Chapter 22 - Danger(s)
"Lupin est allé chez un auror pour nous accuser, répéta Drago, hébété. Ça ne sent pas très bon..."
Il se laissa tomber en arrière sur le canapé d'Hermione, et colla son poing devant sa bouche pour s'empêcher de cogner quelque chose. Il maîtrisait bien mieux ses instincts agressifs que quand il était adolescent, mais il était bien conscient qu'il restait en lui un fond de violence explosif - et il se devait de l'enfouir.
"Tu peux carrément dire que ÇA PUE, s'exclama la jeune femme en jetant la lettre d'Harry sur la table basse, où elle se posa en voletant tranquillement, inconsciente de la bombe qu'elle portait.
- Il en dit quoi, Potter ?"
Hermione se pencha pour ramasser la lettre avec précautions, comme si elle risquait de la brûler au troisième degré.
"Je vais te la lire... Alors... Mione, Lupin a déboulé chez nous, il prétend que vous avez kidnappé Pods. Il était hors de lui, limite en pleine crise de nerf, en fait il criait tellement qu'il a réveillé Dahlia. Pods a vraiment disparu ? Quoi qu'il en soit, je lui ai dit de venir au ministère demain, à une heure décente, pour signaler une disparition inquiétante. Et j'ai ajouté qu'il ne pouvait pas accuser quelqu'un sans preuve. Surtout que bon, on sait tous les deux qu'il n'est pas tout blanc dans cette affaire, avec tout cette histoire de taupe et d'espionnage. On verra bien s'il se pointe demain ou s'il se sera calmé. On se voit demain soir, de toute façon. Oh, Dahlia ! Je dois la garder demain soir. Ça veut dire que je dois aussi voir Harry."
Hermione s'effondra à son tour dans le canapé, écrasée par le poids de l'angoisse. Quelques secondes auparavant, tout allait bien. Plus que bien, même. C'était idyllique. Si on omettait le fait qu'ils avaient tué quelqu'un, évidemment.
Et maintenant, on allait enquêter sur eux, les épier, les interroger, fouiller leurs vies pour les coincer. Le groupe des Non-alignés, dans sa totalité, allait être convoqué. Ca allait être officiel, et extrêmement public. Ils allaient de nouveau faire la Une. Et c'est Harry qui allait mener l'enquête.
"Lupin passe juste pour un fou, qui accuse un groupe politique qu'il déteste. C'est de notoriété publique qu'il me hait. Ça ne rend pas ses allégations très crédibles, marmonna Drago pour se rassurer. En plus, techniquement, ni toi ni moi n'avons kidnappé, ou tué Laura.
- C'est vrai... murmura Hermione en regardant fixement devant elle. Mais ça va déclencher l'enquête plus tôt que prévu. En attirant les regards sur nous. Et s'ils interrogent Pansy avant son départ ?
- Il faut qu'on gagne du temps... maugréa Malefoy en se redressant vivement."
Il s'étira comme un chat et regarda la grisaille au-dehors d'un air pensif, les mains dans les poches.
"Comment on gagne du temps ? gémit Hermione, qui ne supportait pas son flegme à un moment où elle avait besoin de courir partout en hurlant.
- En coopérant. En faisant semblant de coopérer, se corrigea-t-il en avisant le regard interloqué de la Gryffondor. On va montrer patte blanche, avoir l'air inquiets. Je vais faire une déclaration officielle à la presse pour demander aux citoyens d'aider les aurors s'ils ont des informations à apporter à l'enquête. En espérant qu'ils n'en aient pas, évidemment. Il faudrait que tu pleures en public, tout le monde pense que vous étiez proches.
- Tu veux que je pleure, répéta Hermione, dubitative.
- Je peux te pincer, si ça t'aide, suggéra Malefoy en tendant une main vers elle."
Elle lui octroya vivement une tape, se retenant de glousser. Ce n'était vraiment pas le moment de se disperser. Ou de rire. L'heure était grave. Et elle n'allait pas arriver à rester concentrée avec Malefoy à proximité. Tout son corps lui hurlait de lui sauter dessus et de se rouler avec lui dans le canapé, ce qui n'était pas non plus le moment.
"Tu préfères que je te mordre ? proposa le blond avec un sourire taquin."
Elle rosit immédiatement en se souvenant de ce qu'ils étaient en train de faire quelques minutes auparavant. Elle préférait définitivement qu'il la morde, mais ça risquait de ne pas avoir l'effet escompté ; c'était hautement improbable qu'elle se mette à pleurer.
"Arrête ! le houspilla-t-elle. Il faut qu'on prévienne les autres de ce qui vient de se produire. Si les aurors débarquent demain... Et qu'ils sont pris au dépourvu..."
Hermione eut une vision très nette de Pansy en train d'expliquer que Laura s'était empalée de son plein gré sur une statue d'art contemporain avant d'essayer de s'enfuir par les toits.
"Tu préfères aller voir Théo et Pans', ou Blaise ?
- Comme tu veux... répondit Hermione en enfilant ses bottines.
- Bon, je vais gérer Pansy. Théo, il n'est certainement pas à son premier secret honteux ou scandale à camoufler, il connait le terrain. Blaise devrait être plus calme. Envoie moi un message quand t'as fini. Mais ne sois pas trop explicite...
- Ah ? Moi qui comptais dire quelque chose du genre, c'est bon j'ai prévenu notre complice que les aurors étaient en chemin, nos mensonges sont prêts..."
Il roula des yeux, et se leva. C'était le signal du départ, et de la fin de leur petite parenthèse. Hermione serra les lacets de ses bottines d'un geste sec, se mit debout elle aussi, et se retrouva bêtement plantée devant Drago, qui la fixait avec les bras ballants.
"Est-ce que tu ressens un léger embarras ? demanda le blond avec une moue gênée.
- Léger, léger, le rassura Hermione en ricanant nerveusement, avant de se frapper mentalement.
- Bien, soupira Malefoy."
Il hésita quelques peu, pas sûr de la méthodologie à appliquer ici. Tout ce qu'il allait faire dans les secondes à venir pouvait avoir des conséquences désastreuses ou bénéfiques au reste - ou à l'absence - de leur relation à venir. Il pouvait soit prétendre que ce n'était rien, faire comme s'il s'agissait d'une simple conversation à laquelle il mettait un terme, ou alors... Quoi ? Lui faire une bise ? Où, sur le front, la joue ? Elle risquait de voir ça comme un geste paternaliste, ou amical. Mais d'un autre côté, s'il l'embrassait à nouveau, c'était un peu présomptueux. Peut-être que la ferveur du moment était passée, et qu'elle ne voulait pas reproduire l'expérience. Et on ne posait pas ses lèvres sur la bouche d'une personne pour lui dire "à bientôt" sans être un genre de... Couple ?
Alors, en proie à une panique intérieure ingérable, Drago fit ce qu'il avait été éduqué à faire : il saisit délicatement la main d'Hermione et y déposa un baiser léger. Lorsque qu'il se redressa et tomba sur son visage stupéfait, il resta figé, sa main dans la sienne. Puis elle émit un petit hoquet, et gloussa plus franchement. Encore une fois, la vie lui prouvait que ses manières aristocrates ne menaient pas à grand chose. Mortifié, il était sur le point de battre en retraite lorsqu'elle l'attira vers elle, et passa une main sur sa joue en riant plus franchement.
"Merci pour ce moment, lord Malefoy, rit-elle."
Il ne put s'empêcher de rire aussi, passant outre la légère humiliation qu'elle infligeait sans s'en apercevoir à son égo. Mais elle avait dit merci, c'était certainement un indice quant à sa satisfaction. Cette pensée l'enhardit et il pressa doucement ses lèvres sur les siennes. Rien de trop entreprenant, juste un chaste baiser, à peine un effleurement.
Ce qui suffit à relancer les hormones d'Hermione... Elle se pencha pour l'embrasser à son tour à peine quelques dixièmes de seconde après la fin de leur contact. Puis ils se regardèrent, et d'un même geste scellèrent de nouveau leurs lèvres, cette fois plus longuement.
"On ne va jamais partir d'ici, maugréa Hermione en reculant à contrecœur.
- Au travail, Granger, répondit Malefoy en se détournant pour enfiler son manteau."
Elle en fit de même et ils sortirent en silence sur le palier, réfléchissant déjà à ce qu'ils allaient pouvoir dire aux autres pour les empêcher de paniquer. Tout ça frôlait le surréalisme.
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Hermione avait transplanné à l'adresse indiquée par Drago, et cherchait le numéro 8. Évidemment, c'était l'immeuble le plus ancien et aussi le plus luxueux de la rue. C'était comme si les Serpentards possédaient tous des propriétés historiques hors de prix sans sembler s'apercevoir que c'était peu ordinaire. Elle s'avança face à la porte d'entrée, regardant autour d'elle dans la rue plongée dans l'obscurité. Elle ne voyait pas qui pourrait la suivre, ni même pourquoi, mais elle avait tellement l'impression de faire quelque chose de répréhensible qu'elle avait besoin de vérifier.
Elle enfonça l'interphone au nom de Zabini et attendit. Elle se retourna à nouveau, et balaya la pénombre du regard, resserrant le col de son manteau autour de son cou.
"Ouais ? grésilla la voix de Blaise, qui visiblement n'était pas ravi d'avoir de la visite.
- Salut Blaise, c'est... commença Hermione.
- Je suis malade, bonne soirée ! la coupa le Serpentard."
Un clic retentit, et Hermione comprit qu'il avait raccroché. Elle fronça le nez, vexée. Quelle mouche avait piqué le Zabini ? Elle enfonça violemment son index sur le bouton, et attendit plusieurs secondes pour être sûre de l'agacer.
"QUOI ? rugit-il.
- C'est très impoli Blaise, je dois te parler, ouvre-moi enfin ! s'exclama Hermione en collant son visage contre l'interphone.
- Hermione ?! réalisa tout à coup le jeune homme.
- OUI ! confirma-t-elle, soulagée.
- Par Salazar, pardon ! Je t'ouvre !"
Le déclic tant attendu informa Hermione que la porte était ouverte, et elle s'y engouffra sans perdre de temps. Blaise débarqua dans le hall de l'immeuble en courant, affolé, vêtu d'un long peignoir en soie couleur crème, qui formait comme une traîne derrière lui. Un peu déconcertée par cette tenue, Hermione s'arrêta et le regarda de haut en bas, histoire de bien intégrer l'information.
"Est-ce que... tu portes des mules en fourrure, là-dessous ?"
Blaise se plaqua une main horrifiée sur la bouche, puis partit dans un éclat de rire colossal. Au-delà de sa tenue improbable, Hermione ne comprenait pas sa réaction. Elle le laissa donc hurler de rire dans son peignoir crème, imperturbable. Puis Blaise tendit une jambe pour lui montrer la paire de sneakers qu'il portait en dessous. Absolument rien n'allait ensemble. Hermione sourit, parce qu'elle ne savait pas quoi faire d'autre, et le laissa se calmer.
"Pardon, pardon... pouffa le Serpentard en se reprenant tant bien que mal."
Visiblement, elle n'était pas d'humeur à rire. Ce qu'il aurait pu deviner seul du simple fait qu'elle débarque chez lui à 23 heures.
"Tu veux monter ? proposa-t-il.
- Oui, je... Tu n'es pas seul peut-être ? Je suis désolée d'arriver à l'improviste comme ça.
- Je suis seul. Enfin, pas exactement, mais c'est tout comme. Être seul, c'est le but même de ma tenue, et sa raison d'exister, expliqua-t-il tandis qu'ils gravissaient les marches. D'ailleurs, désolé pour l'accueil, je ne suis pas vraiment malade, je pensais que tu étais quelqu'un d'autre.
- Qui ça ?
- Je ne sais pas, justement."
Hermione ouvrit la bouche, mais ne sut pas quoi répondre. Cette conversation était absurde.
"Je ne comprends rien, Blaise, avoua-t-elle.
- Je fuis les spécimens de sexe féminin. J'ai décidé de faire une cure de désintoxication, expliqua le jeune homme en lui ouvrant la porte de son appartement, s'effaçant pour la laisser entrer. Il n'y a que ma mère ici, mais elle dort. Jetlag.
- Ce que j'ai à te dire, c'est vraiment très confidentiel, insista Hermione en pénétrant dans un loft qui ressemblait assez à celui de Drago, à ceci près qu'il était nettement moins ordonné."
L'intérieur de Blaise était composé de tout un tas d'objets hétéroclites qui n'avaient pas grand chose à faire ensemble. Une planche de surf, des affiches de films, une batterie, des baskets abandonnées dans tous les coins, un immense arbre généalogique qui semblait très ancien, une collection de magazines moldus sur le cinéma, on aurait dit une chambre d'adolescent à l'échelle d'un 150 m².
La télévision était allumée sur un match de Quidditch, et visiblement elle avait interrompu Blaise en train d'engloutir des lasagnes surgelées à même la barquette. Une bouteille de vin entamée trônait à côté.
"Je ne suis pas en dépression, crut-il bon de préciser.
- Tu n'as pas à te justifier Blaise, si tu voyais mon appartement à l'heure actuelle... grogna Hermione en songeant au carnage sur sa table basse, dans sa cuisine, à son lit défait et aux vêtements tâchés de sang qu'elle n'avait même pas sortis de la machine à laver.
- 24 heures dans cette vie de bandits de grand chemin et voilà où on en est, conclut Blaise en lui faisant signe de s'asseoir dans le canapé."
Il alla lui chercher un immense verre à vin en cristal, et en profita pour se resservir. Il sirotèrent leur grand cru millésimé en silence, regardant sans le voir le match qui avait lieu sous leurs yeux, avachis dans le canapé comme deux loques.
"Est-ce qu'on va aller en prison ? demanda finalement Blaise.
- Non, c'est hors de question, décréta Hermione. Par contre, l'enquête est sur le point de débuter."
Zabini finit son verre d'un trait, avalant le vin à grosses goulées. Hermione haussa les épaules, et en fit de même. Elle essaya juste de ne pas penser au prix de chacune des gorgées qu'elle engloutissait. Puis Zabini posa son verre sur la table, attendit qu'Hermione l'imite, et les resservit.
"C'est plus tôt que ce qu'on avait anticipé. Comment tu le sais ? Potter ? devina Blaise.
- Exactement. Lupin m'a rendu une petite visite pas courtoise plus tôt dans la soirée, et il a ensuite filé chez Harry pour nous accuser d'avoir kidnappé Laura, résuma Hermione.
- Kidnappé ! glapit Blaise, comme s'il était choqué à cette idée."
Alors que ce qu'ils avaient réellement fait était bien pire.
"Dis-moi que Potter n'a pas cru cette petite drama queen de Lupin...
- Non, pas vraiment. Par contre Laura a vraiment disparu. Donc il va devoir lancer une enquête. Et donc interroger ses collègues, c'est-à-dire nous...
- Et Pansy ! Non, alors là, il ne faut pas qu'elle parle... Elle est encore sous le choc ! paniqua Blaise, qui manqua de renverser son verre sur ses genoux. Elle va se vendre, et nous vendre avec.
- On a un plan.
- On ? T'as vu Drago avant de venir ? Non, ne dis rien... Il était chez toi, pas vrai ? Il était super inquiet en partant du penthouse tout à l'heure, il pensait que tu avais disparu...
- J'étais juste sortie prendre l'air... rectifia Hermione. Drago est avec Pansy et Nott. On a pensé que ce serait bien que Pansy prenne le large quelques jours pour un congrès à Cuba. Ça éviterait une confrontation désagréable avec les aurors..."
Blaise fronça les sourcils, mais finit par hocher la tête.
"Ça va être un cauchemar en termes de communication... Une de nos députées qui disparait dans des circonstances suspectes, le chef du parti adverse qui nous accuse, sans parler de tous les scandales précédents... Les aurors qui interrogent tous nos membres... Quelle est la stratégie ? résuma le Serpentard, pragmatique."
Il se leva pour attraper sa précieuse tablette et commença à pianoter dessus avec frénésie, ce qui constituait un exploit du simple fait que son taux d'alcoolémie devait frôler des records. Hermione elle-même se sentait un peu vaseuse.
"Je n'en ai aucune idée. J'imagine qu'on va devoir communiquer avec calme et sobriété, et montrer notre inquiétude... Et puis, il faut que le public pense qu'on coopère de notre plein gré avec les aurors, pas qu'on est suspects !
- Il va falloir mettre en doute la parole de Lupin et le décrédibiliser auprès des électeurs, je ne vois que ça. Mais il ne faut pas que ça ait l'air de venir de nous.
- Zabini... gronda Hermione.
- Granger, il va falloir mettre tes principes sous le tapis dans les jours qui viennent. Si on veut s'en sortir, il faut utiliser tous les moyens dont on dispose. Et la première chose, c'est de contre-attaquer. Lupin ne va pas se gêner pour donner des interviews, et nous traîner dans la boue publiquement. Il faut qu'on se place officiellement au-dessus de la mêlée, qu'on donne une image de dignité. Et officieusement... il faut qu'on déterre des trucs sur lui. Est-ce qu'il y a des choses que tu sais, et qui pourraient lui nuire ?"
Hermione pinça les lèvres et ne desserra pas les dents, en proie à un dilemme intérieur. Bien sûr qu'elle connaissait des secrets et des informations compromettantes sur Lupin. A commencer par sa perte totale de contrôle sur sa nature de loup-garou. Mais Lupin avait été son mentor. Il avait un fils. Il avait beaucoup fait pour Harry, et était ce qu'il lui restait de plus proche famille. Elle ne pouvait pas.
"Je ne sais rien, mentit Hermione. Rien de suffisamment grave pour décrédibiliser sa parole auprès des électeurs. C'est un héros de guerre, Blaise. On ne peut pas le salir !
- Bien sûr que si, on peut, répliqua Zabini en se replongeant dans ses recherches. Le hacker que j'ai embauché pour trouver la taupe m'a transmis tout un tas de preuves des indiscrétions de Laura. J'ai pas fini de tout parcourir, mais je suis prêt à parier que parmi tous ces documents, il y a des éléments qui la relient à Lupin.
- On ne peut pas s'en servir ! Ça reviendrait à admettre qu'on savait qu'elle était la taupe, ce qui nous donne un mobile pour l'éliminer... En plus, tout ça a été obtenu en toute illégalité !"
Blaise balança sa tablette sur le tapis, et coinça ses bras croisés sous sa nuque avant de retomber en arrière sur le canapé.
"Il faut qu'on trouve autre chose, alors. Soit on attaque directement sa personne, soit sa relation avec Laura pour faire de lui aussi un suspect potentiel. Après-tout, s'ils étaient genre... en couple, comme elle travaillait avec nous, il aurait eu toutes les raisons de la tuer, lui aussi. Une dispute qui tourne mal, de la jalousie, le fait qu'elle refuse de balancer nos activités... J'en sais rien, mais il y a matière à inventer une histoire qui tienne la route.
- Tu veux qu'on fasse de lui un assassin ? s'étrangla Hermione.
- Granger, tu vas continuer à rejeter toutes mes idées ? s'agaça Blaise en lui jetant un regard courroucé."
Hermione se leva, vacillant un peu. Elle se sentait étourdie, et pas seulement à cause du vin.
"Je veux pas devenir cette personne, Zabini. On a fait quelque chose de terrible, qui nous suivra toute notre vie. Et pour le couvrir, on est en train de multiplier les crimes. Cet... accident ne doit pas définir qui on est. On doit penser plus intelligemment.
- Sur le principe, je suis d'accord Granger, temporisa Blaise en se levant à son tour. Mais en pratique, je ne vois pas comment on peut s'en sortir sans tirer en dessous de la ceinture. Façon de parler.
- Il FAUT qu'on trouve une façon élégante de sortir Lupin du jeu. Sans faire plus de mal qu'on en a déjà fait.
- Qu'est ce que vous avez fait ? les coupa une voix féminine."
Hermione se figea, et pivota lentement pour apercevoir le propriétaire de cette voix. Une femme d'une quarantaine d'années, elle aussi en peignoir de soie, se tenait en haut de l'escalier. La jeune femme déglutit. Qu'est-ce que la mère de Blaise avait pu saisir de cette conversation ?
"Maman, tu dors pas ? réalisa bêtement Zabini."
Sa mère leva les yeux au ciel et entreprit de descendre les marches avec emphase, marche par marche, sa main caressant distraitement la rambarde. Tout en elle transpirait la séduction. De ses yeux charbonneux à ses lèvres ourlées - et gonflées de botox, ne put s'empêcher de remarquer Hermione -, elle approchait d'eux comme un prédateur. Son parfum sucré envahit rapidement la pièce, et elle se posta sur la dernière marche, les toisant de toute sa hauteur.
"Ai-je besoin d'appeler un avocat, Blaise ? reprit-elle en dardant sur lui deux yeux ombrageux.
- Quoi ? Bien sûr que non, réfuta le Serpentard en balayant cette idée d'un revers de la main.
- Miss Granger, ajouta sa mère en penchant très légèrement sa tête sur le côté."
Hermione, ne sachant pas s'il s'agissait là d'un salut ou de la simple assertion qu'elle savait qui elle était, pencha elle aussi la tête et répondit sur le même ton :
"Madame Zabini.
- Peut-être que vous serait plus prompte à me dire la vérité que cet être sournois qui prétend être ma progéniture, reprit-elle.
- Bon sang, maman... On était en train de parler du travail. C'est juste de la politique, la coupa Blaise en roulant des yeux.
- Vraiment...? J'ai plutôt eu l'impression que vous parliez d'un meurtre."
Prononcée d'un ton parfaitement calme, sa phrase eu pourtant l'effet d'une déflagration. Hermione regarda Blaise, qui regarda sa mère, qui sourit en notant l'effet dévastateur de sa révélation. Ils venaient de lui confirmer qu'elle avait vu juste.
S'ils étaient aussi transparents dans leurs réactions, ils n'allaient pas faire illusion longtemps.
"Bien, maintenant que nous sommes tous sur la même longueur d'onde dans cette pièce, nous allons pouvoir parler sérieusement, conclut madame Zabini en les rejoignant près du canapé. Blaise, un verre de vin pour ta mère. Miss Granger, expliquez moi qui vous avez tué."
Hermione passa à deux doigts de vomir sur le tapis, complètement affolée. Elle continua à fixer Blaise, qui n'avait pas l'air dans un meilleur état. Immobile devant la cheminée, il ne semblait pas apte à parler, encore moins à se déplacer.
"On... a tué personne, gémit Hermione d'une voix faiblarde.
- Mais vous savez qui l'a fait. Et vous avez participé indirectement. Allons, ne faites pas cette tête de carpe tirée hors de l'eau, j'ai entendu votre conversation et je sais additionner deux et deux. Ou trois et trois, peu importe l'expression. Est-ce que les aurors sont sur votre piste ?"
La mère de Blaise se servit elle-même son verre de vin, puisque son empoté de fils avait vraisemblablement perdu l'usage de ses membres, et que cette gourde de Granger la fixait avec les yeux écarquillés.
"Plus ou moins, en réalité, finit par répondre Hermione.
- Est-ce qu'ils peuvent mettre la main sur le corps ? questionna madame Zabini, qui ne s'adressait plus qu'à Hermione à présent.
- Non.
- Sur l'arme du crime ?
- Non.
- Est-ce qu'ils ont des témoins directs ?
- Non.
- Vous avez commis le crime parfait, gloussa la mère de Blaise à la surprise générale."
Elle goba deux pilules non identifiées pour fêter cette nouvelle, et s'assit sur un des fauteuils en croisant ses longues jambes, révélant des bas en résille. Qui faisait la sieste en bas résilles ?
"Je vais vous aider à vous débarrasser de ce Lupin, décréta-t-elle.
- Quoi ? Non, maman, non, c'est hors de question, objecta Blaise en la menaçant d'un doigt tremblant.
- Allons mon chéri, je ne parlais pas de le tuer, pouffa sa mère."
Blaise et Hermione échangèrent un regard entendu. Il fallait l'arrêter avant qu'elle ne fasse une bêtise qui les enverrait tous en prison, c'était impératif.
"Madame Zabini, c'est très gentil à vous de vouloir nous aider, mais vous avez mal interprété la situation, et il vaut mieux que vous restiez en dehors de ça, tenta Hermione."
Blaise ferma les yeux, attendant la foudre. Sa mère décroisa les jambes et se redressa dans son fauteuil, prête à frapper.
"Miss Granger, je vous serais gré de ne pas me dire ce que j'ai bien ou mal compris, ni même ce que je devrais faire ou ne pas faire. Je vous offre mon aide, et vous allez l'accepter.
- Le principe d'une offre, c'est qu'on peut la refuser, répliqua vertement Hermione.
- Ne jouez pas sur la sémantique !
- Pourtant les mots ont un sens !
- Quelle insolence !
- Quelle indélicatesse de ma part que de vous demander de vous mêler de votre... de vos affaires !
- Mais il se passe quoi, exactement ?"
Drago se tenait dans l'entrée du salon, son manteau posé sur le bras. Hermione fut immédiatement éblouie par sa beauté et son charisme, et en oublia de sauter à la gorge de la quarantenaire en peignoir de soie. Cette dernière, visiblement ravie de voir le blond arriver, déplia sa longue silhouette et alla s'enrouler autour de lui, collant sa poitrine gonflée à bloc contre son torse. Blaise n'eut qu'une réaction : il se frappa le front du plat de la main. Voilà ce qu'ils avaient fait de sa soirée cocooning.
Drago jeta un regard perdu à ses deux collègues, l'une visiblement furieuse, et l'autre à deux doigts de sauter par la fenêtre.
"Maman, laisse Drago respirer, râla Blaise en la tirant en arrière pour libérer Drago."
Celui-ci s'épousseta pour lisser les plis imaginaires sur son pull en cachemire, s'éloigna par prudence de la mère de son meilleur ami, et réitéra sa question :
"Bon, est-ce que quelqu'un va m'expliquer ce qu'il se passe ?
- La mère de Blaise ici présente... commença Hermione non sans jeter un regard venimeux à l'intéressée, a cru entendre des bribes de conversation. Elle pense que nous avons commis un meurtre et souhaite nous aider à mettre Lupin hors d'état de nuire."
La pomme d'Adam de Drago remonta si haut qu'elle faillit lui sortir par la bouche. Il regarda Zabini pour s'assurer qu'il avait bien entendu, puis Hermione à nouveau, et enfin ses yeux se posèrent sur sa plus grande fan.
"Je n'ai pas fait exprès d'écouter, roucoula-t-elle.
- Bien sûr que si, maman. Tu aurais pu signaler ta présence bien plus tôt, la contredit Blaise.
- Le mal est fait, de toute façon, coupa Hermione. L'idée justement, c'est de ne pas faire PLUS de mal."
Elle darda son regard le plus sombre sur la génitrice de Blaise, qui haussa un sourcil provocateur.
"Drago, ta collègue est très vindicative, se plaint-elle sans aucune gêne. Je voulais simplement aider..."
Hermione serra les poings pour ne pas lui bondir dessus et la rouer de coups de poings. Nul doute que le bain de botox et de prothèses qui en aurait résulté aurait été fort divertissant.
"Vous pouvez arrêter de minauder, personne ici n'est dupe, siffla-t-elle à la place.
- Mesdames, calmez-vous, les exhorta Drago en se décalant de nouveau pour échapper à la mère de Blaise, qui se rapprochait insidieusement.
- Maman, s'il-te-plait... pleurnicha Blaise. Hermione a raison, ce ne sont pas tes affaires, on ne te demande pas d'intervenir ! Laisse nous gérer ça.
- Gérer ça ? Mais enfin Blaise, tu ne sais même pas gérer tes propres lessives, gloussa sa mère. J'ai réparé vos absurdités pendant toute votre vie, les garçons. Vous avez oublié qui a empêché vos multiples renvois de Poudlard ? Qui a payé les dégâts de l'incendie de votre club d'escrime ? Qui a acheté le silence de cette fille que vous avez renversée en balais ?
- C'est bon, tu peux arrêter l'énumération, grogna Blaise."
Navrée par l'attitude d'adolescent boudeur du Serpentard, Hermione ne pu s'empêcher de lui adresser un coup d'œil agacé. Lui d'ordinaire si sûr de lui et obstiné, voilà qu'il se laissait mener par le bout du nez par un tyran qui, en plus, draguait ostensiblement Malefoy sous ses yeux. L'audace de cette femme !
"Madame Zabini... Amanda... s'interposa Drago avec un ton doucereux qui le faisait étrangement ressembler à Rogue. Nous sommes bien conscients de tout ce que vous avez fait pour nous. On était jeunes et stupides. Et on vous remerciera jamais assez pour tout ça. Mais maintenant, on est adultes, et en mesure de régler nos propres problèmes.
- Sans verser des pots de vin ou soudoyer la justice, ajouta Hermione.
- Tu n'aides pas vraiment, là, soupira le blond."
Hermione décida qu'elle aussi allait se comporter comme une adolescente rebelle, et se rassit dans le canapé en croisant les bras contre sa poitrine. Il voulait brosser Amanda dans le sens du poil ? Grand bien lui fasse. Mais qu'il ne compte pas sur elle pour le sauver si la mère de Blaise se lançait dans une démonstration de pole dance.
Drago observa attentivement Hermione faire son petit manège, avec sa moue furieuse et son nez retroussé dans une expression de fureur à peine contenue. Il était parfaitement incrédule. Elle n'était tout de même pas... quoi, jalouse ?
"Drago, mon chéri, je sais bien que vous êtes devenus des hommes..."
Hermione profita qu'elle ait le dos tourné pour faire semblant de vomir, ce qui n'échappa pas aux deux garçons.
"Maman, bon sang, arrête ! la supplia Blaise. Ce qu'il voulait dire, c'est qu'on va s'occuper de tout ça ensemble. Nous trois. Sans toi. Tu comprends ?
- Je ne suis pas demeurée, Blaise, répliqua sa mère. J'ai compris, vous ne voulez pas de mon aide. Mais vous pourriez au moins écouter mes conseils..."
Ce brusque revirement ne disait rien qui vaille à Hermione. Madame Zabini se mit à louvoyer dans le salon, faisant onduler son postérieur proéminent, et alla jusqu'à caresser le torse de Drago du bout d'un index. Elle lui jeta ensuite une œillade qui n'avait vraiment plus rien de suggestive, et Blaise pâlit brusquement.
"C'est pas vrai... pesta-t-il entre ses dents."
Sa mère feint de ne pas avoir entendu ses lamentations, et rejeta sauvagement ses cheveux en arrière. Hélas, dans la manœuvre, Hermione remarqua des touffes de cheveux blancs sur ses tempes, et se mit à pouffer. Plus par mesquinerie qu'autre chose, il fallait bien l'avouer. Drago, qui ne comprenait rien, eut l'air de quêter son aide, mais la Gryffondor l'ignora sciemment et se mit à regarder ses ongles. Il avait voulu jouer avec Amanda, le résultat ne s'était pas fait attendre.
"Drago, toi qui es raisonnable... Tu sais qu'il est impératif de faire taire Lupin. Et tu sais aussi que la meilleure façon d'y parvenir, c'est de le traîner dans la boue et de détruire cet homme, gazouillait madame Zabini en tournicotant autour de Drago, raide comme un piquet.
- Je ne sais pas de quoi vous parlez, Amanda. Quoi qu'il en soit, nous prendrons cette décision entre nous, au sein de notre groupe politique, riposta Drago en bombant le torse. Parce que c'est de ça qu'il s'agit : de la politique. C'est une question professionnelle."
Mais madame Zabini ne comptait pas se laisser réduire au silence si facilement. Elle asséna une tape sur les pectoraux du Serpentard, avant d'y laisser glisser sa main. Vers le bas. Lentement. Et Hermione écarquilla les yeux, crispant sans s'en apercevoir ses doigts autour du bras de Blaise.
"Madame Zabini, si vous pouviez arrêter de me tripoter... Je me sens extrêmement mal à l'aise, finit par couper Drago en lui empoignant fermement la main, la levant au-dessus de la tête d'une Amanda fort étonnée par ce rejet brutal.
- Oh, Drago... Je ne te pensais pas si prude, rit madame Zabini.
- Bon, on arrête ce cirque ! s'écria Blaise en dégageant son bras de l'emprise féroce d'Hermione. Maman, remonte dans ta chambre ! Immédiatement ! Tu me fais honte !"
Écarlate, les poings serrés, Blaise semblait enfin réaliser ce qui se déroulait sous ses yeux. Vas-y Blaise, montre lui que tu n'es plus un petit garçon. Il lui indiqua la direction de l'escalier d'un doigt tremblant de rage, et se mit à taper du pied.
"Blaise, enfin...
- STOP ! Tu te tais. Tu es ici chez moi, tu es mon invitée. Mais ça peut changer très vite si tu recommences à t'immiscer dans ma vie privée, à m'espionner, et à draguer mon meilleur ami. Qui a 27 ans. Comme moi. Ton fils. Et ne me regarde pas comme ça ! File dans ta chambre !"
Hermione remarqua que Drago avait baissé les yeux et semblait masquer un sourire, et dû donc se refréner aussi.
"Je ne vois pas tes jambes bouger, maman. Il me semble pourtant t'avoir demandé de quitter la pièce.
- Bien, bien, je m'en vais, abdiqua Amanda en tournant les talons, exaspérée."
Personne ne la regarda gravir l'escalier en roulant des hanches, tout occupés qu'ils étaient à échanger un regard lourd de sens. Ils avaient fait une première erreur, ce soir. Ils avaient manqué de prudence. Et maintenant, quelqu'un d'autre qu'eux savait. Partiellement, certes. Mais quelqu'un avait découvert un pan de vérité. Fort heureusement pour eux, il s'agissait de la mère de Blaise, qui ne parlerait jamais à quiconque de ce qu'elle avait entendu. D'une part parce qu'elle ne trahirait jamais son fils bien aimé, et d'autre part parce qu'elle haïssait les aurors et la justice en général, qui la suspectaient sans arrêt de tuer ses maris sans aucun fondement.
"On devrait poursuivre cette conversation chez moi, proposa Drago."
Blaise et Hermione ne prirent même pas la peine de répondre puisque c'était une évidence, et foncèrent tête baissée vers la porte.
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Blaise, qui avait un peu mal au crâne après ses excès de grand cru, se massait le front en grimaçant, un verre d'eau gazeuse pétillant devant lui. Drago faisait les cent pas dans son immense salon, et Hermione réfléchissait en silence. Ils n'avaient presque pas échangé depuis qu'ils étaient entrés chez le blond, tout occupés qu'ils étaient à ressasser et paniquer intérieurement.
"C'est un cauchemar, marmonna Blaise en étirant ses longues jambes.
- On peut se réveiller d'un cauchemar, grogna Drago en arrêtant ses allées et venue devant sa baie vitrée."
Il se mit à contempler Londres, la mâchoire crispée et le dos raide.
"Je ne pensais pas qu'en me lançant en politique, je prendrais ce genre de nouveau départ. Tu parles d'une réhabilitation, ajouta le blond. Je préférais encore être un sale gosse de mangemort privilégié.
- On est tellement dans la merde... ajouta Zabini.
- Bon, ça suffit tous les deux, les réprimanda Hermione. Vous vous êtes suffisamment apitoyés, c'est bon ? On peut réfléchir à un plan ?"
Penauds, les deux garçons se turent. Drago alla rejoindre les deux autres sur son immense canapé d'angle en cuir, signe qu'il était de nouveau opérationnel et prêt à chercher des solutions.
"Pansy, Cormac et Hestia partent demain à 10 heures pour La Havane. Si on veut, on peut partir avec eux. Ils n'extradent pas les criminels vers le Royaume-Uni, donc les aurors ne pourront pas venir nous chercher ni nous contraindre à rentrer, proposa-t-il.
- Tu veux qu'on parte en cavale ? s'étrangla Hermione. C'est... c'est illégal, ajouta-t-elle. C'est PIRE que de mourir, Drago.
- D'accord avec la préfète en chef, grinça Blaise. Attendons de voir si l'enquête nous coince avant de prendre la fuite, non ?
- J'étais sûr que vous diriez ça, mais il fallait quand même que je vous laisse cette option. Bon, on reste. Dans ce cas, il faut qu'on baratine tout ce petit monde. Il va falloir la jouer fine."
Drago se releva, incapable de tenir en place.
"Demain, à la première heure, je réunis tout le groupe pour les informer que Laura aurait potentiellement disparu et qu'une enquête va débuter. Ça risque de créer un vent de panique, mais c'est la manœuvre la plus crédible pour un leader digne de ce nom. Ensuite, on attend.
- On attend quoi ? Qu'on nous passe les menottes ? gémit Blaise. Pourquoi on anticipe pas un peu ?
- Si par anticiper tu veux dire orchestrer une campagne de dénigrement secrète contre Lupin, c'est absolument hors de question Blaise ! l'avertit Hermione."
Le regard de Drago passa de l'un à l'autre, ne sachant pas sur quel pied danser. Or, c'était à lui de trancher, et les deux autres le savaient bien puisque c'est le blond qu'ils fixaient à présent. Visiblement, ce conflit couvait entre eux, et aucun des deux ne semblait prêt à revoir sa position.
"Lupin va se décrédibiliser tout seul s'il nous accuse dans la presse avec cette attitude de fou furieux, je ne pense pas qu'on ait besoin de se salir encore davantage les mains avec ça dans l'immédiat, décréta Drago tandis que les rouages de son cerveau machiavélique se mettaient en marche à toute vitesse."
Hermione lança un regard triomphant à Blaise, qui ne broncha pas. Il connaissait suffisamment Drago pour ne pas se laisser duper par son petit discours d'apaisement. Après tout, son meilleur ami venait de modaliser sa phrase avec un dans l'immédiat qui revenait à dire pas tout de suite mais très prochainement.
"Je vais répondre à Harry... Sinon, il va se douter que je cache un truc, dit Hermione en plongeant dans son sac à main pour en extraire une plume et un parchemin.
- Tu vas lui dire quoi ? s'enquit Drago en jetant un regard à Blaise."
Ils menaient une conversation silencieuse sous les yeux de la Gryffondor, qui ne devait pas se douter qu'ils s'apprêtaient à contourner en tout connaissance de cause ses objections morales.
"J'en sais rien... pour confirmer qu'aucun de nous n'a vu Laura depuis quelques jours, et lui demander de me tenir au courant. Il nous dira si Lupin fait effectivement un signalement. J'ai atrocement honte de lui mentir comme ça, mais c'est inévitable..."
Elle se mordit la lèvre, et ses yeux s'embuèrent de larmes. Elle se sentait comme une traîtresse. Mentir à Harry était une chose impensable, presque surhumaine. Il était un frère pour elle. Lui cacher une chose pareille était une déchirure...
"Eh... souffla Drago en attrapant sa main glacée dans la sienne. Dis-toi que c'est une façon de le protéger. Il y aurait conflit d'intérêt s'il te savait complice, peut-être qu'il ne te dénoncerait pas pas, mais il devrait lui aussi mentir, et Saint Potter n'apprécierait pas...
- MAIS OUI ! s'écria Hermione en bondissant sur ses pieds."
Sa plume roula sur le tapis épais sous les yeux stupéfaits des Serpentards, qui ne comprenaient pas ce brusque changement d'humeur.
"Granger ? s'inquiéta Drago en la dévisageant, toute rouge et aussi agitée que lui quelques secondes auparavant.
- Conflit d'intérêt ! T'as parlé de conflit d'intérêt ! C'est exactement ça. Harry ne peut pas diriger une enquête si je suis impliquée, il va devoir se révoquer ! Et si Harry est dessaisi de cette enquête, son second prendra le relai ! Drago, c'est brillant !
- C'est qui, son second ? demanda Blaise, qui se laissait doucement gagner par l'espoir.
- Quoi, vous ne savez pas ? s'étonna Hermione. C'est GOYLE !
- Merde alors... lâcha Blaise, éberlué. Ce tocard sans cervelle est auror ?
- Il va être dessaisi aussi, on a fait toute notre scolarité ensemble... réalisa Drago. Il ne pourra pas enquêter sur moi sans qu'on le suspecte aussi de conflit d'intérêt, c'est de notoriété publique qu'on était proches à Poudlard. C'est qui, ensuite ?
- J'en sais rien... avoua Hermione. Mais le principal, c'est qu'Harry ne sera pas sur cette enquête, il ne nous interrogera pas, et il ne verra pas que je mens ! Oh, je suis tellement soulagée !
- Attends, Granger, t'emballe pas... Il faut que tu sois impliquée pour que l'enquête change de mains. Et pour l'instant, rien ne dit que tu le seras, tempéra Drago."
Hermione se rassit, son enthousiasme quelque peu retombé. Bien sûr qu'elle rêvait de ne pas être impliquée. Mais une part d'elle espérait, priait, suppliait de ne pas être confrontée à Harry dans une salle d'interrogatoire. Or, elle ne pouvait pas avoir les deux. Soit elle mentait à Harry et conservait ses chances de s'en sortir indemne, soit elle se retrouvait au cœur d'une enquête pour meurtre et écartait Harry. C'était, dans un cas comme dans l'autre, une situation plus que pénible. Drago reprit aussitôt la main de la jeune femme dans la sienne sans même avoir à y penser, ce qui n'échappa pas à Blaise. Depuis quand son indomptable et irascible meilleur ami ressentait le besoin de réconforter Granger ?
Zabini fixa ostensiblement leurs mains liées, et fut horrifié exactement de la même façon que Potter quelques jours auparavant, au ministère. Mais pas pour les mêmes raisons. Si Harry avait immédiatement été inquiet, c'était pour Hermione. Blaise, lui, était inquiet pour Drago. Drago qui ne s'attachait jamais à personne, ne laissait aucun être humain l'approcher de trop près, ne dispensait aucun geste affectueux, choisissait le pire moment pour se montrer vulnérable face à une femme. Et ça, ça ne lui disait rien qui vaille. Drago était du genre à garder ses frontières hermétiques pour survivre. Comme lui. Comme Granger, il le savait.
"On saura que l'enquête se rapproche de nous si Potter en perd la direction, au moins, tenta Drago pour dérider un peu Hermione."
Blaise ouvrit la bouche, à deux doigts de se jeter en travers de leurs mains en hurlant à la mort. Mais Hermione fit une chose étrange qui lui coupa l'herbe sous le pied, et le poussa à reconsidérer son jugement. Elle regarda le blond avec une profondeur insoupçonnée, hocha la tête comme pour acquiescer, et dit :
"Tu as raison. Je vais faire comme tu as dit, et on attendra.
- Bah merde alors, lâcha Blaise pour la énième fois de la soirée."
Les frontières étaient réciproquement ouvertes. Et Blaise se dit que, peut-être, ce n'était pas une vulnérabilité.
Meilleurs vœux pour cette année 2020 ! Puisse-t'elle être celle de la ponctualité, où je réussirai à poster mes chapitres en temps et en heure...
J'espère que ce chapitre vous a plu ! Merci, merci, merci pour vos commentaires, merci de continuer à lire, merci aux lecteurs de la première heure et aux nouveaux, c'est grâce à vous que je continue à chercher l'inspiration et à écrire.
