L'inné et l'acquis

JKR, Alixe et Vert… je vous dois tout !

Ah Ryan, pour Bellatrix, il va falloir t'armer encore un peu de patience pour la voir à découvert… Pourtant comme dirait si bien Lyane, « elle n'est pas si bien cachée que ça »… mouarf…

Alixe, Guézanne, Lazoule, Lunenoire, Fée fléeau, Juliette-qui-non-n'est-pas-morte…
Le tournoi informel de Quidditch vous mobilise, dites-moi ! Il offre, il est vrai, de multiples possibilités : combler l'espace entre les épreuves – je reconnais – mais aussi faire avancer l'intrigue globale ! Si, si, ça avance même plus que vous semblez ne le croire !

Cyrus méritait bien de faire quelque chose de mieux tout seul, hein Juliette ?

Harry et Cyrus (ou non dans la même équipe) ? Hum… Tout est possible bien sûr ! Mais je n'arrive pas obligatoirement à caser ça dans l'avancement général – en gros, ça me servirait à rien… Je pourrais, par contre, mettre Ron sur un balai – avec Harry peut-être – et dans un but bien moins avouable que l'amitié entre les peuples…hum, hum…
Mais ne n'est qu'une des voies possibles… A suivre donc…

Lazoule, j'ai repris mon calendrier : Tonks annonce sa grossesse à Noël – On va dire trois mois. Ça nous fait une naissance en juin – des gémeaux quoi ! Et là, on est sans doute fin mars- début avril… Ah tiens je réponds aussi à Andromaque, là !

Ah Alana, m'étonne pas que ça te gêne un Lupin aussi dumbledorien… j'ai moi-même pas mal hésité ,mais j'avais pas non plus envie qu'il soit encore sous tutelle… mais bon, n'est-il pire aveugle que celui qui croit contrôler ce qui se passe ?

Bonne arrivée à Luny – dis-moi tu as lu aussi les deux opus précédents où tu as pris celle –là en route ? Juste pour savoir… Katherine et Warren… hum… on va en reparler…

Vous aimez les Lupin/Rogue ? Andromaque, Juliette, Petite Plume… Sirius/Cyrus, le final (ou presque) ? Juliette, Titou, Petite Plume… Les « bons » côtés de Rogue, Petite Plume et Guézanne… C'est parti !

Vingt-six - Echos

On ne connaît bien que ses ennemis, conclut silencieusement Severus Rogue en observant les convives s'approcher de la table ce dimanche midi. Qu'est-ce que je sais finalement de quelqu'un comme Flitwick ? Quels sont ses rêves secrets ? Voit-il Poudlard comme un accomplissement ? Un refuge ? Une prison ? Et Chourave, a-t-elle toujours rêvé de la vie qu'elle mène aujourd'hui ? Et Vector ? Et McGonagall ? Pourquoi sont-ils là aujourd'hui ? Que cachent-ils derrière leur sourire ?

Alors que chacun des professeurs prenait sa place habituelle, Lupin et Dumbledore s'offrirent un concours de politesse pour savoir qui présiderait – les deux niant en avoir le mérite ou toutes autres Gryffondories habituelles… De manière assez prévisible, le plus âgé finit par céder le premier… Lupin prit place à sa droite, tout sourire, comme si sa mise de côté était une récompense !

Doutes-tu donc toujours et en tout lieu de ta valeur ? Crois-tu que Dumbledore lui en doute encore ? - s'interrogea le Maître des potions, assis à l'extrémité droite de la table.

Severus savait, qu'avec les années, il était venu à connaître Remus Lupin au-delà de ce qu'il n'aurait jamais pu envisager, qu'il avait appris à apprécier son humour, sa droiture, sa persistance devant les difficultés… Il avait même fini par saisir ce besoin complexe de reconnaissance et de fusion avec la communauté magique, ce besoin de paternité, de transmission… Mais il était encore si souvent pris en défaut ! Lupin lui glissait parfois entre les doigts comme des viscères de grenouille…. Sa persistante humilité, par exemple, continuait à le sidérer…

Et ne parlons pas de Dumbledore ! Que sais-je de Dumbledore ? Il est puissant, oui, mais est-il ambitieux ? J'ai toujours l'impression que ce sont les autres qui le sont pour lui ! Est-ce seulement l'âge ? Lui sans doute sait la boue qui colle à mes pas… mais sait-il à quel point il est difficile d'y échapper, à quel point chaque pluie la ravive ? Je suis incapable de le dire !

A l'invitation de Dumbledore, Igor Karkaroff s'installa à sa gauche, alors que Olympe Maxime se plaçait à la droite de Lupin. Karkaroff se rengorgea imperceptiblement de cette marque d'intérêt et Severus se rappela combien de directeur de Durmstrang avait posé de question sur le président du Magenmagot.

Je comprends bien mieux quelqu'un comme Karkaroff, je sais ce dont il a besoin, ce qu'il craint. Je connais ses rêves comme ses cauchemars… Il importe peu qu'aujourd'hui nous soyons dans des camps différents… lui et moi n'avons pas vraiment changé… nous sommes toujours fait de la même étoffe !

Le repas était gai et animé. Tout le monde commentait les performances des joueurs – et pour une fois tous ou presque pouvaient se rengorger puisque tous étaient représentés chez les gagnants comme chez les perdants. C'est ça que tu voulais, hein, Lupin ?

« Ça s'est joué à pas grand-chose », remarqua Gobe-Planche

« Leu peutit Maleufoye a bien vu qu'ils allaient peurdreu s'ils jouaient la partieu au point », commenta Mme Maxime.

« C'est le jeu ! » rétorqua Minerva McGonagall avec un petit haussement d'épaule.

Lupin, avec un sourire, la félicita des qualités de capitaine de Katie Bell, comme si la professeur de Métamorphose y était pour quelque chose.

« Cyrus a été remarquable ! » estima alors Flitwick de sa petite voix pointue. Cerridwenn merci, il n'a pas battu des mains !

« Il brûle de faire partie de l'équipe de Gryffondor depuis des années », répondit McGonagall.

« Il avait une partenaire particulièrement efficace », commenta Lupin en levant son verre vers Mme Maxime.

« Oh, Alieunor est uneu bonne joueuseu, son frèreu est dans l'euquipe de Franceu »

Insensiblement, la conversation dériva sur le classement international de Quidditch, ce qui permit agréablement à Karkaroff de se féliciter des bons résultats bulgares – même si cela avait privé Durmstrang de son premier champion. Ils avaient presque fini le repas quand Sybille Trelawney apparut aussi silencieuse et diaphane qu'à son accoutumée.

« Sybille ! » l'accueillit Dumbledore avec un grand sourire. « Je n'espérais plus vous voir ! »

Et parlez du caractère retors des Serpentards ! - jugea Severus Rogue.

« Bonjour Albus… Il y a beaucoup d'animation cette année... le Tournoi, les matchs… Je crains toujours que ça ne trouble un peu mon troisième œil… Mais quand j'ai vu que vous étiez là… »

Elle ne précise pas si elle a vu la venue de Dumbledore en premier dans sa boule de cristal ou dans la note que j'ai glissé dans le casier de chacun de mes chers collègues !

« Mais asseyez-vous, je vous en prie », intervint alors Marigold Chourave, lui faisant de la place à côté d'elle. La professeur de Divination mit quelques secondes à hocher la tête puis s'installa avec des gestes étonnamment lents.

En voilà une autre que je ne sais pas comprendre ! - estima le Maître des Potions. Il savait que Remus s'inquiétait qu'elle soit allée voir Karkaroff et il nota, d'ailleurs, que ce dernier dévisageait la professeur de Divination avec une certaine insistance. Il savait que Dumbledore voulait essayer d'en discuter avec elle, mais il n'arrivait pas vraiment à prendre tout cela au sérieux. Il ne comprenait pas comment les deux Gryffondors – comme il les appelait souvent intérieurement – pouvaient juger moins plausible que Karkaroff ait inventé cette histoire pour l'inquiéter lui plutôt que cette vieille folle ait pu discerner les signes du retour de….

Et penser au poids qu'elle a pris sur nos vies, sur toutes nos vies à tous, avec sa prophétie ! Le Seigneur des Ténèbres respectait les voyants… plus que Dumbledore ou Lupin qui font juste semblant de le faire…. Et je me rappelle avoir pensé que c'était une faiblesse…

Tout en picorant dans son assiette, Sybille Trelawney répondit avec sa voix fragile aux questions de Dumbledore sur ses élèves – « tellement peu ont eu la grâce d'être touchés par le don ! » – et sa santé. Elle raconta qu'elle passait depuis l'été dernier ses vacances dans un manoir qu'une vieille tante lui avait légué sur la côte. «J'ai été tellement triste quand j'ai vu la mort sur elle », expliqua-t-elle encore. Mme Maxime – était-ce sur l'initiative de Dumbledore ou de Lupin ? s'interrogea le Maître des Potions – lui demanda ensuite si elle avait vu l'issue du Tournoi.

« Le Tournoi…. Vous avez raison de penser, Mme Maxime, que le Tournoi est un bon instrument pour le Destin… » - commença la professeur de Divination au moment où les conversations allaient reprendre. Tout le monde se tut brusquement.

Non, décidément, je ne peux pas la comprendre… Il me semble que je me sentirais plus proche de Bellatrix si elle entrait brusquement dans cette pièce ! Elle, je saurais ce qu'elle veut et comment elle compte l'obtenir !

00

Severus trouva prétexte d'une expérience en cours pour s'éclipser avant la fin du repas. Ce n'est qu'une fois arrivée dans l'ombre de son cachot qu'il se sentit mieux. Il ferma néanmoins soigneusement la porte de son laboratoire avant de relever sa manche gauche et de sentir sous ses doigts la pulsation, raisonnable mais réelle, de la cicatrice que le Seigneur des Ténèbres avait apposé sur son bras. Etait-ce possible ?

Karkaroff avait commencé à le regarder fixement du moment où la marque avait commencé à le picoter. Il ne l'avait pas lâché avant qu'il ne quitte la salle. Avait-il ressenti la même chose et chercher à voir si le Maître des Potions souffrait comme lui ? Avait-il trouvé le moyen de déclancher lui-même les picotements ? Etait-ce un plan pour lui faire perdre toute prudence et toute raison. Son cœur s'accéléra encore.

La marque était là, toujours palpitante. Comme un petit animal endormi sous ma peau.

Il se rappela qu'un temps, il l'avait trouvé belle, la preuve que l'absolu qu'il cherchait était sans doute à sa portée. Ça paraissait si lointain maintenant, les motivations, les espoirs, les déceptions…. Et Lupin voulait qu'il remue tout cela pour que ce gamin – certains auraient parlé d'abomination – puisse mieux maîtriser celui qui lui avait donné la vie ? Car qui d'autre que Black avait donné la vie à Cyrus ? Sa vie !

Ça n'aidait pas comme ligne de pensée !

Il se réfugia dans le travail, dans l'émincée des racines d'armoise, dans le recueil du jus de pissenlit, dans l'écrasement des grains d'hellébore… autant de tâches répétitives et précises qui entraînaient miraculeusement ses pensées loin des motivations des humains, loin des cicatrices brûlantes, des erreurs de jeunesse, des choix éthiques et autres réflexions sur la destinée.

Il dériva si loin et si bien qu'il sursauta presque quand on frappa à sa porte. Il essuya lentement et méticuleusement ses mains sur un grand torchon avant d'aller ouvrir. Lupin se tenait appuyé contre le chambranle, Cyrus à ses côtés. Bien sûr… c'était prévu…. Comment avait-il pu oublier ?

« Tu travailles ? »

« Une potion »

« Tu préfères qu'on le fasse plus tard ? » demanda encore Lupin.

Je préfère qu'on ne le fasse pas du tout, pensa Severus, mais il garda cette réflexion pour lui. Il n'avait aucune envie de déclancher une lourde contre-offensive de Remus s'il cherchait à se rétracter. Ce damné loup-garou n'aurait de cesse, il le sentait, à la fois de le convaincre de revenir sur sa décision et de comprendre ses raisons. Et, en fait, aucune des deux discussions ne plaisait à Severus !

Il s'effaça donc et laissa les deux Lupin entrer. Il mesura alors combien Cyrus avait grandi ; il dépassait maintenant largement l'épaule de Remus et le souvenir revint immédiatement de la haute et puissante stature de Black. Il sentit son corps se crisper légèrement.

« Tu comptes… rester là ? » demanda-t-il.

« Je pense que oui », répondit très tranquillement Remus.

Severus attendit la suite mais elle ne vint pas. Ai-je fait tant de mal à Harry ? pensa-t-il sans être capable de le formuler à haute voix. Mais c'est toi, qui as voulu ! Pas moi ! Et tu me demandes la même chose encore aujourd'hui !

Il revit l'adolescent raidi par ses efforts pour contrôler ses émotions, les yeux brillants et meurtris par la haine que lui, Severus Rogue, professait encore pour James Potter tant d'années plus tard. Il savait qu'il avait eu des mots très durs, trop durs sans doute alors que l'objet de tout ce ressentiment était mort ! Comment Lupin avait-il rattrapé les choses depuis ? C'était encore une question qu'il se savait incapable de poser ! Maudit loup-garou !

« Comment allons-nous faire cela ? » demanda-t-il plutôt, clinique.

« Moi, personnellement, je ne vais rien faire », répondit tranquillement Remus. « Je ne suis là que pour Cyrus… ça va être un moment difficile pour lui »

Alors que pour moi, ça va être une partie de plaisir ! - s'insurgea encore Severus une nouvelle fois sans l'exprimer.

« J'ai néanmoins une suggestion. Je me méfierais des mots, Severus… je pense que pour passer les barrières mentales que Sirius a laissées derrière lui, il faut des émotions… des images… »

« Tu veux utiliser une Pensine ? » demanda le Maître des potions avec une visible appréhension. Ses pensées étaient bien trop confuses, ses sentiments trop violents, pour qu'il puisse les donner à voir.

« On peut discuter si tu préfères », intervint alors doucement Cyrus et, pour la première fois, Severus tourna réellement son regard vers lui :

Le jeune garçon avait l'air inhabituellement grave, mais plus d'une gravité plus curieuse qu'inquiète. Poliment attentif fut l'expression qui vint à l'esprit du Maître des potions avant de sentir se surimposer dans sa tête, le visage de Harry entrant avec la même expression dans son bureau une semaine plus tôt. Ce n'était pas une expression qu'il pouvait associer à Sirius Black ou à James Potter. Non, certainement pas. Etait-ce la marque de Lupin sur ses fils adoptifs ?

« Je ne sais pas… comme tu veux… » - répondit-il plus troublé qu'il n'aurait aimé l'admettre par les souvenirs et les émotions contradictoires qui se bousculaient dans sa tête.

« Commençons par parler alors », proposa calmement Cyrus avec un air de sollicitude qui hérissa le Maître des potions.

« Combien de temps avons-nous ? » demanda-t-il sans doute sèchement, à Lupin.

« Autant qu'il en faudra… » - répondit celui-ci, impassible, encore que Severus doutât qu'il n'ait pas senti son malaise. « Albus est reparti… Il s'excuse de ne pas t'avoir salué »

Une façon comme une autre de me demander pourquoi j'ai disparu, songea Severus mais il demanda ironiquement :

« Alors, Sybille a révélé le nom du Champion ? »

Remus haussa les épaules : « Non… elle a continué sur le thème du Tournoi comme lieu d'expression du destin… un lieu où des torts peuvent être corrigés malgré le soin de ceux qui se croient plus forts que les dieux, a-t-elle précisé »

« Fascinant »

« Albus trouve positif qu'elle s'intéresse à la vie de l'école », ajouta Remus avec l'air de quelqu'un à qui on a fait la leçon. Cyrus à ses côtés pouffa. « Puisqu'il semble que l'avenir nous échappe, si nous faisions un petit point sur le passé », reprit le premier quelques secondes plus tard.

Severus hocha la tête et indiqua des chaises qui entouraient un bureau dans un coin du laboratoire.

« Installons-nous »

000

« Tu veux que je te dise quoi ? » demanda Severus, mécontent de l'émotion qu'il sentait dans sa propre voix. Non, ça n'allait pas être facile !

Cyrus haussa imperceptiblement les épaules, réfléchit visiblement à la formulation qu'il allait employer et murmura : « Pourquoi te…détestait-il ? »

Comme si là était la question ! Comme si la réponse commençait par « parce que » !

« Je ne pense pas être bien placé pour répondre ! » s'entendit-il exploser. « Tu es celui à qui je devrais poser cette question, non ? Si elle m'intéressait ! »

La réponse saisit visiblement Cyrus qui, instinctivement, regarda Remus comme pour lui demander conseil. Mais Lupin n'eut qu'un sourire furtif. Et Severus comprit comme l'enfant le conseil silencieux : Attends !

Il les détesta : Lupin, Cyrus, Black, et Potter aussi, et Dumbledore encore et toute cette cohorte de Gryffondors confiants ! Et cette détestation eut l'effet paradoxal de le lancer dans l'explication que Cyrus attendait :

« Il ne supportait pas que j'existe tout simplement ! Que je ne sois pas complètement stupide, que les professeurs m'apprécient ! Que mes condisciples me parlent ! Tout en moi semblait l'agacer ! L'air que je respirais, le sol que je foulais ! Tout ! Même que je cherche à l'éviter ! »

Remus imperceptiblement secoua la tête. Ah, c'est pour cela que tu es là, n'est-ce pas ? Pas pour le gamin mais pour vérifier ce que je vais dire ! Pour me convaincre sans doute que je me trompe !

« Quoi ? » gronda-t-il. « Tu voudrais que je lui dise quoi ! Que je l'ai parfois consciemment provoqué ? Qu'il me fascinait ? Que sa capacité à gaspiller son cerveau, sa fortune et son influence me révoltait viscéralement ? Mais n'est-ce pas à toi, le père spirituel, de dire cela ! »

Lupin détourna les yeux, contemplant longuement le mur comme il aurait observé un paysage au travers d'une fenêtre. Puis son regard revint sur lui, pour accompagner des paroles calmes :

« Je ne crois pas, non. Objectivement, non. »

Severus sentit de nouveau la colère couler dans ses veines, brûlante et insupportable comme la marque qu'il portait sur son avant-bras. Que sais-tu de mes souffrances ? Ne t'intéressent-elles donc pas ? Seul l'honneur des Maraudeurs, n'est-ce pas ! Il ouvrit la bouche pour rétorquer, mais la petite voix de Cyrus l'arrêta :

« Il était tellement content de pouvoir te détester… »

Severus regarda le jeune garçon assit droit et tranquille sur la chaise face à lui. Ses yeux gris semblaient lointains comme s'il contemplait une image intérieure – et c'était sans doute le cas. Plus tard, il regretterait presque de ne pas avoir alors utiliser la légilimancie pour mieux comprendre la nature des relations entre Cyrus et sa mémoire. Mais il savait aussi qu'au moment où l'adolescent avait parlé il avait été plus que jamais loin de l'objectivité scientifique ! Content de me détester ?

« C'était tellement plus facile ! Plus facile que de détester Lucius ou Narcissa qu'il avait toujours connus… Ou Bellatrix qui avait été si proche de lui… ou Regulus… Tellement plus facile de s'en prendre à toi, solitaire et mal dans ta peau… brillant, oui, proches des autres, oui, mais tellement plus vulnérable… Même quand il avait quitté sa famille, s'opposer à eux aurait été reconnaître leur existence… »

Les mots paraissaient particulièrement étranges venant de ce garçon à peine échappé aux rondeurs de l'enfance, encore si fragile et incertain… immature… Lupin s'en inquiétait souvent… Pourtant ses paroles paraissaient si claires, si précisément justes… elles tombaient sur la colère brûlante de Severus comme une potion apaisante, comme la réponse longtemps cherchée d'une complexe équation de pentacle.

Evidemment, il avait été la solution de facilité… Evidemment, il n'avait pas dû être simple de quitter le clan Black, le confort de sa puissance et de son arrogance… Regulus en avait été incapable d'ailleurs, pourtant Severus n'avait jamais douté que le plus jeune Black ne soit pas de l'étoffe dont on faisait les Mangemorts. Il se souvenait même avoir évoqué ce doute à Lucius Malefoy ! Evidemment, il avait été le plus simple à détester… « Tu étais tout ce que ses parents auraient voulu qu'ils soient », avait dit Lupin.

Mais sa colère se rebiffa.

Et alors ?

Black n'avait sans doute pas eu une vie facile ?

Et alors ?

Il avait craché sur sa fortune pour la Lumière ?

Et alors ? Lui n'avait-il pas jeté aux orties ses rêves de puissance ? Lui-même ne s'était-il pas condamné tout seul à une vie d'agent double et d'obscur professeur ? N'était-il pas encore et toujours la cible du mépris de ceux qui avaient leur bonne conscience pour eux ? M'a-t-on donné une seconde chance ? Est-on venu me sauver et m'offrir une nouvelle vie ? Je suis allé voir Dumbledore et je n'ai eu qu'un pardon mesuré, à la hauteur de ce que je pouvais offrir ! Qu'offre-t-il lui ?

Il se sentit singulièrement fragile - et impuissant face à cette fragilité. Il eut l'impression effrayante que s'il ouvrait la bouche il allait se répandre en invectives ou, pire encore, en sanglots – et cette deuxième possibilité était si claire qu'il ne savait pas comment la gérer. Il se raccrocha donc au silence comme à une bouée de sauvetage – lui qui ne savait pas nager !

Personne ne sembla s'en étonner. Cyrus gardait ce regard lointain et bientôt il frissonna. Remus, dont le visage avait rarement été aussi grave, l'attira contre lui : « ça va ? »

« Oui, je crois… mais… je crois aussi que ça suffit… Il y a des choses… des choses qui ne me regardent pas »

Les mots tirèrent Severus de sa prudente réserve envers lui-même. Il leva la tête vers le père et le fils qui ne se quittaient pas des yeux.

« Ce serait… très sage », articula Remus, visiblement ému, « et on est pas toujours obligé d'être sage, Cyrus ! »

« Peut-être que je ne suis pas prêt », répondit Cyrus en secouant la tête d'un geste étonnamment enfantin.

« Peut-être que tu es plus sage que tu ne le crois », proposa Remus.

« Oh… tu devrais dire cela à Minerva…. »

« Non, elle serait sans doute un peu déçue… » - sourit Lupin.

L'échange saisit Severus. Il se sentit vieux, seul et sec face à autant de complicité. Il eut envie de les jeter dehors… et aussi de les serrer dans ses bras… Mais Lupin se tourna vers lui :

« Finalement les mots suffisaient… merci »

Merci ?

000

« Je suis content que ça t'ait aidé » répondit Harry d'un ton sincère.

« Hier soir, je mourrais de trouille en me couchant… » - avoua Cyrus en repoussant machinalement derrière son oreille droite, ses longues mèches noires. Un geste que Harry avait appris à interpréter comme une marque de concentration. « J'imaginais que j'allais faire des tonnes de rêves, que tout allait revenir… toutes leurs blagues stupides, leurs disputes… Que j'allais peut-être hurler… J'ai même failli demander à Papa d'aller dormir à la maison… mais il y aurait eu trop de questions, non ? »

« Sans doute », souffla le grand frère.

« Mais non finalement... rien… »

« Peut-être plus tard », proposa Harry, un peu intimidé.

« Je ne sais pas… je ne crois pas… C'est comme si quelque chose dans ma tête était calmée… une contradiction…. Je sais que tu ne peux pas comprendre… » - soupira Cyrus.

Avant que Harry n'essaie de lui prouver le contraire, une voix légère intervint :

« Hé ! Cyrus ! »

« Oh Aliénor ! Bonjour ! Est-ce que tu connais mon frère ? Harry, je te présente Aliénor ! »

La jeune fille sourit : « On va dire que j'ai entendu parler de lui… Mais je suis heureuse de faire sa connaissance… Et de voir qui peut être le frère de Cyrus aussi ! »

Harry aima bien la façon dont elle avait évacué la question de sa « célébrité » et il lui sourit en lui serrant la main.

« Moi, je suis curieux de connaître quelqu'un qui joue aussi bien ! »

« Merci. On va dire que, chez nous, c'est une histoire de famille ! Mon grand-père a été entraîneur de l'équipe de France, mon frère Guilhem vient d'entrer dans l'équipe… »

« A quel poste ?»

« Attrapeur »

« Harry est un super attrapeur, j'espère qu'il sera tiré au sort bientôt ! Tu verras ! » - intervint Cyrus avec enthousiasme.

« Ça m'étonnerait qu'il y ait un nouveau match avant la seconde épreuve », rétorqua Harry.

« Oui, c'est le week-end qui vient », confirma Aliénor

« Romaric est prêt ? » demanda Cyrus

« Je crois… Il a passé de longues heures à percer le mystère de l'œuf… au début il avait l'air inquiet mais depuis quelques jours, il est plus détendu… Il doit avoir trouvé… il y avait un message je crois… »

« Fais leur donc confiance pour avoir trouvé des trucs tordus », estima Cyrus avec une jubilation certaine.

« Je crois que le message, c'est un coup de Flitwick », commenta Harry.

« Qu'est-ce que je disais ! »

Les trois se turent quelques secondes puis Aliénor demanda :

« Tu es en troisième année, Harry, c'est ça ? »

« Oui… et toi ? »

« Moi aussi » confirma-t-elle. « J'étais trop contente d'avoir été choisie pour accompagner Romaric… Normalement, les troisièmes années ne devaient pas venir… »

« Ah ? » Cette fois, c'était Cyrus qui relançait la conversation.

« Oui » Elle rosit. « C'est parce que j'ai eu les meilleures notes du premier trimestre… enfin, je crois que c'est pour ça… »

« Encore une bonne élève ! » gémit Cyrus.

« Ne l'écoute pas, Aliénor, il est loin d'être aussi mauvais qu'il le souhaiterait », se moqua Harry.

« Pas le choix », maugréa Cyrus. « Un père directeur, un frère qui trouve l'arithmancie amusante… »

« Tu étudies l'arithmancie ? Moi aussi ! » - intervint Aliénor

« Vraiment ? »

« Oui… d'ailleurs, là j'allais à la bibliothèque essayer de trouver des choses pour le devoir que mon professeur m'a envoyé… C'est pas facile sans les cours de suivre… »

« Oh, j'allais aussi à la bibliothèque… je peux… peut-être que j'arriverais à t'aider à trouver un livre… enfin, je parle pas français comme Cyrus, hein, faudra me traduire ! »

« Ça serait super ! Seule, je crois que je vais laisser tomber ! »

Cyrus s'arrêta brusquement et les deux autres se retournèrent. Il les regardait avec un grand sourire :

« Vous savez quoi ? Vous allez continuer sans moi… »

« Mais », commença Aliénor.

« Un truc à faire », dit précipitamment Cyrus avec un clin d'oeil pour son frère.

« Cyrus, qu'est-ce que tu vas te mettre en tête ! » s'insurgea ce dernier.

« Comme on dit…. Heu… Amor tussisque non… celatas », lança l'interpellé.

« Non celaTUR », corrigèrent en même temps Aliénor et Harry. (1)

« Vous voyez, même Sénèque ! Je vous vois pour déjeuner ? »

000

(1) Hum, hum... désolée, j'ai pas pu résister à la caser celle-là….

Amor tussisque non celatur, effectivement du Sénèque, l'amour comme la toux ne se cache pas… Mouarf, non ?

(Pour ceux que ça amuserait de savoir, Cyrus dit « tu ne caches pas l'amour comme la toux » et non la forme impersonnelle… Ton côté prof, dirait Alixe - Normal, dès que tu parles de Severus, y'a du latin dans l'air, dirait Vert. )

Sinon, le suivant devrait tourner autour de la deuxième épreuve avec le titre, sans doute trop révélateur, d' Eléments

Je poste ce soir trop contente d'avoir mis un point final au premier jet du 28 qui s'appelle Dominos… ça se précise…