Jour quatre
James se pelotonna dans sa cellule. Il pouvait entendre les échos des cris venant du couloir, et cela lui glaçait le sang. Il les entendait comme s'il s'était trouvé dans la même pièce que Sirius. Les jours étaient devenus aussi routiniers qu'il était possible dans un endroit comme celui-ci.
Il avait été forcé de regarder et, alternativement, d'écouter. Une heure de répit, peut-être, et cela recommencerai encore. Encore et encore.
Tandis que les hurlements continuaient, James jeta un regard d'espoir vers la porte de sa cellule. Comme ci cela avait été mis en scène, lorsqu'elle s'ouvrit en craquant, la vague de froid le frappa. Il bondit sur ses pieds.
"Où est-il?" demanda t-il en tremblant. Sirius n'avait pas été ramené dans sa cellule depuis le premier jour, mais la présence des Détraqueur faisait qu'il était difficile de penser.
Les Détraqueurs avancèrent seulement, entrainant James avec eux. S'amusaient–ils de son manque de perspicacité face à la situation ? Ils n'en donnèrent aucune indication.
"Bienvenue à Azkaban, Gryffondor…"
"Jamais est un très long moment…"
Sirius hurla, se tordant de douleur. Bellatrix lui donna un coup de pied dans le bas du dos, et il cria plus fort. Elle riait en lançant Doloris sur Doloris.
Sirius hurla jusqu'à ce qu'il ne puisse plus crier…
Quand l'univers s'éclaira enfin et que sa vue se stabilisa, la première chose que vit James fut Sirius prostré sur sol de la salle d'Interrogation. Sa poitrine se soulevait et s'abaissait irregulièrement, mais au moins il respirait.
"Oh, oui. Il est toujours en vie. Nous nous en sommes assurés." James bondit au son de la voix de Voldemort. Il serra des dents et des poings.
"Quel est le problème, Potter? Tu as donné ta langue au chat?" rit Voldemort. "Pas de problème. Rodolphus, voudrais-tu réveiller Black?"
Rodolphus Lestrange ouvrit les yeux de Sirius avec seulement trois sorts de Réveil et quatre bons coups de pieds, deux de moins de chaque que la fois précédente. Il eut l'air amèrement déçu.
James essaya de se ruer sur lui quand il leva de nouveau sa baguette, mais Bellatrix était derrière lui, le retenant, murmurant à son oreille, "Allons, allons, Jimmy. Nous ne voulons pas faire ça maintenant, n'est-ce pas? Nous pourrions nous faire mal ."
La mâchoire de James se décrocha alors que, pour la première fois depuis son arrivée, les liens de Sirius tombaient au sol. Ses bras restaient fermement maintenus derrière son dos et il hurla d'agonie quand Rodolphus les bougea.
"Laissez-le tranquille! Ils sont atrophiés! Ils sont disloqués... Ils..."
Les mots de James surgirent avant qu'il puisse penser et, comme il fallait s'y attendre , personne n'y prêta attention.
Sirius fut tiré sur ses pieds. Soudainement, James réalisa qu'il aurait d'abord dû se demander pourquoi il était seulement maintenu, et non attaché dans la Chaise d'Interrogation comme d'habitude. La table avait été déplacée pour être juste devant la chaise. Une autre chaise, une chaise normale, était également à la table.
La routine changeait. Cela ne pouvait qu'être mauvais pour tous les deux. James ne savait pas quoi penser quand les chaînes brûlantes destinées à ses propres bras, jambes, poitrine et gorge s'enroulèrent au lieu de ça autour de son meilleur ami.
Voldemort prenait les choses en charge personnellement. James frissonna. Cela ne pouvait qu'être mauvais pour tous les deux.
"James." Cela donnait toujours le frisson d'entendre Voldemort utiliser son prénom. "Prends un siège."
Bellatrix le laissa et et le poussa vers la chaise vide. Il se rattrapa à peine avant de tomber.
"Je préfère rester debout."
"Très bien. Faisons à ta façon, alors. Endoloris."
Sirius poussa un cri, essaya de se tordre de douleur, mais les chaînes le tenaient solidement en place.
Voldemort s'avança jusqu'à ce qu'il soit assez proche pour dégager les cheveux du visage de Sirius mais sans lever encore le sort.
James s'assit.
"Etait-ce si difficile?"
Bellatrix pouffa tandis que Voldemort levait sa baguette. Il lui lança un regard sombre tandis que James s'asseyait avec rigidité, fixant longuement son ami.
"Maintenant, j'ai peur de ne pas avoir été un hôte convenable. Tu es mon invité depuis, quand ? Presque quatre jours maintenant? Et je ne t'ai même pas nourri correctement. Tu dois, après tout, entretenir tes forces."
Il frappa dans ses mains et un ensemble impressionnant de nourriture fumante apparut sur la table.
"J'ai fait préparé cela pour toi, donc je m'attends à ce que cela te plaise. Tu n'auras pas beaucoup d'opportunités de te faire plaisir, alors saisis-la."
James eut des difficultés à se retenir de se ruer sur la plus proche pièce de viande et de l'avaler d'un coup. Ses mains tremblaient alors qu'il se retenait. Il n'avait rien vu qu' un morceau rassis de quelque chose et un petit gobelet aqueux de Il-Ne-Voulait-Pas-Savoir-Quoi depuis son arrivée. Il avait avidement mangé le Truc Rassis et vidé le Il-Ne-Voulait-Pas-Savoir-Quoi, mais il y avait combien de temps de cela? Ca ne faisait certainement pas autant. Il soupçonnait dans son for intérieur que ça avait été un accident, aussi.
"Et pour Sirius?" demanda finalement James.
"Quoi pour Sirius?" contra Voldemort.
"Donnez-lui en."
"Non. Pas une bouchée."
Les espoirs de James s'écroulèrent. "Alors je ne mangerais pas non plus." Il se tourna pour regarder Voldemort en face, rencontrant le regard écarlate.
La seule réponse de Voldemort fut de tapoter sa baguette sur les chaînes retenant Sirius.
Elles luirent momentanément plus fort, et les yeux de Sirius brillèrent de souffrance. Il inhala brièvement alors que les chaînes se déplaçaient et se réajustaient.
"Mange. Ou il souffrira. A chaque fois que tu t'arrêteras…" Sa vois traîna, mais ils savaient tous les deux qu'il n'avait pas à terminer.
James ramassa la fourchette et la planta dans un civet. Il la porta d'une main chancelante à sa bouche. Oh, comme ça sentait bon. Oh, combien c'était bon. Chaud et riche sous sa langue affamée.
Bouchée après bouchée, il pouvait voir Sirius le fixer avec un regard avide sur son visage. Sa bouche salivait tellement qu'il était pratiquement en train de baver.
"Oh, Sirius." James tendit la fourchette pleine pour lui.
"Endoloris." Voldemort lança le sort, tendant sa baguette directement sous le menton de Sirius. Les cris résultant poussèrent James à carrément laisser tomber la fourchette.
"C'est pour toi. Pas pour lui. N'ai-je pas été clair? Manque-tu tellement d'éducation que tu rejetterais un si généreux présent?"
James tendit le bras vers la fourchette tombée, tremblant si fort qu'il cogna un plat en chemin. Il pouvait difficilement mettre quelque chose dans sa bouche, sans parler de l'avaler, mais cela sembla satisfaire Voldemort.
Après cinq bouchées, James sentit qu'il ne pourrait en avaler plus. Ses yeux cherchèrent et rencontrèrent ceux hantés, enfoncés de Sirius. Sirius avait repris son souffle après avoir crié.
Trois déglutissements forcés et il commença à se tenir l'estomac.
"James… arrête…arrête…" Les yeux de Sirius étaient suppliants.
James papillonna des yeux vers Voldemort. Pouvait-il arrêter? Il n'avait pas ordre de tout manger, après tout. Sans indication d'une façon ou d'une autre, ses yeux revinrent sur Sirius.
"Arrête…"
Il laissa tomber la fourchette.
Il sut immédiatement que c'était une erreur. Vingt-sept centimètres et demi d'if poli le lui dirent clairement. La baguette s'abaissa doucement sur les chaînes, s'attardant dessus.
Les chaînes commencèrent à luire, mais ce n'était pas le souci premier de James. Elles commencèrent à s'enrouler plus étroitement, plus étroitement…et plus étroitement encore. Lentement mais fermement, elles se resserrèrent. Sirius laissa échapper un hoquet étranglé alors qu'il luttait pour de l'air.
"Arrêtez ça, il va mourir!" James commençait déjà à tâtonner à la recherche de la fourchette tombée.
"Oui, j'ose dire qu'il va mourir, n'est-ce pas?"
La main de James trouva la fourchette. "Ca vous avancera à quoi si votre otage meurt ?"
"A quoi ça t'avancera si ce sont tes actions qui le tuent ? On ne pourra pas le ranimer quelque soit le vainqueur à la fin, n'est-ce pas?"
Une carotte trouva de quelque façon son chemin dans la bouche de James, l'empêchant de répondre.
Voldemort baissa sa baguette et les chaînes cessèrent de se rétrécir. Toutefois, elle ne, desserrèrent pas comme avant.
Sirius aspirait douloureusement et laborieusement à chaque respiration; la faim brillait toujours dans ses yeux.
Se forçant morceau après moreau, James essaya de se convaincre qu'il aidait son ami. Il se répétait que plus longtemps il pourrait continuer, plus longtemps il garderait Sirius de la torture. S'il pouvait seulement finir... quelque part, tout irait bien. Gardant les yeux sur Sirius, il essaya silencieusement de communiquer, ça finira. Tout ira bien. Juste encore trois jours. Alors ça, pourquoi trois jours ? Les yeux hantés le fixaient et il ne pouvait les ignorer, ni ne pouvait s'en détacher.
Ce furent les yeux qui le lui dirent finalement. Ce n'était pas la souffrance qui suivrait, c'était ça, maintenant, qui était la pire torture pour Sirius. C'était regarder, avec des yeux affamés, tandis que James mangeait, qui tuait Sirius. Chaque seconde passée devenait de plus en plus difficile en sachant que c'était ses actions qui causaient tant de souffrance à son ami. Finalement, James dut détourner les yeux du visage de son ami. Sirius avait supplié James d'arrêter auparavant. Il l'avait fait pour le bien de James, mais James réalisait maintenant que c'était aussi pour le sien.
"Pas plus… laissez-moi arrêter…"
Le visage de Voldemort se tordit en un large sourire. "Quel est le mot magique?"
James ne put que le dévisager.
"Je ne demande pas quelque sort ou incantations fantaisiste, mon garçon. Juste un peu de politesse envers tes aînés."
"S'il vous plait."
"C'est celui-là."
James essaya encore. "Laissez-moi arrêter… S'il vous plait."
Voldemort claqua des mains avec entrain. La nourriture disparut.
James vomit promptement.
"On ne t'avait pas dit d'être poli ?" James sursauta faiblement au son de la voix de Rodolphus derrière lui. Il avait oublié que le couple était là. Le simple mouvement de sursaut le fit vomir de nouveau.
Voldemort marcha délicatement autour de la flaque étalée. "Nettoie-ça, Potter. Je ne veux aucune tâche quand je reviendrais."
Il se dirigea vers la porte, Rodolphus et Bellatrix sur ses talons.
"Attendez…" James pouvait difficilement croire sa propre audace. Mais ça avait marché une fois…
"Oui?" Voldemort ne se retourna pas.
"Il ne peut pas respirer Laissez-le... ou au moins détachez les chaînes… s'il vous plait." James était dangereusement près de supplier, mais quelque part il ne s'en souciait pas.
"Non." Tous trois sortirent , et la porte de referma.
Alors que la tension de ses muscles fondait, James s'écroula dans la chaise. Mais un seul regard sur Sirius le força à se mettre sur ses pieds.
"Patmol…Je suis tellement désolé…"
"Pas…ta…faute…" il n'y avait pas de voix derrière ce mots, seulement un souffle d'air.
James donna une petite saccade sur les chaînes, mais elles étaient trop serrées. "Reste avec moi, Patmol. Tiens-bon."
"J'es…saie…"
"Bien."
C'est à ce moment que James réalisa que Sirius fixait le vomi. Il allait s'excuser quand il vit avec horreur que Sirius le fixait d'un air affam.
"Sirius...?" Il regarda son ami avec inquiétude. "Quand est-ce que tu as mangé quelque chose pour la dernière fois?"
Sirius ne répondit pas, mais ses yeux disaient tout. Il n'en avait pas idée. Il avait toujours l'eau à la bouche. "Qu'est-ce qu'il t'ont donné à mangé, Sirius?"
"Demande... pas..."
James grimaça. La décision se cristallisa sans sa tête, et il savait qu'il n'y avait qu'une chose qu'il pouvait faire. "De toutes les choses que je n'aurais jamais pensé faire... ça n'avait même jamais été sur la liste, Patmol." Se penchant, il regarda pour la seconde fois vers le civet. C'était presque intact. Il n'avait pas eut le temps de le digérer, après tout. Trouvant un morceau de viande, il le ramassa et le secoua pour le nettoyer.
"Sirius. Viens là. Tu vas remplir ton estomac avec quelque chose aujourd'hui. Je sais que ce n'est pas exactement idéal, mais c'est probablement mieux que tu as l'habitude de toute façon." Portant la viande dégoulinante aux lèvres de Sirius, James l'enfourna dans sa bouche. "C'est ça. Allez."
Sirius pensait clairement qu'il allait mourir et partir au paradis, à en juger par la façon dont ses yeux battait. James posa gentiment sa main sur la joue de Sirius, l'aidant précautionneusement où il pouvait. Puis, Sirius commença à avaler, et tout commença à aller mal.
Il sembla que Sirius essayait de tousser, mais ça ne fit même pas de bruit . Le problème empira quand il lutta pour respirer. L'obstacle se déplaça pour bloquer complètement sa trachée, posant un arrêt aux halètement affaiblis et aux respirations pénibles très aigues de seulement un moment avant. James commença à paniquer. Avec Sirius enchaîné à la chaise, il lui serait presque impossible d'aider son ami. Les yeux de Sirius se gonflèrent alors qu'il essayait de dégager ce morceau de viande de sa gorge. Son visage devenait rouge à cause du manque d'air, et James était sûr qu'il se serait cogné partout s'il n'avait pas été attaché. Comme c'était, il se tendait contre les chaînes autant qu'il pouvait. Malheureusement, Sirius se blessait seulement lui-même dans le procédé.
"Arrête de bouger une minute!" commanda James, se plaçant devant Sirius. Malheureusement les instincts de son ami ne lui permettait pas de s'arrêter. Levant le bras, il s'excusa avant de frapper Sirius dans l'estomac aussi fort qu'il pouvait. Le corps de Sirius se crispa en avant autant qu'il pouvait, mais il était toujours en train de s'étouffer. James cogna encore. Il fallut encore trois essais avant que Sirius recrache la viande.
Sirius inspira faiblement encore quelques fois, James agenouillé à son côté, s'excusant abondamment, sans être capable de rien faire de plus pour aider son ami.
"Ja..." Sirius toussa encore. James se hâta d'essuyer tout ce qui sortait de peur que Sirius ne s'étouffe encore.
"Qu'est-ce qu'il y a?'
"Fais pas ça."
"Pas ça? Pas quoi?"
"N'essaie... pas... de... m'aider. Peux pas. Inquiète... toi... pour… toi... même... ne … renonce… pas." Les yeux de Sirius roulèrent comme l'effort le privait du peu de forces qu'il avait.
James pensa que c'était peut-être pire que toute torture que Voldemort aurait pu imaginer. Sirius avait, il haïssait de l'admettre, raison. Il n'y avait rien qu'il puisse faire.
Agenouillé aux ôtés de son ami, serrant les poings, James éclata en sanglots.
