4 octobre

Prompt : Feux de Bengale et feux d'artifice (Sparklers and fireworks)

Fandom : Dinotopia


« Bah, et David ? Il n'est pas là ? demanda Karl en laissant tomber son sac de sport dans l'entrée de l'appartement de leur père. Je sais que le base-ball ce n'est pas son truc, mais de là à rater notre week-end…

-Si, il est déjà dans la chambre, lui apprit Franck Scott en refermant le frigo derrière lui. Il n'a pas voulu me dire ce qu'il a, mais je pense qu'il a passé une mauvaise semaine. Évite de te disputer avec lui aujourd'hui, d'accord ?

-Papa ! Tu dis ça comme si c'était toujours de ma faute. »

Karl s'approcha de la corbeille de fruits et attrapa un paquet de gâteaux apéro à moitié entamé qui trainait dedans.

« Je pense que je peux m'empêcher d'être agacé par son côté donneur de leçons, ce soir, affirma-t-il. Et de toute façon, on ne se verra pas beaucoup. N'oublie pas que je joue un match important dans deux heures !

-C'est vrai ! Je suis désolé de ne pas pouvoir y assister, fiston, déplora Franck en lui donnant une étreinte chaleureuse. Mais je suis de tout cœur avec toi ! La mère de ton copain Mickaël vient toujours te chercher ?

-Oui, je lui ai donné ton adresse. »

Après cet échange, Karl saisit son sac d'affaires et se dirigea vers la chambre qu'il partageait avec David. Il s'était montré blasé avec leur père, mais ça lui serrait toujours un peu le cœur de savoir que son cadet de quelques mois était triste. Ils n'étaient pas spécialement proches, mais c'était quand même David.

« Hey, tout va bien ? s'enquit-il en pénétrant dans la chambre. Papa m'a dit que tu étais contrarié.

-Laisse tomber, Karl, grommela son frère en demeurant résolument dos à lui, sur le matelas, les genoux remontés sous le menton et la tête basse. J'ai pas envie d'en parler.

-Oh, allez, fais pas la tête. Je ne te demande pas de m'en parler, mais je peux peut-être faire quelque chose pour toi, non ?

-Oui, me laisser tranquille ! »

Karl renifla, vexé. Au temps pour la bonne entente que Franck espérait !

« Très bien ! Si tu le prends comme ça, répliqua-t-il en jetant son sac et en quittant la pièce. »

Cependant, il eut tout le loisir d'entendre David soupirer d'abattement quand il s'éloigna dans le couloir et son cœur se pinça. Non, définitivement, il ne pouvait pas laisser David comme ça, tout seul toute la soirée, sans leur père, qui venait de partir à une soirée d'affaires, ou lui pour essayer de le distraire. D'un geste plus sûr de lui qu'il l'aurait cru, Karl sortit son téléphone de sa poche et composa le numéro de Mickaël.

« Ouais, salut, mec. Désolé, mais je ne vais pas pouvoir venir au match de ce soir… »

wwwwwww

Alors que David se morfondait dans la chambre, à plat ventre sur le lit, il entendit la porte s'ouvrir en grand et sentit qu'on lui jetait son manteau sur le dos.

« Allez, David, lève-toi, lui ordonna Karl. On sort !

-Karl, je t'avais dit de…, commença de protester le jeune homme. »

Mais son frère ne le laissa pas poursuivre.

« La navette s'en va dans vingt minutes ! déclara-t-il. Et il faut qu'on arrive sur au point de rendez-vous et je te signale que tu t'essouffles très vite, alors lève-toi !

-Karl, je n'ai aucune envie d'aller à ton stupide match de…

-On ne va pas au match ! Je t'ai trouvé un festival japonais pas loin d'ici qui devrait te plaire. Rempli à ras-bord de nourriture bizarre, de trucs folkloriques et de gens qui se prennent beaucoup trop au sérieux, tout ce que tu aimes ! Alors grouille-toi, je n'ai pas annulé ma participation à ce tournoi pour rien ! »

Déboussolé, pris par l'impatience et l'avalanche de mots de son frère, David se leva lentement du lit, presque sans s'en apercevoir. Il mit son manteau, attrapa à la volée le panier-repas que Karl lui lançait et le suivit dans l'escalier. Ils prirent la navette de nuit, se collèrent l'un à l'autre pour éviter d'avoir trop froid dans ce vent d'octobre et regardèrent les lumières de la ville s'éloigner jusqu'à ce qu'elles passent le relai à celles du festival, de toutes les couleurs et presque magiques.

« Regarde, qu'est-ce que t'avais dit ! s'exclama Karl en lui désignant la multitude d'échoppes en bois qui proposaient de la nourriture, des jeux et des accessoires japonais.

-Karl, est-ce que tu es sûr que…, commença d'objecter David.

-Évidemment que oui ! Tu ne m'aurais pas suivi jusqu'ici si tu n'en étais pas toi-même convaincu. Ça va te faire oublier tes soucis, David, je te le promets. »

Karl l'encouragea à sauter de la navette et, d'une petite pression dans le dos, le fit avancer vers les premiers étals. David se sentait toujours nerveux, angoissé, triste, et ce n'était pas les lampions roses et les jeunes filles en kimono qui allaient le faire changer d'avis. Cependant, force était de constater que l'odeur de la nuit, mélangée à celle du riz en train de cuire et du poulet frit, avait vraiment quelque chose de revigorant. Et puis, il prenait lentement conscience que, s'ils étaient ici ce soir, c'était parce que son frère avait décidé de renoncer à quelque chose qui était important pour lui… Ce match de base-ball, est-ce qu'il n'en parlait pas déjà la dernière fois qu'ils s'étaient vus, deux moins auparavant ?

David en eut encore plus la certitude quand, deux heures plus tard, en revenant vers son aîné de quelques mois les bras chargés de paquets, il l'entendit parler au téléphone à son ami Mickaël.

« C'est super, j'espère que vous allez continuer à les écraser comme ça ! s'enthousiasmait-il. Ah, attends, il faut que je te laisse, Mike, je viens de retrouver mon frère. On se voit lundi ! »

Il adressa un sourire à David, comme s'il ne s'était absolument rien passé, et le jeune homme connut un moment de timidité avant de lui demander :

« Ce match que tu devais jouer, ce soir… C'était un match important, hein ?

-Oui, plutôt, admit Karl sans se départir de son sourire. Mais toi, tu avais l'air vraiment déprimé. Papa serait resté à la maison, je ne dis pas, mais il était déjà absent, je n'allais pas te laisser tout seul. Allez, on va voir le feu d'artifice, maintenant ? »

Sans savoir quoi dire ni quoi faire, David emboîta le pas à son frère. Ce que Karl avait fait, c'était tellement gentil que… qu'il se sentait vraiment mal de ne pas avoir trouvé quoi que ce soit à ajouter. On pouvait peut-être penser qu'il était « normal » pour un frère d'agir comme ça, mais le jeune homme savait très bien que beaucoup, qui vivaient même avec leur fratrie au quotidien et pas deux jours par-ci par-là comme eux, n'auraient pas agi de même. Karl était vraiment attentionné.

« Tu… tu manges le sandwich que tu as apporté ? demanda-t-il maladroitement lorsqu'ils s'installèrent sur une colline pour mieux voir les explosions de couleurs.

-Oui, la nourriture japonaise c'est pas trop mon truc, répondit son frère, la bouche pleine de pain de mie, de fromage, de salade et de rôti froid. Tu vas manger le tien ?

-Heu… Non, c'est bon. Tu peux le prendre, si tu veux. »

Karl ne se fit pas prier. Il enfourna le second sandwich et, pendant que les premières fusées explosaient dans le ciel, David eut le courage de se tourner vers son frère et de le regarder vraiment pour dire :

« Merci, Karl.

-De rien, Davy, rétorqua Karl en lui donnant une claque dans l'épaule. »

Mais la claque se prolongea en gentille pression et en caresse dans le dos. Il y eut une vraie connexion entre les frères Scott, ce soir-là.