PROMPT : Rupture


Après avoir pris le temps de fixer Potter un long moment, comme pour lui donner un peu plus de ce courage insensé dont il semblait déborder, Severus leva le bras, sonnant le rassemblement des Mangemorts, pour fuir Poudlard.
Ils allaient probablement recevoir quelques Doloris lorsqu'il apprendrait qu'ils avaient perdu Poudlard face à Harry Potter en personne, et ce malgré toutes ses précautions pour empêcher le garçon de rejoindre l'école de magie. Cependant, l'approche d'une bataille majeure empêcherait probablement le Seigneur des Ténèbres de trop blesser ses Mangemorts. Il ne voudrait pas perdre de la chair à canon à ce stade de sa guerre.

Sous les sorts lancés par Minerva, les Mangemorts quittèrent l'école. Aussitôt, les élèves hurlèrent de joie et se jetèrent tous sur Harry, qui revenait en vainqueur.

Minerva sourit, soulagée de le revoir et lui posa une main toute maternelle sur l'épaule.
— Heureuse de vous revoir entier, Monsieur Potter.

En voyant Severus Rogue, toujours aussi impressionnant, Harry avait souri. L'école ne serait pas ce qu'elle était sans cet homme. Il nota les cernes, les traits tirés et les rides provoquées par l'inquiétude. Mais Rogue était là, droit et fier, inébranlable.

Lorsqu'il avança au milieu de ses camarades, avec un sourire provocant, Harry se sentit pleinement vivant. Son professeur lui avait manqué. Il n'avait pas réalisé à quel point le provoquer pour le faire réagir était devenu un jeu… Sous ses yeux sombres, si effrayants pour certains, lui se sentait revivre.

Harry aurait aimé lui parler, autrement qu'en plein milieu de la Grande Salle, sous les yeux de ses camarades, des autres professeurs et des laquais de Voldemort. Mais les Carrow semblaient décidés à en découdre et le combat s'engagea.
Il se battit comme un forcené, avec l'impression d'être presque invincible. Il voyait du coin de l'œil MacGonagall lancer des sorts en direction de Rogue, et l'illusion d'un duel acharné était parfaite. Cependant, il se rendait bien compte que les sorts étaient destinés aux Mangemorts autour d'eux, et ils faisaient le ménage avec efficacité.

En cet instant, le jeune homme eut l'impression que l'avenir était déjà joué. Il allait vaincre Voldemort, et ramener la paix. Pas à cause d'une stupide prophétie qui faisait de lui le Sauveur, mais parce qu'il avait des alliés précieux…

Il y eut un moment de flottement, pendant lequel tout sembla s'immobiliser. Harry croisa le regard de Rogue et ils se fixèrent. L'adolescent essaya de lui transmettre toute sa gratitude, et il aurait aimé lui hurler de rester en vie. De faire attention à lui, de ne plus risquer d'être tué. Il voulait lui dire de se dévoiler, de rester avec lui.

Cependant, MacGonagall lança un sort sur un mur derrière Rogue et des morceaux de pierre se détachèrent, brisant l'instant. Aussitôt, l'homme en noir leva le bras, poing serré, et les Mangemorts quittèrent Poudlard, sous les cris de joie des élèves.

Le jeune homme s'obligea à ne pas bouger alors que ses camarades se précipitaient vers lui. Il sourit à Minerva MacGonagall qui se tenait à proximité, appréciant son accueil chaleureux.
Bien que souriant, il ne participait pas à la liesse générale, totalement crispé, concentré sur ce qui arrivait. Il échangea un regard entendu avec ses amis, et il ferma les yeux un instant.

Décidé, il regarda ses camarades et leva une main un peu tremblante.
— Ceux qui ne veulent pas se battre devraient se mettre à l'abri dès maintenant.

Ses amis — Neville en tête — avancèrent d'un pas, prêts à se battre. Luna lui adressa un sourire tendre, qu'il lui rendit.
Pansy Parkinson commença à protester, demandant haut et fort à ce que Harry soit livré au Seigneur des Ténèbres, pour leur survie à tous. MacGonagall la fit sèchement taire, la dévisageant sans complaisance et ordonna à Rusard de conduire l'ensemble des Serpentard dans leur maison. Qu'ils soient confinés pour ne pas pouvoir intervenir, quelle que soit leur allégeance.

Harry allait protester, refusant de s'arrêter à leur maison, mais Minerva s'approcha de lui pour lui murmurer une explication.
— Ceux qui voudront se battre à vos côtés risquent de se trouver face à leurs parents. Je refuse de leur imposer ça…

L'adolescent hocha la tête, avec une grimace crispée. Il comprenait bien évidemment, même s'il était convaincu que c'était à ses camarades de choisir leur destin…
Il prétexta un besoin de calme pour s'éloigner, quittant la Grande Salle, pour s'adosser dans le couloir désert. Il ferma les yeux, la tête tournant — il avait perdu l'habitude de se retrouver au milieu d'une foule dans cette année de cavale — et le cœur battant. Il allait faire face à son destin et il avait peur. Il serait fou de se prétendre sans peur, cependant malgré ses craintes, il irait jusqu'au bout.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, il se rendit compte qu'il n'était plus seul. Ginny était face à lui, souriant timidement. Il répondit à son sourire, sans arrière-pensées. Cependant, la jeune fille prit sa réaction pour un encouragement, puisqu'elle s'approcha de lui d'un air décidé, envahissant son espace personnel.

Comprenant qu'elle s'apprêtait à l'embrasser, il eut un mouvement de recul. Face à son air blessé, il détourna les yeux.
— Harry ?

À cet instant, il la détesta de vouloir lui donner l'illusion d'une vie normale. Il s'apprêtait à risquer sa vie, probablement à devoir se sacrifier et n'avait pas la tête à se montrer romantique ou quoi que ce soit que Ginny espérait.
Il soupira.
— Tu devrais retourner avec les autres Ginny.

La rousse se renfrogna et croisa les bras sur sa poitrine.
— Je t'ai attendu Harry. Je croyais qu'à ton retour tout pourrait… je sais pas. Changer entre nous. Qu'on pourrait… envisager l'avenir.

Harry haussa les épaules, refusant de croiser son regard.
— Je suis désolé, Ginny. Je… Je ne peux pas.
— C'est une rupture ?

Il tressaillit au ton tranchant, avant de soupirer.
— Il n'y a rien à rompre. Et il n'y aura rien non plus dans l'avenir. Je ne peux pas Ginny, je suis désolé.

Il y eut un long silence entre les deux adolescents. Ginny siffla entre ses dents.
— Aie au moins le courage de me regarder dans les yeux ! Par Merlin, je pensais qu'entre nous… Tu m'as laissé imaginer…
Le jeune homme soupira puis releva la tête. Il n'y avait pas le moindre regret dans son regard lorsqu'il répondit doucement.
— Je t'apprécie énormément, Ginny. Tu es une amie précieuse, tu es la petite sœur de Ron. Mais… Je ne suis même pas certain de survivre à ce qui va se produire dans les heures à venir, alors je suis loin de m'imaginer m'engager dans quoi que ce soit.

Il ignora l'espoir qui se ralluma dans le regard noisette de la jeune fille, pensant qu'il serait toujours temps de la détromper plus tard.