Chapter 32 - Vladimir
Le lendemain matin, assise dans son bureau avec Astoria et Pansy pour l'organisation du gala, Hermione pensait encore à la mine chiffonnée et reconnaissante de Drago lorsqu'ils s'étaient séparés devant le café moldu. Ils avaient fini par commander un second thé, puis à dîner sur place, et la conversation qui avait pourtant si mal commencé s'était terminée dans une sorte de frénésie enthousiaste. Hermione développait ses idées avec sa fièvre coutumière, Drago rebondissait, la contrait, l'obligeait à préciser ou amender ses idées, et s'il ne pouvait s'empêcher de chercher la bagarre ou de lancer des remarques sournoises, il s'impliquait dans le projet. Drago avait conscience qu'il s'apprêtait à affronter ses démons, et à ce stade il ne voulait pas s'engager émotionnellement dans la fondation. Il se focalisait sur l'idée d'expier ses fautes auprès du public, de remettre la main sur son manoir familial, et d'utiliser son indécente fortune dans une bonne action.
Hermione acceptait cet état d'esprit comme une étape nécessaire sur le long chemin de la résilience. Parce qu'elle savait qu'en cours de route, il aurait un déclic. Il était prêt, il fallait juste qu'il accepte d'être vulnérable et humain.
Juste. Comme si ça allait être aussi facile pour Drago de reconnaître qu'il faisait effectivement partie d'une race humaine dotée d'émotions et d'aspirations.
En attendant, il avait pris le train en marche, et c'était suffisant pour le moment.
Il faisait nuit quand ils étaient sortis sur le trottoir, la main d'Hermione enroulée dans le creux du coude du blond. Ils avaient marché vers une ruelle à l'écart, serrés l'un contre l'autre. Elle avait senti qu'ils avaient tous les deux envie de rentrer ensemble, mais elle savait aussi que c'était une très mauvaise idée. Une chose après l'autre. Drago était émotionnellement fragilisé, elle-même était encore bouleversée et déstabilisée par les évènements des jours précédents, et maintenant qu'ils avaient retrouvé un semblant d'équilibre et survécu à une conversation fort déplaisante, elle ne se voyait pas prendre le risque de tout compliquer.
Ils s'étaient regardés en silence, hésitants et maladroits, Hermione s'était penchée pour déposer un baiser sur sa joue qui lui avait fait écarquiller légèrement les yeux, puis elle lui avait soufflé un à demain dans l'oreille et avait transplanné.
Évidemment, à l'instant où elle était arrivée chez Harry, elle avait failli faire demi-tour. Elle avait ensuite passé une affreuse nuit, moite et agitée.
"Je ne suis pas convaincue que ce soit une bonne idée de sélectionner ce drôle de DJ slovaque. Franchement, quelqu'un qui porte une boucle d'oreille en forme de dent de requin ne devrait pas être autorisé à se produire en public, persiffla Pansy en écartant d'office un parchemin.
- Peut-être qu'on devrait choisir la sécurité et engager le hippie qui se produit aux Trois-balais, proposa Astoria sans trop y croire.
- Un hippie au manoir Malefoy ? pépia Hermione avec une grimace écœurée."
Les trois filles se mirent à rire, visualisant un personnage en pantalon pattes d'éph et cheveux longs en train de gratter sa guitare au sommet de l'escalier de marbre.
"Pourquoi pas un moldu ? proposa Hermione en reprenant son souffle.
- Et comment tu lui expliques tous ces gens en robe qui jettent des sorts en sirotant du jus de citrouille ? objecta Astoria.
- Le dress code prévoit des smokings, on boira du champagne, parce qu'on est des adultes, et le plan c'est que personne ne jette le moindre sort à cette soirée, qu'il soit offensif ou défensif, rappela Hermione.
- Un moldu enverrait un bon message d'ouverture au monde, songea Pansy.
- Mais ça reste risqué vis-à-vis du secret... marmonna Hermione.
- On pourrait modifier ses souvenirs, suggéra Astoria.
- C'est un délit, Greengrass, grogna Pansy en levant les yeux au ciel.
- Peut-être que le moldu n'est pas une bonne idée, finit par déclarer Hermione.
- Ne poussons pas Drago trop loin de ses bases, confirma Pansy. Après-tout, c'est déjà un miracle en soit qu'il soit partant pour tout ça. Où en est Blaise avec la fondation ?"
Hermione jeta un coup d'œil vers la porte close, et se pencha en avant pour parler moins fort.
"Il travaille avec Padma pour le côté légal et les statuts. J'ai rendez-vous au ministère à la fin de la semaine pour leur présenter le projet, et Drago va m'accompagner. Il doit se mettre en contact avec son comptable. Personne d'autre n'est au courant. Il faudra qu'on se rassemble pour faire un business plan digne de ce nom... Parce qu'il va falloir mettre aux normes le manoir, engager du personnel encadrant, des intervenants, instaurer un cadre réglementé, préparer un programme scolaire avec des compétences à développer, penser à mettre en place un suivi psychologique personnalisé, et sans doute créer des partenariats avec des entreprises pour la réinsertion des enfants, et...
- Parfait. N'ébruitons rien avant d'avoir l'aval du ministère, chuchota Pansy, interrompant ce qui s'annonçait comme une impressionnante to-do list.
- On va déjà être assez occupés avec la venue de cet auror Yankee, ajouta Astoria."
Le froid s'installa dans la pièce à la seconde où l'auror Harmon et ses yeux inquisiteurs furent mentionnés.
"Ça va bien se passer, répéta Hermione en plantant ses yeux dans le regard de Pansy.
- Bien sûr ! confirma Astoria.
- J'ai quand même hâte que ce soit derrière nous, dit Pansy en tournant rapidement les pages de son classeur.
- Je ne sais pas s'ils retrouveront Pods un jour, mais je pourrais parfaitement vivre avec son absence, déclara Astoria."
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En plein milieu de la pause déjeuner, alors que la très grande majorité des députés étaient sortis manger ou vaquer à leurs obligations, une silhouette encapuchonnée pénétra dans les locaux des Non-alignés sans un bruit, fendant l'espace avec une prestance glaciale. Hermione, qui grignotait une salade sur un coin de son bureau tout en gribouillant des notes de sa main libre, sentit que quelque chose n'allait pas avant même d'entendre quoi que ce soit.
Elle reposa sa fourchette, plissa les yeux, et se leva pour aller jeter un œil dans l'open-space déserté.
Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle tomba nez à immense nez avec Severus Rogue, qui la toisa avec un air hautain.
"Miss Granger, la salua-t'il avec une absence de jovialité notable.
- Professeur Rogue ! s'exclama Hermione d'une voix aiguë."
Il hocha la tête brièvement, et continua à la dévisager sans un mot de plus. Hermione s'agita sur place, se triturant les doigts comme si elle était subitement revenue en arrière, avait 13 ans à nouveau, et tentait de trouver une idée pertinente pour gagner l'approbation du terrifiant professeur de potions. Elle avait beau travailler dur, connaître chacune des réponses à ses questions les plus obscures, réussir absolument toutes ses potions avec brio, elle n'avait jamais obtenu plus qu'un claquement de langue de sa part. Et, après des années passées à gagner en aplomb et en assurance, elle ne pouvait s'empêcher de vouloir entrer dans ses bonnes grâces.
"Est-ce que vous... voulez boire quelque chose ?"
Elle avait proposé sans savoir pourquoi, juste pour maintenir un semblant de civilité, et maintenant elle se demandait ce que pouvait bien boire quelqu'un comme Rogue. Certainement pas du thé. Peut-être un breuvage noir et mystérieux, concocté dans un chaudron rouillé.
"Merci, mais j'ai ce qu'il me faut, répondit Rogue de sa voix traînante en extirpant une gourde de sa cape. C'est une infusion de badiane, gingembre, et spiruline. La spiruline est une micro-algue."
Severus Rogue se promenait avec une gourde. Une gourde remplie d'une boisson détoxifiante. Et il était en train de lui expliquer ce qu'était la spiruline, super-aliment dont les moldus à tendance healthy raffolaient. Pire, il venait de lui adresser la parole avec une longueur inhabituelle. Quelque chose clochait, et Hermione ouvrit la bouche sans anticiper ce qui allait en sortir.
"Je connais la spiruline, dit-elle. C'est extrêmement riche en oligo-éléments.
- C'est aussi un anti-oxydant, précisa Rogue."
Hermione approuva d'un hochement de tête, à cours de mots. C'est alors que Rogue commis l'impensable.
"Souhaitez-vous goûter, miss Granger ?"
Les yeux exorbités, Hermione hocha la tête, et elle le conduisit vers la salle de Détente et de ragot pour y trouver des tasses. Severus Rogue venait de lui proposer de partager avec elle sa boisson détoxifiante. A son grand soulagement, Drago se trouvait là, en train de se gratter le menton pensivement face à la cafetière.
"Ah, Granger, tu tombes bien. Je ne comprends pas, j'ai fait tout ce qu'il fallait, et le café ne coule pas, je... Severus ?
- La cafetière n'est pas branchée, remarqua Hermione d'un air absent.
- Bonjour, Drago, dit Rogue. Une tasse d'infusion de badiane, gingembre, spiruline ?"
Drago cligna des yeux une fois, deux fois, et finit par hausser les épaules.
"Je n'ai pas compris la moitié des ingrédients, mais pourquoi pas."
Ils s'installèrent autour de la table, Drago et Hermione d'un côté, Rogue et sa gourde de l'autre. Il leur servit sa tournée de tisane, ils la burent en silence, et Hermione tenta d'ignorer les regards furtifs et les coups de coude discrets du blond. Lui était déstabilisé, elle était pétrifiée. Car si Drago était le filleul de Severus, elle n'était qu'une élève agaçante du professeur Rogue, et ne bénéficiait pas de la même acceptation de sa part. Donc, elle ne pouvait pas se permettre de le contrarier.
"Pouvons-nous parler en toute sécurité, ici ? s'enquit Rogue."
Drago hocha la tête, et lança quelques sorts pour leur assurer un peu d'intimité. Hermione se demanda si elle devait sortir, et se sentait vraiment en trop dans cet échange visiblement confidentiel. Mais Rogue n'avait pas l'air de vouloir la chasser, puisqu'il sortit un parchemin de sa cape, et le posa devant eux.
Ils le reconnurent immédiatement, et échangèrent un regard chargé d'appréhension.
"Vous aussi, alors, souffla Drago.
- Moi aussi, confirma Rogue. Je l'ai reçue avant-hier.
- J'en ai reçu une aussi. Ainsi que Théo, Blaise, Marcus et Pansy, énuméra Drago. On pourrait croire qu'ils visent les Serpentards..."
Rogue plissa les yeux comme s'il cherchait à comprendre si Drago venait de faire une tentative de blague, ou s'il était simplement stupide.
"À vrai dire, c'est si pauvre d'un point de vue linguistique que j'ai cru à un canular. Mais Vladimir a pris peur et... Et bien, j'ai fini par écrire à Amycus Carrow. Si quelqu'un est susceptible de rejoindre un groupe d'obscurs suprématistes, c'est bien lui. Lui aussi en a reçu une.
- Qui est Vladimir ? demanda Hermione avant de se mordre la langue. »
Elle se fit toute petite sur sa chaise, persuadée de recevoir la foudre pour son indiscrétion et son manque d'attention face au réel problème.
« Mon compagnon, répondit Rogue comme si c'était une évidence. Drago, je pensais que vos collègues avaient été informés de mes motivations pour rejoindre ce groupe au stupide nom. Comment se fait-il que Miss Granger, votre bras droit notoire, n'ait pas connaissance de l'existence de Vladimir ?»
Drago grimaça furtivement, et haussa les épaules.
« Je n'ai pas donné de détails sur votre vie privée, professeur. Ils savent que nous défendrons une loi pour étendre le mariage aux couples homosexuels.
- Homosexuels ? répéta Rogue, outré. »
Hermione, complètement larguée, pivota vers Drago, qui n'avait pas l'air plus éclairé et semblait craindre d'avoir commis un grave impair. Le regard perçant de Rogue passa de l'un à l'autre, et Hermione se félicita d'avoir travaillé ses compétences en occlumencie, sans quoi leur ancien professeur aurait sans nul doute tenté de pénétrer dans leurs têtes pour y trouver immédiatement une réponse.
« Vous n'êtes pas en couple avec Vladimir ? demanda Hermione d'une voix haut-perchée. »
Rogue continua à les dévisager à tour de rôle, et les deux députés crurent bien que leur dernière heure avait sonné.
« Si, dit Rogue.
- Et... Vladimir est un individu de sexe masculin...? poursuivit la jeune femme, de plus en plus mal à l'aise.
- Tout à fait, oui, confirma Rogue.
- Alors je ne comprends pas, craqua Hermione, à bout de nerfs.
- Je vois bien que vous ne comprenez rien, siffla Rogue.
- Vous êtes en couple avec Vladimir, un homme, mais vous n'êtes pas homosexuel, résuma Drago.
- Dire que vous étiez mes deux meilleurs étudiants ! s'offusqua Rogue en se levant d'un coup, les faisant sursauter."
Hermione mobilisa toutes ses forces pour ne pas sourire, extatique.
"Deux ahuris, à me regarder la bouche ouverte !"
Hermione dû cette fois retenir ses larmes.
"Vladimir n'est pas un homme stricto senso, reprit Rogue en articulant lentement. C'est ça, qui m'importe ! Que notre mariage soit reconnu même si nous n'appartenons pas techniquement à la même espèce ! »
Cette fois, Hermione était atterrée. Comment Drago avait pu oublier cette partie de l'information ?
« Vous ne m'avez jamais dit ça, Severus ! s'insurgea Drago, vexé d'avoir été traité d'ahuri de façon aussi injustifiée.
- Enfin, Drago, vous avez rencontré Vladimir. »
Hermione se tourna complètement vers le blond, se demandant soudainement s'il n'était pas effectivement un peu ahuri. Il avait rencontré une créature non humaine sans s'en apercevoir ?
« Mais... Mais... bafouilla Drago, perplexe. Vladimir avait l'air parfaitement humain !
- Il est d'une pâleur fantomatique, ses cheveux sont blancs et il a des canines particulièrement pointues, objecta Rogue comme s'il s'adressait à un enfant.
- Vous venez pratiquement de décrire Drago, intervint Hermione en croyant défendre son leader. Pas étonnant qu'il n'ait pas été interpellé par son apparence.
- Granger ! gronda le blond, outragé.
- Maintenant que vous le dites, Miss Granger... marmonna Rogue en étudiant Drago, pensif."
Consterné, le blond se renfrogna et croisa les bras sur sa poitrine. Non seulement cette discussion le faisait passer pour un idiot, mais en plus voilà qu'on critiquait son physique avantageux et qu'on le tournait en dérision. C'était offensant.
"Dans ce cas, nous devrions songer à ouvrir le mariage non seulement entre personnes de mêmes sexes, mais également d'espèces différentes, décréta Hermione. Dans la pratique, ces couples existent déjà, ils n'ont juste pas d'existence légale. Remus Lupin et Nymphadora Tonks, par exemple. Les loup-garous, les géants... Il faut songer à tout. Peut-être qu'Hagrid...
- Je me fiche éperdument des autres espèces, Miss Granger. J'aimerais qu'on se focalise sur les vampires, la contredit Rogue en se rasseyant.
- On ne peut pas créer d'inégalités supplémentaires en essayant d'en réparer une, s'insurgea Hermione.
- Bon sang... grommela Drago en se frottant le front."
La porte de la salle de Détente et de ragots s'ouvrit sur Cormac, qui pâlit à la seconde où il avisa l'illustre professeur Rogue. Il sembla hésiter un instant entre prendre ses jambes à son cou ou entrer, et resta donc immobile dans l'embrasure de la porte.
"Oui, Cormac ? demanda Drago d'une voix fatiguée.
- L'auror Harmon est arrivé, les informa-t'il. Pour... les interrogatoires ?
- Il ne manquait plus que ça, se lamenta le blond en se levant. Severus, le moment est mal choisi pour... parler de ces échanges épistolaires inquiétants."
Rogue fit disparaître le parchemin incriminé d'un battement de cil, attrapa sa gourde, et pivota sur ses talons en direction de la sortie. Mais Harmon lui coupa la route en apparaissant furtivement dans le dos de Cormac.
"Miss Granger, Monsieur Malefoy, les salua-t'il. Et, vous êtes...?"
Rogue sursauta, et lui lança un regard courroucé.
"Êtes-vous... un américain ? demanda-t'il avec un mépris difficilement contenu. Je suis Severus Rogue.
- Oh, j'ai entendu parler de vous ! répondit l'auror sans sourciller. Votre nom est apparu dans l'enquête, évidemment.
- Comment ça, évidemment ? Et de quelle enquête parlez-vous ? Sachez, monsieur... Harmon, que je mène une vie des plus modestes et qu'aucune de mes activités n'est contraire au respect de la loi. Je ne tolèrerai pas d'être traité de la sorte !"
Drago soupira, Hermione se mordit la lèvre, Cormac écarquilla les yeux, et Harmon se pencha en avant, soudain très intéressé.
"Inutile de vous défendre avec tant de véhémence, monsieur Rogue, vous n'êtes accusé de rien. Vous êtes un député de ce groupe, dont l'une des membres a disparu. Il est normal que votre nom apparaisse dans le dossier.
- Oh ! dit Rogue, gêné d'avoir laissé son sentiment de persécution transparaître."
Puis il se tourna vers Drago, et retroussa le nez.
"Quelqu'un a disparu ? C'est fâcheux, déclara-t-il.
- Vous n'étiez pas au courant ? s'étonna Harmon.
- Severus vient juste de... rentrer de vacances. Il est inscrit dans le groupe, mais c'est la première fois qu'il vient ici depuis son... retour, expliqua Drago en jetant un regard irrité à Rogue.
- Oh, en vacances, répéta Harmon sans expression particulière.
- Je voyage beaucoup, dit Rogue."
Puis il quitta la pièce comme si sa cape venait subitement d'entrer en combustion spontanée.
"Bien. J'aimerais commencer à interroger vos collègues, si c'est ok pour vous, reprit Harmon en se tournant vers Drago. Y aurait-il une pièce où je pourrais m'installer ?"
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Les interrogatoires durèrent des heures, et chacun fit de son mieux pour ne pas laisser transparaître son angoisse. Les députés défilèrent dans la salle de réunion, un par un, entrant et sortant à intervalles irréguliers. Si certains ne passaient que quelques minutes dans la pièce, d'autres y restaient plus longtemps, et chaque minute qui passait faisait monter la tension d'Hermione. Enfermée dans son bureau, elle surveillait les allées et venues, tout en essayant de donner une image parfaitement détendue.
Ils n'avaient rien à craindre, puisqu'ils étaient l'image même de l'innocence.
Objectivement, le groupe avait été brieffé, préparé, chaque mot prononcé avait été mesuré et répété, pour être assez proche de la réalité sans attirer d'ennuis sérieux à quiconque. Et il y avait peu de chance que quelqu'un ait vu ou entendu un élément incriminant. Les seuls qui savaient quelque chose étaient les coupables, et aucun d'eux n'allait déraper.
En plus, les aurors étaient déjà lancés sur une autre piste, focalisés sur l'explosion meurtrière qui avait secoué le pays. Même Lupin, en les désignant comme coupables, avait aidé à détourner l'attention sans s'en rendre compte : les aurors cherchaient des tueurs de nés-moldus, pas des rivaux politiques.
Au moment où Pansy ressortit du bureau, raide et pâle comme la mort, Hermione eut une montée d'angoisse, mais la Serpentard leva un pouce en l'air en passant devant sa porte et continua son chemin comme si de rien n'était.
Lorsque le tour d'Hermione fut arrivé, en fin d'après-midi, elle pensait que le plus dur était fait, et que le danger était passé. Pansy n'avait pas craqué. Chacun des députés semblait soulagé après l'entrevue. Donc, ce n'était plus qu'une formalité.
"Miss Granger, je vais être tout à fait honnête avec vous, comme vous l'avez été avec moi."
Hermione se tendit imperceptiblement sur sa chaise, incertaine.
"Les choses ne se présentent pas bien du tout. Si je résume... commença Harmon en fouillant parmi ses piles de notes. La très grande majorité de ce groupe avait un mobile pour faire disparaître la députée Pods."
Hermione sentit le poids du monde s'abattre sur ses épaules.
"Il ne fait aucun doute que Laura Pods était bien une taupe au sein de votre organisation. Le témoignage que m'a confié l'auror Potter suffirait à le prouver, mais d'autres preuves apportées par Monsieur Zabini appuient ces constatations. A partir de là, votre groupe est suspect. Mais vous et vos députés ne vous êtes pas contentés d'avoir l'air un peu suspects. Votre assistante, Miss Greengrass, a dupliqué l'agenda personnel de Pods pour espionner ses activités, ce qui me laisse penser qu'elle soupçonnait son double-jeu. Elle a également comparée Miss Pods à une truite dans un mémo interne. Ce qui, je vous l'accorde, ne constitue pas une menace caractérisée. Par contre, Monsieur Flint a proféré des menaces contre la taupe à de multiples reprises, de façon très publique, et très graphique. Je cite... Le traître est ici, je veux qu'il sache qu'on va le trouver, et qu'il va payer, ce n'est pas des menaces en l'air. Monsieur Zabini a engagé un repris de justice pour traquer Pods en tout illégalité suite à la publication, non moins illégale, d'une sextape mettant en scène Hestia Carrow. Qui devient donc une suspecte également, dans la mesure où elle aurait pu souhaiter se venger. Le même motif s'applique à Monsieur MacLaggen, après la révélation de ses indiscrétions auprès de multiples sorcières. Miss Parkinson a également proféré des menaces en hurlant, devant témoins, je cite encore... Qui que tu sois, sache qu'on va te trouver, et te tuer, saloperie de taupe. Un vocabulaire très fleuri. Puis Monsieur Dubois est entré dans la liste non restreinte des suspects, lorsque Pods a informé la presse d'une évasion fiscale dans sa famille, après qu'il lui a confié cette information. Il a reconnu l'avoir soupçonnée, sans n'avoir aucun preuve, ce qui ne l'empêche pas d'avoir peut-être essayé de la confronter à ce sujet. Il est également apparu que Miss Pods aurait exécuté une fellation sur Drago Malefoy il y a trois ans, ce qui peut mener à des conflits personnels dans la mesure où il est devenu son supérieur après coup. Dois-je continuer ?"
Hermione secoua la tête, submergée par le portrait dévastateur qu'il venait de brosser de leur groupe. Nauséeuse, elle avait vraiment failli vomir la tisane de Rogue à la mention de la fellation.
"Non seulement chacun ici, individuellement, avait une raison de vouloir Pods écartée du tableau, mais collectivement, le ressentiment à son égard est assez colossal. Peu de députés ont semblé inquiets, quasiment aucun n'avait de choses agréables à dire à son sujet ou même l'air de la connaître à un niveau personnel. Hormis Monsieur Malefoy, évidemment, suite à cette... performance buccale. C'est à se demander si cette personne appartenait vraiment à ce groupe. Pire, vos députés ont tous admis que la disparition de Laura avait coïncidé avec l'arrêt des ragots dans la presse, et que par conséquent ils avaient été assez soulagés. Ce qui, en un sens, les exonère un peu puisqu'ils n'ont réalisé qu'elle était la taupe qu'après sa disparition. D'ailleurs, ce qui est curieux, c'est que personne ne semble avoir remarqué à quel moment elle a disparu. Aucun d'entre vous n'a su me donner une date précise, encore moins une heure. Vous êtes la seule à avoir essayé de la joindre par téléphone avant que la plainte de Monsieur Lupin soit déposée. Par ailleurs, j'ai consulté vos registres, et les allées et venues de Miss Pods corroborent votre version. Elle ne passait que très peu de temps ici. Et elle avait effectivement un comportement étrange, si l'on en croit ses visites nocturnes. J'ai interrogé les Progressistes, et personne ne semblait au courant de son rôle ici. Pas même monsieur Lupin, mais il est assez aisé de démontrer qu'il a menti dans la mesure où un témoin affirme l'avoir vu, avec Pods, dans l'allée des Embrumes. Ma conviction, c'est que lui et Pods n'avaient mis personne dans la confidence."
Hermione ne savait pas si elle devait prendre la parole ou continuer à se taire, alors dans le doute, elle resta silencieuse, et regarda Harmon exposer ses conclusions avec un air serein.
"Miss Granger, si je vous dis tout ça à vous, c'est parce que vous faites partie de la liste des victimes. Et je peux vous assurer que le coupable sera arrêté."
Quoi ? Alors, Harmon pensait toujours qu'il n'y avait qu'un seul responsable pour toutes ces affaires ? Car, si l'agresseur de Laura était à ses yeux le poseur de bombes, ça écartait aussitôt la piste de leur groupe. C'était une extrêmement bonne nouvelle. Hermione supprima cette pensée de son cerveau avant qu'elle ne puisse se lire sur ses traits.
"Je n'en doute pas, Monsieur Harmon, dit Hermione d'une voix mesurée.
- En l'absence de corps, d'arme du crime, d'aveux quelconques, je ne suis même pas sûr que nous puissions estimer que Miss Pods soit, avec certitude, une victime, reprit-il en soupirant. Rien ne nous dit qu'elle ne soit pas partie volontairement. Et, puisque Monsieur Lupin refuse de dire la vérité au sujet de leur entreprise secrète, je n'ai pas de raison supplémentaire de vous accuser."
Il fourragea un peu dans ses papiers en marmonnant dans sa barbe.
"Je sais que le coupable n'est pas ici. Néanmoins, je vous prierais d'être prudents et de veiller à ce que cette ambiance de guerre fratricide dans votre groupe se résolve rapidement. Toutes ces inimitiés, ces trahisons, ces cachoteries sur font de rivalité... Ça ne peut aboutir qu'à des tragédies. Je vous parle d'expérience. Votre discours, hier... C'était la bonne chose à faire. J'ose espérer que l'impulsion donnée aura des effets dans ce bureau également."
Hermione n'avait plus rien écouté après les premiers mots composant sa tirade. Il était en train de dire... Que tous les députés cités étaient, au pire, soupçonnés d'être des politiques vindicatifs ? C'était nettement mieux que de les suspecter d'avoir empalé et démembré une collègue, avant de brûler son corps dans la forêt.
"Je devais vous interroger par acquis de conscience, vous, et les Progressistes. Mais à la lumière des derniers évènements... La piste d'un groupe terroriste est privilégiée. J'ai cru comprendre que vous aviez engagé votre propre équipe de sécurité ?
- Effectivement, confirma Hermione. Drago Malefoy prend notre sécurité très à cœur, et comme les effectifs des aurors ne sont pas suffisants pour tous les députés...
- C'est une sage décision, d'après moi. Faites attention à vous, Miss Granger. Pouvez-vous avertir Monsieur Malefoy que je souhaite lui parler ?"
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Hermione marcha prudemment hors de la pièce, referma la porte, respira un grand coup, et traversa les bureaux en adoptant une posture qui, elle l'espérait, crierait au monde la paix intérieure qui l'habitait. Parce qu'elle était une innocente. Comme eux tous. C'était ça, qu'Harmon devait lire en la regardant partir.
Sitôt qu'elle fut dans le bureau de Drago - où elle entra sans frapper, elle referma la porte d'un geste sûr, et escalada le pauvre garçon assis derrière son bureau. Elle s'installa à cheval sur ses cuisses, noua ses bras autour de son cou, et le serra contre elle de toutes ses forces pour supprimer les tremblements qui la parcouraient.
"Granger...? s'étonna Drago en lui caressant le dos d'une main et les cheveux de l'autre.
- Il pense qu'on est tous innocents, on a réussi, souffla Hermione dans son cou."
Le blond ne répondit pas, et entoura son visage de ses mains pour l'attirer vers lui. Ses lèvres s'écrasèrent contre celles de la jeune femme, et ils échangèrent un baiser de célébration intense, les doigts de Drago fermement agrippés à ses mâchoires. Leurs langues finirent par se rejoindre, et Hermione oublia tout ce qu'elle était venue faire dans ce bureau en premier lieu, se frottant lascivement contre lui sans même s'en apercevoir. Elle gémit dans sa bouche, et Drago grogna, puis la réalité lui revint comme une douche glacée.
"Il veut te voir, maintenant."
A ces mots, Drago l'éjecta pratiquement de ses genoux et la déposa sur son bureau, visiblement peu inquiet pour la pile de parchemins qu'elle écrasa.
"Granger, dis-moi quelque chose de vraiment dégoutant, marmonna-t'il en fermant les yeux.
- Quoi ? coassa la Gryffondor, décontenancée.
- Non, ne parle pas, en fait, gronda le blond en reculant sa chaise à un bon mètre de distance."
Elle baissa les yeux sur l'érection très visible à travers son pantalon, et se mit à rougir jusqu'à la racine des cheveux. C'était flatteur. Et excitant.
Et très malvenu.
"Lucius et Narcissa t'ont conçu dans quelle position, tu crois ? Est-ce que les Sangs purs sont traditionnels jusque dans leur lit, ou est-ce qu'ils tentent des choses moins conventionnelles ? finit-il elle par demander d'une voix innocente.
- Parfait, répondit Drago en se levant prestement."
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Hermione erra dans le bureau de Drago pendant quelques minutes, profitant de sa soudaine absence pour calmer ses hormones en ébullition et observer son cadre de travail plus amplement. Elle avait passé beaucoup de temps dans cette pièce, sans réellement l'étudier. Elle souleva un trophée de Quidditch de l'époque de Poudlard avec un sourire attendri, avant de froncer les sourcils lorsqu'un badge Weasley est notre roi en tomba. Elle observa ses plumes soigneusement ordonnées, sa bouteille d'encre ouvragée, et reboucha machinalement le stylo-encre moldu qu'il avait abandonné dans sa précipitation. Elle n'alla pas jusqu'à espionner dans ses tiroirs, qui le connaissant devaient être méticuleusement protégés par des enchantements tortueux.
Elle se déplaça jusqu'à sa bibliothèque, où se côtoyaient d'énormes volumes anciens et, curieusement, des classiques de la littérature moldue. Des éditions originales, évidemment. De nombreux ouvrages théoriques sur l'art de gouverner étaient soigneusement classés par ordre chronologique, et au vu des post-it et marque pages qui dépassaient des volumes, il les avait étudiés avec zèle.
Elle se pencha en avant pour examiner une photographie de versions très jeunes de Narcissa et Lucius Malefoy, tout de noir vêtus, qui se tenaient la main, plantés sous un immense arbre en fleurs. Un landau d'inspiration victorienne se trouvait à côté d'eux, contenant probablement un bébé Drago.
"On espionne, Granger ? l'interrompit Blaise, la prenant en flagrant délit.
- Je... regardais, répondit brillamment Hermione."
Blaise s'avança dans la pièce, et attrapa la photo qu'elle observait avec un sourire en coin.
"Il ne parle jamais d'eux, dit la Gryffondor.
- Personne n'a vraiment envie d'entendre parler d'eux, rectifia Blaise. C'est pour ça que le ministère à jugé bon de les expatrier.
- En Suisse ? demanda Hermione, qui connaissait parfaitement la réponse pour avoir lu les compte-rendus des procès.
- Dans une résidence surveillée. Sans baguettes. Sans voir leur fils unique.
- Drago n'a pas vu ses parents depuis leur procès ? s'étrangla Hermione.
- Si, il a un droit de visite. Mais il ne l'utilise pas beaucoup, marmonna Blaise en reposant la photo. Son père... Entre Lucius et lui, ça a toujours été compliqué. Mais avec le retour de Voldemort, ça les a définitivement séparés.
- Ça a dû être une période abominable pour lui, songea Hermione.
- Tu n'imagines pas... Je ne sais pas comment il est resté sain d'esprit.
- Il a beaucoup de ressource, murmura Hermione.
- Dis donc Granger, tu t'attendris ? lança Blaise avec un rictus."
Hermione haussa les épaules, et s'autorisa un petit sourire.
"Je pourrais, dit-elle.
- Tu devrais, corrigea Blaise."
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Pansy, soulagée plus qu'il n'était possible de le décrire, avait décidé d'organiser discrètement un repas de célébration en comité réduit. Il aurait été très mal vu de fêter la fin de l'enquête de la disparition d'une collègue faute de preuves incriminantes. Le soir-même, elle invita donc Blaise, Hermione et Drago au Manoir Nott, miraculeusement conservé par l'héritier - il avait dû sacrifier une quinzaine d'autres propriétés en échange.
C'est Igor, l'irascible elfe de Théo, qui l'accueillit au sommet des marches du manoir, avec son habituel air revêche rivé au visage.
"Miss Granger est trempée, commenta-t'il avec un air réprobateur.
- Il pleut, répondit sobrement Hermione."
Il la sécha d'un claquement de doigts sans attendre son accord, et Hermione faillit s'évanouir en croisant son reflet dans le miroir de l'entrée. Ses cheveux, difficilement domesticables, étaient à présent dressés dans un désordre absolu sur son crâne, formant une masse frisée volumineuse qui n'avait rien à envier à une coupe afro.
"Oh, Granger, inutile de te coiffer pour assister à un dîner chez moi, tu as bien fait de ne pas faire d'efforts, ricana Théo en faisant son apparition. Attention à ne pas blesser quelqu'un, par contre.
- Nott, le rabroua Pansy, qui venait d'arriver avec un tablier autour des hanches.
- Parkinson, qu'est-ce que c'est que cet accoutrement ? Vous vous êtes données le mot pour avoir l'air de souillons à ma table ? Ou il y avait un dress code dont je n'ai pas été informé ?
- Tu vas être privé de dessert, Nott, c'est une certitude.
- Si c'est toi qui l'a cuisiné, c'est une bénédiction.
- Stupide cancrelat !
- Sale peste !
- Assez, les coupa Igor d'une voix stridente."
Au grand étonnement d'Hermione, les deux Serpentards obtempérèrent, non sans se jeter un regard des plus venimeux.
"J'ai cru comprendre que tout s'était bien passé avec le Yankee ? demanda Nott, comme si sa prise de bec avec Pansy ne venait pas d'avoir lieu.
- Oui. Enfin, il pense qu'on est une bande de sauvages sans scrupules moraux, mais au moins on est pas catalogués comme assassins.
- C'est un soulagement, avoua Pansy en tripotant son tablier.
- C'est derrière nous, la rassura Hermione en enlevant son manteau, puisque Igor tendait un bras impatient vers elle en tapant du pied au sol.
- Vous allez vous rendre à l'enterrement de la Progressiste ? s'enquit Nott.
- Est-ce qu'on ne pourrait pas poursuivre cette conversation au salon ? suggéra Pansy.
- Depuis quand tu es une maîtresse de maison à cheval sur l'étiquette ? râla Théo.
- Nott, t'es un hôte épouvantable, remarqua Hermione en essayant d'aplatir ses cheveux sur son crâne.
- C'est vrai. Tu accueilles tes invités en les insultant, tu critiques la cuisinière, tu laisses ton elfe martyriser Granger... Quoi, Igor ? Tu es impoli !"
Igor jeta un regard torve à la Serpentard, et quitta la pièce dans un craquement sec.
"Bravo, il est vexé, maintenant je vais devoir le couvrir de cadeaux pour qu'il accepte de travailler à nouveau... maugréa Nott.
- Cet elfe te mène par le bout du nez !
- Il est indispensable à ma survie ! C'est grâce à lui que ce manoir n'est pas devenu un tas de ruines puantes.
- Il profite de ta faiblesse !"
Hermione cessa de les écouter mener leur petite dispute domestique, et se contenta de balayer du regard le plafond peint avec soin. Elle le trouva d'abord somptueux, avant de réaliser que la scène peinte représentait en réalité des moldus, piétinés par des sorciers à chapeaux pointus qui tenaient des serpents dans leurs mains. Elle frissonna, horrifiée.
"Où est mon Whisky ? s'impatienta Blaise dans le lointain.
- Tu peux pas arrêter de boire une minute ? J'essaye de te raconter quelque chose, râla la voix de Drago.
- Vladimir ? Vladimir ? cria une troisième voix."
Et Hermione fit la rencontre du vampire dont Rogue était amoureux de façon totalement inopinée. Face à elle, derrière Pansy et Nott qui continuaient à se disputer, se tenait une personne qui l'observait, les mains dans les poches.
Il n'avait pas tout à fait un aspect de prédateur. Pas dans une mesure où ses sens se seraient mis en alerte. Il était grand, élancé, à la limite de la maigreur. Il avait des traits très purs, bien ciselés, et portait un costume ajusté. Planté à plusieurs mètres d'elle, il ne fit pas de mouvement dans sa direction, et se contenta d'agiter la main doucement dans sa direction. Le geste, presque timide, la laissa pantoise.
Elle ne prit pas le temps de réfléchir davantage, et s'avança vers lui, main tendue pour le saluer.
Vladimir - puisque c'était son nom - marqua une seconde d'hésitation, et secoua rapidement la main tendue dans la sienne, dure et glacée.
"D'ordinaire, les gens ne s'approchent pas de moi si volontiers, l'informa-t'il avec détachement.
- Vos yeux ne sont pas rouges, dit Hermione.
- Vous êtes attentive aux détails, répondit Vladimir."
Ils se jaugèrent en silence, sans hostilité aucune, pendant que le duo infernal de Serpentards continuait à se prendre le bec.
"Je ne me nourris pas de sang humain, l'informa-t'il.
- Vous vous nourrissez de spiruline ? supposa Hermione avec un demi-sourire.
- Entre autres. C'est très riche en fer.
- Vlad...imir ? intervint Rogue en déboulant dans le hall d'entrée, interrompant en même temps la conversation et la dispute en cours. Je me demandais où tu étais passé."
Le vampire esquissa un rictus et Hermione, troublée, fut forcée de reconnaître qu'il avait un étrange air de ressemblance avec Drago à cet instant.
.
"Le rôti est cru, fit remarquer Igor en déposant malgré tout le plat au centre de la table.
- Oh ! sursauta Pansy, confuse.
- Ça me convient parfaitement, dit Vladimir avec un air approbateur.
- Tu vois Nott, il y a des gens qui apprécient ma cuisine, triompha Pansy en tirant la langue.
- Vladimir mange aussi des insectes et des coquillages crus, l'informa Rogue avec un froncement de nez.
- Des substituts à l'hémoglobine... songea Hermione dans sa barbe.
- Miss Granger, je vous serais gré de ne pas traiter Vladimir comme un de vos cas d'étude, coupa Rogue d'une voix tranchante."
Drago arrêta le mouvement de sa main, suspendant son verre en l'air, et plissa les yeux en direction de son parrain.
"Oh, je suis désolée, je ne voulais pas..."
L'intéressé coupa les justifications d'Hermione d'un geste de la main.
"Au contraire, je suis ravi qu'une personne aussi brillante s'intéresse à mon régime alimentaire. Peut-être auriez-vous des suggestions pour le diversifier ? Il n'y a pas encore beaucoup d'études s'intéressant à un régime sans sang humain, et je dois reconnaître que je manque de matériel.
- Eh bien, en réalité... De nombreux moldus ne consomment plus de viande, et ont donc trouvé des substituts alimentaires qui répondent à leurs besoins nutritionnels. Par exemple..."
Drago jeta un regard triomphant à Rogue, et tous furent forcés d'écouter en silence la démonstration d'Hermione, qui avait captivé Vladimir. Lorsque ce fut fait, elle déplia sa serviette d'un geste ample et entreprit de découper son morceau de viande crue avec précaution. Les conversations reprirent autour de la table, et Drago profita de l'inattention générale pour marmonner un sort destiné à cuire la tranche de rôti d'Hermione. Cette dernière s'enflamma brièvement, et prit une teinte rosée beaucoup plus appétissante.
Hermione, fascinée, se pencha vers le Serpentard.
"Quel sort tu as utilisé ?
- Barbecurus pronto, chuchota Drago.
- Tu viens de l'inventer, l'accusa Hermione en plissant les yeux."
Le blond ricana, et haussa les épaules.
"Tu l'as mérité, souffla-t'il.
- Pourquoi ? grimaça Hermione, vexée, et frustrée de ne pas en savoir plus.
- Pour m'avoir volontairement excité avant de m'envoyer dans le bureau du Yankee."
Hermione releva la tête pour vérifier que personne n'avait entendu ça, et tamponna ses lèvres du bout de sa serviette pour reprendre le contrôle. Elle s'agita un peu sur sa chaise, et sentit la main de Drago se poser sur sa cuisse, beaucoup trop haut pour que ce soit un geste acceptable lorsqu'on dînait avec Severus Rogue.
Elle attrapa son verre d'une main tremblante, essayant d'ignorer au mieux la main de Drago qui remontait doucement sur sa cuisse, caressante, s'enroulant autour d'elle comme le serpent qu'il était. Elle cogna un peu le verre contre ses dents, et fut obligée de le reposer brutalement lorsque la main de Drago s'infiltra sous la couture de sa culotte. Le verre cliqueta contre son assiette, et tout le monde la regarda. La main de Drago stoppa aussitôt son ascension, mais il la laissa là, rendant Hermione extrêmement nerveuse, partagée entre l'envie de lui arracher sa braguette avec ses dents ou de lui planter son couteau à viande dans le bras.
Igor apporta un plateau de fromage, tout le monde se remis à discuter, et Drago caressa sa peau du bout des doigts tout en maintenant une conversation civilisée avec son parrain. Puis il se mit à gagner du terrain, s'approchant de plus en plus de sa zone à risque, provoquant des décharges électriques dans tout son corps. Affolée, Hermione essaya de se décaler, mais en bougeant elle l'obligea à tendre un peu plus la main. Lorsqu'il entra en contact avec ses lèvres, Hermione s'immobilisa comme une statue, et serra les dents pour ne pas laisser échapper de bruit incongru. Il caressa d'abord doucement, avant de lui administrer un traitement plus appuyé, décrivant des cercles qui menaçaient de déclencher une implosion à tout instant.
"Si humide, Granger, murmura Drago dans son oreille."
Elle ne put retenir un petit glapissement, qui une nouvelle fois attira l'attention sur elle, alors que Drago conservait son air impassible.
"Délicieux... fromage. L'odeur. Miam, bafouilla Hermione.
- Miam, confirma Drago."
Blaise fronça les sourcils, et fit mine de se pencher sous la table, obligeant Hermione à gesticuler étrangement et Drago à retirer sa main si vite que l'élastique de sa culotte claqua sèchement contre sa peau. Blaise, qui n'avait même pas encore fini de se pencher, lâcha un sourire équivoque et secoua la tête de droite à gauche.
Eeeet voilà Rogue, au meilleur moment évidemment ! Personnellement, j'adore Vladimir, je ne supporterai pas la moindre critique à son sujet.
En revanche, si vous souhaitez critiquer les activités louches de Drago, c'est autorisé.
