Me revoici avec le quatrième chapitre d'Elected ! Il va se passer beaucoup de choses, alors accrochez-vous, c'est parti :)
Depuis qu'Hermione avait évoqué l'idée de se faire virer de son groupe à l'assemblée, elle tournait en boucle dans sa tête. Qu'adviendrait-il d'elle si effectivement, Lupin décidait de l'exclure ? Elle ne pouvait pas être seule, elle n'aurait plus aucun poids et ne pourrait plus soumettre de lois. Autant démissionner. Et puis elle n'avait jamais été virée de sa vie, jamais, nulle part. Hermione Granger ne se faisait pas renvoyer.
Et pour la virer, Lupin devait trouver un motif valable ; on ne rejetait pas un membre juste pour un petit désaccord. En plus, Lupin tenait beaucoup à son unité, et insistait sans arrêt sur l'idée que chaque voix était importante. La virer, c'était se priver de sa voix. Et la voix d'Hermione Granger était capitale.
Non, il ne la virerait pas.
Ou peut-être que si. Il ferait d'elle un exemple, pour remettre son groupe en ordre à un moment où tout bougeait très vite à l'assemblée, et où les autres groupes explosaient.
Hermione se prit la tête entre les mains, et grogna.
Tout ça à cause des petites manigances de Drago Malefoy.
"Un thé ? proposa la voix d'Harry depuis la cuisine.
- S'il te plait, répondit la jeune femme en relevant la tête."
Avec tout ça, elle en avait presque oublié qu'Harry et sa fille étaient dans son appartement. Dahlia jouait sur le tapis avec une boîte de cubes ensorcelés, et babillait gentiment.
"J'envie ta fille... Tout ce qu'elle a comme soucis, c'est d'empiler des trucs, marmonna Hermione en s'accroupissant à côté de la petite fille pour l'aider.
- On empile tous des trucs. Moi j'empile les criminels, toi les projets de loi, répliqua Harry en haussant la voix pour couvrir le sifflement de la bouilloire.
- J'aimerais surtout arrêter d'empiler les problèmes. Je n'ai toujours pas vu Lupin, et c'est ce soir qu'a aura lieu l'inscription dans les groupes... Pourquoi il refuse de me répondre ?"
Hermione lâcha un cube qui roula sous la table basse, l'obligeant à ramper pour le rattraper.
"Boum, dit Dahlia en éclatant de rire."
Malgré sa mauvaise humeur, Hermione rit avec elle et lui rendit le morceau de bois.
"Peut-être qu'il craint d'autres désaffections dans votre groupe ? Il court peut-être après d'autres députés pour les retenir. Et puis, il sera fixé ce soir. Il verra bien où tu t'inscris.
- Boum, répéta Dahlia en envoyant valser un des cubes sous la table."
Visiblement, elle aimait particulièrement voir Hermione s'escrimer à retrouver, en tâtonnant, ses jouets. La jeune femme fouilla le dessous de la table machinalement, perdue dans ses pensées.
"C'est vrai... ça sera la surprise !
- Comment ça, la surprise ? tiqua Harry en passant la tête par la porte de la cuisine.
- Je ne parlais pas de moi. Je reste, c'est évident. Tu me vois me jeter tête baissée avec Malefoy et sa clique ? Je ne sais même pas quelle est leur ligne politique, à part qu'ils veulent pas être comme tout le monde. Tu parles d'un renseignement !
- Bon sang, si j'avais su qu'un jour on aurait cette discussion... marmonna Harry en arrivant avec une théière fumante."
Hermione fit voler deux tasses jusqu'à eux et entreprit de les servir.
"Tu sais, Malefoy n'est pas si infréquentable que ça."
Interdite, Hermione darda deux yeux choqués vers son meilleur ami. Qu'était-il en train de faire, exactement ?
"Je sais tout ça. Mais que ce soit toi qui me le dises, et surtout maintenant... T'es en train d'essayer de me dire quelque chose, Harry ?"
Il haussa les épaules, semblant hésiter à poursuivre. Il n'avait pas l'air sûr de ses propos.
"Je sais que c'est bizarre venant de moi, quand on connait notre rivalité à Poudlard et cette espèce de haine mutuelle qui a quand même duré quoi, six ans ? On a passé une éternité à se tirer dans les pattes, mais c'était des gamineries. Quand les choses ont commencé à mal tourner, à vraiment mal tourner... il a recouvré la raison. Il a fait les bons choix. Il a menti à son père, il a coupé les ponts avec sa famille, il a aidé Rogue, il a aidé les jumeaux, il a rallié l'Ordre. Malefoy n'est plus cet atroce gamin arrogant. Il a tourné le dos à son éducation et c'est plus qu'aucun de nous n'en a fait. Il a quand même flingué un h-o-r-c-r-u-x-e... répondit Harry en épelant le mot, comme si Dahlia risquait de le répéter.
- Bien sûr, je sais... J'ai jamais dit que je l'accusais d'être un mangemort ou un quelconque extrémiste ! Mais ça reste quand même un petit con. Égocentrique, opportuniste, immoral. C'est pas parce que Fred et George ont rejoint son fan club qu'on est obligés d'en faire autant. Que JE suis obligée d'en faire autant.
- Ce que je voulais juste te dire, c'est que tu ne devrais peut-être pas rejeter cette idée trop vite... Après tout, les points communs que t'as avec eux, les idées que vous partagez, ça c'est réel."
Hermione reposa brutalement sa tasse sur la table. Harry insistait beaucoup trop pour être honnête. Qu'il l'incite à la prudence et à la modération, très bien. Mais qu'il suggère que rejoindre le camp de Malefoy n'était pas l'idée la plus saugrenue qui soit... C'était louche. Hermione sentait une boule grossir dans sa gorge, comme un mauvais pressentiment qui enflait à mesure qu'Harry prenait des précautions oratoires.
"Tu penses que Lupin va me virer ? s'inquiéta Hermione."
Harry secoua la tête, se gratta la nuque, soupira. Il était embarrassé.
"Je te connais, Hermione. Je pense que tu ne vas pas supporter cette situation longtemps, finit-il par lâcher. Ça fait des mois que vos relations se dégradent, qu'il fait preuve d'autorité et que ça t'agace. Tu crois pas qu'il s'est passé quelque chose d'irréversible entre vous ?"
Hermione resta muette une bonne minute, affligée. Bien sûr qu'il avait raison. Quelque chose s'était brisé quand Lupin était venu la menacer dans son bureau, et la fracture avait été entérinée avec cette lettre condescendante. Mais ne pas s'entendre avec son leader n'était pas une raison suffisante pour tout plaquer, abandonner ses collègues, les valeurs de son groupe, tout le travail accompli. Elle pouvait certainement gérer cette relation conflictuelle. Il le fallait.
"Ce n'est pas comme si j'avais le choix de toute façon... Je vais ravaler ma fierté et attendre qu'il s'excuse, décréta-t-elle."
Ne voulant pas la contredire à nouveau, Harry choisit de retenir sa langue cette fois-ci. Il sentait bien qu'Hermione était perdue, et qu'elle n'était définitivement pas prête à prendre une décision. Il l'attira contre lui et lui embrassa la front, et se contenta de la réconforter en attendant qu'elle soit apte à réalisait ce qu'il se passait.
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Hermione passa le reste de la journée à s'occuper de Dahlia tout en travaillant de loin sur ses dossiers. Harry était parti travailler, et Daphné qui ne s'entendait plus avec ses parents préférait largement confier sa fille à la griffondor que lui imposer une journée avec les Greengrass. La jeune femme apprécia cette distraction bienvenue, mais ne parvint jamais à oublier complètement ce qui la taraudait. Elle se sentait angoissée, comme un animal pris au piège.
La fin d'après-midi s'écoula atrocement lentement, et même les rires de Dahlia ne parvinrent pas à détourner ses pensées des conflits latents autour d'elle.
Lorsqu'à 18h, Daphné vint récupérer sa fille, elle trouva Hermione avec les traits tirés et un teint étonnement rouge. Aussi, elle ne lui laissa pas le choix et l'assit de force face à son miroir. Elle s'empressa de lui jeter un sort pour donner un peu de volume à ses cheveux, lui appliqua du fond de teint et de l'anticerne, rehaussa son regard avec une ombre à paupière et un trait de mascara. Hermione subissait ce tourbillon sans protester, fascinée par le talent de la femme d'Harry. Daphné faisait partie de ces êtres élégants et naturellement doués pour savoir mettre en valeur leur physique, sans avoir pourtant l'air de faire trop d'efforts.
"Voilà, tu as de nouveau une apparence humaine ! se félicita Daphné et admirant son travail."
Hermione approuva d'un hochement de tête.
"Je dois reconnaître que c'est pas mal... souffla-t-elle.
- Tu te sens mieux ?"
Hermione releva la tête vers Daphné. Était-elle donc si transparente que ça, pour que même l'aînée des Greengrass se rende compte de son mal-être ? Ce n'était pas que les deux femmes s'entendaient mal, elles avaient plutôt une bonne relation. Mais Hermione était beaucoup plus proche d'Astoria, qui était une battante, osait rire aux éclats, jurer, et savait se montrer redoutable lorsqu'il le fallait. Daphné était plus modérée, plus douce, et surtout plus difficile à cerner. Comme Hermione, en réalité. Ce qui expliquait sans doute qu'elles aient du mal à se rapprocher, puisqu'elles étaient toutes les deux du genre à taire leurs émotions et à se contenir au maximum.
"Je me sens mieux, merci. Au moins, si je suis expulsée sans ménagement de mon groupe, j'aurais une belle peau pour les caméras."
Devant l'air piteux d'Hermione, Daphné commença à rire, et la griffondor la suivit presque immédiatement. Elle était minable à cet instant, mais au moins elle relativisait.
"Je suis toujours en contact avec Zabini, tu sais, dit Daphné en rangeant les pinceaux qu'elle avait utilisés dans leur étui.
- Oh, dit Hermione, qui ne savait pas vraiment quoi dire d'autre.
- Il a beaucoup d'estime pour toi, tu sais. Tu as peut-être l'impression que tes alliés te tournent le dos, mais tu n'es pas toute seule.
- Daphné... Tu sais quelque chose ? Il t'a parlé de ce qu'il se passait en ce moment ?
- Non, pas vraiment... Mais je lis les journaux, et je vis avec Harry. Je pense que tu as plus d'opportunités pour l'avenir que ce que tu veux bien voir."
Sur ces paroles énigmatiques, Daphné souleva sa fille dans ses bras, agita sa petite main en direction d'Hermione, et transplanna.
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Hermione retrouva Laura qui l'attendait au bas des marches devant l'assemblée, l'air maussade. Elle aussi avait été réprimandée par Lupin, ce qui expliquait sans doute son air misérable. Les journalistes étaient déjà en train de faire le pied de grue devant les grilles, distraits par Parkinson qui faisait son show. Laura avait l'air un peu angoissée, et se dépêcha de passer devant eux en baissant la tête. Ce qui lui donnait un air encore plus coupable.
"Hermione, je ne comprends pas, marmonna la jeune femme dès qu'elles furent hors de portée des perches qui enregistraient le son. Pourquoi on nous suspecte de trahir les nôtres ? On est juste allées à une conférence, bon sang !
- T'y es pour rien, c'est après moi qu'ils en ont... Tout le monde est tendu, regarde moi ça... répondit Hermione en balayant le hall de l'assemblée de la main."
Par petites grappes, les députés s'écharpaient. On entendait des invectives et des accusations voler à travers la pièce. Ceux qui ne parlaient pas se regardaient en chien de faïence. D'autres parlaient à voix basse à l'écart, regardant leurs collègues d'un air suspicieux.
"Tout ça parce que Malefoy s'est découvert une vocation en politique, ajouta Hermione en secouant la tête.
- Je veux bien croire qu'il ait catalysé tout ça, mais si tout se passe aussi mal pour nous, c'est de la faute de Lupin, maugréa Laura, qui avait l'air très remontée."
Son ton inquiéta Hermione, qui recula encore plus sous une des arcades pour interroger Laura.
"Qu'est-ce qu'il t'a dit, exactement ?
- Plus ou moins la même chose qu'à toi. Que je devais mon succès à mon groupe, que je ne pouvais pas tourner le dos à mes alliés, que j'étais inconséquente de frayer avec des opportunistes qui cachaient leur jeu, et j'avoue que cette dernière partie, je n'ai pas bien compris. On aurait dit un des délires de Dean Thomas. Comme si on faisait face non pas à des adversaires politiques, mais à des ennemis sanguinaires. Franchement, je suis furieuse d'être traitée comme ça !"
La fureur de sa collègue confirma à Hermione que la sienne était bien fondée, et légitime. Mais pour qui se prenait Lupin, tout à coup ? Il distribuait les mauvais points et menaçait comme un chef tyrannique. Et pire, il commençait à délirer et à accuser leurs adversaires de tous les maux. On n'est plus en guerre, Lupin. Les mots qu'elle avait prononcés peu de temps avant lui revinrent en mémoire avec force. C'était là le nœud du problème, finalement. Lupin agissait comme un chef de guerre et non pas comme un chef politique. Ses histoires de sacrifice, d'ennemis, de plus grand bien... Il continuait à se comporter comme s'il ne travaillait pas au sein d'une assemblée mais au beau milieu d'un champ de bataille, sous des éclairs verts.
"Je ne sais pas si c'est parce que la pleine lune approche, mais il va sérieusement falloir qu'il songe à se calmer ! pesta Laura, en regardant de travers leur leader qui passait, suivi par une dizaine de leurs collègues.
- Regarde moi ça, on dirait une dinde et ses dindonneaux ! marmonna Hermione.
- C'est pas très beau ça, Granger, pouffa Blaise en incrustant sa tête sous leur alcôve secrète."
Surprise par l'intrusion, Hermione lui donna une pichenette sur le nez à l'aide d'un prospectus qu'elle tenait. Zabini sursauta, et partit dans un grand rire qui attira tous les regards vers eux. Laura se frappa le front du plat de la main, au bout du rouleau. Pour la discrétion, on repassera.
"Je suis sûre que 80% de nos collègues, au bas mot, sont intimement persuadés qu'on va rejoindre votre groupe, murmura Hermione.
- Notre groupe ? Quel groupe ? Tu veux dire, les Conservateurs ? Parce que ça serait hautement improbable, tout de même, rétorqua Blaise.
- C'est ça Zabini, prends nous pour des billes, grogna Laura en le foudroyant du regard."
Le serpentard ne répondit rien. Il enfouit ses mains dans ses poches, et regarda Laura par en-dessous ses cils. Son petit sourire en coin s'élargit lorsqu'il vit la jeune femme crisper sa mâchoire d'énervement.
"Laisse-le faire le malin, d'ici quelques minutes il sera bien obligé de reconnaître officiellement qu'il est un Non-aligné, décréta Hermione.
- J'aimerais bien savoir d'où vous est venue cette certitude, jeunes filles.
- Je ne vois pas Malefoy se lancer dans un truc pareil sans son acolyte de mauvais coups à ses côtés. C'était déjà le cas à Poudlard. Et pendant la guerre. En plus, tu méprises tes collègues, ne dis pas le contraire. Tu supportes pas ces vieux, réfractaires au changement. Et puis Parkinson et toi, vous agissez bizarrement ces temps-ci, ne croyez pas que je ne vous vois pas venir. D'autres questions ? martela Hermione à voix basse."
Zabini, qui avait gardé un air impénétrable tout au long de sa tirade, fit une petite moue appréciative.
"Ok Granger, tes arguments sont pertinents. Ne faisons pas attendre les autres, il est temps de rentrer dans l'arène."
Et Blaise s'éloigna d'un pas guilleret, sans avoir démenti. Les députés commençaient à se diriger vers l'hémicycle en petits groupes agités. Malefoy était au milieu, et semblait observer le chaos avec délectation. Il avait décidément un certain goût pour la désolation.
"Depuis quand tu sais ? s'étonna Laura. J'ai eu des petits doutes sur Malefoy, mais... Seigneur, c'est eux... bafouilla Laura.
- J'ai aucune certitude, mais on va être fixées rapidement."
Laura soupira, et elles s'avancèrent de concert vers leurs sièges respectifs, sans pour autant se mêler à leurs collègues qui les regardaient avec une certaine retenue. D'autres avaient des regards compatissants, et Hermione ne put s'empêcher de penser qu'eux-aussi avaient peut-être reçu des missives agressives de la part de Lupin.
Tout le monde s'assit dans un brouhaha inhabituel, entrecoupé de regards assassins et craintifs.
Le président entra pesamment, d'avance agacé par l'année mouvementée qui s'annonçait. Il ne perdit même pas de temps à faire de discours, et fit signe à son assistant d'apporter l'urne magique. Il était pressé d'en finir, de voir ces bancs se vider, et de rentrer chez lui mettre ses pantoufles.
« Mr le président, j'ai une requête, attaqua Lupin en se levant d'un coup. »
Le silence se fit dans l'amphithéâtre, et Hermione échangea un regard inquiet avec Laura. Un rapide balayage de leurs rangs leur permit de constater qu'une partie d'entre eux semblaient au courant de ce que Lupin allait dire. Et Hermione, fidèle parmi les fidèles, chef de file, n'était pas dans le lot. Elle avait volontairement été laissée dans le noir par ses collègues, et se retrouvait devant le fait accompli. Personne ne l'avait consultée, et c'était la première fois que cela arrivait. Face à cet affront, elle croisa les bras sur sa poitrine et attendit.
« Allons bon… marmonna Karacter. Allez-y, Mr Lupin. Nous vous écoutons.
- J'aimerais qu'en vertu de l'alinéa 3 de l'article 17 du code de la sorcellerie, les signataires de notre charte qui ont dérogé à la règle 36 se signalent immédiatement. »
Lupin avait perdu tout son auditoire, assommé par les textes de loi qu'il avait cités.
Tout l'auditoire, sauf Hermione, qui comprit où il voulait en venir assez rapidement. La règle 36 disait qu'un des signataires de la charte n'avait le droit de s'engager dans un autre mouvement que le mouvement progressiste, sans en avertir 15 jours avant au minimum son dirigeant. En d'autres termes, tout traitre dans leur groupe aurait dû se signaler depuis deux semaines, et visiblement personne ne l'avait fait.
Ce qui ne pouvait signifier que deux choses : ou les traitres ne connaissaient pas la charte, ou ils n'existaient tout simplement pas.
Et Hermione se sentit insultée une deuxième fois. ELLE avait rédigé cette charte, presque seule, et Lupin la soupçonnait de s'y soustraire ? Il la prenait pour une incompétente notoire ou pour une personne déloyale. Hermione bouillait intérieurement. Elle sentait ses oreilles rougir. Elle hyperventilait.
Il l'accusait de vouloir le trahir en douce, et de cracher sur sa propre charte. Il l'accusait de préparer sa fuite et de lui mentir en tout connaissance de cause. Et il croyait la coincer maintenant, en l'obligeant à se lever face à tous ces yeux inquisiteurs qui jaugeaient leur groupe avec une certaine stupeur. Lupin était tout simplement en train de lui tendre un piège, à elle, et à tous les autres qui pouvaient avoir l'idée de partir.
Ce groupe était-il une prison ?
Laura la regarda avec inquiétude, et Hermione pinça les lèvres. Dès que cette cérémonie serait achevée, elle ferait un scandale. Et si Lupin ne s'expliquait pas, elle claquerait la porte. Autant dire que ses explications avaient intérêt à être limpides ! Parce qu'elle comptait bien régler ça, et sans délai. La seule différence c'est qu'elle voulait le faire en privé, et pas en se donnant en spectacle dans un lieu de pouvoir qu'ils se devaient de respecter.
Hermione se mordit la lèvre avec violence pour contenir sa rage, qui menaçait de déborder d'une seconde à l'autre. Elle n'arrivait pas à réaliser ce qui était en train de se passer, et c'est le goût du sang dans sa bouche qui la ramena à sa réalité.
"Pardonnez-moi de vous dire ça Mr Lupin, mais personne ne vous suit. Qu'attendez-vous de cette assemblée exactement ? reprit Karacter, après avoir consulté son assistant.
- Il veut que les traitres se lèvent parmi les progressistes, traduisit Hermione d'une voix claire, raide et digne sur son siège."
Aussitôt, tous les yeux se portèrent sur elle. Hermione eut une seconde d'hésitation, et se leva brusquement.
"Si vous ne connaissez pas la charte, sachez qu'elle vous obligeait à vous signaler à Lupin depuis 15 jours. Alors, s'il y a des Non-alignés parmi vous, faites-moi confiance et levez-vous. Vous y êtes légalement obligés. Sinon, vous vous exposez à être radiés et à verser une amende. C'est bien ça, Lupin ? reprit Hermione d'une voix tranchante en foudroyant du regard son leader."
Ne sachant vraiment sur quel pied danser, Remus hocha la tête, perturbé par l'intervention inopinée d'Hermione. Celle-ci lui jeta un regard à transformer un roc en tas de poussière.
"Oui, c'est exact, il confirma, en se détournant d'elle pour se concentrer que Karacter.
- Vous ne pouviez pas attendre que les noms soient proclamés par la procédure habituelle, au lieu de nous faire perdre du temps ? s'exclama Parkinson en se levant pour lui faire face.
- Et comment aurait-il pu humilier les membres de son groupe qui ont osé le défier, dans ce cas ? lança une voix non identifiée dans les premiers rangs, soulevant de nombreuses approbations.
- C'est la loi ! s'écria Dean Thomas en se levant à son tour.
- Et c'est parce que c'est légal, que c'est bien et qu'il faut le faire ? C'est légal aussi de manger de la citrouille crue, est-ce qu'on le fait pour autant ? hurla une vieille sorcière dans les rangs supérieurs."
De nouveau, ce fut le bazar, et tout le monde se mit à protester. Hermione plaqua une main sur ses yeux, effarée.
"C'est une honte ! Pourquoi pas clouer des gens au pilori, aussi ! Qu'attendez-vous ? Qu'ils se lèvent et qu'on leur jette des projectiles dessus ? On est où ici, au zoo ? s'emporta le frère de Dumbledore, qui siégeait parmi eux environ une fois tous les deux ans, quand il daignait se présenter.
- Qu'est-ce que c'est que ces méthodes ! hurla une députée conservatrice, juste pour le plaisir d'attaquer son adversaire.
- Liberté de penser ! Liberté de choisir ! brailla un député qui portait des dreadlocks.
- Arrêtez ça ! Taisez-vous ! s'excitait Karacter en frappant comme un forcené sur sa cloche."
Au milieu de ce vacarme qui ne faisait que s'amplifier, Drago Malefoy se frottait les mains. Tout se déroulait encore mieux que dans ses rêves les plus fous. C'était du pain béni pour lui, et il en était parfaitement conscient. Il se retourna pour vérifier que Granger était bien à deux doigts d'entrer en ébullition, et constata avec joie qu'elle était bien au-delà. Elle était debout, les deux mains appuyées à plat sur son bureau, et vociférait sur Dean Thomas. De là où il était assis, il voyait sa poitrine se soulever violemment, et ses mèches de cheveux voler en rythme. Il n'entendait pas ce qu'elle disait dans le bruit ambiant, mais nul doute qu'il n'aimerait pas être à la place de ce type. A son grand regret, il vit Pods tirer Granger en arrière et le spectacle s'interrompit. Les dés étaient jetés. La rupture était consommée. Et cette fois, ce n'était vraiment pas de son fait.
"Ce n'est pas de ta faute Hermione, tu pouvais pas savoir que Lupin allait utiliser ta charte de cette façon, dit Laura, estomaquée par ce qui se déroulait sous ses yeux.
- Laura... commença Hermione, les yeux écarquillés et les cheveux hirsutes.
- Quoi ? Quoi ? s'inquiéta la jeune femme en lui prenant la main.
- Je ne peux pas rester dans ce groupe. Je ne peux plus. C'est impossible."
Laura ne se posa pas plus de questions, et se pencha par dessus sa table pour attraper violemment le bras de Dean Thomas et le tirer en arrière.
"Eh, connard ! On se tire ! Vous venez de perdre deux députées ! hurla-t-elle en le défiant du regard."
Sa phrase devait être une des ces phrases cruciales qui apportent un tournant majeur à une situation. Elle tomba pile dans une accalmie, dans un moment où les conversations houleuses se mettaient en pause en même temps. Et elle résonna dans tout l'hémicycle. Laura, rougissante, se rassit à sa place et quêta l'approbation d'Hermione.
Cette dernière déglutit, étranglée par l'intensité du moment.
C'était en train d'arriver. C'était réel.
Alors elle se leva, et tendit la main en l'air pour demander la parole au président. C'était un peu optimiste de faire un tel geste dans le capharnaüm ambiant, mais l'attention était déjà sur elle, et elle n'était pas n'importe qui. Alors le président, qui semblait au bord de la dépression, lui donna la parole.
"Mr le Président, étant donné les conditions actuelles, j'aimerais demander un report de séance. Je sais que je ne suis pas en mesure de le demander puisque je ne suis pas leader de groupe, mais à vrai dire je n'ai pas de groupe du tout, donc on peut considérer que je suis leader de moi-même et étudier ma proposition ?
- Je vote pour ! s'empressa de dire Parkinson, qui regardait Hermione avec une lueur féroce dans les yeux.
- Moi aussi ! s'exclama Laura.
- Mesdames, calmons-nous, comme l'a dit Mrs Granger, elle ne peut pas proposer cette requête, alors... les interrompit Karacter, désespéré.
- Alors moi, je la dépose. Je suis leader de groupe, j'ai le droit non ? s'exclama Malefoy en se levant avec prestance, regardant tout le monde de haut. Ah oui, flûte. Bonjour, Drago Malefoy, leader des Non-alignés."
Et le brouhaha reprit de plus belle. Tout cela était très surréaliste. Les conservateurs, qui jusqu'alors avaient été épargnés par la bataille, se mirent à rattraper leur retard en s'insultant avec empressement. Maintenant qu'ils savaient que Malefoy les avait trahis, ils savaient qu'il n'était pas le seul, et commençaient à s'accuser entre eux.
Mais Lupin n'était pas en reste, et engueulait tous ses fidèles. Finalement, il avait déclenché tout ça, et provoqué sa propre perte.
Parkinson profita de la confusion générale pour se lever, et se précipiter dans les escaliers en direction d'Hermione et Laura. Elle se pencha avec aisance pour éviter un rouleau de parchemin qui volait en travers de l'allée, et arriva enfin à leur hauteur, essoufflée.
"J'ai trop envie de vous faire un câlin, vous êtes mes héroïnes aujourd'hui ! les félicita la serpentard en les empoignant d'autorité."
Elle cogna les têtes d'Hermione et de Laura dans sa précipitation, mais elles n'osèrent pas protester face à cet élan d'affection. Puis Parkinson redescendit comme elle était venue, laissant les deux filles pantoises. Hermione en profita pour se ré-intéresser à ce qu'il se passait, et remarqua que Blaise et Drago étaient en train d'affronter au moins quinze députés en costume qui agitaient les bras et parlaient tous en même temps. Karacter, lui, ramassait ses affaires et semblait bien décidé à s'en aller. Son assistant était d'ailleurs en train d'afficher "séance suspendue" sur le tableau accroché au mur du fond.
Certains députés, affligés, étaient aussi sur le départ. D'autres attendaient des consignes, mais en vain puisque leurs dirigeants s'écharpaient. C'était la confusion générale.
Le ton continuait à monter entre Drago, Blaise, Pansy, deux autres conservateurs, et un groupe toujours plus important de détracteurs.
"Tu vas pas défendre ton mec ? lui lança Dean Thomas.
- Tu vas pas fermer ta gueule, sale punaise ? lui répliqua Hermione sans réfléchir. Oh mon dieu, ça fait du bien ! constata-t-elle à voix haute, avant de se reprendre. Je sais que la vie sexuelle imaginaire des autres te permet de supporter le vide de la tienne, mais retiens toi un peu, tu embarrasses tout le monde. Tu ferais mieux de te concentrer sur ce que tu as fait, et d'analyser ta responsabilité dans ce naufrage.
- J'ai plus à écouter tes leçons de morales, t'en as pas marre de fourrer ton nez partout et d'être aussi prétentieuse, sale... commença Dean en se levant, menaçant.
- Sale quoi ? le coupa Malefoy, qui remontait les escaliers accompagné de sa troupe."
Dean Thomas se tourna vers lui, surpris. Malefoy n'avait pas l'air particulièrement agressif, mais tout le monde savait qu'un serpent allongé n'est pas nécessairement en train de faire la sieste. Il peut attaquer en un dixième de seconde, sans prévenir.
"Ah tiens, en plus il la défend... Vous comptez officialiser ça aussi, bientôt ?"
Malefoy s'avança d'un pas, toisant Thomas de toute sa hauteur. Son regard était tellement glaçant qu'il aurait transformé un incendie en iceberg, et Thomas accusa le coup.
"Précise ta pensée, Thomas. Si tu arrives à formuler une phrase intelligible avec tes faibles moyens lexicaux, évidemment.
- Tu te crois encore à Poudlard, Malefoy ?
- Si c'était le cas, tu serais déjà en train de pleurnicher dans ton dortoir.
- Bon, ça suffit, intervint Hermione, qui était la seule à reprendre ses esprits au milieu de ce combat de coqs."
Elle s'intercala entre les deux hommes, et tourna le dos à Dean Thomas. Elle essayait de capter le regard de Malefoy, mais comme il était beaucoup plus grand qu'elle, ses yeux passaient au-dessus de son crâne. A moins de sautiller comme un personnage de dessins animés, elle ne voyait pas trop comment attirer son attention. Alors, elle posa ses mains sur son torse et entreprit de le pousser doucement en arrière. Evidemment, il ne bougea pas d'un millimètre, mais ce geste eu au moins l'avantage de permettre à la griffondor que Malefoy avait des pectoraux bien développés pour un sang pur feignant, qui passait son temps à se faire servir par ses elfes et à se faire conduire partout par son chauffeur.
"Je ne prends pas Granger au sérieux parce que je couche avec elle, Thomas, cracha Malefoy sans baisser les yeux sur elle. Je la prends au sérieux parce que c'est une femme brillante et honnête qui travaille d'arrache-pied pour améliorer notre monde. C'est un élément précieux. Et vous auriez dû le comprendre et la traiter avec le respect qui lui est dû. Maintenant si tu préfères penser qu'on cache une incroyable liaison sulfureuse, libre à toi de poursuivre dans cette voie de la bêtise. Tu y excelles."
Hermione, qui avait toujours les mains plaquées sur son torse et n'osait plus amorcer le moindre mouvement - même celui de respirer - n'en revenait pas de ce qu'elle entendait. D'ailleurs, personne n'en revenait. Le silence s'était fait autour d'eux, et tous les députés regardaient Malefoy avec curiosité pour les uns, suspicion pour les autres. Hermione sentait la poitrine du jeune homme se soulever rapidement, signe que sa fureur était pour l'instant contenue, mais menaçait d'exploser d'un instant à l'autre. Pourtant, sa voix avait été claire et tranchante, il n'avait pas montré d'autres signes d'agacement. Tout était intériorisé.
Finalement, il baissa les yeux sur elle. Il n'avait l'air ni moqueur ni fier de lui, juste inquiet. Hermione fronça les sourcils, de plus en plus perplexe, puis elle réalisa que s'il était inquiet, c'est parce qu'il craignait sa réaction à elle.
Il avait peur qu'elle ne croit pas à sa sincérité, comme une bonne partie de l'hémicycle. Alors, si c'était une manipulation pour se la mettre dans la poche comme tous semblaient le penser, elle était très bien menée, et Hermione sentait qu'elle avait envie de le croire. Elle ne pouvait pas savoir si c'était à tort ou à raison, mais elle avait cru à sa démonstration de respect. Après tout, il avait mûri depuis l'épisode du coup de poing en troisième année.
Alors, elle lui fit un petit sourire de remerciement, et le poussa doucement en arrière pour l'éloigner de Thomas, qui trépignait sans répondre. Curieusement, il se laissa faire cette fois, et recula d'un pas. Il planta ses yeux dans les siens, et Hermione pu constater qu'il n'avait pas l'air de vouloir en découdre. La jeune femme laissa donc ses mains retomber le long de son corps, et leur petit interlude complice s'arrêta là.
"Bon, on arrête le mélodrame, les coupa Pansy. Thomas, à la niche. Drago, tu te calmes. Les meufs, on va au bar."
La vie était très simple avec Pansy Parkinson. Chaque chose à sa place. Mais pour Hermione, cette journée était un cataclysme, et il allait être difficile pour elle d'envisager un avenir serein. Dans quel merdier s'était elle embourbée ?
J'espère que ce chapitre vous a plu, les évènements s'accélèrent et Hermione vient de prendre une décision capitale sur un coup de tête.
Comment vous imaginez la suite ? Est-ce qu'elle va revenir en arrière, rejoindre Drago, trouver une troisième voie ? J'aimerais aussi avoir votre avis sur les personnages de Daphné et d'Astoria, ainsi que de Laura. Et puis, que pensez-vous du geste de Lupin et de son comportement depuis le début de cette histoire ?
Merci encore à toutes celles qui ont pris le temps de me donner leur avis, j'espère n'avoir oublié de répondre à personne (sans quoi n'hésitez pas à vous plaindre, je l'aurai mérité). A bientôt pour la suite !
