PROMPT : Paranoïa
En s'éveillant, Harry cligna des yeux, désorienté. Il eut un bref moment de panique, avant de se rendre compte qu'il était dans les bras d'un Severus assoupi. En sécurité.
Aussitôt, il se détendit, apaisé.
Il profita de l'étreinte, de ce moment de paix. Il ne se souvenait plus vraiment comment il était arrivé là, mais ça n'avait pas vraiment d'importance tant que Severus était à ses côtés. Il avait totalement confiance en son ancien professeur.
Il se perdit dans ses pensées une fois de plus, mais cette fois, il ne revivait pas son enfance misérable ou les erreurs qu'il avait faites et qui avaient eu des conséquences tragiques. Il ne revoyait pas la bataille ou la mort de Voldemort. Cette fois, il repensait à chaque moment passé près de Severus. De leur première rencontre, où l'homme l'avait détesté pour être la copie de son père — au moins physiquement, jusqu'à leur cohabitation étrange et si satisfaisante.
Severus Rogue avait été présent à chaque instant dans sa vie, depuis ses onze ans. Malgré son comportement, il avait été un soutien constant, un protecteur de l'ombre.
À un moment, la rancœur que Harry lui portait avait disparu. Pas d'un coup, bien évidemment. Mais, il avait commencé à mieux cerner l'homme, à le comprendre, et petit à petit, tout le négatif qu'il pouvait éprouver à son encontre s'était évaporé.
Avec un soupir, Harry se redressa légèrement, sans quitter l'abri des bras de Severus, et il le dévisagea avec attention. Chaque épreuve qu'il avait traversée était gravée sur son visage. Mais en le regardant, Harry ne voyait qu'un homme courageux, qui avait sacrifié sa vie sans la moindre hésitation.
Et lui… il voulait être près de lui, quoi qu'il arrive, pour l'épauler. Pour profiter de sa protection aussi, et de sa force. Avec le recul, Severus Rogue était probablement le sorcier qu'il respectait le plus dans le monde magique.
Malgré lui, il étouffa un ricanement amusé en imaginant la réaction de Ron s'il lui disait ce qu'il pensait de Severus Rogue en cet instant. Hermione serait probablement surprise qu'il ait dépassé sa colère d'enfant, mais Ron… il ne parviendrait pas à comprendre qu'il puisse aimer à ce point son tortionnaire d'école… Après tout, les cours de potions avaient toujours été une épreuve et il avait eu son compte de retenues.
Severus cligna des yeux et se réveilla en sentant les mouvements de Harry. Il se redressa et leurs regards se croisèrent et s'accrochèrent. Harry eut un sourire hésitant.
— Professeur.
L'homme roula des yeux, et afficha un air faussement agacé — l'effet étant gâché par un sourire en coin inhabituel chez lui.
— Harry. Tu vis avec moi depuis un moment je pense que tu peux utiliser mon prénom, non ?
Aussitôt, le regard vert s'éclaira et il sourit en hochant la tête. Il se redressa, quittant avec un frisson la chaleur des bras de Severus, pour s'asseoir près de lui, prenant soin cependant de se coller à lui. Conscient de son petit manège, Severus l'enlaça.
Harry se frotta le visage et leva un regard perdu vers l'homme près de lui.
— Pro… Severus ? Je… ne me souviens plus trop de ce qui s'est passé. Je veux dire… je ne me souviens pas m'être endormi.
Severus soupira. Le temps de la conversation qu'il redoutait semblait avoir sonné et il serra Harry un peu plus contre lui avant de parler.
— Tu as fait un genre de crise de panique.
Il sentit le jeune homme se raidir, et il lui caressa le bras pour l'apaiser.
— Tu n'as pas à t'inquiéter, c'est normal Harry. Tu as traversé tellement d'épreuves que tu as le droit parfois de relâcher la pression et de craquer.
Indécis, Harry hocha la tête, moyennement convaincu. Severus força un sourire sur ses lèvres et continua.
— Tu t'es endormi, mais… je ne savais pas vraiment ce qui avait provoqué ce… malaise. J'ai dû utiliser la legilimentie pendant ton sommeil.
Severus s'attendait à une explosion de colère, ou à une indignation légitime. Mais Harry resta silencieux, attendant la suite. Malgré lui, il ne put s'empêcher de taquiner légèrement son ancien élève, essayant maladroitement de détendre le jeune homme tendu.
— Je m'attendais à une salve de questions pleine de paranoïa sur ce que j'ai pu lire dans ton esprit…
Harry gloussa, et le fixa, l'emprisonnant de son regard vert Avada.
— J'ai confiance en vous, Severus.
L'homme déglutit, et resta un moment silencieux, sous le choc. Cette acceptation tranquille fit battre son cœur plus vite, et une fois encore, il se jura de ramener ce garçon exceptionnel à la vie pour qu'il soit heureux. Lui plus que quiconque méritait un peu de bonheur…
Severus soupira, essayant de masquer l'émotion dans sa voix.
— Harry… tu n'es coupable de rien. J'ai vu à quel point tu te tortures, mais… tu as réalisé l'impossible.
Le visage de Harry se ferma et il haussa les épaules, en détournant le regard.
— Si j'avais… Si je vous avais écouté un peu plus dès le début, j'aurais pu éviter des morts. Je…
— Ne sois pas stupide. Même si tu me fais confiance maintenant, je n'ai rien fait pour que ce soit le cas par le passé. Tu avais toutes les raisons de douter de moi, Harry.
— Vous n'aviez pas le choix.
— Oh par pitié ! Ne fais pas de moi un foutu héros ! J'ai fait des erreurs, en premier lieu prendre cette satanée marque. Et même si je devais afficher mon mépris envers toi pour garder mon rôle d'espion, je n'étais pas obligé de te bousculer comme je l'ai fait ! Albus me l'a suffisamment reproché, tout comme Minerva ! J'ai assouvi une vengeance stupide de cours d'école sur toi, parce que ton père…
— Parce que mon père a été un idiot. Tout comme Sirius et Rémus. Je les aime, bien sûr, mais je leur en veux pour ça.
Il y eut un lourd silence après la déclaration tranquille de Harry. Loin de s'énerver aussitôt comme avant, il semblait détaché de tout, comme indifférent. Severus sentit un frisson glacé dévaler son échine et il se demanda à quel point l'esprit du jeune homme avait été endommagé. Il le serra un peu plus fort contre lui.
La réaction de Harry fut immédiate : il se blottit contre lui, grimpant presque sur ses genoux, se gorgeant de ce contact et de cette tendresse.
Presque machinalement, Severus déposa un bref baiser sur son front, et le sourire lumineux qu'il obtint en réponse réchauffa son cœur.
