PROMPT : Chasser les ombres à minuit
Harry était reparti presque apaisé de sa rencontre avec le professeur Rogue. Il espérait qu'ils avaient posé les bases d'une nouvelle relation, plus chaleureuse qu'avant.
Il pouvait supporter les réflexions en cours et son comportement agressif, clairement injuste, mais seulement s'il savait que c'était une façade. Harry ignorait pourquoi il avait besoin d'être soutenu par ce professeur en particulier — surtout compte tenu de leur lourd passif — mais il ne se posait pas de questions tant qu'il réussissait à approcher Severus Rogue.
Bien évidemment, il ne fut pas surpris de voir que Hermione l'attendait dans leur salle commune, poings sur les hanches malgré l'heure tardive, un air désapprobateur sur le visage.
Il lui adressa un léger sourire d'excuse espérant qu'elle s'en contenterait, mais la jeune fille n'était pas du genre à abandonner si facilement.
— Harry Potter ! L'année n'a pas encore commencé et déjà tu ignores le couvre-feu !
Il soupira et haussa vaguement les épaules, répugnant à lui confier où il était même s'il s'agissait de sa meilleure amie en qui il avait toute confiance.
Les traits de Hermione s'adoucirent, et elle lui posa une main légère sur l'épaule, avec un air grave.
— Si tu as besoin de parler, je suis là, Harry. Pas besoin de chasser les ombres à minuit pour te changer les idées. Regarde-toi, on dirait que tu n'as pas dormi depuis des semaines !
Harry voulut protester, mais elle le coupa, autoritaire.
— Je suis ton amie ! Je… Écoute, tu ne m'embêteras jamais à venir me voir si ça ne va pas. Je suis là pour toi, OK ?
Ému, le jeune homme l'attira dans une étreinte maladroite, en la remerciant dans un souffle. Puis, Hermione le poussa vers son dortoir, avec un sourire en coin.
— Va te coucher idiot ! Tu as besoin de repos…
Harry ricana et prit le temps de se retourner un instant pour la fixer.
— Merci Hermione.
Elle roula des yeux et rejoignit son propre dortoir, laissant échapper un bâillement sonore.
Quelques minutes plus tard, Harry était dans son lit, blotti sous la couette, écoutant les ronflements de Ron, la bouteille de sommeil sans rêves à la main. Il hésita, et finalement la but avec un haussement d'épaules. Au moins, il ne commencerait pas l'année avec des cauchemars incessants…
Pendant l'année, Rogue fut égal à lui-même avec Harry : détestable et parfois cruel. Parfois, le jeune homme explosait et répliquait et gagnait ainsi une série de retenues pour la plus grande consternation de ses amis. Mais il ne se plaignait jamais, haussant juste les épaules d'un air indifférent quand Ginny lui suppliait de demander à Dumbledore d'intervenir.
Dumbledore sembla se rappeler soudain sa présence et l'impliqua plus que jamais dans la guerre, en lui racontant l'histoire de Tom Jedusor qui deviendrait en grandissant Voldemort.
Cependant, quelque chose avait changé, et aidé Harry à se sentir mieux, à revenir à la vie après s'être plongé dans un puits de désespoir. Il allait régulièrement voir son professeur de potions, caché sous sa cape d'invisibilité quand il ne profitait pas des retenues infligées en cours, et tous les deux discutaient, apprenaient à se connaître.
Malgré lui, Severus admirait le gamin — qu'il ne voyait plus vraiment comme un enfant compte tenu du poids qui pesait sur ses épaules. Il se surprenait à le traiter en égal, de plus en plus souvent.
Harry lui prouvait chaque fois à quel point il lui faisait confiance en lui révélant tout ce que Dumbledore lui confiait. Ainsi, Severus découvrait ce qui lui avait toujours été caché… L'existence des horcruxes l'avait révulsé et il avait pris sur lui de faire des recherches discrètes. Après tout, en plus de la bibliothèque de Poudlard et de sa réserve interdite, il avait sa propre bibliothèque bien garnie en livres traitant de magie noire ou de magie de l'esprit et il avait surtout accès à la bibliothèque des Malefoy, profitant de son amitié avec Lucius et de son lien de parrain avec Drago.
Il transmettait chacune de ses découvertes à Harry, mais restait muet lorsque Dumbledore l'appelait. Le vieil homme lui distillait les informations au compte-gouttes après tout, et s'il lui avait révélé les origines de Voldemort plus tôt, il aurait peut-être pu changer les choses. Comme éviter à son filleul d'être marqué, ou réduire la fidélité de Lucius et de quelques autres Sang-Purs très attachés à leur pseudo-pureté…
Lorsque Dumbledore commença à emmener Harry pour aller chercher les horcruxes en sa compagnie, Severus maudit le vieil homme de mettre l'adolescent en danger. Il ne comprenait pas quel besoin il avait du garçon, mais il n'aimait pas ça. Et il exigea de Harry qu'il vienne le voir à chaque retour avec Dumbledore.
Harry revenait juste d'une de ces expéditions, et buvait un chocolat chaud, gracieusement offert par son professeur. Celui-ci soupira et avoua, en détournant les yeux.
— Dumbledore a exigé de moi que je le tue à la place de Drago Malefoy. Il veut préserver son âme, et… ça doit être moi.
Harry sursauta violemment et secoua la tête.
— Et votre âme ? Il s'en moque ? Pourquoi...
— Malefoy n'a jamais tué. Contrairement à moi. C'est juste que… je deviendrais l'ennemi public numéro un… Le destin semble décidé à me pousser vers la tombe.
L'adolescent sembla soudain épuisé et il secoua doucement la tête.
— Vous devrez vous cacher soigneusement. Je sais que vous êtes capable de rester loin du Ministère et de ses larbins.
Surpris, Severus fronça les sourcils.
— J'aurais imaginé vous voir vous insurger contre ça, et chercher une solution pour épargner Dumbledore.
Harry haussa les épaules, et gonfla légèrement les joues.
— J'aurais pu, oui. S'il ne m'avait pas tourné le dos au moment où j'avais besoin de soutien. Il me cache trop de choses pour que je puisse avoir confiance. Cependant, même s'il a refusé d'en dire plus, je sais parfaitement que sa main a été touchée par un sort de Magie noire et qu'il va… probablement mourir ?
Severus hocha la tête avec un rictus moqueur.
— Il semblerait que vous deveniez observateur, monsieur Potter. Effectivement, le directeur s'est montré particulièrement imprudent et si j'ai réussi à contenir le sort mortel dans son bras pour l'instant, ce n'était qu'un… répit. Pas une solution définitive.
Harry hocha la tête, songeur. Cependant, au moment de retourner dans la tour Gryffondor, il marqua un arrêt.
— Soyez prudent professeur.
Habituellement, lorsque le gamin s'inquiétait pour lui — ce qui lui réchauffait toujours le cœur même s'il refuserait de l'avouer clairement — il ricanait ou plaisantait. Cette fois, pourtant, comme pris d'un pressentiment, il répondit d'une voix douce.
— Vous aussi, monsieur Potter.
