L'inné et l'acquis

Piqué à JKR

Relu par Alixe et Vert

Alana… encore la première…. Larmoyant ? Oh… c'est pas très gentil ça… j'aurais pu faire bien plus larmoyant, je crois…

Fée Fléau... Oui, Harry plus puissant, oui, un lien indestructible, oui, Tonks capable d'être Auror et mère…. Oui, oui et oui…

Thamril… La transformation d'Harry et Tonks ?
On y retourne tout de suite…

Est-ce bien raisonnable pour une femme enceinte ?
Lunenoire, Harana, Lulu-Cyfair…
Eh bien, figurez-vous que je me suis posée la question…
Y a-t-il un médicomage sur FFnet ?

Merci, Harana, de croire au cheminement mental de Remus dans cette scène, ça faisait longtemps que je ne lui avais pas donné autant de place, me semble-t-il…

Bellatrix ? Harana, Lulu, Petite Plume
Je vous sens impatientes là….

Guézanne…. Une fois de plus, me voilà à millimétrer ma réponse à ta si attentive review… Je crois pouvoir reconnaître ne pas avoir voulu que Remus soit toujours parfait… Il est peut-être trop dur avec Harry, trop « anglais »… et, sans doute, l'est-il parce qu'il a peur de ses propres sentiments, qu'il continue envers et contre tout à douter de lui et de son « droit au bonheur »… J'attends clairement ton avis sur le début, pas besoin de le dire…

Aïe, ma critique d'Art préféré, Vert, confirme que le bleu Véronèse n'existe pas… Mais je suis sûre que vous aviez compris que c'était un bleu-vert sombre – genre de Prusse… L'Italie me parle toujours plus que l'outre-Rhin…

Mystick a bien aimé l'action… en v'là encore un peu….

Titou a rattrapé Remus au vol quand il est tombé… La chanceuse !

Ryan trouve ça original… Toi qui voulais qui se passent des trucs !

Juliette aime bien quand Fénoire est de sortie…
Faut dire que c'est la pleine lune !

Encore un long chapitre….

Vingt – Sangs

La lune avait gagné.

Encore une fois.

C'était comme ça avec la lune, tous les vingt-cinq jours, elle lui rappelait sa loi et lui ne pouvait que s'y soumettre. Est-ce que la lune s'inquiétait qu'il ne soit pas sans doute pas en état de supporter une transformation ? Est-ce qu'elle s'inquiétait qu'il ignore si son fils allait bien ou qu'il ait des choses plus importantes à faire que de passer sa nuit à tourner en rond jusqu'à l'épuisement dans ce grenier fermé ? Non.

En plus, Lunard détestait les lieux fermés comme cela, il allait bientôt se jeter contre ces murs, cette lucarne et cette grille, insensible à la douleur comme à la vanité de ses assauts. Il allait gratter le plancher et se planter des échardes dans les pattes. Il allait hurler, des heures et des heures, et se brûler les cordes vocales. Et il n'y avait rien que Remus puisse faire pour l'en empêcher.

Alors, il se soumettait. C'était la leçon imposée par la lune tous les mois. Humilité, soumission. Aucune rébellion n'avait de sens. Lunard avait besoin de marcher, alors il marchait sur le plancher de bois. Il allait sans doute ensuite courir… s'attaquer aux malles et sacs qui traînaient dans le grenier et peut-être même à lui-même si cela ne suffisait pas. Remus essayait de profiter de ces dernières minutes de lucidité pour se rappeler quand il était venu ici… il essayait de comprendre, de recoller les lieux, les souvenirs, les odeurs…

Les odeurs… Il y en avait pleins dans ce vieux grenier et ça aussi ça occupait Lunard. Il y avait l'odeur chaude et puissante du fumier de cheval qui avait depuis longtemps imprégnée les murs et les planches. Il y avait l'âcre odeur de poussière, celle sucrée des grains d'avoine et celle étrange de l'angoisse… d'un animal terré… une odeur à la fois connue et étrangère… Et la fourrure de Lunard se souleva tout autour de son cou alors qu'il changeait sa trajectoire pour s'approcher de cette odeur.

Dans la clarté de la lune montante, il vit d'abord le chien, dressé face à lui. C'était un colley blanc et beige aux longs poils soyeux et à la tête fine. Il le regardait s'approcher, sans sembler trahir d'inquiétude ou d'agressivité. Pourtant, Lunard pouvait sentir sa tension et son appréhension et quelque chose d'autre aussi. Il gronda parce que ce colley était sur son territoire. Il demandait sa soumission immédiate et complète, il ne pouvait y avoir deux chefs dans le même territoire et ça faisait longtemps qu'il n'avait pas eu d'égaux. Le colley s'ébroua comme dans un geste humain de refus et se campa encore plus fermement sur ses pattes. Pas d'agressivité encore mais un message clair : je ne me soumettrais pas.

Lunard gronda encore mais sa curiosité était piquée. L'odeur se précisait et il était presque sûr que ce colley était une femelle et puis que cette odeur Remus la connaissait. Non qu'il s'intéressât beaucoup aux expériences de Remus. Ça faisait longtemps que l'humain n'avait pas semblé juger bon de s'intéresser aux réels besoins de son double loup. Lui avait-il donné des compagnons ? Lui avait-il offert la possibilité de chasser, du goût du sang ? Non, il n'avait fait que le tenir reclus de caves en greniers, d'oubliettes en donjons. Reclus, seul. Mais trois jours par mois, et une nuit surtout, Lunard avait malgré tout sa vengeance.

Il s'approcha plus près encore, emplissant ses narines de l'odeur du colley et arriva l'affirmation qu'elle lui appartenait, à lui ou à Remus…ce n'était pas très clair… Elle le laissa d'ailleurs de repaître de cette odeur connue et ô combien apaisante. Quand sa gueule passa sur ses flancs légèrement enflés, elle gémit doucement. Lunard sentit la vie qui palpitait en son sein et l'apaisement crut encore. Il n'était pas seul, il avait retrouvé un compagnon et la nuit de la lune ressemblait moins que jamais à une malédiction.

Mais son attention fut attirée par un mouvement juste derrière la grille, juste derrière la chienne. Un forme gris argenté, une forme canine là encore, non, un loup… et l'odeur vint avec… un jeune loup de sa propre meute… La chienne suivit son regard, attentive, prête une nouvelle fois à s'interposer. Le louveteau gémit. Lunard gronda, plus par réflexe que par colère. Le petit loup sembla hésiter de l'autre coté de la grille, puis il se glissa entre les barreaux. La chienne sembla vouloir intervenir puis se ravisa, mais Lunard sentait la tension inquiète qui l'habitait. Le louveteau comptait pour elle.

Il était magnifique avec son poil argenté, plus clair que le sien, un poil d'hiver un peu bourru, qui faisait des touffes rebelles entre les oreilles. Ses grands yeux verts étaient cerclés de noirs qui faisaient encore ressortir leur couleur naturelle et il avait une étrange cicatrice au milieu de l'occiput frontal. Lui aussi était tendu mais aussi implorant, les oreilles en arrière et la queue basse. Il s'approchait de lui en petits bonds timides comme s'il s'attendait à ce que Lunard s'y oppose. Et le grand loup lui ne savait pas trop. Il lui semblait qu'il aurait dû s'y opposer, qu'il aurait dû réagir mais il était émerveillé par le louveteau, par sa perfection et par cette conviction qu'il appartenait à sa propre meute.

Plus pour rappeler son statut de chef qu'autre chose, il gronda de nouveau, un peu plus sourdement peut-être. Le louveteau se figea immédiatement et s'aplatit au sol. Lunard s'approcha, attiré par l'odeur, attiré par le besoin de communication physique qui allégeait tant son excitation fiévreuse. Il renifla longuement le petit dont il sentait le cœur battre la chamade, dont il sentait l'épuisement et la confusion. Ces odeurs là lui déplurent et il gronda de nouveau. Le louveteau roula sur le dos, la gorge offerte à sa colère, en signe de soumission totale et la vision de ces poils longs blancs et doux amollit sa réprobation. Les liens de la meute étaient les plus forts et il entreprit de débarrasser le louveteau de ces odeurs déplaisantes, le léchant longuement.

00

Quand Harry ouvrit les yeux et vit qu'il était dans un lit, il espéra, un moment, qu'il avait tout simplement rêvé. Non, sûrement, tout cela n'avait pas pu arriver… Ces voix querelleuses, ces émotions violentes, ces malédictions et cette angoisse ne pouvaient appartenir qu'au domaine du cauchemar. Certainement.

Comme ces images… son père, sa baguette dressée contre lui… des fantômes tournoyants… Tonks prenant le pouls d'un corps allongé… un grand loup gris aux babines retroussées… et une étrange sarabande de visages… Remus, Andromeda, Ted, Severus, Grand-père Albus, Cyrus… et leurs voix mêlées qui chuchotaient sur tous les tons qu'il avait de la fièvre et qu'il devait dormir.

Il secoua la tête pour les chasser loin de lui et se redressa, pour tomber nez à nez avec Cyrus qui lisait allongé à coté de lui un exemplaire écorné de Balai-magazine et il sut qu'il n'avait pas rêvé. Jamais Cyrus ne l'aurait accueilli avec ces paroles si rien ne s'était passé :

« Salut Morphée, revenu du pays des morts ? »

Il y avait des jours où légitimement on pouvait avoir envie de tordre le cou à Cyrus Mélanio Lupin, mais Harry sentit confusément qu'il n'en aurait pas la force alors il abandonna.

« Papa ? », murmura-t-il et en parlant il se rendit compte de combien il avait soif.

« Oh… parti à Londres : réunion, Ministère… le train-train habituel », répondit son frère avec un haussement d'épaules. Harry dut se répéter plusieurs fois que jamais Cyrus ne pourrait lui mentir sur un pareil sujet.

« Il va bien ? », chuchota-t-il quand même, pour en avoir le cœur net.

« T'avais quand même pas peur de l'avoir tué ? », questionna Cyrus sur le ton de la conversation.

Lui faire rendre son dernier soupir… là, tout de suite… Tentant…

« Tonks ? », préféra demander Harry.

« Elle ? A part fouiller la maison de fond en comble à la recherche d'autres restes magiques et noirs des Black, passer ses nuits à te surveiller et houspiller tout le monde parce qu'elle est crevée, ça va… », estima Cyrus.

Harry préféra digérer ces informations en silence, évitant le regard de son frère qui finit par se replonger dans sa lecture.

« On en est sorti comment ? », interrogea Harry finalement, obligeant ce dernier à relever la tête.

« Du grenier ? »

« Oui. »

« Eh bien, comme Tonks ne revenait pas… au bout d'une heure, Andromeda a pris sa baguette et est partie à votre recherche… Elle est revenue avec un louveteau dans les bras… et Tonks appuyée sur son épaule… On m'a chargé de te surveiller… T'en as mis du temps pour te retransformer ! C'est délire le temps que tu tiens ! »

Cyrus avait abandonné son air supérieur et blasé pour prononcer les deux dernières phrases. Harry supposa qu'il était de bon goût de remercier du compliment. Il hocha la tête.

« Après, elles se sont enfermées dans la chambre d'à côté mais à cause de la cheminée on entendait tout ici… Tonks a hurlé un truc sur des cristaux qu'avaient failli tous vous tuer… »

Harry grimaça mais Cyrus eut la délicatesse de ne pas poser de question.

« Andromeda a dit que c'était le dernier cadeau de sa mère… qu'elle les lui avait envoyés pour son mariage… sans doute pour qu'elle devienne folle… Ces Black, hein, c'étaient vraiment des boute-en-train, non ? », continua-t-il mi factuel, mi moqueur. « Là, Tonks a fondu en larmes… longtemps, et puis Andromeda est venue me dire de me coucher…ça fait trois jours que tu dors, Severus est venu t'apporter des potions et… »

Le récit de Cyrus s'interrompit quand la porte s'ouvrit sur Andromeda qui apportait un plateau.

« Tu es réveillé Harry, tant mieux ! J'ai entendu des voix… ça va mieux ? »

Harry ne sut qu'acquiescer un peu nerveusement.

« Faut que tu manges, Harry, hein ? Tout ! »

Elle s'assit sur le lit, et Harry se demanda si elle comptait rester là pour vérifier qu'il allait tout manger. Dans cette éventualité, il s'empara du verre de jus de citrouille et l'avala d'un trait. Il avait rarement été aussi proche d'elle et il fut frappé par sa ressemblance avec Cyrus. Andromeda se tourna d'ailleurs vers ce dernier posant une main sur son épaule :

« Cyrus, mon chéri, tu devrais aller prévenir Nymphadora et Albus que Harry s'est réveillé »

Albus, son grand-père était là ? Une nouvelle fois, la réalisation de la gravité des évènements s'imposa à lui, et la culpabilité l'envahit. Il reposa d'une main tremblante son verre sur le plateau, ne prêtant qu'une vague attention au fait que Cyrus s'empressait d'obéir, ne soupirant que pour la forme.

« Tu vois Harry, ces cristaux… c'est la seule chose qui me restait de ma famille…. Quand je suis partie, je suis partie avec les vêtements que j'avais sur le dos… Et quand j'ai reçu ce coffret d'or, j'ai su tout de suite ce qu'il contenait… Ma mère avait toujours été très fière de ses ascendances scandinaves et de ses cristaux interdits… Je ne l'ai jamais ouvert, mais je l'ai gardé… la preuve tangible de la raison pour laquelle j'avais quitté ma famille… Mais, quand Nymphadora est arrivée, je les ai cachés dans le double fond d'une malle, et puis de déménagements en réaménagements, j'ai perdu la trace de la malle… Jusqu'à ce que tu la retrouves… vingt-huit ans après… »

Harry ne savait pas quoi dire. Il n'y avait pas de reproche dans la voix d'Andromeda, juste des faits, des faits monstrueux pour lesquels elle semblait avoir développé une distance presque effrayante, mais sans doute nécessaire.

« Nous avons tout fait fondre hier soir, Nymphadora et moi… ça a pris cinq heures pour que tout soit liquéfié et évaporé… Pffit.. comme les Black… évaporés… »

Avant qu'Harry ait pu mesurer les implications de ce qu'Andromeda venait de lui raconter, la porte s'ouvrit de nouveau pour laisser passer Tonks.

« Mais ces vapeurs-là sont un peu comme la pluie, maman, elles finissent toujours par te retomber sur le nez », commenta cette dernière en tenant la porte à Albus Dumbledore. Harry ne put s'empêcher de se raidir en voyant entrer son grand-père.

« Nymphadora est déçue que ces cristaux ne soient pas la preuve de la présence de Bellatrix autour de nous », lui expliqua Andromeda avec un air conspirateur.

« Maman... »

« Ma chérie, Bella est certainement là où tu l'attends le moins…Je me souviens quand on jouait à cache-cache, ni Cissa, ni moi ne la trouvions jamais… Et sans son benêt de mari, elle n'aurait jamais fini à Azkaban, tu peux me croire ! »

Tonks leva les yeux au ciel et les yeux d'Albus pétillèrent.

« Il semble qu'elle soit arrivée à la même conclusion que vous, Andromeda, puisqu'elle l'y a laissé ! », approuva ce dernier, avant de demander : « Comment vas-tu Harry ? »

« Ça va, Grand-père », murmura l'interpellé un peu impressionné par les trois adultes qui lui faisaient face. « Enfin je crois… »

Le vieil homme hocha la tête longuement et s'installa sur son lit, là même où Cyrus était allongé quelques minutes plus tôt.

« Je crois que nous allons vous laisser», commença Andromeda.

« Je pense que Tonks doit rester », dit calmement Dumbledore le regard fixé sur Harry comme dans une question muette.

« Harry, je ne le prendrais pas mal », insista la jeune femme avec un air soucieux qui toucha Harry au cœur.

Il semblait que ce soit la seule chose qu'il arrive à faire ces temps-ci, donner des soucis à tous ceux qui l'entouraient. Il ne savait pas ce que son Grand-père avait à lui dire, encore qu'il suspectait que ça ne commencerait pas par des félicitations… Était-il là parce que Remus avait dû partir et que Tonks ne savait pas quoi faire de lui ?

« Non, reste… s'il te plaît, reste… », articula-t-il.

La jeune femme acquiesça et s'assit au bout du lit tandis que sa mère se levait et sortait de la pièce.

« Tonks, grand-père, je… »

Mais le vieux sorcier leva la main et murmura :

« Tu te fais sans doute beaucoup de reproches, Harry, mais je ne suis pas celui peut t'absoudre des gestes et des décisions que tu regrettes. »

Harry déglutit et se tourna dans un réflexe inconscient vers Tonks qui soupira.

« … Je suis là, à la demande de ton père », continua Dumbledore.

Les yeux d'Harry revinrent sur le visage sévère de son grand-père. Il n'avait pas accentué les mots mais pourtant l'affirmation était claire. Il hocha la tête.

« Il m'a dit que tu as entendu par hasard Severus et Cornélius parler d'un prophétie te concernant, toi et Voldemort, et que cela t'a troublé au point d'oublier que de nombreuses personnes étaient plus que disposées à répondre à tes questions... »

« Grand-père, je… »

« Ce n'est pas à moi de te demander des comptes, Harry. J'espère seulement que les informations que je vais te donner vont finir de te convaincre des limites de tes propres raisonnements »

Il n'y avait pas grand-chose à répondre à cela et Harry se contenta une nouvelle fois d'acquiescer.

« Harry, veux-tu connaître cette prophétie ? », demanda encore son Grand-père.

Encore une fois, il acquiesça sans ajouter un mot. Son grand-père se releva alors et prit un sac en tapisserie que Harry n'avait pas remarqué avant. Il en sortit une Pensine encore plus patinée que celle dont se servait Remus.

« Il n'y a plus de bons fabricants de Pensine de nos jours », remarqua alors Dumbledore, comme s'il lisait dans ses pensées, « tu sais sans doute que celle de ton père vient de Square Grimmaurd… Ella a appartenu à Phineas Nigellus, directeur assez peu apprécié de Poudlard et ancêtre de Sirius…La mienne est plus ancienne encore, elle aurait été forgée au VIe siècle et certains disent que Morgane elle-même l'aurait remplie de l'eau d'Avalon, mais je ne voudrais pas avoir l'air de croire tous les boniments de celui qui me l'a vendue… »

Harry sentit un sourire involontaire lui étirer les lèvres. Les longues et étranges digressions de son grand-père avaient toujours eu un pouvoir calmant pour lui. Il se rappelait des heures qu'il passait dans son bureau l'hiver, quand son père enseignait et que les activités de Hagrid ou de Linky s'accommodaient peu de sa présence, et où le vieil homme l'instruisait ainsi de milles petites histoires et anecdotes sans liens apparent entre elles jusqu'au jour où il s'était retrouvé dans la classe de Binns et s'était rendu compte de tout ce qu'il savait déjà de l'Histoire magique.

En parlant, Dumbledore avait installé la Pensine et sorti lentement sa baguette.

« Tu sais, n'est-ce pas Harry, qu'il est impossible de mentir à une Pensine, on ne peut lui donner de faux souvenir… »

Harry ouvrit la bouche pour dire que jamais il n'aurait pensé à accuser son grand-père de mensonge mais le vieil homme continua :

« Ma subjectivité intervient bien sûr, mais les mots que tu vas entendre sont ceux que j'ai entendus »

« La prophétie t'as été faite à toi ? »

« Oui. Quelques mois avant ta venue au monde. »

Harry digéra un peu l'information avant de demander :

« Et qui l'a faite ? »

« Sybille Trelawney », répondit son grand-père. « Le jour même où je venais lui dire que je n'avais pas de poste pour elle à Poudlard… » Le vieux sorcier eut un petit sourire. « Heureusement pour moi que tous les candidats éconduits n'ont pas recouru aux mêmes procédés ! »

Tout en regardant son grand-père extraire son souvenir de sa tête en longues volutes spectrales, Harry repensa à la prédiction que la professeur de Divination avait faite sous l'effet d'herbes que Cyrus et lui avaient glissées dans son thé. Une prédiction floue mais qui avait finalement été partiellement vérifiée. Et puis, il y avait ce geste qu'elle avait eu pour lui peu après la rentrée, et ces paroles faisant de sa cicatrice en emblème de sa différence… Sybille Trelawney…

Tonks s'était levée et avait ouvert le tiroir de sa table de nuit. Elle lui tendit sa baguette avec un sourire désolé. Il la remercia en détournant le regard. Il n'avait pas envie de sa compassion. Il préférait mille fois les reproches de son Grand-père. Quand ce dernier lui indiqua que tout était prêt, il approcha sa baguette du liquide argenté.

000

«Celui qui a le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres approche. Il naîtra de ceux qui l'ont par trois fois défié. Il sera né lorsque mourra le septième mois. Et le Seigneur des Ténèbres le marquera comme son égal mais il aura un pouvoir que le Seigneur des Ténèbres ignore. Et l'un devra mourir de la main de l'autre car aucun d'eux ne peux vivre tant que l'autre survit. Celui qui détient le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres sera né lorsque mourra le septième mois...»

Quand il avait relevé la tête de la Pensine, sa première réaction avait été l'incompréhension. Ça ne pouvait pas être ça. Ça ne pouvait pas être des phrases à la fois aussi générales et effrayantes.

« Mais… rien ne dit que c'est moi ! », s'était-il d'abord exclamé, le premier choc passé.

« Non », avait tranquillement répondu Dumbledore. « Mais tes parents, James et Lily, faisaient déjà partie de l'ordre et ils s'étaient déjà par trois fois opposés directement à Voldemort… »

Ce n'était pas le genre d'information que Harry pouvait entendre sans sentir sa gorge se serrer.

« … mais ils n'étaient pas les seuls, comme ils n'étaient pas les seuls à attendre une naissance pour la fin du mois de juillet, ni même à attendre un petit garçon… », continua son grand-père de sa même voix calme.

La question était évidente mais Harry ne la posa pas.

« Alors comment avez-vous su ? », questionna-t-il au contraire, absolument pas désireux de savoir qui aurait pu être à sa place aujourd'hui.

« Voldemort t'a choisi Harry… »

« Mais… il s'est peut-être trompé ! »

Dumbledore secoua la tête avec un peu d'agacement, et Harry vit Tonks poser une main sur son épaule comme pour lui demander la parole.

« Harry, en essayant de te tuer, il t'a donné le pouvoir de le détruire... ce n'est pas la prophétie qui t'a choisi mais lui… »

« Mais... mais pourquoi aurait-il fait une chose pareille ! Il aurait mieux fait… »

« Parce qu'il ne connaissait que la première partie de la prophétie », expliqua son grand-père, « Il ignorait qu'il te donnerait autant de pouvoir en... te marquant comme son égal… »

« Oh. » Harry se tut quelques minutes avant d'ajouter d'une voix qui lui sembla étrange à lui-même chuchota : « Et maintenant je dois le...tuer ? »

« Harry ! » s'écria Tonks, mais cette fois, c'est le vieux sorcier qui posa une main sur son épaule :

« La prophétie nous dit seulement que tu en as sans doute le pouvoir… ou que tu seras un jour capable de l'utiliser… Ces deux dernières années, par deux fois, tu as été confronté à lui et nous avons tous pu voir que tu avais des capacités… importantes de résistance à la magie noire…»

« L'autre jour, épuisé, tu as repoussé un sortilège de Neelps », ajouta Tonks l'air presque effrayé de ses propres paroles.

« Nous savons tous dans cette pièce que tu as des pouvoirs considérables », reconnut Dumbledore, « mais aussi que tu es loin de les maîtriser suffisamment pour affronter un réel combat…Harry, la prophétie dit aussi qu'il peut te détruire… Partir à sa recherche serait une chose assez stupide ! »

« Bien sûr », répondit Harry, sentant leurs regards inquiets sur lui. La tête lui tournait. « C'est aussi pour cela que quelqu'un comme Bellatrix veut tellement me tuer », reprit-il néanmoins.

« Nous savons peu de choses des intentions de Bellatrix », répondit son grand-père, « mais c'est bien sûr notre inquiétude à tous et nous aurions sans doute dû être plus clairs sur nos raisons… »

Tonks secoua la tête et intervint :

« Harry, je ne sais pas ce que tu en penses… mais j'ai fait partie de ceux qui ont poussé Remus à continuer à te cacher l'existence de cette prophétie… Il me semble qu'elle est un poids énorme et injuste pour quelqu'un de ton âge… C'est facile de dire maintenant qu'il aurait fallu faire différemment. » Elle jeta un regard étonnamment brillant à Dumbledore qui resta impassible, « mais je crois que dans la même situation, je continuerais à penser que tu n'as pas besoin de savoir ça ! »

La conversation aurait sans doute pu continuer des heures, mais Andromeda et Cyrus entrèrent à ce moment là dans la pièce, et Harry remarqua que son frère était habillé différemment. Il portait une robe neuve d'un bleu sombre qu'il ne lui avait jamais vue et qui n'était visiblement pas destinée à être utilisée pour monter aux arbres, jouer au Quidditch ou cuire des potions. Il était aussi nettement mieux peigné que d'habitude et Harry pensa qu'Andromeda devait y être pour quelque chose.

« Je suis désolée de vous interrompre mais si vous voulez arriver à l'heure à votre rendez-vous avec Remus, vous devriez vous préparez », expliqua cette dernière.

Tonks leva les yeux au ciel.

« Ah oui les vœux… Allons-nous déguiser en femme de directeur… » - soupira-t-elle, « Espérons que cette armure de convenances me préservera des assauts de ma chère tante… »

A la mention de sa sœur, Andromeda tourna la tête : « Tu peux dire tout ce que tu veux de Narcissa, Nymphadora, mais elle a toujours su s'habiller ! »

« Ne vous laissez pas trop enfermer dans les conventions, Nymphadora », murmura alors Dumbledore, « votre légitimité est ailleurs que dans des bouts de chiffon, moi-même j'y vais comme vous me voyiez… »

« J'ai peur, professeur, de ne pas me sentir encore assez sûre de moi pour y aller dans cette tenue », répondit la jeune femme, en désignant le jean et le gros pull qu'elle portait.

« Que les quatre éléments en soient remerciés », murmura Andromeda, et Cyrus pouffa.

« Maman, nous te laissons Harry », annonça alors sa Tonks, faisant mine de ne pas avoir entendu.

« Je peux rester aussi ? », demanda Cyrus au moment même où Harry protestait, au contraire, qu'il pouvait se lever !

« Non, non, non… Cyrus va montrer à tout le monde comme il est devenu raisonnable et toi, Harry, tant que tu auras de la fièvre et des joues plus pâles que ton oreiller, je ne veux même pas t'entendre parler de poser le pied par terre », contra Tonks en secouant la tête avec un air convaincu.

Comme aucun des deux garçons ne semblaient se décider à protester davantage, Andromeda s'esclaffa bruyamment :

« Ah ma chérie, c'est un rôle dans lequel tu n'as pas fini de me plaire, je crois ! »

00

C'était le petit matin. La lumière grise filtrait à peine entre les rideaux. Dans la pénombre, Harry pouvait voir Cyrus endormi respirer calmement. Il se leva très doucement et s'habilla en surveillant que son frère ne se réveille pas et sortit tout aussi discrètement. Il descendit avec le même soin l'escalier qui menait au rez-de-chaussée. Il était très tôt et tout le monde dormait, mais il pariait que Remus lui ne dormait plus.

Remus avait toujours été un lève-tôt, arraché au sommeil par les premières lueurs de l'aube. Il pariait qu'il allait le trouver armé d'une théière et en train de lire un livre ou d'écrire quelque rapport. Il était quasiment sûr qu'il allait le trouver seul, parce que Tonks dormait toujours plus que lui – et encore davantage depuis qu'elle était enceinte. Et la mention de l'état de la jeune femme lui rappela combien il avait été froid et distant sur ce point avec ses parents.

Il soupira. Ça faisait une chose de plus pour laquelle il devrait s'excuser. « Celui qui peut t'absoudre », avait dit son grand-père. Le pouvait-il vraiment ? Y serait-il prêt ? Sa main se posa sur la porcelaine froide de la poignée de la bibliothèque. Il n'y avait qu'un moyen de le savoir.

Son père se retourna dès qu'il ouvrit la porte, les deux mains prises, la droite par une mug de thé brûlant, la gauche par un livre, les yeux clairs, calmes et attentifs, le visage tiré, mais pas aussi épouvantable que Harry n'avait pu se l'imaginer dans la solitude de sa chambre.

« Papa… »

« Bonjour Harry… », l'accueillit Remus, d'un ton prudent. « Est-ce bien raisonnable de te lever si tôt ? »

« Je voulais te voir. »

Remus hocha la tête.

« Eh bien, je suis là. Entre… »

Harry s'exécuta un peu nerveusement.

« Asseyons-nous là », proposa Remus, et Harry le sentit presque aussi nerveux que lui. « Tu veux du thé, autre chose ? »

« Je veux te parler »

« Bien sûr… moi aussi»

Ils s'assirent face à face dans les deux fauteuils qui encadraient le cheminée mais, contrairement à ce qui venait d'être annoncé, aucun des deux ne dit un mot pendant de longues secondes.

« Je… », commença finalement Harry comme on se jette à l'eau.

« Tu es désolé et moi aussi, Harry », le coupa vivement Remus.

« Non », rétorqua Harry en secouant la tête, « Enfin, si, bien sûr mais, ce qui est important, c'est que je ne pensais pas un mot de ce que j'ai dit… »

« Bien sûr », commenta Remus un peu brusquement, avant de reprendre sur le ton du constat : « Enfin, en conscience, tu ne l'aurais jamais formulé comme cela, mais tu te sentais trahi, abandonné…et tu n'as rien dit d'autre…»

Harry sentit sa gorge se nouer. Avait-il inconsciemment pensé ce qu'il avait pu dire ?

« Harry, les cristaux Neelps sont une forme rare et puissante de magie noire… On ne peut pas te reprocher ce que tu as pu dire ou faire sous leur emprise…Aucun tribunal magique ne le ferait, et moi encore moins !»

Harry le regarda, incertain de comment répondre. Il ne voulait pas que l'on mette tout sur le compte des cristaux. C'était trop facile. Mais ce qu'il voulait plus que tout c'est que ce doute s'éteigne dans les yeux de son père adoptif…

« Papa… je ne sais plus exactement ce que j'ai dit, ni ce que j'ai fait… mais ce que je me rappelle suffit à me rendre très malheureux… et toi aussi, visiblement… et ce n'est pas… »

« Ce n'est pas quoi, Harry ? »

« … juste… ni pour toi, ni pour moi… »

Les yeux pâles de son père plongèrent dans les siens de longues secondes, et Harry eut l'impression étrange de voir fondre un mur de glace.

« Tu es sûr ? Après tout, je suis un dissimulateur… et je ne suis pas ton père »

« Tu es mon père ! Sinon je ne serais pas là à essayer de m'excuser ! », s'exclama Harry en se levant violemment. « Je ne veux pas d'autres pères que toi ? Comment peux-tu en douter ? Quelle preuve te faut-il ! Je suis Harry, je suis le fils du loup, je…» Il ravala ses larmes mais n'arriva pas à en dire plus.

« Harry… » Remus s'était levé derrière lui et l'enlaçait. « Harry, je suis désolé… »

« J'en ai marre que tu doutes à chaque fois… »

« Excuse-moi… mais je ne doute pas de toi, je doute de moi. »

Ils se turent l'un et l'autre.

« On est bien, hein, si ton inconscient ne retient que ce que mon inconscient a de plus stupide en tête », marmonna Harry.

Remus rit doucement, longuement, sans le lâcher.

« Heureusement que les loups sont plus directs que les hommes», finit-il par proposer.

« Ça ne fait pas longtemps que j'y arrive », articula alors Harry, rattrapé par sa mauvaise conscience. « Je voulais te le dire ! »

« Sans doute le même jour, où tu m'aurais posé des questions sur la prophétie », se moqua gentiment Remus.

« Non, pas le même jour, je crois », répondit Harry en baissant la tête. Son père rit de nouveau.

« Prudent, je vois… »

« Non pas tellement », maugréa Harry. « Stupide »

Remus le fit lentement tourner sur lui-même pour le regarder dans les yeux.

« Est-ce que tu as peur de moi, Harry ? »

« Non, je n'ai peur ni du loup, ni de l'homme… C'est juste toutes ces personnes qui autour de moi me parlent de mes différences, de ma destinée… »

« Je pensais que tu avais appris à les ignorer… »

« Mais est-ce que je peux ? »

« Tu peux choisir, Harry, je me bats depuis huit ans pour que tu le puisses et je continuerai ! »

Harry baissa la tête et murmura : « Tu te bats aussi pour que je sois prêt au pire, hein ? »

« Maintenant que tu sais pourquoi… », reconnut Remus. « J'aurais sans doute dû te le dire en Septembre quand Bellatrix s'est échappée… »

« Moi, j'aurais dû venir, je sais… Je voulais pas… te déranger, je crois, et puis j'étais en colère… J'ai un petit frère qui dit que je suis particulièrement stupide dans ces moments-là… » Il releva la tête.

« En voilà un autre qui grandit », murmura Remus, presque pour lui même.

Harry essaya de sourire : « Il a été plus franc que moi sur ce coup-là, hein ? »

« Heureusement Harry, parce que… si je n'étais pas arrivé… » Il ferma les yeux. « Il me faudra du temps pour digérer tout cela Harry, je suis désolé, je n'ai pas des réponses absolues à tout… »

Harry baissa la tête, embarrassé par son amertume.

« Tu vas me punir ? », finit-il par demander.

« Te punir, Harry ? »

« Je ne mérite pas ta confiance… Je fais sans cesse les même erreurs… »

« On fait tous sans cesse les mêmes erreurs, Harry… », soupira Remus. « On apprend juste à les voir venir…à se méfier de nos propres automatismes… Je ne vois pas quelle punition pourrait t'apprendre à mesurer toutes les conséquences de chacun de tes actes… » Il sourit un peu tristement. « Où alors on pourrait poser un brevet, toi et moi, et ne plus s'inquiéter de nos revenus pour des générations et des générations ! »

Ils se turent tous les deux et, cette fois, ce fut Remus qui reprit avec une espèce d'énergie nouvelle :

« Si on allait te préparer un petit-déjeuner Harry, sinon Andromeda et Tonks vont me déchoir de tout droit paternel »

Harry sourit et le suivit dans la cuisine où ils préparèrent de concert un repas pour tout le monde, retrouvant dans ce travail commun plus de liberté et de complicité dans leurs relations que dans la conversation qui avait précédé.

« Et alors ces vœux ? » questionna Harry, la bouche pleine de toasts un peu plus tard.

« Le futur radieux de la communauté magique ? Facile… le Tournoi, la croissance économique et la réforme d'Azkaban… »

« La réforme d'Azkaban ? »

« Un écran de fumée, Harry, c'était pour éviter de parler du fait que personne ne sait où peut être Bellatrix… ça ne présente pas très bien alors qu'on attend incessamment les délégations de Durmstrang et Beauxbâtons…»

« Ils arrivent quand ? »

« Dans trois semaines, autant dire demain ! »

« J'ai hâte de voir ça…. Et la première épreuve ? »

« Quinze jours après, juste le temps qu'ils s'acclimatent… »

« Malgré la neige ? »

« Rien de tel qu'un petit dragon pour dégeler l'atmosphère », énonça Remus avec un regard moqueur.

« Un dragon », répéta Harry d'un air innocent qu'il abandonna aussitôt : « Je croyais qu'il y en avait quatre »

« Tu croyais ? », s'enquit son père.

« Joker », répondit Harry en riant, les mains levées en signe de défaite.

« Est-ce une connaissance générale de radio Poudlard ou… »

« Papa….»

« Je demande juste… »

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Ensuite… le retour à Poudlard, les prémisses du Tournoi, pas mal de conversations… ah, ça vous étonne ? Pour l'instant, ça s'appelle Cicatrices

Je viens juste de finir le 22 (Châteaux) et patauge un peu dans le 23… des bouts de scènes, pas encore de fil…. et ça m'inquiète... Je suis en train de manger mon avance… pas bon ça…

Pour tromper mon angoisse, je lance donc plusieurs concours de prénoms….

Un pour les futurs jumeaux, évidemment : toute la famille Lupin a des idées bien sûr, mais je suis curieuse de voir ce que vous proposeriez…

Un autre pour l'Animagus de Harry, parce que, là, Cyrus et moi séchons lamentablement….

Attendons courrier avec impatience !