagne la bataille, c'est ce qui arrivera à terme…
Ils cessèrent de marcher. Elle se rapprocha tout près de lui et mit ses bras autour de lui.
- Tant pis, murmura-t-elle, je te suivrai dans l'opprobre le cœur léger…
- C'est très gentil, Ellen, répondit Harry sur le même ton. Mais si Voldemort gagne la bataille, je ne serai plus là pour t'entraîner dans l'opprobre ni dans quoi que ce soit d'autre d'ailleurs…
Il frissonna… Evoquer sa propre mort ne lui avait jamais été agréable. Mais c'était la première fois, à cet instant, dans les bras d'Ellen, ses yeux dans le regard doré de la jeune fille, que cette pensée lui brisait le cœur. Il se sentit soudain glacé de l'intérieur et Ellen tressaillit aussi.
- Je te disais qu'il finirait par neiger, dit-elle. Le temps se rafraîchit.
Harry leva les yeux vers le ciel qui s'obscurcissait brusquement. Ellen fit de même. L'air semblait figé et le silence était vide. Ils comprirent avant même de les voir.
Crabbe et Goyle cessèrent de ramasser les feuilles mortes du parc. Potter leur criait de rentrer vite et sa voix était lointaine. Oui, il fallait rentrer à l'abri du château… mais à quoi bon ? Ils n'avaient aucune chance de salut.
- Oh ! hurla la voix de McGregor. Les deux Trolls Pétrifiés ! Vous vous dépêchez ou je vous fais avancer à coups de pieds dans le derrière ?
Goyle songea qu'il n'avait pas de baguette. Crabbe l'attrapa par le col et le traîna avec lui en direction du perron. Il grognait à ses camarades de rentrer et sa mine revêche les ramena vers une réalité dont ils s'éloignaient lentement.
Harry constata que les Serpentard lui obéissaient. Il cherchait des yeux dans l'ombre qui se refermait sur eux l'ébauche des longues robes sombres des Détraqueurs. Il laissa Ellen courir vers le château et ralentit son pas. Ils étaient tout proches. Ils étaient là.
- Harry ? Mais qu'est-ce que tu fais ? Viens !
- Il est trop tard Ellen ! Fais-les rentrer ! Et ramène de l'aide par ici ! On n'aura pas le temps de fermer les portes avant qu'ils…
Il ne termina pas sa phrase. Ils étaient là. Ils flottaient droit vers le château. Le temps semblait immobile et la terreur de ses camarades parvint jusqu'à Harry.
Ellen poussa Crabbe à l'intérieur. Le jeune homme avait ses yeux exorbités fixés sur Harry au milieu du parc. Elle suivit son regard. Un grand cerf, gigantesque, lumineux, jaillit de la baguette du jeune homme et bondit vers les spectres informes qui se répandaient dans le parc.
- Spero Patronum !
Sa voix leur arriva ensuite et Crabbe parla sur elle :
- Il n'y arrivera jamais tout seul…
Il jeta un regard d'envie sur la baguette de McGregor.
- Va avertir les autres ! intima-t-elle d'une voix qu'elle ne reconnut pas elle-même. Et ferme la porte derrière nous…
Un éclair d'incompréhension passa dans le regard habituellement morne du garçon.
- Fais-le !
Elle l'entendit crier sous la voûte du hall et eut juste le temps de le voir s'arc-bouter au lourd battant de bois pour le fermer. Elle sauta les marches du perron la baguette en avant.
Un immense cheval d'un blanc argenté frôla Harry de son aile diaphane. Les Détraqueurs les plus proches s'évanouirent dans une brume irréelle. Le jeune homme sentit vibrer dans sa main la chaleur de celle d'Ellen. Il resserra ses doigts sur les siens. Une nouvelle fois, il s'entendit prononcer la formule, d'une voix forte et ferme. Comme un écho, la voix d'Ellen lui répondit. Elle avait le même accent convaincu qu'en ce jour de printemps où elle s'était élevée pour chanter sous la voûte de la Grande Salle. Le cerf et le cheval d'argent galopèrent un instant côte à côte avant de s'écarter l'un de l'autre.Le Cheval ouvrit ses ailes balayant dans son sillage d'argent les silhouettes glacées. Le Cerf fonçait bois en avant pour se forcer un passage.
- Qu'est-ce que tu fais là ? dit enfin Harry. Rentre vite !
- Si tu crois que je vais laisser ces choses essayer de te voler le moindre baiser, tu te fourres le doigt dans l'œil, Potter !
Elle était pâle. Ses cheveux bruns paraissaient plus sombres encore et son visage plus farouche. Elle désigna les serres d'un geste du menton. Et Harry acquiesça en silence. Elle leva sa baguette et Harry l'imita. A nouveau leurs deux Patronus crevèrent les rangs serrés des Détraqueurs obstinés tandis qu'eux-mêmes courraient vers les jardins.
C'était étrange. Il n'avait presque pas besoin de faire appel à ses souvenirs. Il n'avait pas l'impression de lutter contre le froid et le désespoir que les Détraqueurs faisaient monter en lui… Le malaise était là pourtant. Le même que celui qui l'avait assailli l'avant-veille quand le sommeil le fuyait. Mais c'était si facile de le cantonner dans un coin de sa mémoire. C'était si facile de laisser la voix d'Ellen parler plus haut que les chuchotements sournois de cette voix qui lui disait qu'il n'était rien…
L'entrée du jardin fut devant lui comme il se demandait si Hagrid était retourné dans sa cabane.
- Harry ! cria la voix angoissée de Colin Crivey. Qu'est-ce qui se passe ?
La cour était sombre et Harry distingua les silhouettes du jeune homme qui soutenait contre lui Rosalind Shelton.
- D'après toi ? répondit Ellen.
Colin secoua la tête.
- Ce n'est pas possible ! murmura-t-il. Ce n'est pas possible…
Harry et Ellen poussèrent les deux jeunes gens vers le passage qui menait au château. Harry lâcha Cornedrue sous la galerie avant de courir derrière ses amis jusqu'à la porte. Il se précipita dans le Hall et referma la porte derrière lui.
Crabbe et Goyle terminaient de fermer les portes et Rusard, sous les ordres de McGonagall accourue n'arrivait pas à faire tourner la clé des verrous. Il tremblait de tous ses membres, blafard et flageolant.
McGonagall se tourna vers les nouveaux arrivants. Elle s'efforçait de garder une attitude ferme.
- Miss McGregor, ramenez vos camarades dans la Grande Salle… Toutes les Maisons se réunissent là-bas…
Ellen montra le chemin à ses deux condisciples. Ils étaient tous blêmes. Leurs jambes se dérobaient sous eux.
- Potter ?
Harry leva vivement la tête vers le professeur McGonagall.
- C'est valable pour vous aussi…
Harry s'avança.
- Nous n'aurons pas le temps…
McGonagall fronça les sourcils. Elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule sur le flot d'élèves qui descendait le Grand Escalier dans une panique silencieuse. Ils sentaient déjà le froid s'insinuer dans leur cœur.
Harry s'avança encore et la voix basse il répéta :
- Nous n'aurons pas le temps de mettre tout le monde à l'abri… Ils sont déjà là… Ils sont si nombreux…
Il sembla au jeune homme que McGonagall pâlissait davantage encore.
- Je sais… murmura-t-elle. Je les ai vus par la fenêtre…
- Il faut prévenir les Aurors, Madame…
- C'est impossible… Ils sont occupés ailleurs…
Au travers de leurs lunettes respectives, le regard d'Harry croisa celui de McGonagall. Une vague d'angoisse monta du plus profond de lui. Aucune chance. Ils n'avaient aucune chance. Et les mots de Colin retentirent dans son esprit vide : C'est impossible ! Non ! Cela ne pouvait pas être. Comment avait-il pu faire une chose pareille. Et pourquoi ? La colère ? La vengeance ? La rage ? Un frisson parcourut Harry. Le refus montait à sa gorge. Et sa propre colère prit le dessus.
- J'ai fait prévenir le professeur Dumbledore, continuait McGonagall. Il va trouver une solution. Retournez dans la Grande Salle…
- Non ! cria presque Harry.
Harry courut à la Salle des Quatre Maisons. Elle était vide. La voix d'Hermione derrière lui. Il se précipita vers son amie. Elle se tenait au mur, la main sur son cœur.
- Oh merci, mon Dieu ! soupira-t-elle au bord des larmes. J'ai eu si peur… Ils étaient si nombreux et tu étais si seul…
Harry la prit dans ses bras.
- Non, murmura-t-il dans ses cheveux. Je n'étais pas seul…
Elle semblait inerte entre ses bras. Et il eut peur.
- Où est Ron ? demanda-t-il brusquement.
- A l'infirmerie avec d'autres Préfets pour faire descendre les blessés dans la Grande Salle, murmura Hermione.
- Il faut que tu rejoignes tout le monde… Tu es Préfète en Chef, Hermione…
Elle secoua la tête et Harry vit deux larmes couler le long des joues de la jeune fille.
- Hermione ! Qu'est-ce qu'il y a ?
- Tout n'a servi à rien… Harry. A rien… Il fait si froid…
- Hermione ! Tu es Préfète en Chef !
- Je n'en ai plus la force…
La panique un instant faillit s'emparer du jeune homme. La colère revint balayant tout autre sentiment.
Il tint Hermione à bout de bras et la secoua sous l'œil effaré de leurs camarades qui couraient vers la Grande Salle. Hermione pleurait en silence.
- Et Remus qui n'est plus là pour nous donner du chocolat, dit-elle.
- HERMIONE !
Il la gifla de toute la force de sa propre peur.
- Tu-es-Préfète-en-Chef ! asséna-t-il.
Elle ouvrit des yeux effrayés mais parut se reprendre.
- Oui… balbutia-t-elle. Je suis Préfète. En Chef…
Elle passa sa main sur sa joue, comme étonnée et prit le flot pressé des élèves.
Harry la talonna et entra dans la Grande Salle en même temps qu'Ellen qui revenait des cachots des Serpentard. Le réfectoire retentissait de lamentations et de pleurs. Les professeurs présents avaient bien du mal à maintenir un calme relatif.
Harry vit avec soulagement qu'Hagrid était là. Le demi-géant, à force de "Brum ! Brum !" embarrassés tentait de taire le murmure grandissant. L'école continuait à se déverser dans le réfectoire, inquiète et mal à l'aise. Harry s'écarta du passage. Ellen le suivit. Il sentit qu'elle glissait quelque chose dans sa main. Lorsqu'il baissa les yeux, il vit que c'était une tablette de chocolat. Il sourit.
- Je savais que cela finirait par servir…
La voix était mal assurée. Et le sourire incertain. Il remit la tablette entre ses mains.
- Merci, dit-il doucement. Mais va plutôt voir Hermione, elle en a plus besoin que moi…
Les mots de Dumbledore lui revinrent en mémoire. C'est la douleur et le chagrin qui rendent vulnérable… Il caressa la joue d'Ellen du bout des doigts et se pencha pour embrasser ses lèvres. Quelles images avaient ramené les Détraqueurs à l'esprit de la jeune fille ? Sa lèvre tremblait et le sortilège de Coquette avait disparu, laissant voir une marbrure sur sa joue et dans son cou.
Le froid les saisit. Harry leva la tête vers le plafond enchanté. Ils étaient là. Tout près. Il s'attendait à les voir traverser les murs. Les pleurs se firent plus nombreux. Il vit Justin prendre Susan dans ses bras et Colin serrer son frère et Rosalind contre lui. Ils n'avaient aucune chance. Ils étaient tous pris au piège. Harry ferma les yeux. L'air qu'il respirait lui faisait mal. L'image qui s'imposa à son esprit lui blessait le cœur. Les Détraqueurs. Des centaines et des centaines de Détraqueurs comme une chape de désespoir sur le château. Il rouvrit les yeux et les tourna vers les ouvertures qui d'ordinaire laissaient passer les hiboux postaux. Ils soufflaient par-là leur haleine glaciale. Il lui semblait voir leurs longs doigts informes s'accrocher aux bords des oeils-de-bœuf. Ils flairaient leurs joies et leurs peines comme les chiens la curée. C'était fini. Il n'y aurait pas de salut. Il ne viendrait aucun secours.
Firenze fit irruption dans la salle.
- Ils sont là… Lança-t-il au Professeur Londubat qui essayait de calmer quelques Première Année hystériques. La verrière de ma classe ne tiendra pas longtemps…
Le professeur de Défense contre les Forces du Mal frappa dans ses mains.
- A vos tables ! commanda-t-il. Chacun à vos places habituelles. Comptez-vous et signalez les manquants…
Il y eut un mouvement affolé. Harry sentit Ellen qui se serrait contre lui. Ce fut elle qui l'embrassa cette fois.
Un ricanement discret les fit se retourner.
- C'est ça, Potter… Fais-lui tes adieux… avant de t'évanouir…
Malefoy n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Une main s'abattit sur sa robe et le saisit par le col.
- La ferme, Malefoy ! grinça Ron derrière lui. Tu crois que les Détraqueurs vont t'épargner parce que tu portes la marque noire ?
- Ronald Weasley !
Ron se tétanisa ; la voix de Dumbledore était pourtant aussi douce qu'à l'ordinaire. Il lâcha Malefoy qui ne riait plus.
Dumbledore restait sur le pas de la porte. Il désigna les Serpentard condamnés aux travaux forcés à Algie Londubat :
- Qu'on leur rende leur baguette…
Tous les visages se tournèrent vers le directeur cependant qu'Algie Londubat faisait apparaître les baguettes de ses élèves sur la table des professeurs. Les jeunes gens s'approchèrent en hésitant. Chacun se saisit de son instrument, les uns avec crainte, les autres avec avidité.
- Madame Pomfresh… souffla Ron avec angoisse. Elle est encore à l'infirmerie. Goldstein est intransportable et elle ne peut le laisser seul… Mcmillan est resté avec elle, mais…
Dumbledore leva la main pour le faire taire. McGonagall arrivait, essoufflée et pâle.
- Pas moyen Albus ! Elle ne veut rien entendre… Elle s'est enfermée dans son grenier et je n'ai rien pu faire… Oh Albus… Ils sont là… Ils arrivent.
Dumbledore la fit entrer. Tout le monde était figé dans l'attente de sa parole. Il se tourna vers la salle. Il était grave.
- Minerva, vous refermerez les portes derrière moi…
Harry s'avança vers lui.
- Ils sont trop nombreux ! Vous aurez besoin de renfort…
Ronald Weasley était derrière lui et Ellie McGregor également. Dans la salle des Septième et des Sixième Année se levaient et venaient vers eux.
A nouveau Dumbledore leva la main. Il souriait, cependant, cette fois…
- Hé bien… je ne sais comment je dois prendre cela, fit-il… Dois-je croire que je suis si vieux que vous n'avez plus confiance en mon pouvoir ? Ou bien est-ce l'expression de votre attachement à ma personne… ?
Les élèves stoppèrent leur avancée. Comment Dumbledore pouvait-il plaisanter dans de telles circonstances ? Harry à quelques pas de lui, voyait son regard tamiser la foule des jeunes gens.
-Songez à vos camarades qui ne maîtrisent pas encore les sorts de votre niveau… Il faut les protéger comme vous-même. Que deviendront-ils si les plus forts… les plus habiles… les plus expérimentés… les abandonnent à leur sort…
Le directeur cessa de promener les yeux sur la salle, il croisa le regard d'Harry.
- Harry ? Viens mon garçon… Ronald ?
Ron se rengorgea et se plaça près de son ami. Puis Dumbledore appela Ginny Weasley et Neville Londubat qui ne put s'empêcher de s'étonner ; Justin Finch-Fletchey, Marta Dobson ; Terry Boot, Michael Corner, et enfin Morag McDougall des Serpentard qui s'avança presque en courant.
Harry était en train de se dire qu'il aurait choisi exactement les mêmes personnes pour former un groupe d'intervention anti-Détraqueurs, lorsque Dumbledore posa son regard sur Ellie McGregor, qui n'avait toujours pas rejoint sa place.
- Ellie McGregor…
La voix du Directeur résonna dans l'air comme un cristal. Un frisson à nouveau saisit tous ceux qui se trouvaient dans la Grande Salle soudain assombrie. Il y eut dans le couloir un grand bruit de verre brisé. Dumbledore poursuivit, la voix à peine un peu plus hâtive.
- … et Drago Malefoy.
Le silence se fit glacial. Etait-ce parce que tous se demandaient si Dumbledore avait toute sa tête ou à cause de la proximité des Détraqueurs, nul n'aurait su le dire. Le dernier interpellé ne fut pas le moins surpris. Le sourire légèrement méprisant qu'il arborait d'ordinaire, et qui s'était à peine estompé depuis que Dumbledore avait apostrophé cet imbécile de Weasley se figea.
Dumbledore fit un geste et les jeunes gens se retrouvèrent hors de la salle. Ils entendirent la porte se refermer derrière eux et la voix de Minerva McGonagall leur souhaiter bonne chance.
