Tseng – quatorze ans
Finalement, c'était plutôt agréable d'être 1ère Classe… Nous avion eu de nouveaux appartements, un peu plus spacieux. Non, beaucoup plus spacieux… On pouvait circuler dans les petites pièces sans se prendre dans les petits meubles… Quel luxe!
Je regardai le nuage de lait le former dans le café noir fumant. Je ne me lassais jamais de ce spectacle éphèmère et d'une banalité atterrante. Banal? Pour les buveurs de café en tout cas… Quoi qu'il en soit, moi j'aimais regarder ça. C'était toujours un spectacle unique. C'était plutôt court, et gratuit, c'était un petit plaisir de la vie et je savais en profiter…
Je touillai un instant dans la tasse avec ma cuillère, regardai le petit tourbillon que je venais de créer… puis regardai l'heure. Sept heures moins le quart. J'avais encore le temps. La journée d'un 1ère Classe commençait à sept heures et demie… …1ère Classe. Sephiroth et moi étions les plus jeunes de toute l'histoire… Et ce n'était pas un hasard. Nous avions compris. Sephiroth était destiné à l'armée pour son talent de combattant et son excellence en stratégie. Et moi, j'étais destiné à une élite plus particulière… Je savais me déplacer avec la plus grande discrétion, frapper mortellement et sans bruit, j'étais assez bon stratège aussi, vif d'esprit et capable de manier pas mal d'armes différentes et très portatives, j'avais un certain charisme et le sens de la diplomatie, je savais mentir… …C'était aux Turks qu'on me destinait. Je n'avais pas le choix, mais ça ne me dérangeait pas. Après tout, je n'avais pas tant de morale que ça…
°°°
Pas tant de morale que ça. Enfin, ça dépendait pour quoi…
Je marchais dans le laboratoire avec Hojo. Il me parlait de son intérêt pour un spécimen tel que moi, visiblement satisfait des résultat qu'il obtenait de moi. J'écoutais à moitié, regardant les tubes à Makô vides autour de moi. L'un d'eux attira mon attention. Il y avait une créature dedans. Je m'arrêtai pour regarder de quoi il s'agissait avec une pointe de curiosité.
-Hojo… Qu'est-ce que c'est que… ça…?
-Un spécimen sans grand intérêt, une erreur de manipulation qui me sert de cobaye pour les expériences dangereuses…
-C'est… un enfant…!
-Et alors?
-Où l'as-tu trouvé…?
-Pas trouvé! fabriqué! Créer des êtres humains est un jeu d'enfant!
Je collai mon visage contre la vitre. Pauvre gosse… Un garçon, visiblement… Il était encore couvert d'une pellicule de Makô en train de coaguler et cristalliser. Ça n'avait pas l'air de le faire souffrir mais je savais que ce devait être fort désagréable. Ses cheveux délavés semblaient presque luire… Et ses yeux… de purs yeux Makô…! Je me pinçai les lèvres. Il me regardait d'un air implorant.
-Si c'est une erreur de manipulation… Donnes-le moi, Hojo…
-Quoi?
-Donnes-moi cet enfant…!
Il se mit à rire de façon sinistre.
-Je ne vois pas du tout ce que j'aurais à y gagner! …mais je veux bien le miser dans un pari…
-Un pari?
Il hocha la tête.
-Tu vas lire les rapports concernant ce gosse. Tu vas les lire tout seul, enfermé dans la pièce où ils se trouvent. Et quand tu en sortiras – pour une raison ou une autre – tu devras me dire ce que tu as compris, et si tu as compris tous les rapports, je te donnes le gosse. Sinon… tu m'appartiens complètement. J'aimerais t'utiliser pour une expérience toute particulière et assez risquée mais Veld y a fait opposition.
Veld…?…le chef des Turks…?
C'était cet homme qui nous avait trouvé sur un toit des bâtiments du SOLDAT l'été passé… Je l'avais revu quelques fois… Il était assez impressionant…
-Laisses-moi une heure pour me préparer et montres-moi les raports.
°°°
Oh, c'était horrible…! Le père du gosse était un ex 1ère Classe du SOLDAT à tendance psychopathe. Il avait fini par tuer ses compagnons sans qu'aucun n'arrive à l'arrêter et les Turks avaient finalement dû intervenir pour le maîtriser. Il avait été interné dans un asile spécialisé, puis transféré dans un laboratoire où Hojo l'avait pris comme spécimen de recherche. Il avait fait prélever des cellules reproductives pour inséminer artificiellement une jeune femme devant jouer le rôle de mère porteuse. Elle avait reçu nombre d'injections de Makô pour habituer le bébé et était morte à l'accouchement – par césarienne. De toute façon, ce n'était pas elle qui intéressait Hojo alors elle avait été vidée de son sang juste après que le bébé aie été sorti de son ventre et laissée pour morte.
Le gosse quant à lui avait été mis en couveuse, alimenté par intraveineuses, continuant à recevoir des injections de Makô à micro dosage. Puis avait finalement été placé en tube. Le but était d'utiliser la Makô pour le rendre à la fois plus fort, comme dans la plupart des expériences à la Makô, mais aussi pour voir s'il était capable de créer par lui-même de nouvelles zones dans son cerveau comme le font les nouveaux-nés au contact d'autres humains. Sauf que lui, il était seul avec la Makô et devait trouver toutes les connaissances nécessaires à comprendre le monde dans le liquide… …Evidemment. Une théorie dit que la Makô est composée des âmes des morts et contient le savoir des Anciens… un truc étrange… dur à expliquer… mais je comprenais quand même…
-C'est bien ça…? demandai-je à Hojo.
Il hocha la tête et applaudit lentement.
-Tu es encore plus intelligent que je ne le pensais, Tseng… C'est vraiment intéressant…
-Donnes-moi cet enfant alors…
-Hum. Oui, je vais te le donner… mais tu devras t'en occuper correctement et me faire des rapports à son sujet…
-Je ferai ce que je veux.
Il ricanna et me fit signe de le suivre.
-Je me suis dit qu'il refusait peut-être de coopérer, tu sais? …je l'ai peut-être jugé trop vite comme une erreur… mais de toutes façons, il n'y a plus rien à obtenir de lui ici et il a besoin d'un entraînement physique pour que son corps ne s'atrophie pas trop… Il est tout disposé à devenir fort après tout…
-J'ai lu les rapports, Hojo…
Il s'arrêta dans un couloir et ouvrit une cellule. Mon gamin s'y trouvait. Propre, vêtu d'une tunique blanche. Je m'accroupis et tendis doucement la main vers lui.
-Viens, bonhomme, allez… n'aies pas peur, je ne te ferai pas de mal, moi…
Il plongea son regard dans le mien. Ses iris avaient changé. Ils étaient passé à un bleu pur, aqueux… …mais il y avait toujours cette lueur surnaturelle… Après un instant, il se leva et s'avança vers moi. Et mit sa petite main dans la mienne.
-C'est bien, gamin…
Je l'attirai à moi et le pris dans mes bras. Hojo avait l'air intéressé par la réaction du gamin. Finalement, ce pari était réellement tout bénéf' pour lui. J'allais poursuivre l'expérience pour lui sans le vouloir… Je lui lançai un regard défiant et tournai sur mes talons.
°°°
-Un nom… il te faut un nom…, murmurai-je.
-Je n'ai qu'un numéro, répondit le gosse d'une voix neutre.
Je sursautai.
-Tu parles?
-O.Oui… mais ça fait un peu…
Il indiqua juste sa gorge.
-Mal? ça fait mal? …C'est sans doute que tu n'en as pas l'habitude… tu cachais aux scientifiques que tu savais parler, c'est cela…?
Il hocha la tête. Je lui souris et ébourrifai ses cheveux blanc argenté.
-Avec moi tu pourras parler sans crainte…
Je regardai les racines de ses cheveux. …Tiens donc… étrange…
-…Reno…?
Il leva les yeux vers moi.
-…Est-ce que ce nom te convient? …il m'est venu à l'esprit tout seul…
-«Reno»…? …c'est mon nom?
-Oui. Dorénavant, tu t'appeleras «Reno Sabbiarossi»…
-«Sabbiarossi»? répéta-t-il.
-C'était le nom de ta mère… et il te faut une identité, n'est-ce pas? Et ce ne sont pas ce numéro tatoué sur ton épaule et ces courbes rouges sur ton visage qui te la donneront…
Il acquiesça.
-Je crois que je comprend. Mais c'est compliqué…
Je plissai mes lèvres en un petit sourire.
-Les enfants de ton âge ne sont pas aussi intelligents que toi, Reno, tu es différent d'eux mais ce n'est pas là un défaut… Tu dois t'en rappeler.
Il hocha la tête.
-Bien… quoi qu'il en soit, je ne peux pas te laisser avec ça pour seul vêtment, décidai-je en indiquant la tunique. Je vais t'acheter des vêtements de petit garçon normal. Je vais devoir m'absenter un peu, mais ce ne sera pas long, je te le promet… …Tu veux bien rester ici en attendant? Je ne peux pas te sortir comme ça, mais la prochaine fois… je t'emmenerai…
-Je resterai sage, m'assura-t-il avec toujours ce même ton neutre et sérieux à la fois.
Ça me donnait presque envie de rire.
-Bien… alors à tout de suite!
Je lui ébouriffai une dernière fois les cheveux, attrapai ma veste et quittai l'appart en détalant.
NdVixen: quoi? oui j'aime beaucoup Reno…° …j'écrirai sans doute son histoire à lui dans une autre fic, c'est quand même pas sur lui qu'elle est centrée celle-ci! …R&R!
