Chapter 10 - Scoop
"Malefoy, sérieusement, fais quelque chose... Je commence à me sentir claustrophobe... gémit Hermione en appuyant sa tête contre le montant de l'ascenseur.
- Tu n'es pas claustrophobe, la rabroua le blond en fixant la paroi en face de lui, las.
- Qu'est-ce que tu en sais ? grogna la jeune femme en croisant les bras, vexée.
- Je le sais. Tu es juste frustrée d'être impuissante, et enfermée ici au lieu de pouvoir remplir des tableaux et des listes. Typique Granger."
Hermione lui jeta son regard le plus venimeux, mais ne rencontra que le profil imperturbable du Serpentard, qui était toujours assis par terre à côté d'elle. Même dans cette position aussi misérable, il parvenait à conserver son maintient digne. Il avait croisé ses jambes sans que son pantalon ne fasse de plis, il était toujours bien coiffé, la seule chose qu'il avait consentie était de desserrer sa cravate.
"Arrête de me mater. C'est pas parce qu'on est dans un ascenseur qu'il va se passer un truc torride, lança le blond sans tourner la tête.
- Tu peux arrêter avec tes remarques grivoises ? C'est gênant pour toi ! rétorqua Hermione.
- Grivoises, gloussa Malefoy. Quelqu'un te fait une liste de mots bizarres à placer dans la journée, et tu marques des points en cas de succès, c'est ça ? Dis le moi si tu veux, je serai ravi de t'aider à les introduire.
- Je vais surtout introduire ma main dans ta tête, Malefoy ! le menaça Hermione.
- Dans ma tête, t'es sûre ? répéta-t-il en haussant un sourcil goguenard.
- Et allez, encore une remarque... lubrique.
- J'espère que ce mot vaut au moins 1000 points, parce qu'il est vraiment ridicule.
- Tu sais, on est déjà en train de passer un moment horrible, tu n'as pas besoin d'en rajouter. Je suis suffisamment désespérée.
- Justement, je me méfie des femmes désespérées. C'est toujours à ce moment-là qu'elles pensent au point trente-deux.
- C'est sûr qu'avec toi, elles ne peuvent qu'être désespérées. Je ne vois pas ce qui pourrait les motiver à part un besoin irrépressible d'en finir avec la vie.
- Outch, Granger. C'était pas très gentil, ricana Malefoy en tournant enfin la tête dans sa direction."
Hermione lui lança un sourire victorieux en réponse, et il secoua la tête sans animosité aucune. C'était étrange en y pensant, mais leur petite prise de bec n'était ni agressive, ni particulièrement blessante. Cet ascenseur devait être une sorte de dimension parallèle où ils faisaient passer le temps en s'attaquant sans aucune malveillance.
"Je regrette d'avoir congédié cet actionnaire croulant, il était tellement sous ton charme qu'il serait certainement venu te secourir en escaladant le câble de l'ascenseur à l'aide de ses dents.
- Quelles dents ? pouffa Hermione. Ça fait longtemps qu'elles ont dû tomber."
Malefoy émit un petit rire de peste, et laissa le silence retomber entre eux. Mais ce n'était pas un silence gênant, ou lourd.
"Tes parents sont dentistes, c'est ça ? demanda-t-il finalement.
- Euh... oui. Mais je te préviens, pas de vanne sur mes parents. Quoi que tu aies en tête, oublie, le coupa Hermione.
- J'allais pas faire de vanne, c'était une vraie question."
La jeune femme lui jeta un regard suspicieux, mais comme il n'arborait pas son habituel air sournois, elle décida de le croire.
"Tu ne parles jamais d'eux, reprit Malefoy.
- Toi non plus, tu ne parles jamais de tes parents.
- Pas besoin, ils sont déjà dans la tête des gens à la minute où ils entendent mon nom ou me voient arriver dans une pièce. Alors que toi, tes parents, personne ne les connait. Ils n'ont tué personne, remarque... ça doit sûrement participer à leur anonymat."
Derrière le sarcasme apparent, Hermione perçut un très net ressentiment. Malefoy n'étant pas du genre à s'épancher sur ses ressentis, c'était un peu déstabilisant. Elle nota que sa mâchoire s'était crispée et se décida enfin à parler, plutôt qu'à l'observer avec une telle minutie.
"Tu sais, t'es en train de prouver à tout le monde que t'as rien à voir avec tout ça. Les gens le verront comme on le voit, nous tous, ici."
Malefoy ouvrit la bouche pour répondre, mais un grand bruit secoua la cage d'ascenseur. Ils sautèrent immédiatement sur leurs pieds, face à face, inquiets. Dans la panique, Hermione avait attrapé la manche de Malefoy. Elle sentait ses jambes trembler, et s'apprêtait à voir l'ascenseur tomber dans le vide d'une seconde à l'autre. C'était la fin. Elle, une des sorcières la plus brillante de sa génération, allait mourir ici, bêtement, avec Malefoy.
"Ça va aller, Granger, lança Malefoy autant pour la rassurer que pour lui-même."
Une nouvelle secousse résonna et ils se rapprochèrent instinctivement l'un vers l'autre, quêtant inconsciemment un peu de chaleur humaine avant la chute finale. Ce qui n'allait certainement pas les sauver. Hermione était à présent accrochée non seulement au bras de Malefoy, mais aussi au revers de sa veste, et ils étaient si proches que leurs fronts se touchaient presque.
"Putain, putain, putain... marmonna Hermione à toute vitesse, les yeux révulsés.
- C'est vraiment les derniers mots que tu veux prononcer ? siffla Malefoy dans une tentative un peu ratée de faire de l'humour.
- Je suis désolée ! lança la jeune femme.
- De quoi ? grimaça le blond.
- Je sais pas ! s'écria Hermione alors qu'une troisième secousse les projetait l'un contre l'autre."
Les bras de Drago se refermèrent autour d'elle et elle enfouit sa tête contre sa chemise. Une minute avant, si on lui avait dit ce qui allait se passer, elle aurait éclaté de rire. Il fallait vraiment qu'elle soit en danger de mort pour s'approcher ainsi d'un individu pareil ! Même si sa lessive sentait indéniablement bon.
"COUCOU ! ALLO ! VOUS M'ENTENDEZ ? hurla d'un coup la voix de Zabini dans le haut-parleur d'urgence de l'ascenseur. Le dépanneur est là, il est en train de réparer, vous allez sortir dans une minute ! Tout va bien là-dedans ? Lequel a essayé de tuer l'autre en premier ?"
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"Ils sont resté combien de temps là-dedans ? murmura Pansy sur le ton de la confidence, bien installée dans sa salle de Détente et de ragots.
- Aucune idée... Mais vu leurs têtes, ça devait faire un moment. Ils ont rien expliqué, ils sont juste rentrés chez eux... répondit Astoria en se resservant du café."
Parkinson reste silencieuse, pensive. Granger et Drago étaient restés coincés dans l'ascenseur pendant une durée indéterminée, et ils en étaient sortis tout dépenaillés. Comme si... Non, il n'avait pas pu se passer quelque chose de cet ordre là entre eux. Et puis, ce n'était définitivement pas le genre de Granger de sauter sur son chef, qui plus est dans un ascenseur.
"Ils ont dû se disputer, comme d'habitude, conclut la jeune femme.
- C'est de pire en pire... Ils sont perpétuellement furieux l'un contre l'autre, râla Astoria, qui en avait assez des cris et des tensions.
- Jusqu'à présent, ça les a pas empêchés de bosser ensemble... Tout leur a réussi, tempéra Pansy en haussant les épaules. La conférence de presse, la cérémonie, la réunion d'équipe, cette histoire de contrat avec Wizzards Chanel... En fait, ils s'écharpent, mais ça finit bien.
- Ouais, pour le moment. Mais je connais Hermione. Elle va imploser et faire quelque chose de vraiment, vraiment stupide, annonça Astoria en rinçant sa tasse dans l'évier.
- Ah... Oui, Drago pourrait totalement faire ça aussi."
Le silence se réinstalla, les deux jeunes femmes étant préoccupées plus que de raison par la situation. Elles savaient toutes les deux à quel point l'orage qui s'annonçait allait être dévastateur. A première vue, on aurait pu croire qu'Hermione et Drago n'avaient rien en commun. Mais en réalité, en matière de conflit, ils étaient plutôt similaires : ils étaient rancuniers, s'emportaient lorsque cela devenait personnel, et pouvaient perdre tout sens commun une fois aveuglés par la rage.
"Qu'est-ce que tu suggères ? Tu crois qu'on devrait... se mêler de tout ça ? s'enquit Astoria en se mordant la lèvre, peu encline à interférer dans les relations des autres.
- Peut-être qu'à un certain point, on devra le faire... Mais pour le moment, attendons. C'est des adultes ! Ils sont conscients de leurs responsabilités. Peut-être qu'ils vont se calmer d'eux-mêmes..."
Parkinson ne croyait absolument pas en ce qu'elle venait de dire, et le regard que lui lança la cadette des Greengrass lui prouva qu'elle n'était pas dupe.
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De son côté, Hermione se détendait sur une table de massage, dans un institut très privé qu'elle fréquentait dès qu'elle se sentait d'humeur à enterrer des corps dans son jardin. Elle ne venait se faire dorloter que rarement, lorsque la situation était vraiment insupportable. Et là, c'était le cas. Elle était épuisée. Tous ses muscles tendus lui faisaient mal, elle avait des cernes gigantesques sous les yeux, et elle était persuadée de s'être trouvé des cheveux blancs éparpillés sur son crâne.
Elle tombait en décrépitude, et c'était entièrement la faute de Malefoy. Elle s'obligea à faire sortir le blond de sa tête, et se concentra sur la musique douce qui résonnait dans la pièce. Se détendre. C'était pour ça qu'elle était venue.
Hélas, pile au moment où elle allait enfin sombrer dans un demi-sommeil réparateur, quelqu'un ouvrit la porte de la pièce et sa masseuse s'interrompit.
"Miss Granger, je suis vraiment désolée de vous déranger, mais il y a un monsieur ici qui m'y a obligée. Il dit que c'est très important."
Hermione ouvrit péniblement les yeux, resserra sa serviette moelleuse autour de son corps, et s'assit à regret pour faire face à l'intruse.
"Quel monsieur ? Est-ce qu'il est blond ? Parce que si oui, dites-lui d'aller mourir en enfer, et...
- Je ne suis pas Drago, s'offusqua une voix depuis le couloir.
- Mon dieu Zabini, mais qu'est-ce que tu fais ici ? Comment...? bafouilla Hermione en descendant de la table."
Le Serpentard prit ça pour une invitation et entra dans la pièce, pas gêné pour un galion de congédier d'un geste de la main les deux employées. Il referma ensuite la porte, et se passa une main sur le front.
"Granger, on a un gros problème."
Hermione se décomposa aussitôt. Blaise était le genre de personne qui paraissait toujours cool et détendu, et qui était capable de faire des blagues même dans les pires moments. Alors, s'il estimait que la situation était un "gros problème", cela signifiait qu'une guerre était imminente, au bas mot.
"J'ai intercepté une journaliste dans l'openspace, elle te cherchait, elle posait des tas de questions... commença Zabini, en cherchant ses mots.
- Comment elle a réussi à arriver jusque là ? Décidément, il va falloir qu'on revoit nos dispositifs de sécurité... pesta la jeune femme.
- Granger, elle a des infos sur toi. Elle écrit un article suite à un tuyau anonyme. Elle voulait une réaction...
- Quelles infos ? grogna Hermione, dubitative.
- Elle a... des photos."
Zabini avait l'air tellement navré qu'elle imagina aussitôt le pire. Elle resserra inutilement la serviette autour de son corps, comme si cette dernière pouvait la protéger à la manière d'une armure. Son collègue fixait ses chaussures, embarrassé.
"Des photos de quoi ? De moi ?"
Il hocha la tête.
"Je suis le seul à les avoir vues au bureau, dès qu'elle les a sorties je l'ai amenée à l'écart. Elle se dirigeait tout droit vers le bureau de Drago.
- Il était pas là, de toute façon ! objecta Hermione. Qu'est-ce qu'il y a sur ces photos ? Tu commences à vraiment, vraiment m'angoisser...
- Il est revenu dans la soirée... Mais, euh... Comment dire ça... marmonna Zabini.
- Zabini, je sais que tu as culbuté Romilda et j'ai tout entendu. Ne sois pas gêné, parle bon sang ! On aura qu'à dire qu'on est à égalité !
- D'accord, d'accord ! Tu étais avec ce joueur de Quidditch, et tu étais à cheval sur ses genoux, et vous vous embrassiez, et t'avais pas vraiment de T-shirt...
- QUOI ! hurla Hermione en se plaquant deux mains sur le visage."
Elle sentit aussitôt ses paumes cuire au contact de ses joues. Elle était entrée en phase de combustion spontanée face à l'affront. La panique lui coupa le souffle, son cœur se mit à tambouriner de manière désordonnée dans sa poitrine. Ça ne pouvait pas être en train d'arriver...
"Ne t'inquiète pas, on ne voit pas vraiment tes... enfin, ça quoi, dit Blaise en décrivant un cercle vague en direction de son torse. Tu es de dos sur la plupart des photos, alors...
- Comment ça la plupart ? Il y a plusieurs photos ? Mais qui a pu faire ça ? paniqua Hermione en faisant les cents pas.
- Vous étiez sur une plage, sur un transat, c'est plutôt public comme endroit alors...
- Oui je sais très bien où c'était Zabini, j'étais là ! C'était une plage privée ! Je ne suis pas exhibitionniste, par Merlin ! s'écria Hermione.
- Et oh, j'essaye juste d'aider...
- Qu'est-ce que tu lui as dit ? T'as récupéré les photos ? réalisa soudain Hermione, affolée.
- Je lui ai dit que tu la rencontrerais ce soir, pour gagner du temps. Elle a gardé les photos parce que c'était les originaux... Je savais pas quoi faire !
- Oh mon dieu, mon dieu, mon dieu..."
Hermione poursuivit ses allées et venues, terrifiée. Elle avait très nettement senti son cœur tomber tout droit dans ses chaussettes. C'était un cauchemar !
"Calme-toi, on va trouver une solution. Ces photos ne vont pas être publiées, on ne laissera pas faire ça, tenta de la rassurer Blaise.".
Il se pencha pour essayer de freiner la course effrénée de la jeune femme, sans succès. Elle finit néanmoins par se stopper d'un coup.
"Peut-être qu'en la payant...
- Non, j'ai déjà essayé tu penses bien. J'ai proposé une somme astronomique, mais elle s'en fiche. Elle pense que cet article va lancer sa misérable carrière, et elle m'a fait le numéro de la journaliste intègre qui refuse des pots de vin. La presse, c'est vraiment plus ce que c'était.
- Elle veut pas d'argent ? Mais comment on va faire ?
- Peut-être qu'on devrait demander de l'aide à quelqu'un, Granger. Pansy saura quoi faire, elle s'est sortie de ce genre de mauvais pas auparavant.
- HORS DE QUESTION ! Personne ne doit savoir. C'est absolument non négociable. Zabini, jure moi que tu n'en parleras à personne !
- Granger, sois raisonnable... essaya de temporiser le Serpentard.
- NON !
- Qu'est-ce que tu vas faire, alors ?"
Elle avait l'air tellement hors de contrôle à cet instant, qu'il s'inquiétait réellement de ce qu'elle avait en tête. Elle se remit à tourner en rond comme un lion en cage, enroulée dans sa serviette.
"Je vais aller la voir, et je verrai bien sur le moment quelle stratégie adopter... Peut-être que je peux lui donner d'autres informations plus intéressantes en échange, ou juste la supplier..."
Elle se rendait compte elle-même des inepties qui sortaient de sa bouche, mais comme elle ne voyait pas d'autre possibilité, elle continuait à imaginer des solutions abracadabrantes. Zabini soupira, affligé.
"Et ton joueur de Quidditch, il peut pas t'aider ? Il est sur les photos lui aussi, après tout, suggéra-t-il.
- Ce n'est pas mon joueur de Quidditch. Ces photos datent d'il y a deux ans. Et puis, de toute façon, c'est un homme. Si ces photos sortent, on l'applaudira, lui. Zabini, jure moi que tu vas rien dire à personne, d'accord ?
- Non Granger, je ne peux pas te jurer ça. Si tu ne t'en sors pas ce soir, ce qui risque d'être le cas puisque tu te jettes dans la gueule du loup avec une absence totale de plan, je ne vais pas rester les bras croisés à te regarder couler ! Ça pourrait ruiner ta carrière !
- TU CROIS QUE JE LE SAIS PAS ? hurla Hermione."
Zabini soupira de nouveau, et se leva pour attraper cette cinglée de Granger et la plaquer contre lui. Elle resta raide et immobile, mais il enserra son corps maigrichon entre ses bras et lui tapota amicalement le dos. Il ne savait pas quoi faire, elle non plus, mais il n'allait quand même pas la laisser partir en vrille toute seule. Il la garda contre lui une bonne minute, au moins pendant ce temps elle ne pouvait pas prendre de décision catastrophique. Finalement, il la lâcha, et c'est là qu'il remarqua qu'elle avait les larmes aux yeux.
Granger n'allait tout de même pas pleurer, là, maintenant, devant lui ? C'était largement au-dessus de ses capacités à se comporter de manière empathique. Il ne savait jamais quoi faire lorsque les gens se mettaient à pleurnicher et sangloter et émettre des bruits dégoutants devant lui. Pourquoi faisaient-ils ça ? C'était gênant pour tout le monde. Heureusement, Granger ne se mit pas à renifler et couiner, elle essuya ses larmes d'un geste plein de rage et serra les dents.
"Bon sang Granger, t'en fais pas, on va trouver un truc. Va la voir, discute avec elle, gagne du temps. Tu me fais confiance ?
- Non, répondit Hermione très sincèrement.
- Parfait. Allez, habille-toi, je m'occupe de tout."
Et Zabini repartit comme il était venu.
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Hermione serrait nerveusement le bout de papier sur lequel Zabini avait gribouillé l'adresse de la journaliste, et regarda les numéros défiler sur l'écran rouge de l'ascenseur. Elle n'avait absolument aucune idée de ce qu'elle allait dire, ou faire, pour se sortir de cette situation. Lorsque les portes s'ouvrirent, elle eut un instant d'hésitation. Une sueur glacée roulait sur sa nuque et la fit frissonner. Puis elle fit un pas, et un autre, et chemina dans la couloir au ralenti, jusqu'à la porte de l'appartement de cette odieuse personne qui s'apprêtait à signer l'arrêt de sa carrière en politique.
Elle appuya sur la sonnette, et retint son souffle. Les quelques secondes qui s'écoulèrent lui parurent être d'une longueur infinie. Enfin, la porte s'ouvrit.
"Malefoy ? hoqueta la jeune femme.
- J'allais justement partir. Et toi aussi. Tiens, siffla-t-il en lui plaquant une enveloppe en papier kraft contre la poitrine.
- Quoi ? Mais que..."
Il la poussa dans le couloir sans ménagement et claqua la porte derrière lui, sans prononcer un mot de plus. Hermione ouvrit l'enveloppe et comprit en une fraction de seconde ce qu'elle contenait.
"Qu'est-ce que tu... Comment...
- Sortons d'ici, répondit-il en lui jetant un regard étrange. Elle ne posera plus de problème.
- Malefoy, qu'est-ce que tu as fait ? s'inquiéta Hermione."
Elle ne savait pas si elle devait le croire, se réjouir, craindre le pire, c'était très confus. Il était planté devant elle avec son regard glaçant, et il avait l'air très énervé. Ses mâchoires étaient tellement contractées que ses dents devaient probablement grincer les unes contre les autres.
"Je l'ai balancée dans le vide-ordure après l'avoir frappée avec un chandelier, tiens. Qu'est-ce que je pouvais faire d'autre ?"
La jeune femme ouvrit la bouche pour parler, mais la referma aussitôt. Il mentait, c'était évident. Personne, même pas Malefoy, ne pouvait avouer un meurtre de cette façon.
"Sérieusement, Malefoy... Comment tu as fait pour récupérer ces photos ?
- Je viens de te le dire."
Il se dirigea vers l'ascenseur, les mains dans les poches, et Hermione cavala derrière lui, son enveloppe nerveusement serrée contre elle.
"La prochaine fois que tu es confrontée à ce genre de trucs, et que tu risques de créer un scandale qui pourrait faire tomber la totalité de mon groupe politique, viens m'en parler au lieu d'essayer de régler le problème toute seule.
- Je... Je ne t'ai pas demandé d'intervenir ! J'allais m'en occuper !
- C'est ta façon de dire merci ? Parce que si oui, tu as des progrès à faire, cingla le blond en s'engouffrant dans la cage d'ascenseur. Prends l'escalier, je n'ai pas envie de me retrouver coincé deux fois dans la même journée avec toi dans un espace aussi réduit."
Il la planta là, et elle n'eut d'autre choix que de courir dans les escaliers pour essayer de le rattraper avant qu'il ne sorte de l'immeuble. Hermione était perplexe, et avait le sentiment d'avoir perdu tout contrôle sur sa vie. Elle bondit de marche en marche, avant de réaliser qu'elle pouvait simplement transplanner jusqu'au hall de l'immeuble. Ce qu'elle fit. Elle arriva donc juste à temps pour voir la silhouette de Malefoy disparaître derrière la porte d'entrée.
"Bon sang, marmonna-t-elle en se remettant à courir derrière lui. Malefoy !"
L'intéressé consentit à l'attendre, et se retourna. Campé sur ses deux jambes dans la pénombre, il croisa les bras, et la regarda se précipiter sur lui comme si sa vie en dépendait. Ce qui était un peu le cas, en réalité.
"C'est Zabini qui t'a demandé d'intervenir ? demanda-t-elle, essoufflée.
- Non, d'ailleurs je vais devoir lui remonter les bretelles à lui aussi. Je n'aime pas qu'on me fasses des cachotteries."
Il arqua un sourcil pour manifester son mécontentement, et fixa la Gryffondor d'un regard impénétrable. Elle se sentit de nouveau au bord des larmes sans s'expliquer pourquoi. Peut-être tout simplement parce qu'elle se sentait humiliée. Dépossédée. Traitée comme une enfant à qui on aurait volé ses secrets pour la menacer avec. Elle était une victime, une victime à qui on avait enlevé le droit de se faire justice. Elle détestait ce sentiment d'impuissance, elle détestait qu'on lui jette son intimité au visage, elle détestait cette position de passivité. Son menton se mit à trembler et Malefoy haussa un sourcil circonspect.
"J'étais mortifiée, Malefoy ! Je ne voulais mettre personne au courant et j'ai insisté pour qu'il se taise, c'est de ma faute. Tout est de ma faute.
- Tu ne vas pas pleurer, quand même, grogna le blond.
- Non, murmura Hermione d'une voix tremblante."
Elle plongea dans son sac à main pour y chercher un mouchoir, et se donner quelques secondes de répit. Elle en profita pour y enfouir brutalement l'enveloppe, et se tamponna les yeux rapidement. C'était probablement le moment le plus embarrassant de sa vie.
"C'était pas de ta faute. Sauf si on estime que les héroïnes de guerre n'ont pas le droit d'aller à la plage sans être harcelées par des paparazzis. J'imagine que ça va avec la notoriété."
Elle redressa vivement la tête, surprise. Quelque chose ne tournait pas rond. Il ne se moquait pas d'elle, il ne se vantait pas d'avoir sauvé sa peau, il ne cherchait pas à l'écraser. Il avait même l'air d'essayer d'être gentil.
"Comment tu as fait pour la convaincre de rendre les photos ?
- Oh, je lui ai offert de l'argent, répondit-il avec un geste évasif de la main.
- Tu mens, contra Hermione. Blaise lui en a offert et elle a décliné."
Malefoy s'autorisa un petit sourire, avant de se reprendre.
"J'ai potentiellement assorti une somme non négligeable avec des menaces et du chantage. Parfois, porter la marque des Ténèbres se révèle utile.
- Oh... souffla Hermione. Et bien... Merci, Malefoy.
- Tu me remercies d'avoir utilisé Voldemort pour te sauver la peau ?"
Hermione se mordit la lèvre, gênée. C'est vrai que vu comme ça, il semblait difficile de ne pas s'offusquer. Elle, l'héroïne de guerre louée par tout un peuple pour ses valeurs morales incorruptibles. Sauvée par la marque de ténèbres. Par Drago Malefoy. Et il avait pris un gros risque pour elle, au moment même où il cherchait à se défaire de son passé et de son image de mangemort. Exhiber sa marque n'avait pas dû être aisé pour lui.
"Peu importe les moyens, ce qui compte c'est le résultat, pas vrai ? finit par lancer la jeune femme.
- Granger, Granger... décidément, tu es pleine de surprises aujourd'hui ! pouffa le blond.
- Qu'est ce que ça veut dire, ça ? grimaça Hermione, embarrassée.
- J'en sais rien, à vrai dire. Bon, on va boire un verre avec les autres ? C'est le week-end, on a bien mérité une pause. Je suis pratiquement sûr qu'il y a une cheminée dans le bar, tu pourras y brûler ces photos.
- Oh... Attends, tu les a regardées ?"
Malefoy sourit d'un air énigmatique et se remit en marche, la forçant encore une fois à lui emboiter le pas.
"J'ai envie de mourir, marmonna Hermione en rabattant sa capuche sur sa tête, autant pour se protéger de la pluie que du jugement du blond.
- Ça va Granger, je les ai pas regardées.
- C'est vrai ? sursauta la jeune femme, sincèrement étonnée.
- Bah oui, tu me prends pour qui ? Je suis pas un pervers.
- Merci. De pas être un pervers. Et de t'être occupé de ça, ce soir. Peu importe pourquoi tu l'as fait, merci."
Ils cheminèrent en silence vers le bar, moulinant dans leur tête chacun de leur côté tout ce qu'il s'était passé dans la journée.
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Parkinson, Zabini, Laura et Astoria étaient attablés depuis un certain temps si l'on en croyait les choppes de bière entassées devant eux. En les voyant pénétrer dans le bar ensemble, ils eurent tous un instant de stupeur, surtout Blaise qui se décomposa et faillit échapper sa mâchoire sur la table. Mais ils réalisèrent que Drago et Hermione n'avaient pas l'air de s'être entretués, voire même qu'ils semblaient assez apaisés, et ne firent aucune remarque. Du moins, jusqu'à ce que les filles partent aux toilettes en groupe et que Blaise se jette sur son meilleur ami.
"Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Elle t'a tout raconté ?
- Elle m'a rien raconté du tout, par contre toi je t'ai vu avec ton air de conspirateur essayer de soudoyer cette femme dans l'openspace... Tu me connais, j'ai creusé un peu, juste au cas où. J'ai trouvé son adresse. Et ensuite, je suis allé la voir. Et Granger a débarqué.
- Oh le carnage... murmura Blaise.
- Figure toi que non. Problème réglé.
- Hein ? Mais comment t'as fait ?
- J'ai fait ce que Drago Malefoy fait toujours."
Zabini éclata d'un rire sonore et lui octroya une grande claque dans le dos. Finalement, tout s'arrangeait. Et ce n'était pas grâce à lui, qui avait totalement échoué à résoudre le problème.
"Tu l'aimes bien quand même cette petite Miss Je-sais-tout, gloussa-t-il."
Drago leva les yeux au ciel et lui lança un regard courroucé.
"Ce genre de scandale éclabousse tout, Blaise. Les Non-alignés ne peuvent pas se permettre ce type de mauvaise presse.
- Oui, oui, évidemment, rétorqua son meilleur ami avec un haussement de sourcils suggestif. Mais elle t'a pas incendié en te trouvant là-bas ? C'est pas son genre de se laisser sauver par un prince sur son cheval blanc, elle a pas tellement le profil de la douce princesse en détresse."
Ils échangèrent un regard complice et se mirent à glousser comme deux enfants.
"Je suis aussi surpris que toi mais en fait, non. Je crois qu'elle était trop humiliée et soulagée pour protester. Franchement, si elle n'était pas aussi chiante, j'aurais pu avoir de la peine pour elle."
Blaise arrêta de rire et plissa les yeux comme pour essayer de lire à travers le cerveau de Malefoy.
"Tu as eu de la peine pour elle ! répéta-t-il d'une voix aiguë.
- Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit, objecta le blond.
- Oh si, en langage Malefoy, c'est tout à fait ce que tu as dit. Par Merlin, mais t'as un cœur en définitive. Serveur, une tournée !"
Lorsque les filles revinrent de leur aparté aux toilettes, elles les trouvèrent relativement ivres et hilares. Zabini tapait du poing sur la table et Malefoy agitait les mains dans tous les sens, comme s'ils étaient en désaccord sur quelque chose.
"Je rêve ou ils s'amusent sans nous ? grimaça Pansy en frappant du plat de la main les deux garçons sur la tête."
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Hermione se réveilla le lendemain matin avec un sérieux mal de crâne, et plus aucun souvenir de la fin de sa soirée. Elle fut rassurée de sentir l'odeur de sa lessive sur ses draps : elle était chez elle. C'était déjà un indice encourageant.
"Merlin, ma tête... grogna-t-elle.
- M'en parle pas, répondit la voix d'Astoria."
Hermione ouvrit les yeux et se retourna, mais le lit était vide.
"Je suis là, dit Astoria en levant un bras au dessus de sa tête.
- Mais pourquoi tu as dormi par terre ? l'interrogea Hermione.
- Aucune idée. Je crois que c'est Parkinson qui m'a poussée pour prendre ma place dans le lit.
- Parkinson a dormi ici ?"
Hermione avait beau se creuser la mémoire, impossible de reconstituer le déroulé des évènements. Tout était devenu flou aux environs de trois heures du matin, jusqu'à un complet black-out. Elle se frotta le visage et constata qu'elle n'avait visiblement pas pris la peine de se démaquiller. Ce qui prouvait une bonne fois pour toute qu'elle n'était vraiment pas dans son état normal la veille. Elle regarda ses doigts noircis par des résidus de mascara et grogna.
"Salut les marmottes ! lança Parkinson en entrant dans la chambre, lumineuse comme la rosée du matin. Tournée de potion anti gueule de bois pour tout le monde. Astoria, tu as un ticket de caisse collé sur le front."
Les deux marmottes saisirent la potion tant espérée et l'avalèrent d'un trait. Hermione rejeta ensuite ses couvertures et constata qu'elle était encore habillée avec ses vêtements de la veille. Elle n'avait même pas retiré ses chaussures. Écœurée, elle les jeta dans un coin de la chambre.
"252 galions ? J'ai dépense 252 galions hier soir ? Mais qu'est-ce que j'ai pu acheter de tant ? s'exclama Astoria, qui avait décroché son ticket de caisse.
- Oh, ça doit être le champagne au Lucifer, pouffa Parkinson.
- Le Lucifer ? On est allés en boîte de nuit ? s'étrangla Hermione.
- J'ai des goûts de luxe quand j'ai trop bu... nota Astoria.
- Blaise avait raison, il avait deviné que vous alliez tout oublier... C'est dommage, vraiment, on a passé une super soirée !"
Hermione se laissa retomber en arrière sur ses coussins. Comment avait elle pu oublier non pas un pan de sa soirée, quelques moments épars, mais plusieurs heures ? Qu'avait-elle fait pendant tout ce temps ? Et surtout, avait-elle vraiment envie de le savoir ?
"Ne faites pas ces têtes, vous n'avez rien fait d'humiliant. On a beaucoup dansé, enfin pas toi Hermione. T'étais assise avec Drago sur les banquettes, comme deux petits vieux.
- Quoi ? Mais pourquoi ? On faisait quoi ?"
Parkinson éclata de nouveau de rire, un air sadique vissé au visage. Elle savourait pleinement le pouvoir qu'elle exerçait sur ses deux collègues : elle détenait le savoir, le secret de cette soirée épique. Et les voir s'imaginer le pire comme ça, c'était très réjouissant. Elle tirait une satisfaction toute particulière de la réaction d'Hermione... Visiblement, elle envisageait la possibilité d'avoir fauté avec le blond.
"Alors ça... Aucune idée. Vous ne faisiez que jacasser, et ricaner, et boire comme des trous. C'est curieux, quand vous êtes bourrés, vous ne vous disputez pas du tout. Ça doit surement vouloir dire quelque chose d'un point de vue psychologique."
Sur ces bonnes paroles, Parkinson enfila son manteau.
"Tu t'en vas ? demanda Astoria en se levant.
- Oui, j'ai un repas de famille ce midi hélas... J'aurais dû continuer à boire jusqu'à maintenant, ça m'aurait aidée à supporter ça, pesta la Serpentard.
- Tu peux me faire transplanner jusqu'à chez moi d'abord ? Je suis trop fatiguée pour le faire seule, je risquerais de me désartibuler...
- Seigneur Astoria, quelle fragilité ! ricana Pansy en lui empoignant la main. Bonne sieste, Grangy !"
Un craquement sonore plus tard, Hermione était seule dans son appartement. Seule, et désorientée. Tout se bousculait, tout changeait à toute vitesse dans sa vie, et elle en venait au point où elle ne savait plus très bien qui elle était. Une hystérique qui se battait dans des ascenseurs ? Une petite chose brisée qui pleurait sans arrêt ? Une députée surmenée, ou juste très motivée ? Une personne qui devait museler des journalistes pour l'empêcher de publier des photos d'elle topless, comme une vulgaire star de téléréalité ? Et puis, pourquoi diable avait-elle passé la soirée à disserter avec Malefoy, qui lui pourrissait la vie depuis des jours ? Ils n'étaient tout de même pas amis.
Elle avait dû simplement être dépassée par un sentiment de reconnaissance, après ce qu'il avait fait pour elle. Finalement, elle s'était laissée ensorceler par le blond, il avait réussi à l'amadouer. C'était impensable !
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Pour se distraire, Hermione passa l'après-midi à plancher sur ses projets de loi et à lire les lettres que lui faisaient parvenir ses électeurs. Astoria les triait en amont, écartant les inévitables lettres d'insulte ou tout simplement saugrenues. Ensuite, Hermione lisait et stabilotait les points auxquels elle se devait de répondre. Puis elle faisait des listes, et réfléchissait à des solutions concrètes. Ce qui lui prenait un temps fou, et ce n'est qu'à la nuit tombée qu'elle réalisa qu'elle n'avait ni mangé ni bu de toute la journée.
Comme si elle avait lu dans ses pensées, Laura débarqua avec un sac de fast-food dans les mains et écarta d'autorité les parchemins éparpillés sur la table basse.
"Bon sang, quelle soirée, ricana sa collègue en enfonçant une paille dans son gobelet de soda. Je n'ai rien fichu de l'après-midi ! Mais je vois que tu as travaillé pour dix.
- Oh... Je n'ai pas tellement avancé. C'est difficile de se concentrer, avec tout ça, répondit laconiquement Hermione en piochant dans ses frites.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé, hier ? Je t'ai perdue de vue après la réunion, et tu n'es réapparue qu'au bar... Avec Malefoy. Qu'est-ce que vous faisiez, pendant tout ce temps ?
- Oh, on était pas ensemble. Pas tout le temps, du moins. Longue histoire.
- J'ai tout mon temps ! insista Laura.
- Rien d'important, éluda la Gryffondor. Qu'est-ce que tu as pensé de la réunion ? Ça s'est plutôt bien passé, non ? Finalement, on dirait qu'on peut vraiment réussir à travailler tous ensemble.
- Mmm... Sur le mariage pour tous les sorciers, c'est ça ? Quelles sont les autres lois à l'ordre du jour ? Des projets en particulier ?
- Je ne sais pas vraiment, soupira Hermione.
- Vraiment ? Non, parce que tu fais partie de l'exécutif, alors je pensais que tu aurais des informations plus... confidentielles.
- Eh non ! coupa Hermione, un peu agacée par cette avalanche de questions alors qu'elle souffrait d'un mal de tête lancinant."
C'était parfaitement légitime de la part de Laura de se renseigner, mais cette façon d'insister, d'insinuer... C'était assez irritant. Et sa collègue sembla s'en apercevoir, parce qu'elle changea de sujet et elles parlèrent de choses plus légères, sans lien avec leur travail de députées. Puis Laura rentra chez elle, et Hermione fonça se réfugier sous sa couette pour refaire le plein d'énergie. Elle était invitée à déjeuner chez Harry et Daphné le lendemain, avec Ron et Astoria, et si elle se présentait avec une tête de serpillère mal essorée, elle n'avait pas fini de les entendre.
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"Tu as l'air fatiguée, Hermy, dit Ron en déroulant l'écharpe qui se trouvait autour de son cou."
Il n'avait même pas fini d'arriver qu'il avait déjà remarqué ses traits tirés. Et pourtant, elle avait dormi près de douze heures.
"Je vais bien, dit Hermione en le serrant rapidement dans ses bras.
- Astoria aussi est épuisée. Même quand elle dort, elle parle de boulot. Et de plantes carnivores. Je ne sais pas ce qu'il se passe dans vos nouveaux bureaux, mais ça a l'air inquiétant.
- Quand est-ce qu'on pourra venir les visiter ? s'enquit Daphné. Connaissant Drago, ça doit être grandiose.
- Ah ça... On a survolé la ville en balais pour escorter un prévenu avant hier, on risque pas de rater votre immeuble. Avec ces lettres dorées gigantesques... ajouta Harry.
- Oh, ça... Attends de voir l'intérieur, pouffa Astoria. Hermione a fait le maximum pour le freiner sur la déco, et à une fontaine près c'est réussi.
- Une fontaine ? s'exclama Ron. Maintenant, j'ai vraiment envie de voir ça."
Hermione laissa Astoria continuer à décrire les locaux, et se mit à jouer avec Dahlia. Elle se sentait étrangement mal à l'aise avec ses amis. Mal à l'aise parce qu'elle leur cachait des choses, volontairement, et en toute connaissance de cause. Elle n'avait rien dit de ses innombrables altercations avec Malefoy, à personne, et les témoins n'en savaient que peu sur la teneur de leurs échanges venimeux. Elle n'avait rien dit à personne non plus au sujet des photos volées. Ni même de sa folle nuit au Lucifer avec Malefoy. Et si elle ne parlait de rien de tout ça, c'était évidemment parce qu'elle avait honte. Et qu'elle savait à quoi elle s'exposait : ils seraient choqués, ils ne comprendraient pas, ils auraient peut-être pitié ou seraient déçus d'elle. Et surtout, ils poseraient des questions sur sa relation avec le Serpentard. Parce que le dénominateur commun, dans tout ça, c'était lui.
Elle sentit plus qu'elle n'entendit Harry arriver dans son dos, et il s'assit en tailleur à côté d'elle sur le tapis.
"T'es vraiment sûre que tout va bien ? T'es pas obligée d'en parler si t'as pas envie, mais si tu changes d'avis... Tu sais que je suis là, lui dit le brun.
- Oh Harry..."
Hermione se fustigea mentalement en sentant les larmes perler, à nouveau, dans ses yeux. Mais que lui arrivait-il bon sang ? Elle n'avait jamais été le genre de personne qui pleurait beaucoup, et en deux jours, elle avait failli s'effondrer en pleurs à de nombreuses reprises. Un bordel émotionnel, voilà ce qu'elle était. Harry passa un bras sur ses épaules et l'attira contre lui, comme s'il réconfortait une enfant. Et ça ne fit que renforcer la tristesse d'Hermione.
"J'ai menti, Harry... avoua la jeune femme à voix basse.
- Je sais. Qu'est-ce qui se passe ? C'est grave ?
- Non... mais ça aurait pu. Déjà, c'est pas facile de s'adapter dans ce nouveau groupe, il a de fortes personnalités et... c'est assez tendu. Mais ça va, c'est... C'est plus simple que prévu. On s'entend assez bien, finalement.
- Alors, c'est quoi le problème ?"
Hermione tourna la tête pour regarder son meilleur ami dans les yeux et se dit qu'après tout, si quelqu'un était bien placé pour se montrer compréhensif, c'était lui. Il ne lui avait jamais tourné le dos.
"Viens, dit Harry en l'entraînant à l'écart."
Ils se réfugièrent dans la bibliothèque sans que personne ne remarque leur manège, et Hermione se décida à tout déballer.
"Tu te souviens, il y a deux ans, j'étais partie en vacances sur la côte d'Azur avec Laura. J'avais... rencontré Malcolm Jenkins.
- Oui, j'ai pas oublié. Ron nous a assez bassiné avec ce joueur de Quidditch, alias un dieu vivant. Et si mes souvenirs sont bons, tu ne l'avais pas juste rencontré...
- Justement, à ce propos... Visiblement, on était pas totalement seuls sur la plage privée de l'hôtel. Quelqu'un a pris des photos. Des photos embarrassantes. Et une journaliste a mis la main dessus, et a décidé de les publier."
Harry se redressa, le regard assombri par une colère sourde.
"Qui c'est, cette journaliste ?
- Je ne sais pas. Mais Malefoy s'en est occupé avant hier, et il a réussi à récupérer les photos. C'était les originaux.
- Attends, quoi ? C'est Malefoy que tu as appelé au secours, et il t'a aidée ? Comment il s'y est pris ?"
Comme elle s'y était attendue, Harry était en état de choc.
"Je ne sais pas exactement... Ce n'est même pas moi qui l'ai prévenu, tu te doutes bien. Quoi qu'il en soit, il a réglé le problème. Il n'y aura pas d'article et il n'y a plus de photos. Seulement... Je me suis sentie salie, Harry. On m'a épiée, on m'a volé mon image, je suis passée à deux doigts d'une humiliation publique.
- Mon dieu Hermione, je suis désolé, s'exclama Harry en la prenant de nouveau dans ses bras. C'est fini maintenant."
Ils restèrent à l'écart quelques minutes de plus, mais finirent par rejoindre les autres pour ne pas attiser leur curiosité. Malgré tout, durant la totalité du repas, Harry ne se départit pas de son air préoccupé. Il était évident qu'il n'allait pas en rester là. Heureusement, Ron anima le déjeuner en imaginant des conversations entre Rogue et son amoureux mystère, ce qui contribua largement à améliorer l'ambiance.
Chose promise chose due, voilà la suite de la scène de l'ascenseur ! Bon, désolée de vous décevoir, mais pas déjà tout de même... il va falloir attendre encore un peu pour qu'il se passe quelque chose entre eux. Beaucoup de stress pour Hermione dans cet épisode, mais elle peut quand même compter sur les autres pour l'aider (ou du moins pour essayer). J'espère que ça vous a plu en tout cas ! A bientôt pour la suite :)
