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Disclaimer : Tout est à JKR, lieux, personnages -sauf certains que vous reconnaîtrez aisément- créatures, etc je ne tire aucun bénéfice de cette histoire, si ce n'est celui du plaisir que je prends à écrire et faire partager ce que j'écris… Bonne lecture.
Avertissement : niveau d'alerte 1 / 3 sur ce chapitre.
Chapitre 194
Ombres
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Drago Malefoy sentait contre sa nuque le bout du crochet qui retenait sa robe. Il essayait de ne pas bouger, attentif au moindre craquement de l'étoffe qui le tenait en vie. Mais les braillements de Peeves, qui hurlait une chanson paillarde pour ne pas entendre les exhortations du Baron Sanglant, lui rendaient la tâche difficile.
- Peeves ! Veux-tu te taire ! Je t'ordonne de ramener ce garçon au sol ! criait le Baron.
- Non ! Non ! Non ! chantonnait Peeves.
Il s'assit sur le rempart et coiffa Malefoy de son bonnet multicolore.
- Tu crains les chatouilles, Malefoy ? Hein ? Quoi ? Tu pourrais répondre, mal élevé ! Très bien ! Je vais vérifier moi-même…
Il avança ses doigts boudinés vers le torse de Malefoy. Le souffle du Serpentard s'accéléra. Il jeta un regard chargé de haine vers l'esprit frappeur.
- Allons ! Allons ! fit Peeves sur un ton doucereux. Ne fais pas de manières… Je sais combien tu es jaloux des prérogatives de Potter… et de l'importance que ton maître lui accorde… Alors pendant qu'il se fait chatouiller par ce vieux Tom, moi je te chatouille toi… D'accord ? Pas de jaloux comme ça…
- Peeves ! essaya le Baron de sa voix la plus lugubre.
Peeves fit mine de trembler de peur et éclata de rire.
- Non ! Non ! Non ! Monsieur le Baron ! Vous ne pouvez rien contre moi dorénavant… Ho ! Regardez ! Dumbledore !
Peeves tendait son bras vers le bas du château. Malefoy baissa prudemment les yeux. Il était pratiquement gelé. Il avait le vertige. Et par-dessus tout il avait peur.
Il vit surgir dans le parc une ombre qui ressemblait à Dumbledore, poursuivie par cinq mangemorts. Le baron cessa de houspiller Peeves et ce dernier fixait ses yeux avides sur les silhouettes, tout en faisant entendre de petits claquements de langue excités.
Malefoy sentit son cœur se serrer de joie. Le grand Dumbledore était en mauvaise posture. Il ne se sortirait pas de cette situation. Et même quand deux des mangemorts s'écroulèrent, il garda la certitude que le vieil homme était fini.
Drago ne se rendait pas compte que le silence de la tour n'était plus troublé que par la plainte du vent sur le chemin de ronde. Le souffle du jeune homme était suspendu à la fréquence des éclairs de couleur qui s'échappaient des baguettes. Peeves semblait fasciné par le combat qui se déroulait tout en bas. Le Baron sortit de sa stupeur.
- Il faut lui apporter de l'aide ! dit-il et il s'enfonça dans la pierre.
Le vent portait des voix déformées, des incantations inachevées et une odeur étrange qui piquait la gorge.
Dumbledore reculait. Il résistait, mais il reculait. Il s'éloignait du château. S'éloignait de toute aide qui pourrait venir de l'intérieur. Trois mangemorts harcelaient le directeur. Le pressaient. Le fatiguaient. Concentraient son attention sur ces trois baguettes qui le menaçaient. L'empêchaient de rassurer de sa présence ceux qui se croyaient à l'abri à l'intérieur.
Malefoy commença à se détendre lentement. Il avait de plus en plus froid, mais il n'avait plus peur. Il lui suffisait d'attendre. Attendre que le vieux fou succombât aux assauts impérieux de ses adversaires. Et il serait le premier à savoir que la fin serait proche pour les ennemis de l'Héritier de Serpentard. Peeves serait alors bien plus raisonnable et il serait facile de lui faire des promesses que d'autres s'empresseraient de ne pas tenir.
Il suffisait d'attendre, sans bouger, et cet empoisonneur d'esprit frappeur lui paierait cette dernière humiliation avec les intérêts de toutes les autres… il lui suffisait d'attendre la victoire.
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Peeves avait retrouvé son bagou. Debout sur les remparts, il scandait : Dumbledore ! Dumbledore !
Malefoy rongeait son frein. La pointe du crochet le blessait à présent et il s'efforçait de ne pas bouger, malgré les crampes dans son cou pour ne pas trembler de froid.
- Tiens… du renfort ! fit Peeves en s'appuyant négligemment du coude sur le parapet. Pour qui crois-tu qu'ils viennent ? On ne voit que des ombres… On parie ? Allez ! Si tu gagnes, je te décroche ! Si tu perds, je te décroche aussi…
Peeves éclata de rire ; Malefoy serra un peu plus sa mâchoire tétanisée.
- Moi je dis… Pour Dumbledore ! continua Peeves. Et toi ? Tu dis quoi ?
Malefoy fixait les deux silhouettes incertaines courant vers le parc enneigé qui reflétait les lumières blafardes de la nuit.
Pas de robe, pas de capuches… deux formes agiles et rapides. Pas des mangemorts, mais pas des élèves non plus. Sans doute deux membres de cette Brigade Anonyme dont il avait saisi quelques noms dans le Grand Hall. Il retint un geste de colère. Encore des traîtres à leur sang. Comme ce vendu de Nott et ces deux imbéciles de Crabbe et Goyle… Et combien d'autres encore ? Tous ces félons qu'il faudrait punir.
Drago suivait des yeux les deux ombres qui se rapprochaient dans le dos des mangemorts. Il aurait voulu les prévenir. Il souhaitait de toutes ses forces que les trois hommes se retournassent. Malefoy sentit son cœur se serrer à lui faire mal. Son vœu venait de se réaliser. Deux des mangemorts se détournaient de Dumbledore. Ils brandirent leur baguette chacun vers le jeune homme qui se présentait face à lui.
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Malefoy suivait les combats avec anxiété. Ce n'étaient que des jeunes gens… Ils n'avaient aucune formation militaire. Et surtout, ils n'étaient pas aussi aguerris que ceux qui se trouvaient en bas… La Brigade Anonyme avait eu de la chance jusque là. Ce n'étaient que des amateurs… Ils ne faisaient pas le poids dans une bataille rangée comme celle qui se jouait à Poudlard… Ils ne bénéficiaient pas des conseils et de l'entraînement du Maître des Ténèbres. Et la Marque ne les animait pas de cette rageuse envie de vaincre…
Drago ne comprit pas tout de suite ce qui se passait sur le pré. Il vit les éclairs rouges des baguettes des jeunes gens se croiser et les mangemorts s'effondrer sur place. Le troisième se précipita vers Dumbledore qui recula une dernière fois. De trois côtés, des lumières jaillirent et frappèrent le dernier espoir de Drago Malefoy.
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Danny Walters tendit la main à Dumbledore pour l'aider à se relever et le vieil homme la prit avec gratitude, tandis que Gerald Dennis se penchait vers le dernier mangemort effondré.
- Ca va, annonça-t-il. Il en a pour un moment, mais il est vivant…
Il lui arracha sa capuche et siffla longuement.
- Tu sais qui c'est ? demanda-t-il à Walters. C'est Lestrange, le plus vieux… Quand je vais dire à Ginny que j'ai eu cette ordure…
- Elle va être impressionnée, c'est sûr ! se moqua Walters. Surtout si tu oublies de lui dire qu'on s'est mis à trois pour l'avoir…
Dumbledore se mit à rire.
- Effectivement, à trois contre un, c'est tout de même peu régulier…
- C'est exactement ce qu'on s'est dit quand on est sorti du château ! répliqua Dennis, un peu piqué.
Dumbledore s'appuya sur l'épaule du jeune homme.
- Ce n'était pas un reproche… dit-il. Merci, les enfants, ajouta-t-il. Mais enlevez donc vos passe-montagnes, jeunes gens… J'aime savoir à qui j'ai affaire, et davantage encore qui me sauve la vie…
Les deux jeunes hommes retirèrent leur cagoule, tout fiers de l'importance que leur donnait le Directeur de Poudlard.
- Daniel Walters… ! fit Dumbledore en hochant la tête. Bonsoir, Monsieur Dennis. La conversation est tout de suite plus chaleureuse quand on voit le visage de ses interlocuteurs. Alors ? Comment cela se passe-t-il à l'intérieur ? Fred Weasley a-t-il réussi à rejoindre le château ?
- Il arrivait quand nous sortions, répondit Walters.
Dumbledore leva les yeux vers le ciel sombre. Il tapota l'épaule de Dennis.
- Bien… fit-il. Vous m'avez fait gagner du temps, jeune gens… C'est une bonne chose…
Il lâcha Gerry et fit quelques pas en boitillant jusqu'à ce qu'il se baissât pour ramasser quelque chose dans la neige.
- Vous avez perdu quelque chose, Monsieur ? s'inquiéta Walters.
Dumbledore essuya du revers de la manche ce qu'il venait de retrouver.
- Je crains d'avoir été maladroit, en effet… murmura le vieil homme aux jeunes gens qui se rapprochaient. Et il va me falloir changer les plans une fois encore… Monsieur Walters ? Vous connaissez le chemin de la tour d'astronomie, je présume…
- Naturellement, Monsieur…
- Alors vous me rejoindrez sur la terrasse… Quant à vous, Monsieur Dennis, tenez-vous prêt à ouvrir les portes de l'enceinte lorsque votre camarade vous en donnera le signal. Daniel ? rappela-t-il comme Walters s'éloignait déjà. Vous connaissez Messieurs Crabbe et Goyle ? Trouvez-les et envoyez-les aux portes, voulez-vous…
Dennis toussota, hésitant à intervenir. Ce qu'il fit cependant sous le regard interrogateur de Dumbledore :
- Vous vouliez ajouter quelque chose, Gerry ? demanda le directeur sur un ton légèrement amusé.
- Heu… Non… mais vous êtes sûr que les deux Trolls sont bien les personnes qu'il faut ?
Dumbledore hocha la tête :
- Je suppose qu'ils ont été surnommés ainsi à cause de la force légendaire de ces créatures… Alors, oui, Vincent Crabbe et Gregory Goyle sont bien les personnes qu'il faut pour ouvrir les portes de l'enceinte…
Le directeur fit signe à Walters qu'il pouvait y aller et Dennis courut de son côté se mettre à l'abri du vent derrière les battants de la porte principale, dans l'attente du signal de la tour. Lorsqu'il se retourna pour voir de quel côté partait Dumbledore, il ne le vit plus au milieu du parc.
Il s'aperçut que le directeur de Poudlard l'attendait devant les portes.
- J'ai levé le sortilège qui les maintenait fermées, expliqua-t-il. Pour lever la barre, il faut tirer sur la chaîne. Je vous conseille fortement de jeter un charme d'allègement dessus pour que vous puissiez la lever sans grand effort tandis que vos camarades ouvriront les battants. Prenez garde tout de même, il se pourrait qu'on se batte devant les portes quand vous les ouvrirez. Il serait dommage que vous preniez un sortilège perdu…
Il leva encore une fois les yeux vers le ciel et la tour.
- Vous retournez à l'intérieur, Monsieur ? demanda Dennis.
- Pas tout de suite, mon garçon… J'ai quelque chose à faire avant…
Et avant que Dennis eût pu lui poser une autre question, Dumbledore avait disparu.
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- Tu as perdu ! Tu as perdu ! chantonnait Peeves. Alors… Je te décroche comment ? Tout d'un coup ou petit à petit ?
- Tu ne me tueras pas, Peeves ! cracha Malefoy. Tu as besoin de moi !
- Je me demande… hésita Peeves. Qu'est-ce qui serait le plus drôle… M'assurer l'impunité pour les siècles des siècles ou avoir le plaisir immense de t'entendre t'écraser au sol… Est-ce que tu feras Splaasshhh ? ou Pchhhhploouf ! Tu veux qu'on parie encore ? Moi je dis…
- LA FERME ! cria Malefoy sans retenir sa colère.
- OK ! OK ! fit Peeves. Tu ne veux pas parier, c'est d'accord. Je te garde encore un peu… Mais tu sais j'ai des témoins qui diront à tous que je leur ai sauvé la vie… alors qu'est-ce que ça peut faire que tu sois toujours en vie ou pas…
- Tu paieras ! Peeves ! Je te jure que tu paieras ! Quand le Seigneur des Ténèbres se présentera devant les portes de Poudlard ta tête sera la première à tomber…
Peeves se mit à rire une fois de plus, en faisant des gestes et des grimaces grossières.
- Et où est-il ? Où est-il le Seigneur des Ténèbres ? Ton maître dont tu nous rebats les oreilles depuis des mois ? Est-il parmi ses fidèles à se battre à leurs côtés ? Je ne le vois pas… Tu penses peut-être qu'il va venir à ton secours… Et qu'il va te féliciter pour t'être fait accrocher comme un vulgaire jambon à la plus haute tour du château ? Hein ? C'est ça ? Tu crois qu'il va monter jusqu'ici pour te décrocher lui-même ? Juste après m'avoir coupé la tête sans doute…
Peeves se frappa les cuisses. Son rire se perdit dans le vent sifflant.
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- Peeves ?
Peeves cessa de rire. Il conserva son air insolent cependant pour répondre :
- Professeur Dumbledore ?
- Je constate que tu as trouvé le moyen de t'amuser un peu, Peeves, malgré les circonstances tragiques de cette nuit… Mais je doute que Monsieur Malefoy goûte autant que toi à la plaisanterie.
Peeves ricana.
- Je ne vous le fais pas dire, Dumbledore…
Il mit une main sur une hanche et prit l'air avantageux des Grands d'Espagne sur les tableaux de Velasquez.
- Et puisque vous êtes là, Monsieur le Directeur, j'aimerais que vous preniez note que le sieur Malefoy est mon prisonnier… Je l'ai surpris dans la salle des Quatre Maisons qui essayait d'avada kédavrer l'un de ses camarades, le dénommé Théodore Nott, avant de faire de même sur six autres personnes, dont un professeur…
- C'est certainement un crime qui mérite le pilori où tu l'as placé, Peeves… mais je suis sûr que Monsieur Malefoy jouirait de la vue superbe avec davantage de sérénité s'il avait ses deux pieds sur le sol… Peeves, ramène-le, s'il te plait… ?
Peeves se renfrogna, croisa les bras, et marmonna que c'était pas juste, et qu'on profitait qu'il était un esprit pour abuser de sa confiance et… que, bon d'accord, mais uniquement parce que c'était Dumbledore, et qu'il restait pour veiller sur ses affaires.
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Drago Malefoy sentit son corps se soulever et flotter vers le haut du mur. Puis il tomba lourdement au sol et se releva aussitôt, non sans jeter un regard mauvais à Peeves. Il vit Dumbledore faire un geste de la main et l'esprit s'éloigna pour s'asseoir sur le parapet un peu plus loin. Malefoy se retint au rempart, un peu flageolant, tout ankylosé et ravi de se retrouver face à face avec ce vieux fou de Dumbledore.
- Vous vous attendez sans doute à ce que je vous remercie… dit Malefoy sur un ton hautain.
- Je ne m'attends plus à grand-chose de votre part, Drago.
Le ton de Dumbledore n'était pas aussi bienveillant que d'ordinaire. Malefoy se tint sur ses gardes. Le regard du directeur cependant n'était pas aussi dur qu'il s'y attendait. Il essayait de lire dans ces yeux qui brillaient dans le noir les raisons de ce traitement de faveur.
- Que voulez-vous ? demanda Drago pour rompre ce silence où seul le vent se faisait entendre. Je ne vous dirai rien de ce que je sais ! Vous pouvez me menacer de me jeter au bas de la tour, je ne parlerai pas…
- Ho ! Je le sais bien, Drago… Je le sais… car vous ignorez les réponses aux questions que je pourrais poser…
Dumbledore s'avança vers le parapet et invita Malefoy à faire de même.
- J'ai toujours aimé cet endroit du château, dit-il dans un soupir. On a une vue imprenable sur le ciel et sur le domaine de Poudlard… Quand viendra le temps de me retirer, c'est ce que je regretterai le plus dans ce vieux château… Je veux parler du Poudlard matériel bien sûr… Car l'autre Poudlard, le plus important, le vrai, je l'emporterai dans mon cœur. Comme chacun de ceux qui ont passé une partie de leur vie, ici…
Dumbledore se tourna à demi vers Drago Malefoy :
- Et vous, Drago ? Qu'emporterez-vous de Poudlard quand vous devrez le quitter ?
- Quand je quitterai Poudlard, répondit Drago avec un grincement de dents, il n'en restera rien. Et je ne veux rien emporter non plus.
Dumbledore hocha la tête.
- Vous vous trompez, Drago. On laisse toujours quelque chose derrière soi. Et on emporte toujours quelque chose aussi, même si on n'en a pas conscience.
- Quand le Seigneur des Ténèbres mettra le pied à Poudlard, c'en sera fini de l'école. C'en sera fini de tous ceux que vous avez entraînés derrière vous. Vous serez responsable de leur mort à tous…
- Et de celle d'Argus Rusard aussi, Drago ?
Malefoy se raidit. Le froid faisait trembler ses mâchoires. Il redressa la tête avec fierté. Le regard de Dumbledore sur lui le perçait de part en part. Une évidence s'imposa à lui. Il n'y avait aucune gloire à avoir causé la mort d'un stupide cracmol. Il baissa la tête pour ne plus voir ces yeux qui le fixaient.
- C'était un accident… avoua-t-il presque malgré lui.
- Et de celle de plusieurs de vos camarades ?
Drago ne répondit pas.
- Est-ce vous, qui avez ouvert les portes, ou moi, qui ne les ai pas mis à l'abri à temps, qui sommes responsable de leur mort ? Vous qui avez incité vos camarades à prendre les armes ? Ou moi, qui non seulement vous ai laissé faire, mais ai été incapable d'empêcher le saccage de l'école par vos amis mangemorts ?
Malefoy fit un effort pour laisser un ricanement s'échapper de sa bouche tremblante :
- Je suis flatté que vous m'éleviez au même plan que vous-même, professeur…
- Ne le soyez pas, Drago… C'est moi qui m'abaisse au même niveau que vous. Nous avons tous deux cru que nous étions les maîtres du jeu. Nous avons manqué d'humilité et nous payons ce soir toutes les conséquences de nos actes…
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Dumbledore se tourna vers la Forêt. Au loin l'orage grondait, et l'horizon de la Forêt était rouge sang.
- Ce n'est pas encore l'aurore, dit Dumbledore, et pourtant le ciel rougeoie comme pour un lever de soleil.
- On dirait un crépuscule, frissonna Drago. Mais ce n'est que la Forêt qui brûle.
- Il semblerait, reprit Dumbledore. Sentez-vous cette odeur d'incendie ? Le vent le pousse vers nous. On pourrait presque entendre la fuite des créatures qui peuplent la forêt.
Il reporta son attention sur Drago :
- Votre maître est là-bas, Drago. Avec Harry. Et puisque aucun des deux n'est encore revenu, j'en conclus, que soit leur combat dure encore, soit ils sont morts tous les deux…
Drago sursauta.
- C'est impossible ! voulut-il crier, mais sa voix se perdit dans un grondement porté par le vent.
- Rassurez-vous, Drago, de ces morts-là, vous n'êtes pas responsable… murmura Dumbledore presque pour lui-même.
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Danny Walters rentra dans le Grand Hall. Trouver Crabbe et Goyle… ! Il en avait de bonnes, Dumbledore ! Où allait-il trouver Crabbe et Goyle dans cette pagaille ? Et il fallait encore qu'ils veuillent l'écouter… Il n'avait pas souvenir que ces deux là fussent d'une grande rapidité d'esprit.
Et il fallait aussi qu'il arrivât vivant en haut de cette fichue tour d'Astronomie. S'il parvenait à traverser le Hall… Devant la salle des Première Année, George se battait avec acharnement contre un mangemort qui hurlait des obscénités entre chacun de ses sorts. Il se portait à son secours quand un homme encapuchonné surgit devant lui.
- Comme on se retrouve, Walters…
- On se connaît ? fit Daniel.
- Moi je te connais, et ça me suffit…
L'homme cria un sortilège. Walters leva un bouclier devant lui. Qui pouvait bien être ce type ? Et puis cela n'avait pas d'importance. Il n'avait ni l'intention de lui sauver la vie, ni celle de le tuer. Il voulait juste trouver Crabbe et Goyle, traverser le Hall et monter à la tour d'Astronomie !
Walters se battait la rage au cœur. Il perdait un temps précieux. L'autre ne cédait pas d'un pouce. Personne ne viendrait aider l'ancien Serdaigle. Tous se démenaient devant la petite salle. Et ceux qui sortaient du passage sous l'escalier se précipitaient dans le couloir du rez-de-chaussée.
S'il pouvait seulement faire prévenir les deux Serpentard des ordres de Dumbledore, il pourrait se consacrer à la seconde partie de sa mission… Il vit sortir McGonagall de sous l'escalier et son cœur se serra. Elle trouverait Crabbe et Goyle et ils n'oseraient pas discuter ses ordres. Mais son adversaire ne lui laissait aucun répit. Et McGonagall –il ne l'aurait jamais crue capable de cela !- rebroussa chemin.
Walters essaya de se rapprocher de George qui avait tout autant de mal à se débarrasser de son bruyant adversaire que Daniel du sien. Il recula vers la petite salle, semblant perdre du terrain. L'autre le poussait et le poussait encore. Ses sortilèges se faisaient plus incisifs, plus dangereux aussi.
Soudain une aile argentée effleura la capuche du mangemort qui pressait Walters. Aucun des deux ne savait d'où sortait la petite chouette hulotte qui survolait le Hall. Il y eut un moment de flottement dans les combats. Daniel en profita pour lancer un bloque-jambe sur son adversaire, et l'assommer d'un stupéfix vengeur quand il se retrouva à terre. Il ne prit pas la peine de vérifier l'identité de celui qui se cachait sous le capuchon noir, tout juste prit-il quelques secondes pour lever les yeux vers la chouette qui s'envolait vers l'extérieur. McGonagal revenait. Elle brandissait sa baguette plus décidée que jamais et ponctuait ses lancers de sorts, de « voyous ! » et de « vauriens ! » indignés.
Walters allait la rejoindre quand son attention fut attirée par d'autres cris, tout aussi vindicatifs, mais bien plus grossiers. Il se tourna vers George, toujours aux prises avec son mangemort bruyant. Il lança un Expelliarmus qui prit l'homme au dépourvu et George termina le travail.
Le jeune chef de l'AD voulut entraîner son camarade dans un autre combat, mais Walters l'informa des derniers ordres de Dumbledore. George n'avait aucune idée de l'endroit où se trouvaient Crabbe et Goyle. Il s'étonna même de l'exigence de Dumbledore. Mais après tout, c'était lui le chef, et il savait ce qu'il faisait.
Il montra à Walters la tête rousse de Fred, qui traversait le Hall en courant, en compagnie d'une troupe de jeunes gens.
- Fred pourrait te le dire, s'il a récupéré la Carte… Suis-le…
Le groupe conduit par Fred Weasley avait déjà atteint la porte. Les combats se concentraient devant la petite porte. Les mangemorts redoublaient de férocité.
- La porte va céder, dit Walters, une sourde angoisse au fond de la gorge.
- Fais ce que t'a demandé Dumbledore ! commanda George tout en le poussant vers la porte du Hall.
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Walters prit son élan au moment où son ancien directeur de Maison surgissait devant lui.
- Attendez-moi ! Attendez-moi ! s'essoufflait le petit professeur Flitwick en trottinant vers la sortie du hall.
- Que se passe-t-il, professeur ? demanda Walters.
- Par Merlin ! haleta Flitwick. Le couloir est bloqué par un sortilège. Il faut faire le tour pour arriver dans la Grande Salle.
Flitwick s'arrêta, la main au côté.
- Je n'en peux plus ! décréta-t-il.
- Savez-vous où sont Crabbe et Goyle, Monsieur ? demanda encore Walters.
- Serpentard ? La Grande Salle, sans doute…
Walters s'élança. Il revint sur ses pas.
- Je vous emmène, Monsieur ?
Il se baissa et présenta son dos à Flitwick. Le professeur hésita, fit mine de s'offusquer, puis s'écria : « Oh ! et puis zut ! »
Il sauta sur le dos de Walters et s'accrocha à ses épaules.
- Vite ! Vite ! Monsieur… Monsieur… Walters, si ma mémoire est bonne…
- C'est cela, professeur ! Daniel Walters ! répondit-il tandis qu'il sortait déjà sur le perron.
Flitwick brandit sa baguette :
- Alors, Monsieur Walters : A l'attaque !
Un roulement de tonnerre lui répondit en écho et Walters se mit à courir dans la neige piétinée, son fardeau sur le dos.
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Une chouette d'argent surgit du pied de la tour. Malefoy fit un bond en arrière. La chouette fit deux tours au-dessus des deux hommes avant de se dissoudre dans la nuit.
- Ce n'est rien… voulut rassurer Dumbledore. C'est Minerva MacGonagall qui m'avertit que tous les enfants qui devaient partir ont quitté l'école. J'espère qu'Algie Londubat n'éprouve pas de difficulté à assurer le transport de ceux qui se trouvent dans la Grande Salle.
Et le soupir qu'il poussa montrait clairement qu'il en doutait.
- Pourquoi n'êtes-vous pas avec lui, dans ce cas ? questionna Malefoy avec autant de morgue que d'étonnement.
Dumbledore laissa tomber sur lui un regard un peu amusé.
- Hé bien… fit-il en souriant. J'ai longtemps hésité entre votre compagnie dans l'air glacial du temps, et la chaleur des combats dans la Grande Salle, il est vrai.
Drago Malefoy s'empourpra et il n'était pas certain que Dumbledore ne le sût pas. Le vieil homme reprenait cependant :
- Ce que je fais ici, Drago ? La même chose que vous. J'attends que l'aube nous dise sur quel monde elle se lève…
- Oui ! fit Drago avec arrogance. Vous attendez de savoir qui aura perdu !
Dumbledore laissa passer quelques secondes.
- Mais je sais déjà lequel de nous deux a perdu, Drago. C'est vous. Quoi qu'il arrive. Je crains toutefois que la victoire ne nous soit amère, à tous les deux…
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Drago Malefoy recula de quelques pas. Dumbledore scrutait le ciel devant lui. On ne voyait rien des nuages qui s'amoncelaient au-dessus du parc. Au dessus de la Forêt, ils prenaient une teinte de cinabre. Le vent était tombé brutalement et le bruit des combats parvenait jusqu'à eux. Drago tendait l'oreille sans réussir à tirer un quelconque augure des cris qui montaient jusqu'au plus haut sommet du château.
Soudain, Peeves se mit à pousser de petits cris excités. Il montrait du doigt quelque chose tout en bas et Dumbledore se pencha par-dessus le muret. Malefoy se précipita aux nouvelles.
- Des ombres… chuchota le vieil homme. Encore des ombres, Drago…
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Drago n'aurait su dire, lui non plus, qui étaient ceux qui se hâtaient vers la classe ouverte sur le côté du château. Peeves se pencha brusquement :
- Weasley ! cria-t-il avec jubilation. Les jumeaux Weasley sont de retour.
- Oui… Je crois que Fred Weasley vient d'arriver, répondit Dumbledore.
Peeves se mit à se trémousser sur place, visiblement écartelé entre son désir d'aller mettre la pagaille avec les frères Weasley et son refus de laisser son prisonnier aux mains d'un homme connu pour sa trop grande indulgence.
Il poussa un cri de frustration et hurla à Dumbledore de bien vouloir remettre ses affaires à leur place en partant. Il disparut dans un cri de joie qui ressemblait à un cri de guerre.
Dumbledore tourna à nouveau la tête vers le ciel.
- Vous attendez du monde ? se moqua Malefoy que l'absence de Peeves rendait moins nerveux.
- Oui… Pourquoi ? Pas vous… ?
Malefoy se mordit la langue, autant pour ravaler son dépit que parce qu'il claquait des dents.
- Si vous attendez vos Aurors, ils ne viendront pas, finit-il par répliquer. Le Maître leur a envoyé quelques uns de ses hommes pour les occuper. Et il leur a pris leurs balais…
- Des balais, ça se trouve, Drago… répondit négligemment Dumbledore. Et on peut toujours transplaner.
- Sauf si on a un sortilège d'anti-transplanage sur la tête…
- Effectivement, approuva le vieil homme… Mais on trouve toujours un moyen quand on est guidé par la voix de ceux qui appellent à l'aide. Ils viendront… peut-être pas aussi tôt que je le souhaite. Peut-être pas aussi nombreux non plus. Sans doute accompagnés des vôtres, je le crains. Mais ils viendront, soyez-en sûr…
§
Malefoy tressaillit. Il releva la tête, malgré tout.
- Vous ne me faites pas peur, Dumbledore.
- Ce n'est pas ce que je cherche, Drago. Je ne crois pas avoir jamais fait peur à quiconque… sauf à une seule personne. Et même à lui, faire peur n'était pas ce que je voulais. J'aurais du chercher à mieux gagner sa confiance peut-être… Mais je crois que c'était impossible. Il ignorait déjà ce que signifie ce mot. Il n'est sans doute pas très sagace de voir un ami dans chaque main qui se tend, mais y voir chaque fois un ennemi doit être très éprouvant… Qu'en dites-vous, Drago ?
- J'en dis que votre arrogance dépasse de très loin les limites de l'acceptable ! cracha Drago. Vous prétendez que le Seigneur des Ténèbres a peur de vous ! Vous n'êtes qu'un vieux fou qui ne sait ce qu'il dit ! Vous n'êtes pas digne de tenir une école de sorciers. Vous n'êtes pas digne de toucher l'ourlet de la robe du Maître. Vous n'êtes qu'un homme sur le déclin ! Et sans votre armée de sang-de-bourbe et de sang-mêlé vous n'êtes rien.
§
Drago Malefoy crachait sa colère sans retenue, tremblant de rage et d'impuissance devant celui qu'il traitait de sénile, mais dont la baguette dépassait de sa poche.
- Je n'ai rien dit, Drago… répondit calmement Dumbledore. Et je n'ai pas prononcé le nom de Voldemort…
Dans un cri de rage, et de douleur, Drago Malefoy se jeta sur Dumbledore pour lui prendre sa baguette. D'un geste, le vieil homme le repoussa. Drago tomba au sol et se roula sur les pierres humides en se tenant le poignet.
- La peur, Drago… haleta Dumbledore, essoufflé par cette courte lutte. La peur, c'est tout ce qu'il connaît. La peur, la haine et la mort… C'est ce que tu veux ? Trembler toujours ?
- Taisez-vous ! Taisez-vous ! suffoquait Malefoy, couché sur le sol glacé. Laissez-moi tranquille. Ne prononcez pas son nom !
- Et toi, Drago ? Pourquoi ne le prononces-tu pas ? C'est ton maître… celui qui guide tes pas. Celui pour qui tu respires… N'est-ce pas une torture que de ne pouvoir prononcer le nom de ceux qu'on aime ? Votre maître ne vous aime pas, Drago. Il n'éprouve aucun sentiment, pour aucun d'entre vous. Il vous appelle ses amis, mais il ne vous aime pas. Et toi, Drago ? Pourquoi fais-tu tout cela pour lui ? Qu'espères-tu de lui ? Tu l'admires ? Ou tu le crains ? La crainte encore, n'est-ce pas Drago ? Je me souviens d'un homme… tu l'as connu toi aussi… Il était puissant, il était intelligent, il était fier. Il se promenait aux cotés de celui qu'il appelait Maître, il se vantait d'être son ami, et son maître l'appelait son ami… Mon cher ami… Mon très cher ami, Lucius…
- Ne me parlez pas de mon père ! sanglota Malefoy, recroquevillé sur son poignet.
- Non… non… fit Dumbledore en reprenant son souffle et en se redressant contre le muret. Non, je ne te parle pas de ton père. Je parle d'un homme qui a tout donné à Voldemort. Jusqu'à la vie de son fils. Et à qui Voldemort a tout pris. Jusqu'à la vie de son fils.
Drago se releva lentement, l'avant-bras gauche contre son estomac. Il fixait Dumbledore, la bouche tordue dans une grimace de haine.
- Taisez-vous ! Taisez-vous ! cracha-t-il. Vous me faites vomir…
- Tu trembles, Drago… reprit Dumbledore. Tu as peur, tu as froid et tu as mal. Tu vois ce que tu as fait et tu es terrifié. Et il n'est plus temps de revenir en arrière ou de tout arrêter, ou de prétendre qu'il n'est rien arrivé, comme à Halloween. Il n'y a plus rien que tu puisses faire, dans un sens ou dans l'autre. Il te faut attendre l'aube. Tu n'as plus aucun rôle dans ce que tu as déclenché. Tu pourrais quitter la tour, et rejoindre ceux qui se battent, ni la victoire ni la défaite ne dépendraient de toi.
§§§§§§§§§§§§
Dès que Filius Flitwick vit, du fond du couloir, le groupe des jeunes gens bloqué devant la porte de la Grande Salle, il se mit à agiter sa baguette par-dessus la tête de Walters.
- La porte est bloquée, Professeur ! Elle est fermée de l'intérieur ! cria Fred.
- Poussez-vous ! Poussez-vous ! cria Flitwick. Laissez-moi faire !
§
Walters allongea le pas et laissa tomber le petit professeur devant la porte. Flitwick se précipita et lança une gerbe d'étincelles sur la porte. Les deux battants s'ouvrirent à la volée et la brigade de Fred se précipita à l'intérieur, en avant-garde.
L'espoir à nouveau changea de camp dans la Grande Salle. Peeves, accroché au sommet du gigantesque sapin décoré, salua d'un long caquètement enthousiaste l'entrée des nouveaux venus. Le professeur Londubat profita de l'irruption pour se rapprocher des jeunes élèves qu'il n'avait pu faire partir avant l'assaut des mangemorts. Viktor Krum prit sa place auprès du professeur Vector qui faisait front avec une énergie désespérée.
Le professeur Flitwick se faufila jusqu'à la cheminée. Sa petite taille lui permit de passer inaperçu parmi les belligérants et il rejoignit Algie Londubat sans encombre.
- Ha ! Filius ! soupira Londubat. Je vous les confie, si vous n'y voyez pas d'objections…
- Allez ! Allez ! Algie ! Je m'occupe d'eux ! Jeunes gens ! A vos baguettes ! Miss Singleton, rappelez-nous la formule du charme de protection collective, je vous prie...
§
Fred s'élançait dans la salle quand il entendit la voix de Ron qui l'appelait. Il tourna la tête et se jeta derrière la table où son frère se tenait embusqué. Il s'étonna de reconnaître Goyle en sa compagnie, ainsi que de constater qu'un autre Serpentard faisait refuge commun avec Ron. Il aperçut également un paquet de chiffons noirs entre les bras de son frère, qu'il serrait contre lui. Il n'eut pas le temps de demander à Ron de lui faire un point de la situation, ni où se trouvait Ginny. Une silhouette noire tombait sur le paletot de Goyle, le saisissait par le col, et lui hurlait dans les oreilles, pour couvrir le bruit de la bataille :
- T'es Crabbe ou t'es Goyle ?
- Qu'est-ce que tu lui veux ! s'interposa Nott.
- Dumbledore veut qu'ils aillent à la grande porte avec Dennis ! Il aura besoin d'eux là-bas pour les ouvrir… répondit Walters.
Nott interrogea son camarade du regard. Goyle haussa une épaule. Si Dumbledore avait besoin de lui… !
- Par contre, je crains que Crabbe ne soit pas en état d'aider quiconque… reprit Nott.
- Envoyons quelqu'un d'autre… proposa Fred. Ron… ?
- On devrait plutôt envoyer Ernie… dit une voix dans l'épaule de Ron. Ou Larry… enfin, je veux dire Malone.
Le tas de chiffons bougea dans les bras de Ron, et Fred ouvrit de grands yeux effarés :
- Hermione ! s'exclama-t-il devant la chevelure plus hirsute que nature qui cachait le visage de la jeune fille – si toutefois c'était bien elle… Mais… tu es… tu es…
- Vivante ! l'interrompit Ron en caressant les cheveux d'Hermione.
Elle se dégagea doucement de l'étreinte de son bras et ramena sa chevelure en arrière.
- Ce n'est rien, Ron… dit-elle. Fred sait déjà que je suis un Graphorn. J'ai besoin d'une baguette…
Elle tendit une main déformée qui fit reculer Goyle et Walters qui s'avançaient. Ron lui donna sa baguette. Maladroite, elle chercha son badge des Phénix dans sa poche. Ses ongles la gênaient et lorsqu'elle l'eut enfin dans le creux de sa paume, ce fut la baguette qui lui échappa. Ron referma sa main sur celle d'Hermione et pointa la baguette sur le badge. Elle murmura une formule dans un souffle.
- Qu'est-ce qu'elle fait ? demanda Goyle.
- J'appelle Ernie Mcmillan. J'espère qu'il va m'entendre…
- Je crois qu'il est entré avec nous, dit Fred.
§
Ron sortit la tête hors de l'abri de la table. Il chercha Mcmillan et le vit, à côté de Finch-Fletchey, qui tournait la tête de tous côtés. Il l'appela, de toutes ses forces, et sentit Hermione qui tressaillait de douleur contre lui. Les deux garçons rappliquèrent en courant.
- Hermione ! s'écria Justin. Tu es…
- Vivante, on sait, le coupa Fred. Tous les deux, suivez Walters ! Ordre de Dumbledore !
Walters tapa sur l'épaule de Goyle et les deux Poufsouffle allaient les suivre, quand Fred sortit précipitamment son miroir et s'exclama :
- George ! Qu'est-ce qui se passe ?
§§§§§§§§§§§§
B.J. Wilford tendait ses mains liées vers la préfète de Poufsouffle, pour lui faire comprendre qu'elle devait l'aider à se détacher. Il ignorait ce qu'elle faisait là. Mais d'après ce qu'il avait entendu du récit de Ginny Weasley à Londubat, elle était dans son camp. Et elle était libre de ses mouvements. L'irruption brutale des mangemorts leur avait mis à tous deux un espoir ardent au cœur. L'attention des fidèles de Dumbledore était focalisée sur les combats. Des corps tombaient, il ne savait à qui ils appartenaient. Mais ce qu'il savait, c'est qu'ils n'avaient plus besoin de leur baguette.
La fille baissa les paupières sur les liens et hocha imperceptiblement la tête, le regard à nouveau fixé sur Ginny Weasley qui leur tournait le dos. La préfète de Gryffondor ne ménageait pas ses Chauves-furies, totalement concentrée sur ce qui se passait dans la salle.
Durant de longs moments, Ida Norton réfléchit à ce quelle devait faire. Si à sa gauche, on ne se souciait guère de ses mouvements, à sa droite, on ne pouvait que la surprendre à essayer de se faufiler hors de son refuge. Il y avait là nombre de ses camarades de Poufsouffle qui lui jetaient des coups d'œil assassins. Et ils n'auraient pas hésité à se servir de leur baguette contre elle, même désarmée, si ils avaient deviné ses intentions. Il lui fallait une baguette. Pour délivrer Wilford d'abord, puis clouer le bec à Weasley. A moins qu'elle ne se chargeât de Weasley d'abord… elle l'avait bien mérité, non ? Malefoy avait beau dire, ils avaient l'air malin, à présent, ses Serpentard, tous saucissonnés comme de vulgaires mouches dans une toile d'araignée. Elle seule n'avait pas failli. Elle savait où se trouvaient les autres élèves. Et elle pourrait bientôt transmettre son message à qui de droit. La sang-de-bourbe n'avait fait que retarder les choses… Elle ne pourrait pas l'empêcher de servir le Maître et de fermer définitivement la bouche à ceux qui pensaient que les Poufsouffle n'étaient que des bons à rien.
§§§§§§§§§§§§
Le bruit de la bataille couvrait la voix de George dans le miroir. Des mangemorts reculaient vers la porte. Théodore Nott tentait de les empêcher de parvenir jusqu'à eux.
A la table voisine, Ellie avait bien du mal à empêcher Jezebel et Dennis de s'exposer au danger. Archer et Montague couvraient un côté, Neville faisait ce qu'il pouvait de l'autre. Ils avaient vu arriver leurs camarades avec soulagement, mais il entrait encore des mangemorts par la petite porte. Le professeur Sinistra venait de tomber et Vector perdait du terrain. Algie Londubat était aux prises avec un groupe d'encapuchonnés coriaces et déterminés. Le professeur Krum était assailli.
La Brigade et les élèves rendaient sort pour sort, cependant les sortilèges dont les mangemorts usaient faisaient bien plus de dégâts chez les jeunes gens qu'eux-mêmes n'en causaient chez leurs adversaires. Et pour ajouter à l'effervescence ambiante, Peeves, du haut du sapin, bombardait les combattants, toutes factions confondues, avec les décorations de noël qui lui tombaient sous la main.
- C'est maintenant qu'on aurait besoin de renfort, murmura Ellie.
Elle jeta un œil d'envie vers la cheminée.
- Si j'étais sûre de pouvoir revenir, je me risquerai bien à aller chercher de l'aide par là… dit-elle.
Andy Archer se tourna vers elle avec un sourire amer.
- Dommage que les Patronus ne sachent pas se servir de poudre de Cheminette...
- Je peux essayer, si vous voulez… proposa Dawson. Je dirais aux McGregor que je viens de la part de leur fille…
- Dawson ! l'interrompit Ellie sans véritablement l'entendre. Je t'ai déjà dit de ne pas la ramener sans cesse… Qu'est-ce que tu as dit ?
- J'ai dit que je pourrais me charger du message…
Ellen se frappa le front. Comment n'y avait-elle pas pensé plus tôt. Où pouvait-il y avoir des cheminées aussi grandes qu'à Poudlard sinon dans un autre château ? Et qui possédait un château et était également membre de l'Ordre du Phénix ? Le phénix ! Elle plongea brutalement sa main dans le col de sa robe et, après quelques secondes d'une lutte fébrile avec son pull qui refusait de lâcher sa proie, elle en ressortit une broche d'argent.
- Andy… les Patronus ne traversent pas les cheminées, mais on peut les y aider !
Elle se tourna vers Dennis Crivey et Jezebel Dawson :
- Vous deux, vous restez ici avec Neville… Andy, tu veilles sur eux… Archie, tu viens avec moi… Tu protèges mes arrières et tu rallumes le feu dans la cheminée…
Avant qu'aucun de ses camarades n'eût eu le temps de lui demander des explications sur ses intentions, elle avait roulé hors de leur refuge, Archie Montague sur les talons.
§
Ils coururent, courbés pour éviter les éclairs qui fusaient de toutes parts, entre les combattants, jusqu'à se rapprocher de l'âtre. Montague pointa sa baguette vers la cheminée et un feu magique flamba aussitôt dans l'indifférence générale. Ellie leva la sienne vers le pot en terre au dessus de l'âtre, et cria « Accio Poudre de Cheminette ! ». Le pot glissa vers le bord du linteau et perdit son couvercle qui se brisa au sol. Ellen se redressa, la main tendue pour l'attraper au vol. Un éclair vert traversa le pot. Il éclata dans une légère explosion. Ellie se jeta au sol et lâcha sa baguette pour recueillir dans la paume de sa main un petit tas de poudre. Elle roula vers la cheminée, le cœur dans la gorge. Elle entendit Archie crier quelque chose, et la voix aigrelette du professeur Flitwick lui parvint de très loin. Elle prit une inspiration, et manqua suffoquer. Ses yeux lui faisaient mal, et une terrible envie d'éternuer l'étouffait. Elle lança en même temps le cheval d'argent et la poudre dans l'âtre. De tout le souffle qui lui restait, elle cria : A destination ! Il y eut une déflagration dans la cheminée. Ellie éternua enfin, et ses yeux se remplirent à nouveau de larmes qui la brûlaient atrocement.
A tâtons, elle chercha sa baguette, le souffle court. Elle se sentit saisie par la robe et traînée au sol. Elle ne voyait que du noir, du flou, et encore du noir zébré d'éclairs.
- Reste là ! entendit-elle au travers du brouhaha qui envahissait son esprit.
Elle ragea. Où voulait-on qu'elle allât ? Plus elle essuyait ses yeux, plus la douleur s'enfonçait dans son crâne. Elle ne savait où elle était ; elle ne savait ce qui se passait ; elle ne savait qui l'avait tirée hors de la bataille. Tout ce qu'elle entendait n'était que cris et caquètements. Apparemment, Peeves passait un excellent moment, lui, au moins !
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Une ombre s'agitait devant le banc renversé derrière lequel étaient couchés les salamandres. Une robe, une capuche. Un mangemort. Ginny se retourna juste au moment où il tombait à la renverse, touché par un sortilège de stupéfixion. Elle le repoussa vers l'avant, d'un sort d'expulsion, et Ida Norton se recroquevilla, comme dans un réflexe de protection. Ginny retourna à ses Chauves-Furies et Norton, lentement, glissa la main vers la baguette que l'homme avait laissée tomber à ses pieds. Toujours aussi discrètement, elle la cacha dans les plis de sa robe. Tout à côté d'eux, on s'agitait un peu. Flitwick criait. Il y eut une explosion dans la cheminée. Ida ne comprit pas ce que McGregor cherchait à faire. Si elle cherchait à fuir, elle venait d'échouer… De toutes façons, elle n'y échapperait pas elle non plus… Ici, ou là-bas –Granger avait sans doute raison- il n'y aurait pas de quartier pour les vaincus.
Ida Norton ignorait les coups de pieds insistants de Wilford dans ses jambes. Il était pressé de retrouver la liberté, mais elle, elle préférait attendre que l'attention se fût éloignée de leur côté. Il sembla finalement que le Serpentard se rangea lui aussi à la sagesse. Il cessa de s'agiter, pour suivre intensément les faits et gestes d'une fille de Poufsouffle qui traînait McGregor jusqu'à l'abri du banc à côté du leur. Une lueur de triomphe brilla dans les yeux de Wilford et un frémissement le parcourut lorsqu'il se rendit compte que sa condisciple haïe était en état de faiblesse, blessée peut-être.
La fille de Poufsouffle s'éloigna, BJ Wilford donna un dernier coup de pied à Ida Norton. C'était le moment où jamais…
Bénédict Wilford sentit se dénouer les liens sur ses poignets entaillés, et il eut une pensée vengeresse envers Théodore Nott. Il arracha la baguette des mains d'Ida et désentrava ses pieds lui-même. Il fut debout dans un bond et un cri de victoire… Aussitôt un éclair vert le traversa et la menace qu'il avait à la bouche mourut sur ses lèvres dans un râle.
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- George ? George ! cria Fred alors que le miroir retrouvait son eau lisse et sombre.
Il poussa un juron et rangea le miroir dans la poche de son blouson.
- Qu'est-ce qui se passe ? s'inquiéta Ron.
- J'en sais rien. La communication est coupée.
- Il est arrivé quelque chose à George ? s'alarma Ron.
- Ou son miroir s'est brisé… essaya de le rassurer Hermione.
Fred jeta un regard vers la jeune fille blottie contre son jeune frère.
- Oui… C'est sans doute ça… dit-il. Dans la bataille… C'est sans doute ça…
Il se reprit pour ajouter :
- Wood a appelé George. Les mangemorts qu'ils combattaient autour du Ministère se sont brusquement repliés. Il faut prévenir Dumbledore.
- Ils viennent ici ! s'écria Ron.
- A moins que… l'interrompit Hermione.
Elle se dégagea des bras de Ron pour ramper jusqu'à la table et glisser prudemment un œil par-dessus. Elle chercha des yeux vers l'endroit où Ginny avait emmené Ida Norton. Ni l'une ni l'autre n'étaient visibles et Hermione doutait que la seconde eût pu joindre quiconque pour lui faire passer le message qu'elle détenait. Mais elle ne pouvait bien sûr en être absolument certaine… Hermione secoua la tête, comme pour elle-même, et au moment où elle allait se retourner vers les garçons, une explosion les fit tous sursauter. Nott retint un mouvement. Il cria :
- Ellie !
Ellen restait étendue devant la cheminée.
- Qu'est-ce qu'elle a encore fait ! s'exclama Ron.
Mais on venait la chercher et on la mettait à l'abri derrière les bancs.
- A moins que ? répéta Fred, ramenant l'attention de tous vers lui.
- A moins qu'Ida n'ait trouvé le moyen de contacter Lestrange…
- Lestrange ? ricana Walters. Il fait un somme au milieu du parc !
- Alors ce n'est pas lui qui aurait pu rappeler ses hommes…
- Ils viennent ! et nous perdons du temps ! dit Nott, agacé.
- Qu'est-ce qu'on fait ? demanda Walters. On leur prépare un comité d'accueil ?
Fred réfléchit, avec force grimaces.
- Ouais ! On va faire ça… Vous croyez qu'ils apprécieraient une bonne partie de Quidditch ?
- Hein ? fit Goyle.
Walters se releva :
- Je vais prévenir Dumbledore ! On se retrouve aux portes !
Il quitta la salle alors que Fred appellait Peeves.
- J'ai besoin d'une diversion ! cria-t-il à l'esprit.
- A vos ordres, Chef ! répondit Peeves dans un caquètement de triomphe.
§
Fred se leva vivement tout en tapant sur l'épaule de Ron.
- Tu viens, Ronnie !
Ron hésita :
- Hermione ?
Nott le poussa vers son frère.
- Ne t'inquiète pas, dit-il. Je te la surveille.
Ron n'en hésita que davantage.
- Ron ! murmura Hermione en le retenant.
Fred attrapa son frère par le bras :
- Lâche-lui les basques, à ta Harpie ! s'écria Fred. Personne ne te la prendra. Surtout dans cet état !
Il siffla entre ses doigts et cria, la main en porte-voix, pour inviter ceux qui le désiraient à le suivre. Il bondit jusqu'aux portes, suivi par Goyle et les Poufsouffle.
- Ron ! répéta Hermione en tentant de se redresser. Attends…
- Ne t'inquiète pas, Trésor… Je ne manquerai pas à ma promesse : je vais rester avec toi…
- Je me fiche de ta promesse, Ron ! Ecoute-moi…
Un cri, de surprise autant que de saisissement, l'interrompit :
- Hermione ? Mais…
Neville avait fait irruption derrière la table renversée, son bras gauche contre lui, une grimace de douleur à la bouche. Il regardait Hermione avec effarement. Il se ressaisit très vite, tout en gardant les yeux fixés sur Hermione.
- Heu… Il est allé où, Fred ? demanda-t-il.
- Dehors, sans doute… répondit Ron.
- Chercher ce qu'il faut pour sa partie de Quidditch, précisa Hermione.
- C'est bien ce que je pensais… reprit Neville. On a un problème… Les balais… Les trois quarts sont en cours de démontage, pour la révision…
Ron blêmit. Il avait oublié ce détail.
- C'est ce que je voulais te dire, souffla Hermione. Il faut prévenir Fred… Il doit renoncer à cette idée.
- Pas si on lui propose une alternative… dit Neville.
- Tu vas sortir une fabrique de balais de ta poche, Londubat ? se moqua Nott.
- Bien mieux… se piqua Neville. Seulement, il faut aller dans la Forêt Interdite...
Et comme les autres se taisaient, il ajouta très vite :
- Des Sombrals c'est mieux que des balais non ?
- T'es cinglé, Londubat… murmura Nott en frissonnant.
- Reste ici, si tu as peur ! répliqua Ron. Neville il faut que tu viennes avec moi. J'ai besoin de toi pour me dire où ils sont et les ramener à Fred. Hermione… je suis désolé… j'avais pourtant l'intention de tenir cette promesse là…
- Ho Ron ! Ce que tu es bête…
Elle l'embrassa, et fit glisser quelque chose dans sa main :
- Sois prudent, chuchota-t-elle. Et je ne pense pas de tu as le courage d'un veracrasse.
Ron jeta un coup d'œil dans le creux sa paume. C'était son insigne de préfet qu'Hermione lui avait rendu. Il l'accrocha à sa robe avant de reprendre sa main et de la presser contre ses lèvres.
- S'il lui arrive quelque chose, Nott… commença-t-il.
- J'en serais pas responsable, Weasley, je viens avec vous…
Il se leva et courut rejoindre Neville déjà à la porte. Ron prit un baiser les lèvres d'Hermione. Puis sur le seuil du couloir, il lui jeta un dernier regard et lui fit un signe de la main. Elle lui répondit d'une grimace qui la rendit hideuse. Il ne vit qu'un sourire et l'amour dans ses yeux. Il partit en courant vers le froid et la nuit.
Dans le couloir, Ron appela Malone devant lui pour lui demander d'avertir son frère qu'il ramenait des montures. Il sentit une main sur son épaule et tourna la tête vers Viktor Krum qui courrait à côté de lui.
- Il en vient encore ? demanda le Bulgare d'une voix grave.
Ron hocha la tête. Une émotion lui serrait la gorge soudain. Il se laissa distancer avant de rattraper très vite l'ancien champion de Durmstrang.
- Viktor !
Ce fut au tour de Krum de se retourner et de ralentir imperceptiblement le pas.
- Viktor ! Elle est vivante !
A nouveau la main de Viktor se serra sur l'épaule de Ron.
- Alors… je n'ai pas encore tout perdu, répondit Krum. Il me reste deux amis.
§
Ron ne dit rien. Il retint Viktor qui prenait la direction du stade de Quidditch.
- Pas par là, Viktor…
- Mais il faut prévenir Fred que les balais ne sont pas disponibles…
- Ce sera fait ! Viens plutôt nous aider à ramener quelque chose pour les remplacer…
Viktor tourna les talons dans la direction que lui indiquait Ron. Ils se remirent à courir, côte à côte, vers la forêt, dans la nuit. Elle leur semblait moins sombre soudain. Peut-être à cause des éclairs qui l'illuminaient presque sans discontinuer. Le vent soufflait en rafales.
- Un temps parfait pour une partie de Quidditch ! cria Krum.
Et sa voix se mêla au rire de Ron que le vent emporta par-dessus le lac et les arbres du parc.
§§§§§§§§§§§§
Ginny se retourna dans un sursaut. Wilford était debout et lui tournait le dos. La baguette qu'il avait à la main tomba à ses pieds, quelques secondes avant que la tête du Serpentard ne vînt cogner sur le sol presque sur les genoux de la jeune fille. Ses yeux bleus fixaient le plafond constellé d'étoiles illusoires et ses boucles blondes lui faisaient une auréole dorée. Ginny eut un mouvement de recul. Elle réprima un frisson. Elle sentait la panique monter en elle. Le bruit emplissait sa tête. Ce n'était pas comme les autres fois. C'était… C'était… Elle ne savait ce que c'était, sauf un vrai cauchemar…
Un long glapissement la sortit de sa torpeur. Peeves caracolait par-dessus la mêlée vers le sapin illuminé, par-dessus les ombres qui s'entrechoquaient et tournaient tout autour d'elle.
§
- Lâche ça ! cria-t-on à côté d'elle.
Elle tourna la tête, comme dans un rêve horrible dont elle ne pouvait s'éveiller. Ellie et Isadora Marchinson maintenaient Ida Norton à plat ventre, chacune accrochée à un bras de la fille. Ellie bataillait pour lui faire lâcher une baguette qu'Ida pointait sur Ginny. Isadora maintenait sa main sur la bouche de sa condisciple. Elle poussa un hurlement et retira sa main mordue au sang.
- Ginny ! cria Isadora.
Dans un geste réflexe, Ginny pointa sa baguette sur la fille et dit « Stupéfix ». Ida cessa de se démener. Ellie se laissa tomber sur elle et Isadora poussa un long soupir qui ressemblait à une plainte.
- Tu es blessée ? demanda Ginny.
- Non… ça ira… souffla Isadora en tenant sa main mordue.
- Pourquoi ne l'as-tu pas désarmée ? questionna brutalement Ellie.
- J'ai essayé ! se défendit Isadora. Quand j'ai vu qu'elle menaçait Ginny, j'ai voulu lui envoyer un Expelliarmus, mais tu t'étais déjà jetée sur elle !
- Tu avais une baguette et pas moi ! reprocha Ellie.
- J'étais allée rechercher la tienne ! Excuse-moi d'avoir voulu te sauver la vie !
- Tu ne m'as pas sauvé la vie ! Cet idiot de Wilford s'est pris un sortilège de ses propres amis !
- Je ne te parle pas de Wilford ! Je te parle du fait que je sois allée te chercher au milieu de la bataille ! Tu pourrais dire merci au moins !
- Merci ! cria hargneusement Ellie.
- Vous avez fini, toutes les deux ? demanda Ginny.
Par-dessus le corps sans vie de Wilford, elle se rapprocha de ses amies. Son regard allait du visage effrayé d'Isadora aux yeux bouffis d'Ellie. Les larmes coulaient encore sur les joues maculées de la Serpentard et laissaient des traces noires jusque dans son cou. Ellie essuya ses yeux et battit des paupières en pestant contre la douleur qui l'aveuglait encore.
- Qu'est-ce que tu fais là, d'abord ? questionna-t-elle avec moins de rage. Tu devrais être dans les cuisines, avec les autres Poufsouffle !
- J'étais dans la Salle des Quatre Maisons quand Vector est venu nous chercher. J'ai eu peur de retourner vers le Hall… Je ne voulais pas revivre une fois de plus ce que nous avons vécu à Halloween… Oh ! si j'avais su…
- Ouais ! fit Ellie…Tu serais à l'abri à présent… mais tu ne te serais pas trouvée là pour me sortir du pétrin…
- Qu'essayais-tu de faire ? voulut savoir Ginny en essuyant les paupières irritées de son amie avec son mouchoir.
Ellie haussa les épaules.
- Quelque chose qui en vaut la peine, j'espère… sinon Harry sera très très fâché… j'ai perdu son cadeau de Noël.
Isadora secoua la tête d'un air consterné qu'Ellie ne pouvait voir.
- Tu es impossible, McGregor ! fit-elle. Tu ne peux vraiment pas t'empêcher de faire l'intéressante…
Ellie haussa à nouveau les épaules dans une grimace d'excuse. Ginny la serra contre elle. Elle avait une violente envie de pleurer elle aussi. Mais des cris les ramenèrent à la réalité des combats.
- Qu'est-ce qui se passe ? ragea Ellen. Je n'y vois rien que des éblouissements !
Et comme ni Ginny ni Isadora ne lui répondaient, elle plissa ses yeux pour y voir plus clair. Elle devinait, aux petits cris qu'il poussait, que Peeves s'amusait de plus en plus.
- Qu'est-ce qu'il fait ? Pourquoi Peeves est-il si excité ? s'alarmait-elle.
Dans un rire nerveux, Isadora lui répondit.
- Il met le feu aux capuches des mangemorts !
De l'autre côté de la salle, vers la porte, Fred invitait ses camarades à une gigantesque partie de Quidditch. Le rire de Peeves envahissait la pièce.
Une main ferme serra le poignet de Ginny et la releva brusquement.
- George ! s'exclama-t-elle.
- Allez, soeurette, viens avec moi ! Un peu d'air frais te fera du bien ! Tu es toute pâle !
Il entraîna la jeune fille à sa suite, parmi des mangemorts en flammes et des jeunes gens qui se jetaient à l'attaque.
§§§§§§§§§§§§
Dumbledore se retourna vers le parc zébré d'éclairs. Des ombres encore couraient sur la pelouse. Le directeur se pencha légèrement sans rien dire.
La porte de la classe d'Astronomie s'ouvrit brusquement. Walters s'avança, haletant, vers Dumbledore.
- Professeur ! Dubois a contacté George Weasley ! Les mangemorts de Londres se sont repliés brutalement…
Le jeune homme se rendit compte tout à coup de la présence de Malefoy qui se tenait dans l'ombre. Il s'interrompit comme retentissait le rire du Serpentard.
- Ils viendront, Dumbledore… se moqua-t-il. Oui… Ils viendront… Et nous verrons qui aura perdu…
§
Dumbledore scruta l'horizon, les yeux plissés, comme s'il pouvait voir au plus loin de la nuit.
- Qu'a dit Dubois ? Peut-il amener sa Brigade en renfort ?
- Je ne sais pas, Monsieur… La conversation a été brutalement interrompue.
- Est-ce le comité d'accueil que je viens de voir courir vers les portes ? Les jumeaux Weasley nous ont inventé une stratégie de leur cru ?
- Heu… Une partie de Quidditch, plutôt… répondit Walters d'un air gêné.
Malefoy ricana sans retenue.
- Alors, ils vont avoir besoin de moi… affirma Dumbledore, très sérieux.
§
Il s'avança à grands pas vers la porte de la salle d'Astronomie.
- Monsieur… le rappela Walters. Vous avez vraiment besoin de moi ici ?
Il désignait Malefoy retranché contre le rempart et n'avait manifestement pas envie de se retrouver seul avec le Serpentard.
- Non, décida Dumbledore. C'est inutile que vous restiez là, Daniel.
- Et lui ? demanda le jeune homme en entrant dans la classe.
- Il est le prisonnier de Peeves, répondit froidement le directeur.
Il referma d'un sortilège la porte derrière Walters, puis se tourna vers Drago.
- Pour votre propre sécurité, Drago... dit-il, je vous conseille de ne pas chercher à quitter cette tour. Il y a là, en bas, bien des jeunes gens qui souhaiteraient se trouver face à vous… Sans compter Peeves, qui m'en voudrait beaucoup si vous vous échappiez…
- Vous feriez mieux de vous soucier de ceux que vous croyez à l'abri, Dumbledore ! l'interrompit Malefoy avec un sourire narquois.
Le directeur jeta presque malgré lui un nouveau regard vers l'horizon, puis vers la Forêt. Puis il revint à Drago et secoua la tête.
- Adieu, Drago, dit-il. Je regrette que nous nous quittions ainsi…
- Etes-vous donc si sûr de mourir, Professeur, répartit Malefoy avec hauteur. Moi je suis certain que nous nous reverrons, vous et moi…
- Je l'espère, Drago… soupira Dumbledore. Je l'espère réellement…
Il changea de ton pour ajouter :
- Tenez-vous éloigné des remparts par ce temps, Drago…
Il leva la tête vers le toit et secoua la tête :
- Il faudrait vraiment installer un paratonnerre sur cette tour…
Et il disparut alors que l'orage se rapprochait inexorablement.
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La place de Ginny ne resta pas libre longtemps. Quelqu'un s'abattit près d'elle dans un halètement essoufflé.
- A quelle soirée, mes aïeux ! Quelle soirée !
- Manquait plus que toi, Colin ! grommela Ellie. Tu ne cours pas derrière les joueurs de Quidditch cette fois ?
Colin Crivey reprenait son souffle.
- Peut pas ! dit-il.
- Tu es blessé ! s'écria Isadora.
- Pas grave… répondit Colin. Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
- Tu es blessé, je n'y vois goutte, Isadora est morte de trouille… énuméra Ellie. Que veux-tu que nous fassions ?
- Et tout le monde nous abandonne ! s'affola Isadora devant la fuite de la plupart de ses camarades.
- Qu'est-ce qu'ils font ? demanda Ellie.
- Ils suivent les Weasley…
- Les mangemorts ! précisa la préfète de Poufsouffle.
- Y en a qui suivent le mouvement… répondit Colin. Mais ceux qui tiennent les positions près des portes les en empêchent, on dirait…
- Il faut fermer les portes, dit Ellie.
- Elles se ferment, annonça Isadora avec fébrilité.
- Colin, tu viens du Hall, n'est-ce pas, continua Ellen. Tout le monde est à l'intérieur ? Alors il faut aussi fermer la petite salle…
- Les portes sont brisées… lui apprit Colin. Et certains des nôtres sont encore de l'autre côté, avec McGonagall.
- Attendez ! s'exclama Isadora. Flitwick ! Il court vers la petite salle. Lui et Londubat… ils ont lancé un sortilège…
- Et ? s'énerva Ellie.
- Et rien… fit Isadora déçue. On ne voit rien… que nos camarades qui se battent… mais je suppose que les professeurs savent ce qu'ils font…
- Moi j'espère que ce sont les Weasley qui savent ce qu'ils font, murmura Ellie.
- Une partie de Quidditch ! ragea Isadora. Quelle idée idiote !
Elle se mit à se mordre les poings.
- Et sans Harry en plus… geignit-elle.
Ellie tourna vivement la tête vers elle.
- Tu te trompes ! asséna-t-elle durement. Harry est avec nous ! Seulement, c'est un attrapeur. Et les attrapeurs, ça ne vit pas la partie de la même manière que les autres joueurs, c'est tout.
- Tout ce qu'on lui demande, c'est d'attraper le Vif d'Or… dit Colin.
- Il va le faire ! assura Ellen avec ferveur. Il va le faire.
Elle se tourna vers les Salamandres attachées en rang d'oignon derrière elle, sans les voir vraiment.
- Voilà ! leur dit-elle. On est tous enfermés ici, maintenant. Il n'y a plus aucune issue. Et vous, vous n'avez plus aucun espoir. Car si les portes se rouvraient sur d'autres que l'armée de Dumbledore, il n'y aurait pas de survivants !
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Drago Malefoy se pencha fébrilement par-dessus les remparts. Stupide Dumbledore. Il n'avait rien compris… Il n'avait pas compris que ce soir-là, Drago ne pouvait pas perdre. Il suivit des yeux les silhouettes vers la porte. Il leva les yeux vers l'horizon. Le ciel était noir. Une partie de Quidditch ! Fallait-il qu'ils fussent désespérés pour laisser les deux clowns Weasley prendre la direction des opérations ! Mais quoi qu'il arrivât, ils ne pouvaient gagner. Ils n'avaient pas Potter pour se saisir du Vif, cette fois… Et lui, il était encore là. Coincé sur cette stupide terrasse en haut de cette stupide tour, certes, mais encore là ! Il lui suffisait de trouver le moyen de descendre… Si seulement il avait sa baguette…
Il courut à la salle de classe. La porte était fermée, mais les larges ouvertures vitrées des fenêtres offraient une opportunité non négligeable. Il sauta sur l'appui de la fenêtre et frappa du poing sur la vitre. Il ne devrait pas avoir grand mal à la briser. Il releva le pan de sa robe sur son bras et sa tête. Il n'aurait pas d'élan, mais il pouvait toujours tenter un sortilège d'éclatement en même temps. La gloire et les honneurs valaient bien quelques coupures et ecchymoses…
Il prit une inspiration et ferma les yeux.
- Non !
Malefoy se sentit partir sur le côté. Mais pas tout à fait de celui qu'il souhaitait. Il tomba lourdement sur les dalles de la terrasse et il resta là un moment, le souffle coupé, la robe sur la tête, un peu stupide.
Il vit deux doigts maigres se glisser sous le tissu noir et sentit un frôlement furtif sur son front. Il frissonna et repoussa vivement la robe ainsi ce qui se penchait sur lui.
- Dobby ? fit-il à la fois étonné et dégoûté.
Il leva la main sur l'Elfe qui se recroquevilla, les bras sur la tête.
- Espèce de sale vermine rampante ! cria Malefoy en abattant le poing sur le crâne de Dobby.
Drago se releva prestement et continua à frapper l'Elfe de plus en plus fort, jusqu'à ce que Dobby retînt son poignet.
- Ca suffit ! dit-il.
Effaré, Drago ne songea même pas à retirer son avant bras de la main de son ancien serviteur. Dobby le lâcha et le regarda de ses grands yeux tremblants.
- Drago Malefoy n'a pas le droit de frapper Dobby. Drago Malefoy n'est plus le maître de Dobby. Dobby n'a plus d'ordres à recevoir de lui…
- Tu n'es qu'une sale engeance, Dobby… Tu es né pour recevoir les ordres. Tu ne sais faire que ça… Obéir… mal ! mais c'est pour cela que tu es fait ! Sors-moi d'ici ! Vite !
- Non !
Dobby recula de quelques pas et s'assit contre la porte de la classe. Malefoy le suivit et lui donna un coup de pied dans les jambes.
- Hors d'ici ! Misérable moisissure… Fais-moi sortir d'ici !
- Les oreilles de Drago Malefoy ont besoin d'un nettoyage : Dobby a dit Non ! Dobby ne laissera pas Drago Malefoy faire davantage de mal à ses amis…
Malefoy éclata d'un rire cruel.
- Tes amis ! Tes amis ! Tu crois vraiment que tu as des amis !
- Dobby a des amis, oui… Des amis qui lui parlent avec gentillesse… Des amis qui ne le traitent pas comme un tas d'ordures malodorantes. Des amis… Oui… Dobby a des amis, lui…
- Des amis qui seront tous morts avant la fin de la nuit ! cracha Malefoy.
Dobby hocha la tête.
- Peut-être oui… Mais mourir avec ses amis, c'est mieux que mourir sans amis… Mais vivre avec ses amis c'est encore mieux… Dobby aimerait vivre avec ses amis. Harry Potter, Hermione Granger, Ron Weasley…
Le rire de Malefoy s'éleva encore.
- Granger est morte ! Et Potter s'il ne l'est pas déjà le sera sous peu… Quant à Weasley… Depuis que sa sang-de-bourbe a passé l'arme à gauche, il n'aspire qu'à aller la rejoindre… C'est vraiment trop drôle…
Dobby glissa un coup d'œil sur Malefoy. Il vit le pied du jeune homme qui s'élevait encore une fois pour le frapper.
- Dobby a dit : ça suffit !
Il claqua des doigts et Drago s'écrasa le dos contre la muraille des remparts.
- Tu as osé lever la main sur moi ! hurla Malefoy. Maudite…
Dobby leva la main et Drago s'éleva dans les airs. Il cria d'autres insultes qui se perdirent dans le grondement de l'orage.
Dobby ne le reposa au sol que lorsque Malefoy se tut, haletant de peur, de froid et de colère.
§
Drago se recroquevilla contre le muret.
- Dobby, j'ai froid, dit-il en claquant des dents. Si je meurs, on te coupera la tête…
Dobby lui jeta un regard morne. Il claqua des doigts une troisième fois et une couverture apparut à quelques pas de Drago. Le sorcier dut tendre la main pour la saisir et s'en recouvrir. Il crut que la menace avait fait son effet ; il continua sur la même voie.
- Si tu m'ouvres la porte, quand le Seigneur des Ténèbres viendra prendre possession de ce château et de tout ce qu'il contient, je ne te punirai pas pour ce que tu as osé me faire.
- Drago Malefoy n'a pas le droit de punir Dobby…
- J'ai tous les droits, Dobby ! Tu es à moi ! Tu sers ma famille depuis des générations ! Ce n'est pas parce que Potter a usé d'un subterfuge pour te voler à nous que tu lui appartiens !
- Je n'appartiens pas à Harry Potter ! cria Dobby en se redressant brusquement. Je suis un elfe libre. Personne ne me donnera d'ordres. Et je préfère mourir ce soir plutôt que de vivre encore sous les coups des méchants sorciers comme toi et ta famille.
§
Il se tut, encore stupéfait d'avoir levé le ton devant un Malefoy. La voix de Malefoy, s'éleva, grinçante et mauvaise :
- Alors ce soir, c'est moi qui réaliserai ton vœu le plus cher, Dobby… Je te tuerai de ma main, dès que le Seigneur des Ténèbres sera sorti de la Forêt où il est en train de mettre ton Harry Potter en pièces !
Dobby se tordit les mains, hésitant. Il jeta un long regard apeuré vers la Forêt.
- Va donc le rejoindre… se moqua Malefoy. Tu crois que tu pourras le sauver peut-être… ? En tous cas, ce n'est pas lui qui te sauvera, ni tous tes vauriens de congénères, ni même ces espèces de sous-sorciers qui peuplent cette misérable école… il n'est pas capable de se sauver lui-même… Va le rejoindre ! Va ! Ôte-toi de ma vue, répugnante créature ! Ou je te jette par-dessus les remparts…
Dobby serra les poings.
- Drago Malefoy n'a que du fiel à la bouche… des mensonges qui l'aveuglent lui-même… Dobby ne partira pas. Il va faire ce pourquoi il est né…
Il leva vers Drago un regard pour la première fois affranchi de toute peur. Une lueur s'alluma au fond de ses yeux écarquillés.
- Oui… continua-t-il d'une voix sourde. Dobby va veiller sur le dernier des Malefoy.
§
Drago Malefoy resserra la couverture sur ses épaules et se leva lentement. Il se tourna vers le parc et la Forêt. Derrière lui, il sentait Dobby aux aguets. L'Elfe tremblait, effrayé sans doute par les conséquences de ses actes. Il réalisait sans doute dans quelle folie il avait basculé. Il le supplierait lui-même de le punir quand il verrait s'évanouir tous ses espoirs. Dobby ! Libre ! Il fallait vraiment être aussi fou que ce vieux Dumbledore pour croire en toutes ces balivernes. Il n'y avait qu'un seul chemin. Il n'y avait qu'une seule règle. Ceux qui commandent. Et ceux qui servent.
Il resserra la couverture contre lui. Il n'y avait plus qu'à attendre. Pour voir se lever le jour de gloire de Drago Malefoy.
