Chapter 48 - La Suisse
Les arrangements pour leur départ impromptu avaient été faits dans la précipitation, mais avec une efficacité redoutable.
Ils n'avaient plus le temps, plus le choix, et ils avaient besoin de réponses. Vite.
Bien entendu, ni Hermione ni Drago n'était ravi à l'idée de rendre visite aux célèbres Malefoy dans leur résidence cachée dans les montagnes enneigées de Suisse. Drago n'avait pas eu le temps d'être terrifié par ces retrouvailles qui s'annonçaient glaciales, puisque la décision avait été prise la veille et qu'il avait accepté uniquement pour servir un but autre que lui-même : obtenir des informations sur le groupe terroriste qui semblait avoir des liens étroits avec les idéaux de sa famille. Tant qu'il restait concentré sur cet objectif, et seulement là-dessus, tout irait bien. Potentiellement.
Hermione, elle, s'était focalisée sur l'organisation pratique de leur visite ainsi que sur le bien-être de Drago, et avait évité de s'appesantir sur ce qu'elle s'apprêtait à affronter : un assassin qui l'avait ratée de peu à plusieurs reprises et sa femme muette. Elle avait passé son temps à épier le blond du coin de l'œil, à le cajoler discrètement et à anticiper tous ses besoins.
En réalité, il semblait mieux disposé qu'elle à faire face au couple de démons. Il avait l'air décidé et prêt à se battre.
Il avait été convenu que Pansy mènerait de front l'organisation du gala et la supervision des travaux au Manoir Malefoy, Blaise s'occuperait de la gestion quotidienne des Non-alignés, et le reste de leur équipe de détectives débutants comploterait dans l'ombre, sous la surveillance rapprochée d'Harry qui de toute façon, n'avait plus de travail.
Hermione craignait qu'ils profitent de son absence pour s'introduire à la morgue et vérifient par eux-mêmes qu'Irina avait bien été décapitée. Oui, cette idée avait bien été soulevée. Par Nott. Qui ne voyait aucun problème à aller observer un cadavre potentiellement sans tête. Curieusement, Harry n'avait pas objecté avec beaucoup de vigueur, il avait simplement souligné que si décapitation il y avait eu, le corps allait être hautement surveillé, voire altéré par le ministère.
Dobby avait insisté pour les accompagner en Suisse, en vain. Seul Drago était officiellement autorisé à visiter ses parents, et même la présence d'Hermione était techniquement interdite. Sans une intervention directe et vigoureuse d'Abelforth Dumbledore auprès du Haut-Secrétaire à l'Incarcération - oui, ce poste existait -, nul doute qu'elle aurait été, au mieux, bloquée par le Ministère.
Or, en l'état, personne ou presque ne savait qu'ils s'apprêtaient à pénétrer dans la résidence secrète du couple de parias. Cette discrétion était capitale, mais non moins dangereuse.
Hermione était nerveuse ; si quelque chose leur arrivait, combien de temps s'écoulerait avant que les services compétents en soient informés ? Est-ce qu'ils feraient quelque chose ou laisseraient planer le mystère sur la mort étrange de deux députés embarrassants ? Et si Lucius parvenait à lui ôter la vie sans faire appel à la magie ?
Après tout, il avait eu le temps d'apprendre à maîtriser des armes artisanales.
C'était un peu tard pour changer d'avis, puisqu'ils avaient transplanné cinq fois successivement pour atteindre la Suisse.
Elle réajusta machinalement son écharpe et tenta de reprendre le contrôle sur ses mains qui ne cessaient de transpirer.
"Granger, respire. Qu'est-ce que tu veux qu'il se passe de si terrible ? tenta Drago en la serrant davantage contre son flanc.
- Oh, je ne sais pas. La mort ? proposa-t-elle d'une petit voix aiguë.
- Personne ne va mourir aujourd'hui", affirma le blond.
Ils interrompirent leur avancée sur le long chemin sinueux à flanc de montagne, et redressèrent simultanément leurs mentons. Le dernier kilomètre à parcourir devait se faire à pied, puisque toute magie était prohibée autour de la résidence. Un garde qui n'avait pas l'air de parler leur langue les avait autorisés à passer, non sans avoir longuement lu et relu le formulaire de Drago, qui s'impatientait tant et si bien qu'Hermione redouta qu'il ne décide d'abréger l'attente en brisant les vertèbres du vigile.
Ça y était. Ils étaient face au chalet des Malefoy. Quelle étrange phrase à prononcer.
"J'arrive pas à croire que mes parents vivent là-dedans, grogna Drago.
- Un ultime doigt d'honneur de la part du Ministère", commenta Hermione.
Elle plissa les yeux en direction du modeste chalet en rondins. Elle se sentait observée, et il y avait fort à parier que derrière les vitres embuées de l'habitation se cachait au moins un Malefoy belliqueux.
"Est-ce qu'ils savent que je suis là ? marmonna-t-elle entre ses dents, au cas où ils soient capables de lire sur ses lèvres.
- Maintenant oui", répondit Drago en agitant la main.
Immédiatement, un rideau fut tiré et obstrua davantage la vue sur l'intérieur du chalet.
"Ils ont été prévenus hier soir de ma visite, expliqua le blond. Ne t'attends pas pour autant à ce que ma mère ait préparé un gâteau ou mis des draps dans mon lit.
- Ton lit ? balbutia Hermione, qui sentit le sang affluer vers son visage.
- Tu ne croyais quand même pas qu'on allait dormir par terre, Granger, soupira Drago.
- Dormir ? répéta-t-elle.
- Tu as raison, c'est très tentant de faire l'amour à ma copine slash née-moldue à quelques mètres de Lucius. J'aime ta façon de penser."
Il reçut une tape à l'arrière du crâne et, après un petit ricanement, pivota pour jauger sa partenaire. Hermione était enroulée dans son manteau, une écharpe et un bonnet à pompon, si bien qu'en réalité peu de choses dépassaient à part son nez rosi par le froid. Drago se surprit à sourire - en de pareilles circonstances, ça aurait dû être impossible - et se pencha pour embrasser son nez froid.
Hermione esquissa un sourire sous son écharpe et respira un grand coup.
"Eh, Granger... commença-t-il doucement. Si on a suffisamment de réponses avant la nuit, on repartira, et s'ils vont trop loin, cette réunion est terminée. Tout va bien se passer. Je ne les laisserai pas te faire quoi que ce soit. Et peut-être que je m'interposerai si tu tentes de mettre fin aux jours de Lucius. Peut-être."
Après quelques secondes d'un silence tendu, elle s'empressa de hocher la tête, et serra les doigts de Drago dans les siens.
"J'étais censée t'accompagner comme support moral, grimaça-t-elle.
- Et ? Mes parents sont terrifiants. C'est une réaction normale de vouloir faire demi-tour et de redescendre cette montagne.
- Reste juste avec moi, grogna Hermione. Ne me laisse pas seule avec ton père.
- Bien sûr que non, Granger. Même si en un contre un, je miserais sur toi, je ne prendrai pas le risque."
Hermione salua sa tentative de décrisper la situation d'un petit rire nerveux, et posa la question qui lui brulait les lèvres :
"Est-ce qu'on doit garder nos distances ? Je veux dire... Faire semblant d'être juste... collègues ?"
Drago leva les yeux au ciel.
"Évitons que ma langue atterrisse dans ta bouche devant eux, mais à part ça... Granger, on est ensemble, et j'en ai strictement rien à faire de ce qu'ils peuvent en penser. De toute façon, ils sont en train de nous épier, et je pense que c'est assez évident qu'on est un couple. Je suis à peu près sûr qu'ils lisent la Gazette, de toute façon, donc... Ils ont forcément vu des photos. Explicites. Devant le refuge."
Elle se mordit la lèvre pour ne pas sourire bêtement, ce qui n'échappa pas au blond, qui ricana.
"Allez Granger, ne traînons pas, allons-y.
- C'est comme un pansement. Il faut l'arracher sèchement d'un coup, confirma Hermione en bombant la poitrine.
- Lucius va adorer tes références moldues.
- Drago ! le rabroua Hermione en secouant la tête.
- On aurait dû venir en voiture pour le provoquer. Ou bien lui proposer une réunion par Skype.
- Arrête", pouffa-t-elle.
Il continua ses suggestions stupides pendant tout le reste du trajet, la faisant glousser sous son écharpe, jusqu'à ce qu'ils se retrouvent devant la porte du chalet. Ils restèrent debout, côte à côte, serrés l'un contre l'autre pendant une longue minute, sans qu'aucun d'eux d'amorce le moindre mouvement pour frapper. Et ils seraient probablement restés plantés là encore longtemps si la porte ne s'était pas ouverte brutalement sur un Lucius Malefoy passablement irrité.
Hermione s'attendait à beaucoup de choses. Elle imaginait un Lucius sombre, amaigri, ridé, aux cheveux gris, ou peut-être vouté, probablement plus négligé qu'à sa grande époque, pourquoi pas avec quelques dents en moins. En réalité, c'était comme s'ils avaient effectué un bond en arrière dans le temps. Lucius Malefoy était absolument, parfaitement et indubitablement identique à ce qu'il avait été dix ans auparavant.
Droit et rigide, tiré à quatre épingles, avec son regard glacial et son teint immaculé.
Hermione déglutit, déstabilisée.
Comment pouvait-il être encore cette figure aristocrate, alors qu'il vivait dans une montagne et était mis au ban de la société ? Pourquoi n'avait-il pas pris une ride ? Pourquoi sa chemise était parfaitement repassée, par quel miracle était-il si bien coiffé, et comment était-il possible que ses fichus ongles soient manucurés ?
"Père, finit par dire Drago, tirant la jeune femme de son observation méticuleuse.
- Drago", répondit Lucius sur le même ton.
Ils se regardèrent en silence, impassibles, sans que personne ne semble prendre note de la présence de la Gryffondor.
"Nous ne t'attendions plus", finit par céder Lucius.
Une lueur d'émotion fugace passa dans son regard, et Hermione remarqua un léger tressaillement dans sa main, comme s'il avait réprimé un élan vers son fils.
"Ce n'est pas une visite de courtoisie, répliqua sèchement Drago.
- C'est évident."
Enfin, le regard de Lucius pivota sur Hermione, qui se tenait immobile avec l'impression d'être dans un univers parallèle, en train d'assister à une scène où elle n'avait pas sa place.
"Miss Granger, grommela Lucius.
- Monsieur Malefoy, répondit la jeune femme en imitant son hochement de tête minimaliste.
- Qu'est-ce que c'est que ça ?" demanda-t-il soudainement.
Ce changement de ton provoqua une tension immédiate dans le corps de Drago, qui broya la main d'Hermione dans la sienne.
"De quoi parles-tu ?" s'enquit-il d'une voix rauque.
Lucius n'avait plus l'air si composé que ça, tout à coup. Il ouvrit la bouche et la referma aussitôt, clignant des yeux d'un air hébété complètement inédit. Hermione jeta un regard inquiet à Drago, qui ne quittait pas son père des yeux. Est-ce que Lucius était en train de faire un AVC ? Pourquoi Drago ne faisait rien ? Son père était visiblement en détresse. Il avait l'air en état de choc.
Elle tira sur la main de Drago pour le sortir de sa torpeur - il était plus que temps d'appeler un médicomage, ou au moins de permettre à Lucius de s'allonger. Mais Drago ne broncha pas, et l'étrange duel de regard entre père et fils recommença.
Lucius avait les yeux écarquillés et semblait très agité. À l'inverse, Drago était d'une raideur totale et ne clignait même plus des yeux.
"Peut-être devrions-nous entrer", suggéra Hermione, qui n'y tenait plus.
Lucius sembla avaler sa salive de travers, et commença à toussoter, ce qui renforça l'inquiétude d'Hermione.
"Mère ?" appela Drago en tentant d'apercevoir l'intérieur du chalet, toujours bloqué par Lucius, qui s'étouffait.
Lucius plaqua une main sur son cœur et interrompit brièvement sa salve de toux pour observer attentivement Hermione pour la première fois. Il la regarda de haut en bas, et elle eu l'impression inconfortable de subir un examen clinique complet. Le père Malefoy avait beaucoup de chance d'être mourant, sans quoi elle lui aurait expliqué que c'était très impoli de dévisager quelqu'un ainsi.
Puis il se remit à tousser, et Drago soupira comme si l'état de santé de son père l'irritait au plus haut point.
"Drago, je crois vraiment qu'il devrait rentrer, il n'a pas l'air d'aller très bien", tenta Hermione.
S'il s'était agi d'une autre personne, elle aurait tenté de lui tapoter dans le dos pour l'aider à mieux respirer, mais elle n'allait tout de même pas se risquer à entrer en contact avec Lucius Malefoy.
"Oh, il va parfaitement bien ! coupa Drago. Mère ?!
- Comment ça, il va bien ? Tu vois bien qu'il s'étouffe, Drago, c'est...
- C'est un comédien ! s'exclama le blond en regardant son père avec sévérité.
- Drago ! s'écria une voix féminine dans le dos de Lucius.
- Narcissaaaa, gémit Lucius d'une façon tout à fait pathétique.
- Peux-tu cesser cette mascarade ? s'agaça Drago.
- Comment... Mais quelle mascarade ! déclama Lucius. Narcissa, ton fils... Ton fils est ici avec cette femme."
Drago leva à nouveau les yeux au ciel, et Hermione fronça les sourcils. Elle n'avait encore jamais considéré que Lucius Malefoy était une sorte de reine du mélodrame, mais elle s'apprêtait à revoir son jugement. Comment ça, "cette femme" ?
"Lucius, pousse-toi, ordonna Narcissa en claquant sèchement des doigts. Oh, Drago !"
Elle bouscula son mari sans ménagement pour enserrer son fils entre ses bras, et Hermione remarqua avec étonnement que Lucius était à présent courroucé, voire outragé, mais qu'il n'avait plus du tout l'air d'être en fin de vie. Pire, il lui jeta à elle un regard furieux. Elle le lui rendit, plus du tout inquiète pour sa santé fragile.
"Narcissa, ton fils...
- Oh, Lucius, pourquoi il devient MON fils uniquement quand il fait quelque chose qui te déplait ?" gloussa Narcissa.
Elle relâcha Drago et caressa son visage du bout des doigts comme pour mémoriser ses traits, puis ferma les yeux en entendant les gémissements de douleur de son mari.
"Je me sens mal, fit Lucius en s'appuyant contre le mur, une main plaquée contre le front.
- Cesse ces enfantillages ! le rabroua Narcissa. Miss Granger, c'est très aimable à vous d'avoir pris la peine de venir jusqu'ici avec Drago. J'espère que votre voyage n'a pas été trop pénible. Je suis désolée pour l'accueil que vous a offert mon époux. Entrez, je vous en prie. Ne lui accordez aucune attention."
Hermione cligna brièvement des yeux, étonnée que quelqu'un lui adresse directement la parole, et poliment en prime. C'est la main de Drago au creux de son dos qui la poussa à mettre un pied devant l'autre, et bientôt, ils étaient tous plantés dans un petit salon meublé de façon rustique. Plus personne ne parlait, et c'était très embarrassant.
Lucius serrait et desserrait les poings en fixant le sol d'un air meurtrier, Narcissa observait Drago avec un air béat, et ce dernier se mordait la lèvre inférieure en contemplant le feu qui crépitait.
"Il fait chaud, dit-il d'un ton morne.
- Oh... Tu as trop chaud ? s'inquiéta soudain Narcissa, qui se mit en action et se précipita vers une fenêtre.
- Non ! l'arrêta Drago en écarquillant les yeux.
- Je peux parfaitement aérer la pièce, Drago. La température va retomber très vite, tu vas voir...
- Mère, tout va bien.
- Ça ne prendra qu'une minute !"
Narcissa ouvrit la fenêtre sans l'écouter et agita les bras comme pour faire circuler l'air plus vite. Cette tentative désespérée de satisfaire Drago brisa le cœur d'Hermione.
"Je vais attraper une pneumonie ! se plaint Lucius, qui lui n'avait pas de cœur.
- Mère, ferme la fenêtre, reprit Drago d'une voix plus douce. Je n'ai pas trop chaud. C'était... Juste une remarque, comme parler de la météo. C'était stupide."
Narcissa plissa les yeux comme si elle cherchait à savoir s'il mentait pour apaiser la situation ou si la température lui convenait réellement, mais elle ne bougea pas, et lui non plus, si bien qu'ils se fixèrent en silence pendant qu'un vent glacé pénétrait dans la pièce.
"Tu devrais commencer par enlever ton manteau", finit par intervenir Hermione en ôtant le sien.
La voix de la raison ramena Drago à la réalité, et il laissa Hermione lui enlever son bonnet tandis qu'il se tortillait hors de son manteau. Elle empila leurs affaires dans ses bras, se demanda un instant s'ils étaient supposés se débarrasser aussi de leurs chaussures, mais à nouveau Narcissa se mit frénétiquement en mouvement et s'empara de la pile avec une grimace désolée.
Drago ferma prestement la fenêtre et se frotta les mains l'une contre l'autre.
"Lucius, emmène tout ça dans le placard, je vais faire du thé. Installez-vous sur les canapés, je vous en prie."
Narcissa lâcha la pile de leurs vêtements dans les bras figés de son époux, clairement outré de se voir confier une tâche - et quelle tâche ! Ranger les vêtements d'Hermione Granger ? Ses traits se crispèrent dans un masque de fureur et Drago le dévisagea, attendant l'explosion avec les bras croisés devant lui, un sourcil arqué en signe de défi.
Sentant venir un nouveau duel de regard infiniment long, Hermione était à deux doigts d'arracher son manteau des mains de Lucius et d'aller elle-même l'accrocher. Mais contre toute attente, Lucius serra les dents et sortit de la pièce à grands pas.
Les épaules de Drago se relâchèrent imperceptiblement et il soupira, avant de crocheter le petit doigt d'Hermione avec le sien pour l'entraîner vers les canapés. Ils s'y assirent sans un mot, et elle se décala discrètement pour instaurer une distance raisonnable entre eux. Inutile de provoquer Lucius davantage.
Très peu pour Drago ! Il l'attira contre lui d'un geste brusque, si bien qu'elle était presque à cheval sur sa cuisse, dans une position étrange - et inconfortable.
"Drago... souffla-t-elle en se tortillant sur ses genoux.
- Granger ! Ne fais pas ça", la supplia-t-il entre ses dents.
Il la déposa à nouveau sur le canapé, leurs cuisses l'une contre l'autre, et s'agita pour camoufler son léger problème.
"Parfait. Une érection. Il ne manquait plus que ça", chuchota Hermione d'un air réprobateur.
Ils tournèrent vivement la tête l'un vers l'autre, lui outré et elle surprise d'avoir dit ça à voix haute, puis ils commencèrent à glousser, et lorsque Narcissa revint dans la pièce avec son thé, elle les trouva hilares.
Et la vision de son fils taciturne et grognon avec les joues rosies et les yeux brillants, le visage fendu en deux par un sourire sincère, faillit lui faire lâcher son plateau. L'avait-elle seulement vu, un jour, aussi... insouciant ?
"Le... thé", annonça-t-elle d'une voix blanche.
Ils arrêtent de rire immédiatement, à son grand regret. Elle aurait pu contempler son fils sourire comme ça pour le restant de ses jours.
Lucius revint quelques secondes plus tard en traînant des pieds, et accepta la tasse que Narcissa lui tendait. Il la porta à ses lèvres, mais interrompit son geste. Là, sous ses yeux, la jambe de son fils était enroulée autour de la cheville de miss Granger, dans un geste qui semblait assez habituel pour qu'aucun d'eux ne semble y prêter attention.
"Alors, Drago, Miss Granger, qu'est-ce qui vous amène dans ces montagnes ? lança-t-il sèchement.
- Plusieurs choses, en réalité, commença Drago en reposant sa tasse sur sa soucoupe. Tout d'abord, je voulais vous parler de la fondation que nous avons créée."
Hermione déglutit. Pourquoi avait-il dit nous ? La paupière droite de Lucius tressaillit mais il n'intervint pas.
"Je sais que vous en avez déjà entendu parler, et que vous avez échangé avec Severus à ce sujet, mais je pense que c'est important que vous sachiez exactement de quoi il s'agit, et que vous l'entendiez de ma bouche. Après tout, elle porte aussi votre nom.
- Je n'ai que faire de cette fondation, Drago. Fais ce qui te semble pertinent pour réhabiliter notre nom. Après tout, tu n'en fais déjà qu'à ta tête depuis des années avec ces histoires de politique. Tu comprends certainement mieux ce nouveau monde que nous, fais ce que tu as à faire", coupa Lucius.
Alors ça, c'était étonnant ! Hermione sentit son cœur accélérer. Ça se passait beaucoup mieux que prévu. Avec un peu de chance, ils n'auraient pas à passer la nuit dans cet enfer.
"Il ne s'agit pas que de réhabiliter notre nom, père, reprit calmement Drago. Nous avons réussi à récupérer le manoir pour y héberger la fondation, et elle abritera les enfants détenus actuellement par le ministère dans un centre de rétention...
- Insalubre. Et cruel", ajouta Hermione avec un regard appuyé.
Lucius haussa un sourcil, comme s'il ne voyait pas du tout l'intérêt de cette précision. Narcissa émit un petit hoquet, et se pencha pour prendre la main de Drago dans la sienne. Hermione le sentit se raidir.
"Drago... Tu... C'était ce centre, n'est-ce pas ? Qu'est-ce qu'ils... Est-ce qu'ils t'ont fait du mal ?"
Les muscles de sa mâchoire pulsèrent de manière visible.
"Rien que je ne puisse pas supporter.
- Évidemment ! Les Malefoy ne sont pas des mauviettes, ricana Lucius. Ces immondices du ministère. Traiter un Malefoy ainsi. Ils ont de la chance que je n'aie plus de baguette, j'aurais mis le feu à leur centre.
- Ils ne devraient traiter personne ainsi, rectifia Hermione. Aucun enfant ne mérite ça."
Elle redressa le menton. Lucius allait-il déverser son fiel habituel, et lui faire remarquer que certains enfants - le sien - valaient plus que d'autres - au hasard, les sangs de bourbe ?
"Je suppose que vous avez raison, finit-il par marmonner, peu convaincu.
- C'est une excellente chose, Drago, pépia Narcissa. Et les forcer à te rendre le manoir de tes ancêtres...
- Vous pouvez remercier Hermione pour ça", lança le blond.
Elle lui jeta un regard furieux. Personne n'allait la remercier. Elle ne voulait même pas de leur gratitude.
"Vraiment ? grogna Lucius. Et comment avez-vous procédé, exactement ?
- Oh, j'ai étudié le droit sorcier, alors j'ai simplement fait une demande étayée auprès du ministère, et...
- Et elle a menacé le fonctionnaire qui s'occupait du dossier de ruiner sa carrière, sa vie, et de faire tomber le gouvernement dans un scandale retentissant. En le faisant chanter. Et en le menaçant d'amputation.
- Drago !" s'offusqua Hermione, écarlate.
Elle se retourna vers ses parents, qui la regardaient, complètement impassibles.
"L'amputation, c'était Drago", se défendit-elle sans trop savoir pourquoi.
Lucius hocha lentement la tête, imperturbable.
"Mais tout le reste, c'était elle", insista Drago.
Qu'est-ce qu'il fait ? Hermione lui jeta un regard en coin, mais il souriait distraitement.
"Je suppose que l'amour nous fait faire des choses dont on se pensait jusqu'alors incapable, dit Narcissa d'un air rêveur.
- L'amour ? répéta bêtement Hermione. Oui, non, c'est vrai, mais ce n'était pas seulement ça."
Elle se sentit rougir jusqu'à la racine de ses cheveux, bien consciente de son aveu involontaire, et se racla la gorge.
"Le manoir est bien plus utile entre nos mains, où il sera utilisé à des fins positives, reprit-elle. C'était une décision pragmatique.
- Bien sûr, fit Narcissa. Un peu de thé ?"
Hermione tendit sa tasse à l'aveugle, et quêta à nouveau le regard de Drago, qui la contemplait d'un air bizarre.
"Elle m'a aussi aidé à faire disparaître un corps", ajouta-t-il.
Lucius se pencha un peu en avant, appuyant des avant-bras sur ses cuisses dans un geste que Drago faisait sans arrêt. Hermione était blême, à deux doigt de faire une crise d'angoisse.
"Elle est entrée dans un bâtiment en flammes pour venir me chercher. Elle a manipulé un magnat des médias pour qu'il signe mon contrat. Elle a aussi menacé un de nos collègues de lui arracher les yeux pour les faire manger à sa mère. Elle a convaincu Harry Potter de nous aider à faire tomber le ministère."
À mesure qu'il confessait la liste de ses méfaits à son criminel de père, dans un but qui lui échappait, Hermione se sentait perdre pied. Qu'était-il en train de se passer ? Elle n'arrivait même plus à ouvrir la bouche pour se défendre, ou faire stopper ce flot de crimes.
Il décrivait de petits cercles sur sa cuisse avec son pouce, et Lucius plissait les yeux.
"Miss Granger", dit Lucius.
Rien d'autre. Hermione papillonna des yeux.
"Êtes-vous absolument et irrémédiablement certaine de ne pas avoir d'illustre ascendance sorcière ? demanda Lucius.
- Je... oui ? bafouilla Hermione.
- Eh bien, c'est malheureux. Nous allons devoir changer nos coutumes, Narcissa, décréta le patriarche. Il est temps d'autoriser une... née-moldue à porter le sceau des Malefoy.
- Le sceau des... Quoi ? Drago ?
- Il vient de m'autoriser à t'épouser, traduisit Drago comme s'il lui parlait de la météo.
- Oh, Drago ! s'écria Narcissa en battant des mains. Je savais que tu trouverais un jour une femme digne de toi !"
Complètement perdue, Hermione réalisa grâce aux quelques neurones encore fonctionnels qu'il lui restait que confesser des crimes violents et des complots venait de lui faire gagner l'approbation de Lucius et Narcissa Malefoy. Visiblement, pour eux, être digne de leur fils signifiait se comporter comme un assassin sanguinaire dépourvu de morale.
Elle ne savait pas si elle devait se sentir soulagée d'être acceptée ou dévastée.
Est-ce qu'il s'attendait vraiment à ce qu'elle l'épouse, maintenant ?
Et surtout, pourquoi Drago avait-il besoin de l'approbation de ses parents ? Il avait vraisemblablement décidé de sa stratégie kamikaze sans la consulter, confiant leurs secrets à deux personnes en qui elle n'avait pas du tout confiance. Tout ça pour quoi ? Pour que Lucius lui souhaite la bienvenue dans leur famille dysfonctionnelle ?
Drago avait l'air satisfait de cette conclusion et pressait une main rassurante sur son genou.
Mais elle, eh bien... Elle avait envie de mordre cette main.
"Bien, maintenant que cette question est résolue, j'aimerais que nous passions à la suivante, décida Drago en sirotant à nouveau son thé. Vous n'êtes pas sans savoir qu'un groupe terroriste sévit en ce moment. Hermione et moi, on a besoin de votre aide."
Hermione et moi. La Gryffondor plissa les yeux mais continua son opération silence, parce qu'elle ne savait absolument pas ce qui risquait de sortir de sa bouche si elle l'ouvrait.
"Oui, nous sommes au courant. Ton parrain nous a contactés. Même les aurors nous ont interrogés, grimaça Narcissa.
- Nous allons te dire la même chose que ce que nous leur avons dit. On ne sait rien, Drago, affirma Lucius. On n'est pas exactement des individus recommandables, maintenant, avec cette surveillance constante et notre fils qui caracole dans les médias en insultant ses ancêtres.
- Tu veux dire que les terroristes ne vous trouvent pas très intéressants maintenant que vous ne pouvez plus... quoi, commettre de crimes ? siffla Drago.
- Précisément, confirma Lucius d'une voix atone.
- On a des informations que le ministère n'a pas, lâcha Hermione, pour qui le mutisme était beaucoup trop contraignant.
- Oh ?"
Lucius la regarda intensément, attendant la suite.
"Déjà, Irina Dolohov était parmi eux. Ensuite, ils ont l'air de nous cibler précisément, Drago et moi, depuis le début. C'est personnel, on dirait. Et on a des raisons de penser que l'un d'entre eux est entré au Manoir."
Cette dernière information provoqua un hoquet horrifié de la part de Narcissa.
"C'est impossible, objecta Lucius.
- Pourtant, quelqu'un a forcé le passage, insista Hermione.
- C'est impossible", répéta Lucius.
Puis il se leva et commença à faire les cent pas dans l'espace très réduit qu'était son nouveau lieu de vie.
"La personne qui s'est introduite au Manoir cherchait le fauteuil sur lequel... Voldemort s'asseyait", ajouta Drago avec prudence.
Lucius pila, et Narcissa émit un couinement.
"Notre théorie, c'est que ce groupe terroriste entretient des liens forts avec l'idéologie de Voldemort, et qu'il s'agit d'une sorte de groupe de mangemorts de seconde génération. Ces gens ont une connaissance précise de ce qu'il se passait dans le Manoir à cette époque, suffisamment pour être au courant de cette histoire de fauteuil. Ils ciblent les né-moldus dans leurs attentats, et ils ont essayé de rallier d'anciens sympathisants à leur cause.
- Je suis d'accord, fit Narcissa. On en a longuement discuté. Et s'ils nous ont contactés nous pour nous recruter... c'est nécessairement pour les raisons que vous venez d'évoquer, Hermione."
Elle m'a appelée par mon prénom. Hermione pâlit sans trop savoir pourquoi et Drago recommença à lui masser le genou.
"Est-ce que vous savez avec qui Irina pourrait avoir des connexions ? D'autres rejetons quelconques, des liens particuliers avec d'anciens mangemorts ?" poussa Drago.
Lucius plissa le nez dans une moue écœurée, et haussa les épaules.
"Cette gamine était pour le moins farfelue. Difficile à dire. Et elle a rapidement disparu de la circulation.
- Ma défunte sœur l'avait prise sous son aile. C'est dire l'instabilité chronique de cette pauvre enfant, ajouta Narcissa avec un frisson.
- Aucune chance que Bellatrix ait un enfant caché quelque part ?" vérifia Drago, songeur.
Lucius et Narcissa se mirent à ricaner comme des maniaques de concert.
"Non, finit par répondre Narcissa. Elle n'était pas... maternelle.
- Les accidents arrivent, dit Hermione.
- Pas chez les Sang-pur, miss Granger, coupa Lucius.
- Ah non ?"
Le ton de défi dans sa voix n'échappa à personne, et elle s'attendait à un long discours sur la grande fidélité et la rigueur morale de l'élite sorcière, mais c'est Narcissa qui se lança dans des explications rationnelles.
"Lorsque nous nous marions, les sacrements sont particuliers. Ce n'est pas simplement un mariage d'un point de vue légal. La magie qui nous lie prévient toute... procréation en dehors du couple.
- Oh... souffla Hermione, surprise de ne pas savoir ça.
- C'est principalement pour assurer une lignée incontestable. Impossible pour un homme d'engrosser une maîtresse dont le rejeton pourrait ensuite contester sa place à l'héritier, reprit Narcissa avec un regard appuyé en direction de Lucius, qui baissa la tête.
- Oh ! lâcha Hermione en avisant cet échange qui en disait long.
- Bellatrix a été mariée très jeune - vierge, comme le veut la coutume. Elle était stérile. Certaines formes de magie... la magie noire, n'ayons pas peur des mots, peut provoquer ce genre de condition.
- C'est un soulagement ! s'exclama Drago. La magie noire aura empêché cette folle d'avoir une descendance.
- Drago, un peu de respect pour les morts. Il s'agit tout de même de tante, le rabroua Narcissa sans grande conviction.
- Elle a arrêté d'être ma tante quand elle m'a poignardé avec son couteau préféré parce que j'avais refusé de jouer à torture le chat avec elle.
- Torture le chat... C'est un jeu innocent et parfaitement enfantin dont je n'ai jamais entendu parler, n'est-ce pas ? supplia Hermione.
- Non, elle torturait vraiment des chats", soupira Narcissa.
Hermione enroula sa main sur celle de Drago, toujours posée sur son genou, et il entrelaça leurs doigts avec un soupir.
"Je ne comprends pas comment quelqu'un de non autorisé a pu entrer au manoir, reprit Lucius en se rasseyant. C'est impossible.
- Nous avons une théorie, commença Hermione.
- Vous avez beaucoup de théories, Miss Granger.
- C'est ce qui arrive aux gens qui réfléchissent", répliqua-t-elle vertement.
Drago camoufla un gloussement derrière une quinte de toux et Lucius écarquilla les yeux.
"Venez-vous de m'insulter, Miss Granger ? vérifia-t-il d'une voix blanche.
- J'ai simplement questionné votre capacité à mobiliser votre intellect. Ce qui, vous le reconnaîtrez, est légitime, puisque vous avez suivi un illuminé pendant deux décennies avant de réaliser qu'il risquait de tous vous faire tuer. Pour rien."
Le silence tomba, pesant, et Hermione se retint de sourire d'un air ravi. Ça lui avait fait énormément de bien ! Elle s'était retenue et s'était montrée plus que polie et patiente face à l'hostilité évidente de Lucius Malefoy, et ce depuis qu'elle était entrée dans ce chalet. Elle pouvait prendre des coups pour Drago, mais elle avait ses limites. Et reprendre le contrôle ainsi... C'était libérateur !
"Votre théorie, Hermione...? s'enquit Narcissa en servant du thé d'une main tremblante, jetant des regards rapides à son mari pour voir s'il allait craquer et étrangler la petite amie du fils prodigue.
- Nous savons que le Manoir a changé d'allégeance suite à la décision du ministère de vous destituer et de vous priver de vos pouvoirs. C'est Drago qui en a le contrôle. Or, Drago n'est pas juste un Malefoy.
- Un Black... réalisa Lucius, qui avait oublié l'incident précédent.
- Exactement. Le Manoir reste la propriété de l'héritier des Malefoy, mais le sang de Drago constitue... disons, une porte d'entrée, pour un Black ayant l'envie de contourner les sortilèges de protection.
- Mais il n'y a plus de Black, marmonna Lucius, les yeux dans le vague.
- Il ne reste que moi, et je vous assure que je ne suis pas allée au Manoir, se défendit Narcissa.
- Mère, je sais. Personne ne t'accuse. J'aurais reconnu ta signature.
- Alors, qui ?"
Lucius se remit à décrire des cercles dans un espace de quelques centimètres carrés.
"Regulus n'a pas eu d'enfants, sans quoi Sirius n'aurait jamais hérité de la maison des Black. Sirius n'avait aucun enfant non plus, puisque c'est Potter qui a hérité de tout. S'il y a un autre Black, il vient d'une génération précédente.
- Je ne vois pas comment, gémit Narcissa.
- La tapisserie ! s'écria Hermione.
- Drago, ta fiancée a perdu l'esprit, nota Lucius.
- Non, la tapisserie ! insista Hermione en se levant d'un bond.
- Mais oui, vous avez raison ! La tapisserie ! s'exclama Narcissa.
- Est-ce une maladie contagieuse ? gémit Lucius.
- Je pense qu'elles parlent de la tapisserie qui montre l'arbre généalogique des Black. Au square Grimmaurd", supposa Drago.
Hermione se laissa tomber sur ses genoux sans réfléchir et planta deux yeux brillants dans les siens, tout à coup inconsciente qu'ils avaient de la compagnie.
"S'il y avait un héritier, la tapisserie l'indiquerait, même s'il est illégitime. Et il n'y en a pas. On a étudié cet arbre tellement de fois que je le connais par cœur. Je suis complètement certaine qu'il n'existe aucun Black que ceux qui se trouvent sur la tapisserie. Oh ! Mais comment j'ai pu ne pas y penser plus tôt !"
Elle se pencha pour l'embrasser chastement, bouche close, et recula d'un bond. Drago tenta de la rattraper en pensant qu'elle allait s'écraser sur la table basse, mais elle l'évita d'un saut de cabri et écarta les bras, excitée.
"Ça veut dire qu'un des Black qu'on croyait mort ne l'est pas !"
Narcissa s'effondra sur son fauteuil, pâle comme un linge.
"Oh, pardon... C'était indélicat, s'excusa Hermione.
- Ce n'est qu'une hypothèse, coupa Lucius. L'intrus n'a probablement rien à voir avec les Black. C'est peut-être un Malefoy inconnu. Ou... une autre théorie à laquelle Miss Granger ici présente n'a pas encore pensé. Narcissa, est-ce que tu respires ?"
.
"Est-ce que j'ai tué ta mère ?" chuchota Hermione d'une petit voix, marchant sur la pointe des pieds dans le couloir glacial.
Drago referma la porte de la chambre parentale derrière lui et secoua la tête avec un sourire fatigué.
"Elle est solide, répondit-il en soulevant Hermione dans ses bras.
- Je peux marcher, l'informa-t-elle.
- Tu n'as pas de chaussettes et il fait froid."
Il entra dans leur chambre et referma la porte derrière lui d'un coup de pied, avant de la déposer sur le lit, et de s'y laisser tomber à sa suite. Étalés côte à côte avec les yeux rivés sur le plafond, ils laissèrent un silence confortable s'installer.
"Elle se demandait s'il était possible qu'un fantôme franchisse les barrières de protection du manoir.
- Un fantôme ? gémit Hermione en roulant sur le côté pour le regarder.
- Elle pense que c'est le fantôme de sa mère qui revient se venger, ou un truc comme ça. Mon père n'arrivait pas à la raisonner.
- ... C'est impossible, pas vrai ?
- Granger, est-ce que tu me demandes vraiment si ma grand-mère décédée est revenue d'entre les morts pour s'asseoir dans un vieux fauteuil ?"
Hermione glapit et se plaqua une main sur la bouche, embarrassée.
"Je ne sais plus quoi penser."
Drago avança une main pour lui caresser la joue de son pouce, et soupira.
"J'aurais pas dû dire ça devant elle, c'était... cruel, marmonna Hermione.
- Non, on a besoin d'eux pour comprendre ce qui se passe et ils ne peuvent pas nous aider s'ils n'ont pas toutes les informations.
- Mais ta mère s'est évanouie, et ton père me hait. Encore plus qu'avant, du moins.
- Il ne te hait pas. Il m'a autorisé à t'épouser."
Drago se mit à ricaner comme un dément et lui mordilla le bout du nez.
"Cette escapade en Suisse ne se passe absolument pas comme prévu, grogna Hermione, écarlate. Pourquoi tu as déballé tout ça devant tes parents ? Tu m'as embarrassée !"
Elle avait bien conscience de gémir comme une enfant, mais à ce stade, elle n'était plus du tout sûre de savoir comment se comporter.
"Il fallait qu'il ait la preuve qu'on pouvait te faire confiance. Granger, mon père te respecte en tant que sorcière, il n'est pas stupide. Il sait que tu as sans conteste plus de pouvoirs et de compétences que lui. En revanche, il ne connait pas tes allégeances. Il fallait qu'il voit de ses propres yeux que tu n'allais pas lui soutirer des informations pour retourner en courant au ministère. Et... d'un point de vue plus égoïste, je voulais qu'il comprenne que je suis très sérieux. Qu'on est très sérieux.
- Il croit qu'on veut se marier, maintenant, marmonna la Gryffondor.
- Et ?"
Elle se redressa brusquement en position assise.
"Comment ça, et ?" bafouilla-t-elle.
Drago s'appuya sur ses coudes et l'observa d'un air très sérieux.
"Je sais ce que tu penses du mariage, et je sais que j'ai un bagage lourd à porter, mais... Tu changeras d'avis. Et quand tu le feras, je veux que mes parents soient de notre côté. C'est mes parents, malgré tout. J'ai besoin qu'ils te reconnaissent.
- Tu as balancé tous mes crimes en buvant du thé pour que tes parents... m'aiment bien ? reformula Hermione, interdite.
- Oui."
Hermione hésita entre lui mettre une gifle retentissante ou le serrer dans ses bras, mais finit par céder face à son regard résolu. Elle se jeta sur lui sans plus de cérémonie et ils roulèrent sur le lit jusqu'à ce qu'elle se retrouve pressée entre le matelas et son corps, enroulée comme une liane autour de lui.
"D'accord, dit-elle avant de l'embrasser entre deux sourires.
- D'accord pour m'épouser ? vérifia-t-il en esquivant une tape.
- Non. D'accord pour y penser.
- Vraiment ? glapit-il d'un air béat.
- Tu portes trop de vêtements. Enlève ton pantalon", décréta-t-elle en déboutonnant sa braguette à la vitesse de l'éclair.
Il s'empressa de l'aider à retirer son jean, et se souleva sur ses coudes pour lui permettre de glisser sa main sous la couture de son caleçon. Ils relâchèrent simultanément un soupir satisfait lorsque ses doigts s'enroulèrent autour de lui et il laissa retomber son front contre le sien.
"Je t'aurais demandé de m'épouser plus tôt si j'avais su que..."
Il s'arrêta net pour se mordre la lèvre et retenir un gémissement qui aurait certainement horrifié Lucius.
"Chut !" lui ordonna sèchement Hermione contre son cou.
Il reprit rapidement ses esprits et poussa sa culotte sur le côté.
"Ça va être rapide, Granger.
- Moins de discours et plus d'action ! AH ! Oh ! Mmh !"
Il ricana contre sa bouche et enroula une main à la base de son cou.
"Chut !" lui ordonna-t-il à son tour.
.
"Drago ?" lança la voix de Lucius dans le couloir.
L'intéressé se releva si vite que le drap défait s'enroula autour de ses jambes et le propulsa au sol.
"Oui, père ?" répondit-il en se massant distraitement un genou.
Il jeta un regard courroucé à Hermione, qui gloussait avec la tête enfouie dans un oreiller.
"Ta mère s'est endormie, il est 19 heures, je ne sais pas faire à manger. L'un de vous pourrait-il me nourrir ?
- Euh... oui ? supposa Drago en se relevant tant bien que mal.
- Pour ta gouverne, sache que j'étais contre le fait que vous partagiez une chambre sans être au moins fiancés. Ce qui était déjà très progressiste de ma part. J'ose espérer que vous êtes occupés à préparer une des fameuses théories de Miss Granger, et non pas un héritier !"
Hermione ne riait plus du tout.
"On se rejoint en bas dans cinq minutes, père !" l'informa Drago en grimaçant.
Ils attendirent en silence que ses pas s'éloignent et descendent les escaliers, et Hermione sauta dans sa robe d'un air affolé.
"Il me haïssait il y a quelques heures, et maintenant il veut que tu m'épouses et que tu me fasses un enfant ? chuchota-t-elle.
- Il n'a jamais entendu parler de contraception. C'est une autre génération, expliqua Drago.
- Je ne sais pas cuisiner. Toi non plus. Ton père non plus. Qu'est-ce qu'on va faire ? paniqua la jeune femme en tentant d'aplatir ses cheveux qui criaient certainement au monde ce qu'ils venaient de faire - deux fois.
- Des coquillettes."
Drago constata que son pull était à l'envers, se contorsionna pour rétablir la situation, et observa Hermione qui sautillait sur un pied pour enfiler sa chaussure tout en refaisant le lit à la hâte.
"Je t'aime", dit-il doucement.
Elle arrêta ses mouvements frénétiques pour lui lancer un sourire foudroyant et bondit jusqu'à lui pour le serrer dans ses bras.
"Moi aussi Drago.
- Suffisamment pour m'épouser ?
- Oh, assez !"
Finalement, il semblerait qu'ils s'apprêtent à rester en Suisse pour un second chapitre.
Drago avait visiblement prévu une mission parallèle : vendre Hermione auprès de ses parents !
Alors, que pensez-vous de ces chers Lucius et Narcissa ?
