Chapter 33 - L'intrus
Le dîner à peine achevé, Hermione se leva d'un bond, faisant grincer sa chaise et les dents d'Igor.
"Pressée de partir, Granger ? la tenta Drago en arquant un sourcil."
Elle avait nettement envie de le gifler pour effacer ce petit air d'auto-satisfaction sur son visage parfait. Mais elle serra les poings, et se contenta de lui lancer son meilleur regard irrité.
"Je me demande pourquoi Granger est si pressée de prendre le large, se demanda Blaise en finissant son verre de vin.
- Miss Granger a sûrement des recherches à effectuer, supposa Rogue en levant les yeux au ciel."
Hermione avait très envie de prendre ses jambes à son cou sans plus de cérémonie. Tout le monde lui tapait sur les nerfs, et elle sentait la pression monter doucement en elle. Mais Pansy lui coupa l'herbe sous le pied, en lui fourrant dans les mains un plat à salade, embarquant elle aussi le premier plat qui lui tombait sous la main.
"Allons porter ça aux cuisines, décréta-t'elle."
Elles passèrent devant un Igor choqué, et s'engouffrèrent dans un long couloir, un escalier, un second couloir, avant d'aboutir dans un salon lourdement décoré. Puis Pansy posa son plat sur un guéridon en cerisier finement ouvragé, et planta ses mains sur ses hanches. Elles avaient l'air parfaitement incongrue dans ce décor.
"Ok, qu'est-ce qu'il a encore fait ? pouffa Pansy, à mille lieues de s'imaginer la vérité."
Hermione abandonna son plat à son tour, et s'affaissa contre le mur avant de s'éventer maladroitement d'une main.
"Il est... Est-ce qu'il y a seulement des limites qu'il n'est pas capable de franchir ?"
Pansy la regarda d'un air curieux, amusée de voir Hermione écarlate et embarrassée. Puis un éclair de compréhension passa dans ses yeux, et elle se plaqua une main sur les lèvres.
"Oh. Quelque chose de sexuel, donc, comprit la Serpentard en tapotant son index sur son menton.
- Je...
- J'avais deviné qu'il se passait quelque chose de bizarre sous la table ! Vous aviez tous les deux les joues un peu rouges et les yeux dans le vague. Bon sang Granger, assise à la même table que Rogue, sérieusement ?
- Oh. Mon. Dieu, souffla Hermione, mortifiée."
Pansy commença à glousser, se mordant l'intérieur des joues pour ne pas exploser.
"C'est atrocement gênant, marmonna Hermione en enfouissant son visage dans ses mains."
Pansy commença à ricaner plus franchement, puis son rire amplifia jusqu'à ce qu'elle ait besoin de s'appuyer sur le guéridon, et Hermione finit par l'imiter, d'abord timidement, puis très nerveusement, et elles durent s'asseoir contre le mur pour ne pas s'effondrer complètement au sol.
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Vladimir et Rogue avaient pris congé, laissant les cinq autres achever leur célébration dans l'intimité. Rogue avait probablement épuisé son quota de politesse disponible. Disséminés sur des fauteuils dans un des innombrables salons du manoir Nott, ils sirotaient un verre de Whisky en parlant de tout et de rien.
La tentative de fuite avortée d'Hermione avait eu le mérite de calmer Drago, qui semblait se sentir un peu coupable de l'avoir mise aussi mal à l'aise. Il avait donc remplacé son attitude tentatrice par un comportement non moins déstabilisant, lui jetant sans arrêt des regards anxieux, vérifiant qu'elle avait suffisamment à boire, et allant jusqu'à tapoter le coussin sur lequel elle était appuyée pour qu'elle soit confortable. Hermione lui jetait des regards curieux, mais se laissait dorloter, incapable de comprendre ce qu'il trafiquait. Tout au plus, elle haussa un sourcil circonspect lorsqu'il lui sourit spontanément.
Drago Malefoy était étrange.
Pansy avait posé ses jambes sur les genoux de Nott, qui lui massait distraitement les pieds en parlant, et Blaise avait croisé ses bras derrière sa tête, relaxé. Seuls Drago et Hermione étaient assis convenablement, droits l'un à côté de l'autre.
"Qu'est-ce qu'on va faire, maintenant ? finit par demander Pansy.
- À propos de quoi ? demanda Blaise, les yeux clos.
- Et bien, maintenant qu'on est à peu près à l'abri d'être envoyés en prison à perpétuité, on devrait peut-être faire quelque chose au sujet de ces terroristes. Non ?"
Blaise ouvrit les yeux, et chercha ceux de Drago, qui secoua imperceptiblement la tête.
"On ne peut pas faire grand chose, Pans', grommela Nott. À part rester en sécurité, évidemment."
Pansy se redressa, et retira ses jambes des mains de Théo pour s'asseoir en tailleur.
"Lupin avait raison, ces gens ciblent les nés-moldus. Et ils sont violents. C'est pas exactement inédit, pas vrai ? Peut-être qu'on les connaît. Et si... Et s'ils essayaient vraiment de reformer les mangemorts ? Je veux dire, c'est une possibilité. Je suis sûre que les aurors suivent cette piste. Ça n'a rien d'absurde, vu tout ce qu'il se passe, et la dernière fois, ça avait commencé de la même façon. La seule différence... C'est qu'on est hors de la boucle, cette fois-ci. Vous trouvez pas ça bizarre ?"
Hermione baissa les yeux sur le tapis, prodigieusement tiraillée entre l'envie de dire la vérité à Pansy au sujet des lettres, et la volonté de la protéger. Ils venaient juste d'obtenir une petite victoire, de se mettre en sécurité, et c'était pour elle que cette situation avait été la plus difficile. La replonger dans un nouveau cauchemar maintenant paraissait cruel, et elle comprenait très bien que Drago veuille l'épargner. Mais d'un autre côté... Ils étaient en train de lui mentir, et de la traiter comme une petite fille incontrôlable, prenant les décisions à sa place. Théo parce qu'il avait intercepté sa lettre, Drago et Blaise parce qu'ils l'avaient lue, elle-même parce qu'elle gardait ce secret avec eux. Et Pansy ne méritait pas ce traitement. Elle était forte, et loyale, et intelligente. Elle pouvait encaisser, Hermione en était convaincue.
Néanmoins, ce n'était pas sa décision, et si quelques semaines auparavant elle aurait bravé l'interdiction de Drago et aurait certainement tout déballé, elle avait depuis appris à lui faire confiance, et à suivre l'instinct du blond. Il n'avait qu'une chose en tête, c'était de les protéger, eux tous. Il connaissait Pansy mieux que personne. Alors elle se mordit la lèvre, et se résolut à se taire, au moins pour le moment.
"C'est une possibilité que ce soit des mangemorts, mais ce serait stupide de leur part, répondit Drago en haussant les épaules. Les généraux sont morts, à Azkaban, ou en résidence surveillée. Les familles de puristes ont été décimées. Tout ce qu'il reste, c'est des second couteaux pas vraiment convaincus.
- Nous, dit Pansy. C'est peut-être quelqu'un de notre génération. C'est exactement ce que j'essayais de vous dire ! Et si ces gens voulaient... J'en sais rien, nous recruter ?"
Nott se racla maladroitement la gorge, et Drago soupira lourdement. Quelques secondes d'un silence pesant s'écoulèrent. Hermione se décida à fixer le plafond, incapable de regarder Pansy dans les yeux. Tout cela lui était hautement inconfortable.
"C'est ce qu'ils font, Pans'. Ils recrutent. On est soit avec eux, soit contre eux, il n'y a pas de troisième voie dans ce cas là, lâcha le blond à la surprise générale."
Théo et Blaise le fixèrent avec un drôle d'air, et Pansy plissa les yeux dans sa direction. Hermione retint son souffle, épiant la réaction de Pansy. Drago n'aurait jamais confirmé ses soupons s'il n'avait pas prévu de tout avouer, et cette sincérité soudaine et spontanée prit tout le monde de court.
"Comment tu peux en être si sûr ? s'étonna Pansy, méfiante.
- On a reçu des lettres. Nous quatre, pas Granger évidemment. Rogue aussi. Le père Carrow, et Flint également. Et sûrement des tas d'autres, annonça Drago d'une voix calme et mesurée. C'était un ultimatum, soit on les rejoignait, soit on devenait leurs ennemis."
Et avant que Pansy ne puisse se mettre à l'invectiver, il leva une main en l'air et planta ses yeux dans les siens.
"Tu n'étais pas en état d'apprendre ça, pas avant d'avoir mis Pods derrière nous, pas avant d'avoir affronté l'interrogatoire d'Harmon. On allait te le dire, on attendait juste que la première menace soit passée. Pans', t'étais un bordel émotionnel sans nom, et on a juste reculé le moment de te l'annoncer. C'était ma décision. Blaise et Théo n'y sont pour rien."
Pansy avait vraiment l'air d'avoir envie de lui arracher la tête, et elle le fixa dans un silence glacé, les poings serrés. La main droite d'Hermione s'approcha instinctivement de sa baguette, prête à lancer un sort de protection à Drago dans l'hypothèse ou Pansy se jetterait sur lui toutes griffes dehors. Mais, au bout d'une longue minute, elle secoua la tête en soufflant bruyamment. La main d'Hermione retomba sur le canapé, inerte.
"Pas la peine d'endosser la responsabilité pour ces deux abrutis. Vous avez menti tous les trois ! accusa-t'elle en jetant un regard noir à Nott, qui se tassa sur son canapé.
- Granger aussi savait, dit-il en pointant la Gryffondor du doigt."
Hermione émit un petit halètement, et Drago leva les yeux au ciel.
"Nott, ferme-la, t'as douze ans ou quoi ? siffla Pansy sans le regarder. Bien sûr que vous saviez tous. La différence, c'est qu'Hermione aurait fini par me le dire, elle, parce qu'elle n'aime pas me mentir. Alors que vous trois..."
Elle s'interrompit, et sembla réfléchir profondément.
"Pourquoi tu as dit la vérité, toi ? questionna-t-elle Drago, qui haussa les épaules.
- Granger m'a forcé, dit-il."
Hermione haleta de nouveau. Pourquoi tout le monde dans cette pièce semblait vouloir l'accuser, et l'entraîner dans ce conflit latent ?
"C'est faux, je n'ai rien fait du tout, objecta-t-elle."
Un rictus énigmatique se dessina sur les lèvres du blond.
"Pas cette fois. Mais c'était assez facile de deviner que tu allais finir par me reprocher d'avoir caché ça à Pansy, probablement dans les 24 heures qui arrivent. Ensuite, on se serait disputés, je t'aurais dit de rester en dehors de ça, tu m'aurais traité de manipulateur et d'ami minable, j'aurais claqué une porte, et on aurait perdu un temps fou. Disons que j'ai coupé au plus court, expliqua-t-il avant de finir son verre d'un trait.
- Oh, dit Hermione, qui voyait le film de ce qui aurait effectivement pu se passer défiler devant ses yeux.
- Donc... ça va être comme ça tout le temps, maintenant ? demanda Blaise, qui s'était prudemment tenu à l'écart de la conversation.
- Comme ça quoi ? demanda Hermione."
Blaise se leva, et pointa un index sur elle, puis sur le blond.
"Drago va faire ce que tu lui dis, et ce qu'il pense que tu pourrais dire, et toi, tu vas partir en croisade pour lui, et attraper ta baguette dès que quelqu'un le menace ? C'est quoi la prochaine étape ? Des triplés ?"
Nott éclata de rire, écrasant son front sur l'épaule de Pansy, et c'est donc aux dépends de Drago et d'Hermione que le froid se dissipa complètement. Les trois autres riaient comme si Blaise venait de faire une remarque des plus spirituelles, tandis qu'Hermione fourrait sa main dans sa poche et que Drago regardait ses pieds.
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Seuls dans le parc du manoir, Hermione et Drago marchaient en silence dans la nuit, en direction du point d'apparition. Depuis la remarque de Blaise une bonne heure auparavant, ils avaient soigneusement évité de s'adresser directement la parole ou de se tenir trop près l'un de l'autre. D'abord parce qu'ils méditaient en silence dans leur coin, ensuite parce que le fruit de leur réflexion les déstabilisait trop pour qu'ils puissent l'évoquer. Et aussi parce que les trois autres les scrutaient avec un petit sourire en coin. La vérité, c'est que Blaise avait eu raison sur toute la ligne. Drago tenait compte de l'avis d'Hermione et commençait à se comporter de manière décente sans que personne ne lui force la main, et Hermione avait réalisé une cascade médiatique risquée pour le sauver, avant d'envisager de protéger son corps d'une attaque de Pansy avec sa baguette. Ce qui était un poil excessif.
Tout cela était très dérangeant.
Le gravier crissait sous leurs pas, le froid mordant les forçant à avancer rapidement.
"T'as eu raison de dire la vérité à Pansy, souffla Hermione, qui commençait à ne plus supporter ce silence entre eux.
- Je sais, répondit-il sans la regarder.
- Tu n'es pas un ami minable, ajouta-t'elle.
- Je sais."
Hermione arrêta de parler et fronça le nez. Visiblement, il n'était pas d'humeur à tenir une conversation civilisée. Il continuait à regarder devant lui, sa baguette illuminée tendue, et le menton enfoncé dans son col. Ils poursuivirent leur avancée, et lorsque Hermione sursauta violemment à la vue d'une taupière en forme de dragon, c'est tout juste si Drago esquissa un grognement amusé. Un peu humiliée, la courageuse Gryffondor fit mine de l'ignorer.
"J'ai fait quelque chose de mal ? finit-elle par demander, incapable de tenir plus longtemps."
Le blond leva les yeux au ciel pour la centième fois de la journée.
"Non, Granger. J'ai froid, et j'ai envie de rentrer, alors avance."
Cet échange était pour le moins lacunaire. Hermione marmonna quelques mots dans sa barbe et accéléra la cadence pour le rattraper, puisqu'il semblait ne faire qu'allonger l'amplitude de ses pas pour la semer. Ils finirent par franchir les portes du manoir Nott, et Drago stoppa enfin sa course folle.
"Tu aurais attaqué Pansy, tout à l'heure ? demanda-t-il d'un ton neutre."
Hermione émit un petit rire.
"Non, je t'aurais protégé toi, pour qu'elle ne puisse pas t'attaquer, rectifia-t'elle.
- Et si ça avait été quelqu'un d'autre que Pansy ? insista-t'il.
- J'imagine que ça dépendrait de la personne, répondit-elle évasivement, ne comprenant pas où il voulait en venir avec son interrogatoire.
- Disons que c'était Lupin."
Hermione plissa les yeux et attrapa l'épaule du blond pour le forcer à lui faire face.
"Qu'est-ce que tu me demandes, exactement ?"
Drago haussa les épaules, et regarda quelque part dans le lointain.
"Tu veux savoir si je ferais du mal à quelqu'un pour te protéger ? supposa Hermione doucement.
- Je le ferais pour toi, lâcha Drago en la regardant droit dans les yeux. Je devrais pas te dire ça, mais je le ferais. Sans hésiter.
- Je sais. Je devrais pas te dire ça, mais j'aime savoir que tu le ferais."
Cet aveu sembla surprendre Drago, qui arqua un sourcil et esquissa un geste vers elle, avant de laisser retomber sa main le long de son corps.
"Je sais qui tu es. Tu n'as pas besoin de changer parce que tu penses que c'est ce que je veux, Drago. Je ne veux pas du tout que tu te forces à être quelqu'un d'autre. Je... Je ne déteste pas qui tu es.
- Oh, répondit le blond, une lueur dans le regard. Même quand ma main est dans ta culotte et que tu es assise en face de Rogue ?
- Ne force pas ta chance, gloussa Hermione en lui assénant une tape sur le torse."
Elle y laissa sa main, incapable de rompre le contact. Les yeux de Drago tombèrent sur ses doigts, puis remontèrent se planter dans les siens, et il finit par dériver vers ses lèvres. Ils savaient tous les deux ce qui allait se passer. C'était inévitable. Et, une fraction de secondes plus tard, Drago avait fait un pas en avant, enroulé un bras autour de la taille d'Hermione, qui s'était blottie sans réfléchir contre lui. Ils s'embrassèrent avec une lenteur et une douceur inhabituelles, loin de leurs échanges fiévreux. Drago prenait son temps délibérément, avançant et reculant, donnant de petits coups de langue, mordillant, et Hermione s'accrochait à lui, lui rendant son affection avec la même intensité. Cette fois, c'était différent. Ce n'était pas juste un désir physique, un besoin urgent qui les traversait et les secouait et les faisait entrer en collision d'un avec l'autre. C'était un baiser chargé d'affection et de questions. Drago passa sa main glacée sous le pull d'Hermione, et la pressa un peu plus contre lui. Ils étaient si proches, cherchant le plus de contact possible, qu'une simple feuille de parchemin n'aurait pu se glisser entre eux.
Petit à petit, le baiser se fit plus urgent, et ils oublièrent le froid ambiant. Hermione se mit à émettre de petits bruits qui tendirent Drago, et en réponse il laissa ses mains parcourir son corps, attraper, caresser, à tel point qu'elle se demanda s'il était possible de coucher avec quelqu'un debout et avec son manteau sur le dos.
Incapables de réfléchir correctement, encore moins de se décoller l'un de l'autre suffisamment de temps pour parler ou pour transplanner, Drago enserra la lèvre inférieure d'Hermione entre les siennes, et glissa sa main sous sa jupe pour la seconde fois de la soirée. Il la laissa remonter le long de ses cuisses, en caressant l'intérieur de ses doigts froids, et lui arracha un gémissement incontrôlé. En réaction, Hermione sentit ses jambes trembler, et décida de s'accrocher à la ceinture du blond, qui se trouvait à portée de ses doigts de façon très opportune. Elle tira dessus lorsque Drago entreprit de la caresser par dessus son sous-vêtement et, complètement débordée par ce qu'elle ressentait, elle finit par la défaire d'un coup de poignet vigoureux. Le blond exhala un soupir brulant dans sa bouche, et ses doigts passèrent enfin la barrière de tissu de sa culotte. Elle allait vraiment lui sauter dessus, ici et maintenant, et il n'avait plus le choix.
La jeune femme enfonça lentement sa main dans son pantalon, franchit la barrière de son boxer, et enroula sa main autour de lui.
"Froid, Granger, grogna Drago en enfonçant un doigt dans son intimité."
Elle enfonça son visage dans la cape du blond, prenant complètement appui sur lui, et c'est ainsi qu'ils se conduisirent mutuellement à l'orgasme debout devant le portail du manoir Nott.
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Frigorifiés mais hautement satisfaits, ils finirent par réussir à transplanner, et Hermione eut la présence d'esprit de prévenir Harry qu'elle ne rentrerait pas ce soir là.
"On fait le mur, Granger ? ricana Malefoy en lui tendant un mug brûlant. Papa Potter ne va pas être content.
- Papa Potter sera surtout soulagé que ton équipe de mercenaire n'ait pas à rôder autour de sa maison cette nuit, répliqua Hermione en lui tirant la langue."
Le blond continua à rire, et se laissa tomber à côté d'Hermione sur le canapé, face au feu qui crépitait dans la cheminée, exactement comme le soir où ils avaient cédé à leurs instincts primaires pour la première fois. Des flashs particulièrement graphiques taraudaient Hermione, effroyablement consciente de leur proximité, de l'odeur de Drago, du bruit de sa respiration régulière, de son genou qui effleurait le sien. Elle se tourna légèrement vers lui, et eut la certitude qu'il était en train de penser exactement la même chose qu'elle.
Il se pencha pour attraper un plaid et le tendit à Hermione sans un mot, qui s'enroula dedans maladroitement d'une seule main. Il ajusta machinalement un coin de la couverture sur son épaule, et lui sourit, envoyant une volée de petites explosions dans le cœur de la Gryffondor. Les sourires de Drago étaient rares, et lorsque cela arrivait, le monde cessait de tourner sur son axe. Elle lui rendit son sourire par-dessus son mug, et but une petite gorgée, avant qu'il ne heurte gentiment son épaule avec la sienne. Ils pouffèrent un peu, échangèrent un regard en coin, et Drago posa sa main sur son genou, sans arrière pensée. Juste pour la toucher, et la sentir sous ses doigts.
"On dirait des Poufsouffles, remarqua-t'il.
- Des Poufsouffles de 16 ans, précisa Hermione en hochant la tête.
- Heureusement que Zabini n'assiste pas à ça.
- Il en a déjà trop vu, ce soir, maugréa la Gryffondor."
Drago pivota sur elle, et pressa un peu son genou.
"Tu m'en veux ?"
Elle secoua la tête avant d'avoir eu le temps de réfléchir. Elle aurait peut-être dû lui en vouloir de sa conduite fortement inappropriée. Ça aurait pu très mal tourner, et ils avaient eu de la chance que Rogue ne remarque rien. Sans quoi, leur seule option aurait été de se défenestrer par la baie vitrée du manoir avant que la honte n'ait le temps de les rattraper. Mais... aussi sage qu'elle soit, Hermione devait reconnaître qu'elle avait adoré ce frisson d'adrénaline, ce contact entre eux que personne ne pouvait vraiment percevoir. Elle avait adoré qu'il ose, qu'il prenne ce risque, qu'il soit incapable de garder ses mains pour lui. Elle se sentait puissante, et désirable, et pleine d'une sensualité nouvelle.
"C'était... intéressant, se contenta-t-elle de répondre, en absorbant une nouvelle gorgée.
- Je ne m'attendais pas à ce que tu me laisses faire, à vrai dire. Je me suis un peu laissé emporter, du coup, reconnut-il."
Ils échangèrent un autre regard chargé d'électricité, à nouveau près à retenter cette expérience intéressante. Mais Drago se figea brutalement, porta son poing serré contre son menton, et regarda dans le vide. Hermione posa aussitôt sa tasse sur la table basse, et enroula sa main autour de sa baguette. La ressemblance de Drago avec Harry, lorsqu'il voyait à travers sa cicatrice, avait été tellement vive qu'elle sentait le danger.
"Drago ? appela-t'elle doucement, sans oser le toucher."
Il se leva à son tour, désorienté, et abaissa d'une main la baguette d'Hermione.
"Quelqu'un... Quelqu'un vient d'entrer au manoir."
Hermione fronça les sourcils.
"Tu l'as senti ?"
Il hocha la tête, et se passa nerveusement une main dans les cheveux.
"Ça pourrait être quelqu'un du ministère ? Un auror ?
- Non, définitivement pas. Je sais quand ils sont là, mais ça... C'était différent. Ça semblait étranger. Et... intrusif.
- Quelqu'un a forcé le passage ? s'inquiéta Hermione. Mais ça devrait être impossible. Entre les protections du ministère et la magie propre du manoir... Comment c'est possible ?
- C'est théoriquement impossible. Je comprends pas, marmonna Drago.
- Tu veux qu'on prévienne Harry ?
- Surtout pas. Le ministère ne doit pas savoir que les protections ancestrales sont encore actives. Je te rappelle qu'on a enterré un cadavre, là-bas. Et... Et ils vont vouloir que je les désactive. Je ne peux pas leur dire que je sens tout depuis le début.
- Alors, allons-y nous même, décréta Hermione."
Le visage de Drago se figea dans une grimace qui aurait pu être comique dans d'autres circonstances.
"Granger, tu veux t'introduire illégalement dans une propriété du ministère en pleine nuit, en sachant qu'un intrus probablement dangereux s'y trouve, et avec moi comme seule compagnie ?"
Hermione haussa les épaules, et croisa les bras contre sa poitrine.
"Tu l'as dit toi-même, le ministère ne peut pas t'empêcher d'entrer au manoir, ni s'en apercevoir. On a juste à... eh bien, entrer, regarder, et ressortir.
- On ne sait pas ce qu'on va y trouver, temporisa Drago en se mordant la lèvre. Qui que ce soit... C'est quelqu'un de suffisamment calé en magie noire pour franchir les barrières.
- Est-ce que..."
Hermione ferma brusquement la bouche, n'osant pas aller au bout de sa suggestion. Elle ne savait pas très bien ce qu'elle était supposée savoir ou non, ni même si Drago avait envie d'aborder ce sujet avec elle, ou avec quiconque.
"On devrait y aller sans perdre de temps, reprit-elle en attrapant la main du blond.
- Est-ce que quoi, Granger ? Pose ta question, ordonna-t'il en serrant un peu ses doigts entre les siens.
- C'était stupide, répondit évasivement la Gryffondor.
- Peut-être pas. Vas-y, demande-moi... Je ne vais pas m'énerver contre toi, lui assura le blond.
- Je... Est-ce que ça pourrait être possible, peut-être, que... Que ce soit tes parents ?"
Drago se crispa légèrement mais ne fit pas de mouvement pour se replier. À la place, il fronça les sourcils.
"Ils n'ont pas de baguette, et ils sont enfermés à des milliers de kilomètres d'ici. Je ne vois pas très bien comment ils auraient pu entrer en Angleterre sans que le ministère en soit informé. Et... Je connais leurs signatures. J'aurais su que c'était eux."
Hermione hocha la tête, pensive.
"C'est pourtant quelqu'un de ta famille, non ? Pour que le manoir le laisse entrer... C'est une question de sang, pas vrai ?
- Ça devrait l'être... Mais il n'y a plus de Malefoy susceptible d'être là-bas, à part moi.
- Il faut qu'on y aille pour en avoir le cœur net."
Cette fois-ci, Drago semblait plus décidé à accepter l'éventualité de remettre les pieds au manoir. C'est donc sous un flot d'émotions contradictoires qu'il enfila ses chaussures, effectuant mécaniquement une suite de gestes simples et coordonnés sous les yeux inquiets d'Hermione, qui voyait bien que derrière son comportement placide se cachait un tumulte angoissé.
C'était sa maison, son foyer, c'était une bâtisse qui avait abrité sa famille pendant des siècles et des générations. Il y avait appris à parler, marcher, voler, il avait joué à cache-cache avec Blaise et Théo dans les longues enfilades de pièces, lu dans la bibliothèque aux hauts plafonds, traîné dans les cuisines à des heures indues pour quémander des biscuits aux elfes de maison. Sa chambre avait été son sanctuaire.
Et c'était devenu le quartier général de Voldemort et de sa suite, son horrible serpent s'était faufilé dans les couloirs pavés de marbre, le salon était devenu un lieu de torture, la table de la salle à manger un lieu d'exécution où les dîners se déroulaient dans l'angoisse la plus totale.
Ensuite, le ministère lui avait pris son manoir, et il n'avait su que faire de cette notion : était-il soulagé de ne plus avoir à y remettre les pieds ? Honteux d'être le premier héritier en de nombreux siècles à en avoir perdu la possession ? Nostalgique de son enfance et des rires qui y avaient résonné ? Il avait soigneusement rangé le Manoir Malefoy dans un recoin de sa tête, persuadé qu'il appartenait seulement au passé.
Et maintenant, Hermione avait trouvé une faille pour forcer le ministère à le lui rendre.
Et ce soir, il s'apprêtait à y retourner, sans savoir ce qu'ils allaient y trouver.
"Drago ? On est pas obligés d'y aller maintenant, on peut... commença Hermione.
- Si. Si, allons-y, énonça-t'il en se levant du canapé."
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Drago serrait sa baguette entre ses doigts d'une main, et l'avant-bras d'Hermione dans l'autre tandis qu'ils avançaient le plus silencieusement possible dans l'allée qui menait au manoir. Ils avaient franchi l'enceinte sans encombre, le portail en fer forgé s'était ouvert de lui-même dans un grincement sinistre pour les laisser passer, et maintenant, dans une tension palpable, ils marchaient. Drago se tenait légèrement devant elle, le menton droit, les yeux focalisés sur l'entrée du manoir. Ils franchirent le pont qui enjambait une sorte de rivière aux eaux sombres, et Hermione se rapprocha instinctivement du blond en sentant la magie qui tournoyait autour d'eux. Ce n'était pas franchement hostile, mais ça n'avait rien d'agréable non plus.
"On y est presque, articula Drago entre ses dents serrées."
Ils finirent par gravir les marches du perron mais, arrivés devant l'immense porte en bois ouvragé, Drago pivota et l'entraîna sur la gauche. Ils longèrent le mur pendant quelques secondes, puis il tapota une plaque en métal de la pointe de sa baguette.
"C'est l'entrée du personnel, expliqua-t'il à voix basse."
Plusieurs cliquetis successifs se firent entendre, et une porte apparut dans le mur en pierres grises. Hermione retint son souffle lorsqu'il tourna la poignée grâce à un sort informulé.
"J'y vais d'abord, attends-moi ici."
Hermione secoua furieusement la tête et lui emboîta le pas, s'engouffrant derrière lui dans l'embrasure de la porte. Hors de question de le laisser se jeter seul dans le vide, sans personne pour surveiller ses arrières. Le battant claqua dans un bruit étouffé dans son dos, et la Gryffondor réprima un sursaut.
"Lumos, chuchota-t'elle."
Ils se trouvaient dans un petit hall d'entrée, garni de meubles qui avaient été recouverts de draps. Curieusement, il n'y avait ni poussière ni toiles d'araignées. Le blond était figé au milieu de la pièce, sa baguette tendue devant lui, et semblait écrasé par le poids du moment.
"Drago... murmura la jeune femme en tirant sur sa manche."
Semblant sortir brutalement de sa transe, il enroula ses doigts autour de ceux d'Hermione et hocha la tête.
"Allons-y, dit-il."
Ils se remirent en marche en silence, lançant des sorts de détection à intervalles régulier pour déterminer une éventuelle présence. Ils parcoururent une distance interminable dans un long couloir, Hermione un peu en retrait tandis que Drago ouvrait une à une les portes des pièces adjacentes. À chaque fois, il n'y avait que des silhouettes inquiétantes de meubles parés de draps, d'immenses lustres en cristal qui renvoyaient la lumière projetée par leurs baguettes, et d'innombrables tableaux recouverts soigneusement par des planches de bois. Hermione n'avait aucune idée du temps qui avait pu s'écouler, mais lorsqu'ils sortirent enfin de ce couloir par une volée de marche, il lui sembla qu'ils avaient passé des heures dans le noir.
Le hall dans lequel ils déboulèrent lui était familier. Elle s'y était tenue avec Ron et Harry quelques années plus tôt, dans des circonstances très désagréables. Sa tête pivota aussitôt vers la porte du salon de réception dans lequel elle avait été torturée par Bellatrix, et sa main se contracta autour de son avant-bras sans qu'elle n'ait le temps d'y penser. Drago serra ses doigts un peu plus fort.
"Ça va aller ? demanda-t-il doucement.
- Oui. Toi ?"
Il hocha rapidement la tête, et ils respirèrent un grand coup en même temps.
"Merci, Drago, souffla Hermione.
- Hein ?
- Pour ce soir-là. Tu nous a sauvé la vie. Je sais que je t'ai déjà dit merci, à l'audience, mais... Mais je ne l'avais pas fait... Comme ça.
- C'était la seule chose à faire, répondit Drago simplement."
Il reprit alors son inspection méthodique, ouvrant une porte l'une après l'autre, Hermione postée derrière lui prête à lancer un sort au moindre bruit suspect. Elle ne savait pas très bien pourquoi elle avait ressenti le besoin de le remercier à un moment pareil, aussi longtemps après les faits, alors qu'elle savait pertinemment qu'il n'allait pas apprécier qu'elle loue ses bonnes actions. Drago détestait qu'on le félicite, ou qu'on le remercie pour le rôle infime qu'il pensait avoir joué dans la guerre.
Et puis, une part de lui refusait de reconnaître qu'il pouvait réaliser de bonnes actions, comme si c'était une honte terrible d'être quelqu'un de bien.
"Qui a besoin d'autant de salons ? grogna Hermione pour détendre l'atmosphère."
Drago émit un petit rire étouffé, et continua à analyser leur environnement à coups de baguette. Ils avaient à présent cherché dans tout le rez-de-chaussée, sans résultat, et sans noter d'élément particulier si ce n'était les quelques rubans jaunes placés par le ministère pour signaler les endroits qu'ils jugeaient dangereux.
"Le service à escargots de ma grande-tante Romilda leur a donné du fil à retordre, on dirait, nota Drago en levant les yeux au ciel."
Hermione avança bêtement sa main vers le service en argent, mais le blond la tira vivement en arrière.
"Qui sait ce que cette cinglée a fait avec la vaisselle.
- Drago... Comment on va faire avec tout ça quand il faudra préparer le manoir pour accueillir des enfants ? grimaça Hermione en avisant la quantité de rubans jaunes dans la salle à manger.
- On avisera le moment venu, répondit-il dans un haussement d'épaules. Premier étage ?"
Hermione approuva d'un mouvement de tête et ils retournèrent dans le hall pour emprunter l'escalier magistral qui conduisait à l'étage supérieur. De nouveau, ils se mirent à arpenter couloirs et pièces gigantesques en silence. Hermione essayait de ne pas désespérer, mais au vu de la surface du manoir et de la lenteur de leur progression, il allait leur falloir des jours pour en fouiller la totalité. Sans parler des nombreuses dépendances.
Les minutes passaient, identiques, et elle allait faire part de ses doutes à Drago lorsqu'il la plaqua brusquement contre un mur. Ravie de ce contact impromptu, Hermione esquissa un sourire, mais elle s'était totalement mépris sur les intentions du blond. Elle réalisa sa stupidité lorsqu'il projeta un éclair rouge devant lui. Un énorme bruit de verre brisé résonna, et Hermione projeta un sort de protection sur eux deux pour éviter d'éventuels éclats.
"Bon sang, jura Drago en se ruant en avant."
Hermione, qui n'avait rien vu ni rien compris, lui emboîta le pas. Au fond de la salle de musique dans laquelle ils se trouvaient, une vitrine avait explosé, et à ses pieds se trouvait une forme qui gémissait.
Drago se laissa tomber à genoux devant le corps, marmonnant des propos incohérents, et Hermione réprima un sursaut d'horreur lorsqu'elle comprit qui se trouvait là, blessé.
"Dobby ? hoqueta la jeune femme en s'agenouillant à son tour.
- Je... J'ai cru... Dobby ? Dobby ? l'appela Drago en balayant les débris de verre et de bois autour du corps de l'elfe."
Hermione commença à suturer les coupures à l'aide de sa baguette, et réalisa rapidement qu'il ne s'agissait que de plaies superficielles. Drago, tremblant, n'avait pas l'air d'avoir compris que l'elfe n'était pas en danger de mort. Il serrait sa petite main dans la sienne comme s'il essayait de s'excuser, visiblement affolé.
"Drago, ça va aller, dit Hermione en continuant son travail. Il doit simplement être un peu assommé. Tu ne l'as pas tué.
- Qu'est-ce que... J'ai vu quelqu'un bouger, j'ai...
- Ça va aller, répéta Hermione."
Et, comme pour prouver qu'elle avait raison, Dobby ouvrit de grands yeux, et dévisagea les deux sorciers qui s'agitaient au-dessus de lui. Aussitôt, un sourire extatique se dessina sur son petit visage pointu.
"Oh, Dobby est soulagé de vous voir, dit l'elfe d'une voix guillerette qui contrastait avec son état.
- Vraiment, Dobby ? J'ai failli te tuer, grogna Drago en l'aidant à se redresser en position assise. Qu'est-ce que tu fais ici ?
- Dobby vient de temps en temps faire un peu de ménage dans le manoir, quand les aurors ont fini de tout salir. Ils n'essuient même pas leur chaussures. Une fois, Dobby a trouvé des mégots de cigarette dans la bibliothèque."
Hermione plissa brièvement les yeux, irritée par un tel comportement. Puis elle réalisa quelque chose d'autre.
"Mais, Dobby... Tu n'appartiens plus aux Malefoy, raisonna Hermione. Lucius t'as libéré. Pourquoi tu continues à entretenir le manoir ?
- Dobby est libre de faire le ménage où bon lui semble, répliqua l'elfe. Dobby est fidèle à Drago Malefoy, même s'il n'est plus son maître. Cette maison est la sienne.
- Oh, Dobby... souffla Drago. Tu n'as pas besoin de faire quoi que ce soit pour moi... Je suis vraiment désolé de t'avoir blessé.
- Dobby pourra continuer à faire le ménage même avec une canne, Drago Malefoy ! s'exclama l'elfe en se mettant debout.
- Oh, certainement pas, objecta Drago en pointant un doigt strict dans sa direction. Pas de ménage pour toi avant que tu sois guéri."
Hermione observa l'échange entre les deux, perplexe. Elle avait toujours pensé que Dobby haïssait les Malefoy, qui le maltraitaient à coups de canne et l'obligeaient à porter des haillons. Il ne lui était pas venu à l'esprit que toute cette violence ne pouvait être imputée qu'à Lucius, et non pas à Drago qui était encore un enfant. Ce qui était stupide, puisque maintenant qu'elle connaissait Drago, elle le voyait mal martyriser une créature qui lui était aussi dévouée. La preuve en était sa panique à l'idée d'avoir blessé l'elfe.
"Où est-ce que tu vis, Dobby ? questionna Drago.
- À Poudlard, répondit l'elfe. Mais Dobby a beaucoup de temps libre.
- Est-ce que tu veux venir passer quelques jours chez moi, pour te reposer ? Tu pourras avoir ta propre chambre, et... commença le blond.
- OH, Dobby adorerait venir s'occuper de la maison de Drago Malefoy, le coupa un elfe proche d'un état jubilatoire.
- C'est un appartement, précisa le blond. Et j'ai déjà du personnel, tu n'auras qu'à dormir, et... Lire ? Tu sais lire, Dobby ?"
Le pauvre elfe battait des cils en le regardant comme s'il était subitement devenu fou.
"Dobby est très déçu, dit-il d'une voix plaintive. Drago Malefoy devrait se débarrasser de son personnel, Dobby est bien plus compétent. Mais Dobby est d'accord pour venir quelques jours.
- ... Bien, dit Drago."
Hermione, qui avait laissé l'échange se poursuivre sans faire d'interruption, finit par se racler la gorge.
"Drago, l'intrusion de tout à l'heure... Ce n'était pas Dobby, pas vrai ?
- Impossible. Et s'il vient ici régulièrement, je l'aurais senti à chaque fois.
- Dobby... Est-ce que tu as vu quelqu'un, avant nous ?"
L'elfe haussa les épaules, et fit disparaître les débris d'un claquement de doigts.
"Non, il n'y avait personne dans le manoir quand Dobby est arrivé. Dobby sent ces choses-là. Mais Dobby sait que quelqu'un est venu ici. Le salon rouge était dérangé, quelqu'un avait ôté le drap qui recouvrait un fauteuil... Le fauteuil aux pieds en forme de serres d'aigles."
Drago porta une main à son menton, et se laissa tomber sur un banc disposé face à un piano.
"Ce fauteuil a quelque chose de particulier ? devina Hermione."
Drago appuya ses coudes sur ses genoux, la tête baissée, et soupira.
"Voldemort. Voldemort s'asseyait dessus, il devait penser que c'était son foutu trône. Il aurait appartenu à des descendants de Rowena Serdaigle, mais... Enfin, entre la légende et la vérité, à vrai dire je n'en sais rien."
Hermione fronça les sourcils, et réfléchit posément. Quelqu'un était venu au Manoir en dépit des enchantements, et avait décidé d'aller s'asseoir sur un fauteuil. C'était un étrange but à poursuivre après autant de risques à prendre.
"Ce fauteuil, est-ce qu'il a... Des pouvoirs quelconques ? reprit la jeune femme.
- Non, pas à ma connaissance, grogna le blond. Dobby, est-ce que quelque chose d'autre a bougé, ou disparu ?"
L'elfe secoua la tête en signe de négation.
"Où est ce salon rouge ? se renseigna Hermione."
Drago releva la tête vers elle, et soupira à nouveau.
"Au bout du couloir, finit-il par lâcher."
Il se releva, fit glisser sa main distraitement sur le drap qui recouvrait les touches du piano, et se dirigea vers la sortie, Dobby sur ses talons. Cette visite était difficile pour lui, c'était évident, et Hermione s'en voulait de le pousser à faire face à un artefact qui allait sans nul doute réactiver de mauvais souvenirs. Mais il fallait qu'ils sachent.
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Malheureusement, voir le fameux fauteuil ne leur avait pas appris grand chose. Ils l'analysèrent avec une batterie de sorts complète, au cas où les aurors aient raté quelque chose, sans résultat. Drago se contenta d'ensorceler le fauteuil pour qu'il ne puisse pas être déplacé, et Hermione ajouta quelques enchantements de son cru pour le camoufler efficacement. Si l'intrus revenait, il ne pourrait ni trouver le fauteuil, ni le voler.
Drago se mit ensuite à tourner en rond, se gratta la tête, s'approcha des fenêtres pour observer au-dehors, puis soupira.
« Il faut que je fasse quelque chose pour ces protections, marmonna-t-il avec un geste vague de la main.
- Tu veux les renforcer ? devina Hermione.
- Je suis le seul à pouvoir le faire. Mais... »
Il arrêta enfin ses allés et venues et jeta un regard inquiet à Hermione, qui haussa un sourcil dans l'attente d'une explication.
« Tu devrais sortir pour ça. Ce n'est pas... quelque chose que tu vas approuver, et j'aime autant que tu n'y assistes pas. »
Hermione croisa les bras devant elle, et lui jeta un regard de défi.
« Si tu comptes effectuer un rituel... avec du sang... J'aime autant y assister, en réalité. »
Le blond lui jeta un regard stupéfait, puis il pinça les lèvres.
« Ce n'est pas dangereux. Je sais ce que j'ai à faire, il n'y a aucun risque d'accident.
- Je sais. Je... ça m'intéresse. De voir. J'ai besoin de comprendre comment ça fonctionne, répondit Hermione en essayant d'avoir l'air détachée. »
Mais Drago ne mordit pas à l'hameçon, et elle comprit qu'il voyait clair dans son jeu à son petit rictus.
« Bien. Reste, si c'est ce que tu veux. Je vais faire une incision dans ma main, dit-il en levant sa paume devant lui. »
Hermione hocha la tête, attentive.
« Je n'aurai pas besoin d'une grande quantité, expliqua-t-il en coupant une diagonale nette au creux de sa main. »
Hermione se pencha en avant pour mieux voir, comme si elle assistait à un cours, et observa Drago fermer son poing, et faire goutter quelques gouttelettes de sang sur le sol.
Puis il leva sa baguette et lui fit effectuer des volutes compliquées en marmonnant indistinctement, très concentré. Lorsque la petite tache se mit à se mouvoir, et à former des symboles, Hermione écarquilla les yeux et traduisit les runes formées dans sa tête, pour ne pas le déranger : protection, loyauté, enceinte, famille.
« C'est fait, l'informa Drago tandis que le sang disparaissait entre les lames du plancher, comme absorbé par le manoir.
- C'est tout ? s'étonna Hermione, fascinée.
- Quoi, tu t'attendais à ce que je sacrifie une vierge et que j'invoque Satan ? suggéra Drago, visiblement amusé. »
Hermione fixa le plancher quelques instants, comme si elle attendait que quelque chose se passe, et comme il n'en fut rien, elle attrapa la main de Drago et guérit la plaie rapidement. Il la regarda faire en scrutant son visage, puis elle leva les yeux vers les siens.
« Merci, souffla-t-il. »
Puis ils quittèrent le manoir en compagnie de Dobby, qui marchait devant eux d'un pas guilleret.
Alors, à quoi ou à qui vous attendiez-vous dans ce manoir ?
Dobby est en vie, parce que c'est Drago qui a sauvé tout le monde des cachots - c'est sous-entendu ici, mais j'y reviendrai.
Hermione s'intéresse de plus en plus au mode de vie des Sangs purs et à leurs traditions, dans un but éducatif évidemment... Ne vous inquiétez pas, elle ne va pas basculer du côté obscur dans l'immédiat ;)
