Chapter 21 - Tête à tête
Hermione déglutit, les yeux écarquillés d'horreur. Lupin savait, sinon il n'aurait pas fait le déplacement jusqu'à chez elle à cette heure-ci. Il les soupçonnait, et il avait raison. La jeune femme sentit la main de Malefoy se serrer fermement autour de son avant bras, et elle quitta des yeux cette porte maudite pour les poser sur lui.
Légèrement plus pâle que d'habitude - ce qui constituait un exploit compte tenu de son teint translucide habituel -, il avait l'air au moins aussi inquiet qu'elle. Ils allaient devoir la jouer finement, et faire bonne figure alors que la même boule d'angoisse était en train de faire des bonds dans leurs gorges respectives.
"Tu vas devoir ouvrir, chuchota-t-il.
- Va dans la cuisine, répliqua-t-elle sur le même ton. S'il te trouve ici, ça va compliquer les choses.
- Non, je vais pas te laisser seule face à ce..."
Hermione plaqua une main autoritaire sur la bouche du blond, le forçant à se taire, et le fusilla du regard. Ils n'avaient pas de temps à perdre en discussions stériles. Il fallait parer au plus pressé, et en l'occurrence, il s'agissait de gérer la situation Lupin. Malefoy finit par abdiquer au bout de quelques secondes à la foudroyer du regard à son tour, et recula en silence vers la cuisine.
Il n'avait pas le choix, et il le savait.
"HERMIONE ? s'impatienta Lupin en cognant de nouveau le battant de la porte."
Elle respira un grand coup, et ouvrit la porte avec un air surpris plaqué au visage.
"Rémus ? Mais que fais-tu là ?"
Dans d'autres circonstances, elle se serait applaudie pour la justesse de son interprétation. Mais son moment d'auto-satisfaction fut bref, parce que le regard de l'homme planté face à elle n'augurait rien de bon. Droit comme un I, bras croisés devant sa poitrine, Rémus Lupin lui jetait un regard si chargé de rage et de mépris qu'elle dû résister pour ne pas refermer la porte et partir se rouler en boule dans son lit.
"Sois bien consciente que je préfèrerais être ailleurs, cingla son ancien leader."
Hermione déglutit avec difficulté, et puisa au plus profond de ses forces pour garder un visage impassible. Il la toisait avec un tel dégoût qu'elle sentit son estomac se tordre douloureusement. Elle réalisa qu'à cet instant, elle ne le reconnaissait pas, de la même manière qu'il ne semblait pas a reconnaître non plus. Ils étaient devenus des inconnus l'un pour l'autre. Comme s'ils n'avaient rien vécu ni partagé dans le passé. Deux êtres l'un en face de l'autre, l'un enragé et l'autre terrifiée. Et c'était tout.
"Que puis-je faire pour toi, Rémus ? reprit-elle d'une voix enrouée."
Elle se racla rapidement la gorge et haussa un sourcil, l'incitant à poursuivre.
"Je cherche à joindre Laura. Pods. Depuis hier. Elle a disparu."
Il avait abandonné une seconde son air revêche pour laisser place à une expression fuyante, voire gênée. Et Hermione réalisa qu'en venant ici, et en demandant des nouvelles de sa complice, il assertait officiellement qu'ils étaient proches, et qu'elle continuait à entretenir des relations avec lui, son ancien leader. Ce qui était hautement suspect. Il reconnaissait par sa simple venue qu'ils travaillaient ensemble, encore et toujours, que leurs rapports étaient si étroits qu'il remarquait sa disparition au bout de seulement 24 heures. Il trahissait leur secret. Et pour faire ça, il devait vraiment être inquiet.
A raison.
"Laura ? Pourquoi ? Elle ne travaille plus pour toi, Rémus, demanda innocemment Hermione."
Lupin semblait hésiter sur la réponse à apporter, si l'on en croyait les tics nerveux qui agitaient son visage. Ses yeux ne parvenaient pas à se poser quelque part, encore moins à regarder Hermione.
"J'ai besoin d'un de ses anciens dossiers, c'est assez urgent.
- Quel dossier ? rétorqua Hermione."
Elle enfonça ses mains moites dans ses poches et attendit. Elle s'en sortait bien. Ça lui demandait une énergie et une concentration démentielles, mais elle tenait le choc. Et si par dossier il entendait disque dur du groupe politique adverse, il allait pouvoir attendre longtemps.
Et la jeune femme sentit un frisson glacé lui parcourir l'échine lorsqu'elle réalisa le cynisme et le détachement dont elle était en train de faire preuve, face à un homme qui s'inquiétait sincèrement de la disparition de son amie. Amie, ou autre chose, dont elle avait participé à faire disparaître le corps dans une forêt.
"Peu importe, ça ne te regarde pas. Où est-elle ? Tu vas me le dire ! insista Lupin, de plus en plus agité.
- Je ne sais pas, mentit Hermione."
Sous terre, dans le parc du manoir Malefoy.
Elle secoua la tête pour faire taire l'horrible petite voix de sa culpabilité, et serra les poings au fond de ses poches. Il fallait qu'elle abrège cette conversation et qu'il fiche le camp dans les plus brefs délais, sans quoi elle allait fondre en larmes et demander pardon pour tous ses crimes.
"Comment ça, tu ne sais pas ? cracha Lupin, en avançant d'un pas vers elle."
Elle recula instinctivement, et entendit confusément de l'agitation dans sa cuisine. Malefoy ne pouvait pas débarquer maintenant. Il fallait qu'elle reprenne la situation en mains. Ce qui s'avérait compliqué face à Lupin. Ses yeux s'étaient rétrécis en deux minces fentes, et ses pupilles avaient pris une étrange forme... Voire une étrange couleur un peu jaunâtre.
Respire, Hermione Granger.
"Elle n'est pas venue au bureau, aujourd'hui... En réalité, ça fait un moment qu'elle travaille à l'extérieur, ou depuis chez elle. On ne fait que se croiser. Mais je lui dirai de te contacter, la prochaine fois que je la verrai..."
Hermione fut forcée de s'interrompre, ses côtes enserrant si fort ses poumons qu'elle se demanda si un craquement d'os brisés n'allait pas la trahir. Lupin la toisait de toute sa hauteur, une lueur menaçante au fond des orbites, les traits figés dans une expression de pure fureur.
"Je lui dirai... de t'écrire. Un hibou. Téléphone, ajouta-elle dans une confusion totale."
Lupin fronça les sourcils et plissa les yeux, sentant son hésitation et sa peur, et une lueur de colère passa dans ses yeux sombres. Il fit de nouveau un pas vers elle, la tête penchée sur un côté, et ouvrit légèrement la bouche. Ce qu'Hermione vit alors lui glaça le sang.
Les canines de Lupin dépassaient et chevauchaient un peu sa lèvre inférieure, chose qu'elle n'avait jamais vue auparavant. Un grondement contenu sembla monter du torse de son ancien professeur.
Elle battit des yeux à toute vitesse, horrifiée, comme si cela allait faire disparaître cette vision absolument terrifiante.
"Je... Rémus ? paniqua-t-elle avec une petite voix quasi inaudible."
Plus elle tremblait, et plus il semblait hors de lui. Il n'allait tout de même pas la mordre...?
Elle agrippa le montant de la porte, prête à la lui refermer dessus si jamais il lui venait l'idée saugrenue de l'attaquer.
L'instant était totalement absurde. Elle était terrifiée parce qu'elle avait peur de Rémus Lupin. Parce qu'il était un loup-garou. Alors qu'elle n'avait jamais, absolument jamais, eu le moindre doute quant à sa faculté à se contrôler. Elle n'avait jamais eu peur en sa présence. Il fallait dire qu'il n'avait encore jamais grondé en lui montrant ses canines.
"Où est-elle ? répéta-t-il lentement."
Elle ouvrit la bouche pour répondre, mais ses cordes vocales étaient trop écrasées par sa terreur pour émettre le moindre son. Elle ne parvint qu'à expirer un petit sifflement parfaitement ridicule. Hébétée, elle ne pouvait pas quitter des yeux les crocs de Rémus Lupin. Elle restait là, mi-fascinée mi-horrifiée, immobile dans l'encadrement de sa porte. Et lui la fixait, le visage parcouru de soubresauts. Il bougea subitement en avant et elle sursauta violemment, sans pour autant battre en retraite ou tenter de se protéger.
"On ne sait pas où elle est, Lupin, intervint la voix ferme et autoritaire de Malefoy, qui venait d'apparaître dans le dos d'Hermione."
Elle sentit sa main se poser dans le creux de ses reins, ce qui eu le mérite de la réveiller. Elle referma la bouche et se remit à respirer de façon désordonnée, à présent réellement terrorisée. Il avait failli l'attaquer. Elle l'avait perçu de manière limpide. Elle s'était sentie comme une proie pendant quelques secondes, et n'avait même pas eu le réflexe de se mettre en sécurité. Comme si son cerveau refusait d'admettre que Rémus Lupin puisse lui faire du mal. Comme si l'individu en face d'elle était incapable de la blesser, alors que tous les signaux étaient au rouge.
D'ailleurs, maintenant que Drago était là, l'atmosphère avait changé. Lupin avait reculé d'un pas, il avait fermé la bouche, ses pupilles avaient repris leur couleur et leur forme habituelles. Comme s'il ne s'était rien passé. En une fraction de seconde, il avait repris une apparence normale - celle d'un homme en colère et menaçant, mais celle d'un homme quand même. Pas d'un animal sauvage.
"Bonne soirée, Lupin, reprit Drago en se positionnant devant Hermione, lui bloquant la vue sur Lupin.
- Qu'est-ce que vous lui avez fait ! rugit l'intéressé. Je SAIS qu'elle était à vos bureaux hier soir !"
Les yeux vissés au dos du blond, Hermione le vit se tendre imperceptiblement. Sa nuque se redressa. Sans le voir, elle était prête à parier qu'il avait plissé les yeux et pincé les lèvres.
"Ah ? Et bien, nous n'y étions pas. Je vais faire comme si c'était normal qu'un adversaire politique connaisse nos allées et venues dans nos propres bureaux, et cette conversation va s'arrêter ici. Bonne soirée, Lupin, répéta Drago avec un ton sans appel.
- Ça ne va pas s'arrêter ici, non ! répliqua Lupin. OU EST-ELLE, PAR MERLIN ?
- Baissez votre main, Lupin, ordonna Malefoy en se redressant encore davantage. Et baissez d'un ton, aussi."
Agacée de ne rien voir, Hermione tenta de se décaler mais le bras que Drago tendit en arrière l'en empêcha. Il lui bloqua le passage et ne relâcha pas sa prise, maintenant fermement le poignet de la jeune femme derrière son dos. Coincée, elle se résolut à attendre puisque la situation était suffisamment crispée comme ça. Elle n'allait tout de même pas se débattre alors qu'il tentait juste de s'interposer entre elle et un homme clairement menaçant. Le silence s'installa, à couper au couteau. Aucun d'eux ne bougeait d'un pouce. C'était une véritable poudrière, prête à s'embraser à tout instant.
Après une minute interminable, Lupin reprit la parole :
"Ce n'est pas terminé, les menaça-t-il avant de tourner les talons dans un crissement."
Drago claqua immédiatement la porte, la verrouilla, et se passa une main dans les cheveux, où il la laissa. Il se retourna pour faire face à la jeune femme, une expression vraiment concernée lui barrant le front.
"Je rêve, où il était à deux doigts de t'attaquer ? demanda-t-il d'une voix blanche."
Même lui n'avait pas l'air d'y croire. Lupin avait beau être un drôle de personnage, et un ennemi historique de sa famille et des Serpentards en général, il restait un ancien professeur qu'il jugeait compétent, et un adversaire politique globalement digne de l'affronter. Alors ça... Cette attitude sauvage et menaçante ! Un instant, il s'était vu adolescent, au manoir, quelques années auparavant, glacé d'effroi face à un Greyback sanguinaire.
Hermione était toujours hébétée, et regardait la porte comme si toute cette scène n'avait pas pu se produire.
Drago posa une main sur son épaule et la pressa gentiment pour la ramener à la réalité. Elle leva les yeux vers lui, et se perdit un instant dans son regard gris.
"Je... Je crois que oui. Il... Drago, je crois qu'il perd vraiment l'esprit... bafouilla la jeune femme, effarée."
Sentant sa détresse, le blond n'y réfléchit pas à deux fois et l'attira brusquement vers lui pour la plaquer contre son torse, et referma ses bras autour de son petit corps tremblant. Il ne pouvait pas tolérer de la voir, elle, être effrayée. C'était inconcevable qu'un tel roc se mette à trembler. Il raffermit sa prise et la sentit se détendre petit à petit, jusqu'à ce qu'elle laisse son front reposer juste en dessous de son cou.
Ils restèrent enlacés quelques minutes, en silence, écoutant la respiration de l'autre. Pressée contre son torse, Hermione écoutait les battements réguliers du cœur de Drago s'espacer peu à peu, jusqu'à reprendre un rythme normal. Puis Hermione recula, bafouilla, trébucha sur son propre pied et se racla la gorge. Elle était complètement dépassée par les évènements. Ils en étaient là, alors, à se câliner ?
"Désolée... Euh... Merci...? Tu veux... du thé ? débita-t-elle en battant en retraite vers sa cuisine."
Drago esquissa un sourire en coin. La voir gênée et rougissante lui plaisait beaucoup. Lui, Drago Malefoy, avait le pouvoir de déstabiliser la Gryffondor, ce qui n'était pas donné à tout le monde. Même sous la menace d'un loup-garou qui menaçait de la dénoncer - et accessoirement de la mordre - elle ne bafouillait pas autant.
"Volontiers, répondit-il en lui emboitant le pas."
Il s'appuya nonchalamment contre le bar, prenant appui sur ses coudes, et la regarda s'agiter pour préparer son thé. Elle cogna la bouilloire, dû s'y reprendre à deux fois pour parvenir à allumer le gaz, et renversa un peu de feuilles de thé sur les côtés du sachet. Il ne savait pas s'il devait imputer ses gestes anarchiques à sa confrontation avec un loup-garou, ou à leur rapprochement physique. Probablement un peu des deux. Avec Granger, on ne savait pas très bien ; est-ce qu'elle était plus inquiète à l'idée de livrer une bataille sanglante, ou de ressentir une quelconque émotion ?
"Arrête de me regarder comme ça, je vais parfaitement bien, le houspilla Hermione en lui lançant brusquement une petite cuillère."
Le couvert en métal glissa dans un bruit strident sur le bar, et heurta le coude du blond, qui suivi sa trajectoire avant de hausser un sourcil circonspect.
"Inutile de m'attaquer à coup de cuillère, Granger. Contente-toi de me servir un thé."
Une soucoupe en porcelaine, issue du service à thé de la grand-mère d'Hermione, percuta à son tour son coude. Elle le fusillait du regard - Hermione, pas la soucoupe -, ce qui était une nette amélioration. Il la préférait en colère qu'apeurée.
"Le service laisse à désirer, grogna Malefoy en pointant sa petite cuillère en direction de la Gryffondor, qui leva les yeux au ciel.
- Je sais que tu es habitué à te faire servir, mais ne compte pas sur moi pour te faire des courbettes, lord Malefoy, répliqua-t-elle en ouvrant son frigo pour y trouver du lait.
- Oh tu sais, pour ce qu'il reste de mon rang... Je pourrais tout aussi bien vivre dans un carton devant Kings Cross, gloussa Malefoy. Je suis sûr que dans ces conditions, tu serais ravie de te courber devant moi pour me donner une pièce. C'est un truc de Gryffondor, la charité."
Indignée, Hermione planta ses poings sur ses hanches.
"Je ne sais pas ce qui m'énerve le plus. Que tu prétendes être un miséreux ou que tu dédaignes la charité. Tu es conscient que c'est incohérent ?
- Je suis un miséreux. Je n'ai plus de manoir, je te signale.
- Tu as un penthouse et un loft immense dans les quartiers les plus chers de Londres, du personnel, et je suis sûre que tout ça n'est que la partie émergée de l'iceberg... réfuta Hermione. Et puis, à qui appartient le manoir s'il n'est plus à toi ?
- Au ministère. Il a été saisi pour réparations après la guerre, répondit Drago en tapotant distraitement le bar du bout de sa cuillère. Il devait servir à dédommager les victimes, ou quelque chose dans ce goût là. Mais il tombe en ruines, alors je suppose que le ministère a juste voulu nous punir en mettant la main sur une propriété symbolique."
Pensive, Hermione hocha la tête. Elle ignorait tout de cette situation. Pourquoi le ministère n'avait pas cherché à vendre le manoir pour dégager des fonds, ou à le réhabiliter ? En l'état, il perdait de l'argent. Puis une pensée terrible la frappa de plein fouet.
"Mais... Malefoy... Tu veux dire qu'on a enterré un cadavre dans une propriété du ministère ?!"
Le blond s'autorisa un demi-sourire goguenard. C'était sa petite victoire, qu'il ne pourrait jamais revendiquer. Ils lui avaient pris son héritage familial, il y avait camouflé un crime. Il allait leur être difficile d'expliquer la présence d'un corps carbonisé s'ils parvenaient un jour à le découvrir.
"C'est... c'est incroyablement dangereux, on était en plus en train de pénétrer dans une propriété de l'état sans aucune autorisation... Tu ne crois pas qu'on a assez d'infractions au Code de sorcellerie à se reprocher ? pesta Hermione.
- Ils ne savent pas que quelqu'un sans accréditation ministérielle peut rentrer dans la propriété. Théoriquement, c'est impossible. Notre présence au manoir cette nuit là est donc également impossible, rétorqua Drago avec un air très sûr de son fait.
- Comment on est entrés, alors ? reprit Hermione."
Sa curiosité l'emportait sur les reproches qu'elle aurait souhaité formuler. Malefoy ne faisait rien au hasard, il était évident que dès l'instant où il avait suggéré d'aller se débarrasser du corps au manoir, il avait déjà un plan bien précis en tête.
"Le ministère ne sait rien de la magie qui coule dans les murs et l'enceinte du domaine depuis des siècles. On ne peut pas priver un héritier de sang de l'accès à ce qui lui appartient. Leurs titres de propriétés et leurs jugements n'y changent rien. Ils auront beau protéger le manoir des intrusions, je pourrai toujours y entrer, sans laisser aucune trace dans leurs registres de sécurité. Et comme tu étais avec moi...
- Comment ça fonctionne ? En terme de magie, je veux dire... Comment le manoir sait que tu es toi, et que tu es autorisé à entrer ?"
Les yeux brillants d'excitation, Hermione était à deux doigts d'attraper son carnet et de prendre des notes. Elle avait beau être un puits de savoir en termes de magie, un pan de cette dernière continuerait toujours à lui échapper ; la magie ancestrale, les enchantements qui confinaient parfois à la magie noire, restaient hors de sa portée. D'abord parce que tout cet univers était frappé du sceau du tabou, d'autant plus après les deux guerres qui avaient secoué la communauté sorcière, et ensuite parce qu'elle-même ressentait une certaine répulsion à s'y intéresser. Or, dans ce cas précis, les applications de la magie n'étaient pas foncièrement mauvaises. Elle assurait simplement aux descendants d'une famille de conserver leurs droits sur une propriété.
"Je ne sais pas exactement comment ça marche, Granger. Je pense que ça a à voir avec le sang, au sens strict. Mon père et mon grand-père pouvaient user de ce droit, comme moi. Mais ni ma mère ni ma grand-mère ne le pouvaient. L'alliance par le mariage ne compte pas.
- Que les héritiers mâles ? demanda Hermione en fronçant le nez, déjà moins convaincue du bien fondé de ces enchantements mystérieux.
- Non, si j'avais eu une sœur ça aurait fonctionné de la même façon, je suppose... Mais ce n'est pas exactement une tradition d'avoir plusieurs héritiers dans nos familles. Un seul descendant, ça évite de diviser les richesses au moment de la succession, on concentre le pouvoir, expliqua Malefoy, un peu étonné qu'elle se renseigne autant sur les pratiques des Sangs purs."
La jeune femme hocha la tête, perdue dans ses pensées.
"Donc, si le ministère met la main sur ce corps... Ils ne pourront pas nous soupçonner. Je veux dire... Ils penseront nécessairement que seul l'un des leurs a pu pénétrer dans le parc."
Malefoy hocha la tête, se demandant où elle voulait en venir.
"Si jamais l'enquête se rapproche trop de nous... Il nous suffira de leur indiquer discrètement où chercher. On sera écartés de la liste des suspects, non ?"
Un sourire fugace passa sur les lèvres du blond. Voilà où elle voulait en venir.
"C'est un peu risqué de leur donner le cadavre... temporisa-t-il.
- Peut-être. Mais si on en arrive là... ça sera peut-être notre planche de salut."
Elle leur servit enfin leurs tasses de thé, et grimpa sur la tabouret de bar à côté de lui. Elle souffla doucement sur le breuvage fumant. Drago regarda son profil inquiet, s'attarda sur son petit nez retroussé, les tâches de rousseur sur ses pommettes, ses yeux noisette un peu cernés de noir.
"Tu penses qu'ils vont nous soupçonner."
Comme ça ressemblait plus à une affirmation qu'à une question, Hermione tourna la tête vers lui.
"C'est inévitable, non ?"
Drago lui rendit son regard résigné. Pendant quelques secondes, aucun d'eux ne parla. Puis le blond tendit sa main vers elle, sans trop savoir ce qu'il comptait en faire, et la posa gentiment sur sa cuisse. Il imprima une petite pression à son mouvement, et elle ne se dégagea pas. Elle lui lança un petit sourire triste, et posa sa main par-dessus celle du blond.
"Il faut qu'on se prépare à ce qui va suivre, finit par lâcher Malefoy sans la quitter des yeux.
- Si on s'en tient tous à notre version, tout ira bien, décréta Hermione comme pour s'en convaincre.
- Je ne m'inquiète ni de toi, ni de Blaise, ni de Théo. Mais Pansy... Elle peut craquer sous la pression, tout avouer en pensant nous protéger, et on plongera tous, souffla Malefoy en secouant la tête. Elle est rongée par la culpabilité. elle a dit à Théo... Elle lui a dit qu'elle ne voulait pas nous entraîner dans sa chute.
- Il faut qu'on l'écarte, réalisa Hermione."
Drago fronça les sourcils, et se tendit sur son tabouret.
"Comment ça ? grinça-t-il d'une voix rocailleuse.
- On pourrait l'envoyer en voyage à l'étranger. Ça nous fera juste gagner du temps, si ça se complique les aurors la convoqueront malgré tout... Mais au moins, elle sera à l'abri pour les premiers interrogatoires.
- Oh, dit Drago, se sentant soudainement un peu idiot.
- Quoi, Oh...? Tu ne pensais tout de même pas sérieusement que j'allais suggérer de lui faire du mal...? gémit Hermione en se tendant à son tour.
- Non, mentit Drago avec aplomb."
Si Pansy n'avait pas été Pansy, il aurait lui-même pu émettre l'idée de la contraindre au silence en employant des moyens plus ou moins légaux. Chantage, pression, coercition, toutes les options auraient été sur la table. Mais il s'agissait de sa Pansy. Et s'ils en étaient là, c'est parce qu'ils l'aimaient tous suffisamment pour l'aider à couvrir un meurtre.
"Elle ne va pas vouloir partir, avec l'organisation du gala... songea-t-il pour faire dévier la conversation au-delà du malaise.
- C'est dans six semaines ! Et puis tout est en route, on a dispatché toutes les tâches... Elle peut tout à fait s'absenter, répliqua Hermione en faisant défiler des informations sur l'écran de son téléphone."
Drago l'observa d'un air dubitatif. Était-ce vraiment le moment de le snober pour scroller comme une hystérique sur son smartphone ? Ils étaient en train d'avoir une conversation. Et elle tenait toujours fermement sa main, posée sur sa cuisse, ce qui l'obligeait à faire défiler le texte un peu maladroitement.
"Ah, voilà, j'ai trouvé ! triompha-t-elle. Je savais bien que Pansy avait mentionné un congrès international sur l'égalité des sexes. Ça commence dans trois jours, à La Havane.
- Tu veux envoyer Pansy à Cuba ? C'est quoi, ce congrès ? s'enquit-il en se penchant pour lire lui aussi sur l'écran.
- C'est très bien Cuba ! Sable chaud, mojitos, lutte sociale, c'est parfait pour Pansy. C'est le premier congrès sorcier mondial sur le sujet, de nombreux dirigeants sorciers seront là, avec des intellectuels, des économistes, des sociologues, des chefs d'entreprise...
- De toute façon, même si les circonstances avaient été différentes, ça aurait été important que l'un d'entre nous y participe. Et Pansy est toute désignée, conclut Drago en dégainant son propre téléphone.
- Qu'est-ce que tu fais ? s'étonna Hermione. J'ai même pas fini de t'expliquer...
- Pas besoin. Je préviens Pansy.
- Mais... balbutia Hermione, larguée au bord de l'autoroute par une Dragomobile clairement en excès de vitesse.
- Hestia va partir avec elle, ça lui fera du bien de prendre un peu de recul après tout ça. Et puis Cormac aussi, tiens. Il pourra sauter des cubaines plutôt que des Conservatrices, ça nous évitera bien des ennuis. Je vais demander à la secrétaire de réserver un hôtel et des portoloins. Peut-être que Théo pourra envoyer un journaliste de sa chaîne pour faire un reportage sur eux, ça sera bien pour notre image."
La mâchoire inférieure à deux doigts de se décrocher, Hermione pressa vigoureusement les doigts de Malefoy pour arrêter sa course en avant infernale. Il lui jeta un regard surpris, accompagné d'une petite grimace de douleur.
"Tu veux aller avec eux à Cuba ? supposa-t-il.
- Quoi ? Bien sûr que non ! s'offusqua la jeune femme, alors que des images de sable blanc et d'eau turquoise défilaient devant ses yeux. Mais pourquoi tu te précipites ?"
Drago continua à pianoter sur son écran en haussant les épaules.
"On n'a pas tellement de marge de manœuvre, Granger. On ne contrôle plus grand chose. Alors autant anticiper les catastrophes imminentes si on le peut.
- Vu comme ça... Hum, Drago... Il y a autre chose dont il faudrait qu'on parle, lança Hermione sans oser le regarder."
Elle entendit le bruit d'un téléphone posé sur une surface plane, signe qu'elle avait à présent toute son attention. Elle lâcha sa main pour se masser le tempes, et sentit sa main à lui se retirer, laissant une impression de froid à l'endroit où elle se trouvait.
"C'est Harry, avoua-t-elle.
- Que vient faire Potter dans cette histoire ? grogna Drago, qui ne s'attendait absolument pas à ce sujet-là.
- Il sait que Laura était une taupe, et qu'elle bossait avec Lupin. Il va rapidement faire le rapprochement entre sa disparition et notre groupe...
- Il ne va quand même pas te suspecter d'avoir... quoi, tué ta collègue et amie ? Potter n'est pas cinglé, il te connait...
- S'il ne me suspecte pas moi, il peut vous soupçonner vous... Et en plus, comme tu dis il me connaît, et s'il m'interroge il sentira forcément que je cache quelque chose...
- Granger, est-ce que tu es en train d'essayer de me dire qu'on va tous finir à Azkaban ? grimaça Malefoy."
La jeune femme se mordit la lèvre, sans savoir quoi répondre sans les plonger immédiatement tous les deux dans une dépression intense et permanente. Ils étaient en sursis, et il suffisait d'une minuscule petite faille dans leurs mensonges pour qu'ils soient rattrapés par la réalité de la situation. Sur le moment, au milieu de tout ce sang et de Pansy en larmes, il avait été évident qu'il fallait l'aider. Et que faire disparaître le corps était la seule solution, aussi immorale et mauvaise soit-elle.
Hermione aimait l'ordre, la loi et la justice. Elle obéissait aux règles sans se poser de questions. Elle ne déviait jamais, ne trichait pas, ne doublait pas dans les files d'attente, remplissait ses documents administratifs avec une minutie qui frôlait la pathologie, et jamais, Ô grand jamais, elle n'aurait imaginé se retrouver un jour de l'autre côté de la barrière. Avec les criminels, les menteurs, les bandits de grand chemin. Parce que c'est exactement ce qu'ils étaient, à présent. Quelles que soient les justifications à leur geste, ils avaient camouflé un meurtre en disparition. Ils avaient détruit la scène de crime et disséminé des fausses pistes. Et ça... Jamais personne ne le leur pardonnerait si cela se savait.
"Tu te sens coupable ? demanda Drago, qui voyait bien qu'elle était en train de se flétrir comme une fleur fanée.
- Bien sûr ! répondit-elle immédiatement. Pas toi ?
- Je ne me sens jamais coupable, c'est du gaspillage. Je ne regrette pas ce qu'on a fait, et c'est la seule chose qui compte, murmura le blond avec une moue difficile à interpréter. On devait le faire. Alors, les problèmes de conscience... C'est à mettre au second plan. On a fait ce qui devait être fait."
Hermione se mordit de nouveau la lèvre, et observa le blond attentivement. Il parlait d'expérience, c'était évident. Comme quelqu'un qui aurait fait des choses qu'il réprouvait mais ne pouvait pas éviter. Comme quelqu'un à qui on avait forcé la main. Et qui en avait souffert.
"Si tu n'avais pas débarqué en pleine nuit au penthouse, tu n'aurais pas eu à faire tout ça, à nous aider, à porter ce poids, ajouta-t-il."
Une ombre passa dans son regard.
"Qu'est-ce que tu faisais là, d'ailleurs ?"
Oh, rien, je te cherchais toi, pour te sauter dessus comme une écervelée. Hermione replaça une mèche de cheveux qui tombait devant ses yeux pour réfléchir à une réponse plus adéquate.
"Je... J'avais juste oublié un dossier en cours."
Ce qui n'était pas tout à fait faux. Le dossier Malefoy était urgent, et en cours.
Et ledit dossier était encore en train de l'épier, avec la tête de celui-qui-n'était-pas-dupe. Elle se sentit rosir et résista, pour la seconde fois de la soirée, à courir se rouler en boule dans son lit. A la place, elle opta pour une stratégie de contournement.
"Si je n'avais pas été là, vous auriez probablement fait léviter un corps en pleine rue, laissé des traces de sang partout et à l'heure où on se parle, Pansy serait derrière les barreaux. Heureusement que je passais dans le coin, reprit Hermione avec une tentative de sourire sarcastique."
Il hocha la tête, une expression sérieuse animant ses traits.
"C'est probablement vrai. Tu sais... Ne le prends pas mal, mais je ne pensais pas que tu allais prendre le train du crime en marche, comme ça. Sans protester plus que ça. Sans essayer de nous forcer la main pour qu'on se dénonce. Qu'est-ce qui t'a décidée à nous aider ? Je veux dire... On travaille ensemble depuis peu de temps, en définitive. On en est pas encore au stade du "je ferais disparaitre un corps pour toi", comme tu pourrais le faire pour Potter ou Weasley... Quoique Weasley ne tuerait pas quelqu'un exprès, ce serait probablement un accident ridicule du genre il aurait glissé sur une feuille et aurait malencontreusement écrasé une personne âgée. Bref. Euh... Pourquoi t'as pris l'initiative, au lieu de juste tourner les talons et rentrer chez toi ? C'était facile, et tu savais qu'on t'aurait laissée partir..."
Hermione reposa sa tasse vide devant elle et descendit de son tabouret. Elle s'apprêtait à aller la laver, ce qui lui donnait - encore une fois - l'occasion de ne pas regarder Malefoy tout en lui parlant. Elle avait besoin de s'occuper les mains et l'esprit, et de ne surtout pas se livrer à lui en lui répondant. Yeux dans les yeux, trop proches, c'était un risque de perdre un contrôle déjà fragile.
Mais la main du blond s'abattit sans ménagement sur son avant-bras et il stoppa net sa tentative de fuite. Puis il lui redressa le menton de l'index, avec plus de douceur que ne le laissait présager son mouvement précédent.
"Granger. C'était maladroit, ce que j'ai dit. Sur le moment, quand je t'ai vue au milieu de ce carnage, ça m'a rassuré. C'est égoïste, parce que ça voulait dire que toi aussi t'étais dans la merde... Mais je savais déjà que tu allais prendre les choses en main. Ça m'a semblé parfaitement normal que tu nous aides, je savais que tu allais le faire, mais je ne saurais pas l'expliquer même maintenant. Appelle ça une intuition... J'en sais rien. Je t'ai vue, et j'ai vu comment tu regardais Pansy. Quand tu as commencé à nous dire ce qu'on devait faire, je n'ai pas été surpris. Ce n'est qu'après, je me suis dit... Que tu étais loyale et courageuse et dévouée, mais que tu respectais la loi par-dessus tout. Et tu as mis tes convictions de côté. Pourquoi ?"
La soudaine proximité avec lui, ses yeux perçants qui la fixaient avec un air vraiment concerné, sa main sous son visage, ses questions précises et ce qu'il disait d'elle... Hermione se sentit faiblir et ses jambes devinrent subitement molles, alors que paradoxalement son ventre bondissait dans tous les sens. Drago ne parlait jamais beaucoup à la fois. Il n'était pas du genre à s'exprimer en tirades, encore moins à justifier son propre comportement ou à questionner les émotions des autres. Elle déglutit. Il ne la lâchait pas, elle était comme une biche éblouie par des phares qui lui fonçaient dessus à pleine vitesse. Le problème, c'est que contrairement à la biche, elle avait plus envie de se faire percuter que de sauver sa peau. Et surtout... Surtout, elle ne savait absolument pas comment répondre à ses questions. Elle n'avait aucune sorte de réponse logique à lui fournir.
"Vous aviez besoin de moi, dit-elle d'une petite voix. Je ne sais pas pourquoi j'ai accepté ça. Ça m'a semblé naturel."
Il hocha la tête, l'encourageant à poursuivre. Elle se sentit rougir jusqu'à la racine des cheveux.
"Pansy était dévastée, c'est Laura qui avait attaqué, et c'était un accident... Personne n'a souhaité ce bain de sang. Et tout ça, ça n'aurait pas pesé lourd pour les aurors. Avec l'adrénaline, et le choc, et vous tous qui étiez sûrs de suivre le bon chemin... J'imagine que j'ai agi par réflexe de survie. Je me sens coupable oui, bien sûr, mais surtout parce qu'on aurait pu éviter tout ça, et que tout ce qu'on a fait, c'est essayer de réparer les dégâts. Pansy ne se serait pas retrouvée à devoir se battre avec Laura pour un disque dur si on l'avait virée avant.
- En fait, t'es en train de dire que c'est de ma faute, tout ça, résuma Malefoy en laissant retomber ses bras de long de son corps."
Interdite, Hermione fronça les sourcils. Il la regardait comme si elle venait de lui asséner une droite en plein visage, alors que ce n'était pas du tout l'intention de la Gryffondor. Loin de là.
"Absolument pas, Drago.
- Si. Et tu as raison. J'ai pris que des mauvaises décisions. C'est moi qui ai insisté pour qu'on laisse Laura faire, parce que je pensais qu'on pouvait en tirer un avantage. C'est moi qui n'ai rien vu pendant toutes ces semaines. Ces probablement moi qui ai provoqué tout ça, parce que j'ai oublié qu'elle et moi, on se connaissait déjà. C'est ma faute."
Il descendit de son tabouret, tendu comme un arc, et furieux. Il se rua sur son manteau, et le balança sur ses épaules d'un geste vif.
"Je suis le leader le plus incompétent de toute l'histoire de la politique, conclut-il."
Cette fois, ce fut Hermione qui lui attrapa fermement l'avant-bras. C'était le seul moyen de l'immobiliser pour lui faire entendre raison. Parce que là, en un instant, il avait perdu le contrôle. Et voir le blond aussi bouleversé, ça lui brisait le cœur. Drago Malefoy était impassible, c'était un roc, et il ne tremblait pas, Hermione en était persuadée.
"Tu dis n'importe quoi, Malefoy ! s'écria-t-elle. T'es resté calme du début à la fin, tu n'as pris aucune décision à la légère, et tu as guidé tout le monde correctement à chaque crise. Ils ont tous foi en toi, ils savent que tu assures leurs arrières, et ce malgré toutes les turbulences. C'est pour toi, qu'ils ont quitté leurs groupes et qu'ils sont venus te rejoindre. Parce qu'ils croient en tes capacités à changer les choses. Ils t'écoutent, ils te suivent, et pour ce qui est de Laura, j'étais d'accord avec toi. Je suis aussi responsable que toi de ce fiasco. Aucun de nous ne l'a vue arriver. C'est pas le moment de craquer et de remettre en questions ta position de leader. Moi, je te fais confiance."
Impossible de savoir ce qui, dans les mots de la jeune femme, déclencha quelque chose chez Drago. Le fait est que, brusquement, il bondit en avant, l'attrapa par la taille avec fermeté et la plaqua contre le mur du salon. Elle émit un petit bruit, plus par surprise que par douleur, et plongea ses yeux dans les orbites fiévreuses du Serpentard. La biche venait de se faire percuter.
Et puis, avant qu'il ne puisse se ressaisir, et éventuellement reculer, ce fut Hermione qui amorça le mouvement. Elle pressa ses lèvres contre celles du blond dans un geste brusque, et instinctif. Il répondit immédiatement à son baiser, et leurs bouches se mirent à se mouvoir de manière sauvage et désordonnée. Très vite, Hermione enroula ses mains autour de son cou, et entre deux râles et grognements, Drago la plaqua un peu plus contre le mur. Leurs langues se livraient une bataille sans merci, à tel point que leurs dents s'entrechoquèrent dans un bruit mat. Mais, au lieu de les freiner, ça ne fit que renforcer l'intensité de l'instant. Hermione tira les cheveux de Drago pour rapprocher encore plus son visage du sien, il répondit en lui mordant la lèvre inférieure. Elle se défendit en remontant une de ses jambes entre les siennes, et il enfonça ses doigts dans la peau de ses hanches, dans un geste possessif qui leur arracha à tous les deux un soupir.
La situation était totalement hors de contrôle, mais ils s'en fichaient totalement. La tension n'avait fait que croître entre eux depuis des semaines, et il était temps de la libérer.
A bout de souffle, Hermione repoussa un peu Drago, et lui adressa deux yeux écarquillés. Il avait les lèvres un peu gonflées et les pupilles dilatées, ce qui rendait l'éventualité de tout stopper là impossible.
"Je suis officiellement le pire leader de la terre, maintenant, lâcha le blond avant de replonger vers les lèvres de la jeune femme."
Elle gémit lorsqu'il glissa de nouveau sa langue entre ses lèvres, et le serra contre elle de toutes ses forces. Elle avait chaud, atrocement chaud, elle s'agitait comme une démente dans le maigre espace qui restait entre le mur et le corps de Drago. Pour la première fois depuis ce qui lui semblait des siècles, elle se sentait en sécurité. Elle aurait probablement basculé au sol devant la foule de sensations qui arrivaient par vague et la faisaient trembler, si Malefoy n'avait pas décidé de la maintenir fermement debout.
"Ça va ? demanda-t-il dans un souffle en reculant son visage de quelques centimètres.
- Euh... Très bien. Et toi ? bafouilla-t-elle, essoufflée et écarlate."
Était-ce vraiment le moment d'avoir une conversation courtoise ? Il esquissa un sourire en coin, et s'approcha pour l'embrasser avec douceur, et une lenteur qui la fit littéralement fondre. Il exerçait une pression mesurée, effleurait, reculait, caressait. C'était tellement agréable qu'elle aurait pu en mourir.
"Moi aussi, je vais bien, lâcha-t-il en cognant doucement son nez contre celui de la Gryffondor, comme l'aurait fait un chat."
Elle pouffa, et tenta de réorganiser les cheveux blonds qu'elle avait ébouriffés. Il était mignon. Et sexy. Et elle avait encore envie de l'embrasser. Le regard qu'elle lança aux lèvres du jeune homme n'échappa pas à ce dernier, qui s'autorisa de nouveau un petit sourire.
"C'était quoi, ça ? sursauta Hermione.
- Euh... Je souris ? Parce que je suis content ? tenta le blond, étonné de devoir fournir une explication quant à sa joie.
- Non, le bruit. Oh, ça recommence ! s'inquiéta la jeune femme en tordant le cou pour voir derrière Drago."
Il se retourna, tendant l'oreille. Un hibou était en train d'essayer de perforer la fenêtre du salon avec son bec, ce qui résultait en un bruit parfaitement irritant. Ce maudit volatile était en train d'interrompre leur moment. Il l'aurait bien étranglé, mais il ne pouvait pas commettre autant de crimes en une seule et même semaine.
"C'est Edwige ! réalisa soudain Hermione, qui lui échappa."
Forcément, Potter et son maudit hibou étaient responsables de cette interruption. Il fallait toujours qu'il ruine tout, celui-là. Hermione se précipita vers la fenêtre, et Edwige se posa tranquillement sur son bras tendu.
"Je me demande ce qu'il veut, à cette heure-ci...
- Faire l'intéressant, comme d'habitude, maugréa Drago dans sa barbe."
Elle déroula la missive, anxieuse.
"Oh, dit-elle après quelques secondes.
- Quoi, Oh ? râla le blond en s'avançant vers elle.
- Lupin vient de débarquer chez lui en vociférant. Il nous accuse d'avoir kidnappé Laura et a demandé à Harry de lancer une enquête..."
(Oui, je sais, Edwige devrait être morte mais j'ai décidé que c'était trop triste, donc elle est là.)
(Oui, je sais aussi, je suis en retard, mais nous dirons que c'est dans l'esprit de cette grève générale : les auteurs de fanfiction aussi ont le droit de se mettre en grève. Pas sûr que Drago apprécie, cela dit...)
BREF, voilà, enfin ils se sont embrassés ! Au milieu d'un petit chaos, certes, mais c'est arrivé. Et ils ont bien fait parce que, clairement, la tempête arrive. Finalement il ne se passe pas grand chose dans ce chapitre, mais je trouvais ça important qu'ils aient une vraie discussion sur leurs motivations respectives. Et que Drago parle un peu de sa vie perso, parce que si on sait ce qu'il en est pour Hermione, lui ça restait assez obscur.
Quant à Lupin, j'espère que ces fidèles supporters (dont je fais partie dans le canon, hein) ne m'en voudront pas. Il me fait un peu peur à moi aussi, maintenant.
A bientôt, chèr(e)s lecteur(trice)s 3
