11 octobre
Prompt : Mots d'amour (Love notes)
Fandom : Prince of Persia
Bis souleva la tourte aux fruits pleine de jus rouge qu'un garde venait de faire glisser sur le sol, jusqu'à lui. Il était à peu près certain que cette pâtisserie n'avait rien à faire là. Certes, il bénéficiait d'un traitement de faveur digne des plus grands amis de marque, en ayant été enfermé dans une pièce assez confortable et garnie de coussins. Il y avait même une table et un divan ! Le jeune homme était presque sûr qu'il n'y en avait pas dans les prisons des voleurs, des endettés ou des traîtres. Et qu'il n'y avait pas non plus de tourtes !
Bis fronça les sourcils, toujours perplexe. Le confort matériel passait encore, mais pourquoi lui accorder en plus des repas digne d'un roi ? Il croyait pourtant que Tus entendait montrer que même les amis de princes ne pouvaient pas éternellement commettre des impairs sans être puni, même quand ils n'étaient pas irréparables ou désastreux. L'enfermer quelques jours dans cette geôle était censé être un acte de justice tout autant qu'un exemple… un exemple qui tenait plus du principe, parce qu'on en pouvait pas dire que Bis souffrait particulièrement dans cette pièce qui ressemblait à une chambre.
Il n'y avait que les repas qui étaient vraiment infectes, sauf aujourd'hui, avec cette merveilleuse tourte moelleuse qui sentait bon les fruits. Mais que faisait-elle là ?
« Vous êtes sûr que vous ne vous êtes pas trompé ? demanda-t-il même au garde. Vous savez, cette pièce ressemble à une chambre d'invité, mais ce n'est pas le cas. Il y a des barreaux juste là.
-C'est pourtant bien à vous qu'elle est adressée, répondit l'homme. Il n'y a personne d'autre dans cette prison qui mérite un tel présent. »
Bis hocha la tête, facile à convaincre. Et puis, après tout, pourquoi se plaindre ? Le gâteau avait vraiment l'air délicieux ! Alors, sans se faire prier, le jeune homme croqua à l'intérieur.
« Hé, mais qu'est-ce que c'est que ça ? marmonna-t-il en sentant quelque chose de différent et de bizarre sur sa langue. »
Il retira délicatement le morceau étrange de sa bouche et, malgré les tâches rouges de jus de fruits, il devina un papier avec une écriture sombre et serrée. Un petit mot ? D'une servante ? Non, un petit mot de Dastan ! Il pouvait reconnaître son écriture entre mille.
Bis, j'espère que l'enfermement auquel Tus t'a contraint ne te pèse pas trop. Je suis désolé de ne pas avoir pu te suivre sur ce coup-là et que tu te sois mis dans le pétrin pour moi. Enfin, je sais bien que ce n'était pas si grave que ça et que mon père et mon frère ont fait en sorte que tu sois bien installé, mais ça me mine quand même. Toi et moi n'avons jamais eu l'habitude d'être enfermés, n'est-ce pas ?
« Mais c'est un roman qu'il m'a écrit ou quoi ? se demanda Bis à voix haute en croquant une nouvelle fois dans la tourte. »
Il écarta délicatement la pâte à divers endroits pour voir s'il y avait encore un petit mot, mais le reste de la tourte était uniquement du gâteau.
« J'espère que tu ne me laisseras pas sur ma faim, mon frère, lança-t-il en pliant soigneusement le petit papier pour le ranger sur la table. »
Il finit la tourte avant appétit et, le cœur réchauffé à l'idée qu'on ne l'oubliait pas, il retourna se coucher. Il ne pouvait pas faire grand-chose de plus, de toute façon.
Le jour suivant, il reçut de nouveau, de la part de Dastan, de beaux morceaux de poulet dorés au milieu de sa fade nourriture de prisonnier. Il y avait encore un message dedans.
Bis, tu sais, plus j'y pense et plus je me dis que c'est la première fois que nous sommes séparés si longtemps. C'est étrange, non ? Même quand mon père m'a adopté et que tu ne m'as pas rejoint au palais tout de suite, je me suis toujours arrangé pour venir te voir au moins une fois tous les cinq jours. Tu sais quoi ? Ce ne sont pas les gardes de Père qui m'empêcheront de continuer.
À la seconde où Bis terminait de lire ces lignes, il entendit un bruit sourd et une voix qui l'appelait :
« Bis ! Tu vas bien ?
-Dastan ? s'étonna le jeune homme en faisant volte-face. »
Il aperçut, accrochées aux barreaux de sa fenêtre, les mains calleuses de son ami et son visage qui s'encadra à contre-jour.
« Heu… Dastan… Ce n'est pas un peu dangereux, ce que tu fais là ? s'inquiéta Bis en s'approchant de lui.
-Je sais, mais tu me connais. Et je m'inquiétais pour toi, se justifia le jeune prince. Sauf que, d'après ce que je vois, tu vas très bien. Ces coussins, ces rideaux… Je ne me rappelle pas en avoir déjà vus dans les cellules des prisonniers. Tu as vraiment de la chance, tu le sais, ça ? »
Le regard du jeune prince se posa tout autour de lui, visiblement à la recherche d'un endroit où se laisser tomber pour retrouver des appuis plus stables et quitter les lieux avant que les gardes le voient.
« Dastan, attends ! l'arrêta Bis. La pièce est peut-être confortable, mais la nourriture est infecte. Est-ce que tu pourrais… continuer à m'envoyer de la nourriture ?
-Oui, bien sûr, sourit le jeune prince, soulagé de savoir qu'il allait bien.
-Et des petits mots, ajouta rapidement son ami. J'aime bien lire que tu penses à moi.
-Si Tus et Garsiv nous voyaient, ils se moqueraient de moi, plaisanta Dastan Mais je t'écrierai toujours avec plaisir, mon frère. Bon, maintenant, il faut vraiment que je te laisse. Je n'ai pas d'appui sous les pieds et je commence à lâcher. »
Dastan disparut aussi brusquement qu'il était arrivé et Bis sourit, avant de retourner s'allonger. Il n'avait jamais été aussi heureux d'être en cachot, et pas seulement à cause des coussins et des rideaux.
