Auteur: Kuro-Hagi – 01/11/2021
Genre: Romance – Yaoi – Friendship – Hurt/Comfort
Disclaimer: Tout ce monde et ces personnages appartiennent à Tadatoshi Fujimaki
Note : Avant-dernier chapitre. Un moment difficile pour Daiki. Il ne reste plus qu'un chapitre et encore pas mal de choses à dire ! Le prochain chapitre devra attendre un peu malheureusement, j'ai quelques contraintes. Mais promis il arrive ! Merci pour votre soutien jusqu'à présent, merci pour vos reviews !
Ju : Il faudra attendre un peu pour le prochain chapitre, j'en suis navrée. Mais promis il va arriver ! Merci pour ta review ! J'aimerais aussi dire leurs quatre vérités aux parents de Daiki… A bientôt !
SLITHER (glisser, onduler)
by Daiki
Sa gorge est nouée. Il serre les doigts de Taiga entre les siens. Il a les larmes aux yeux. Il ne voit pas comment ça peut bien se passer. Il ne voit pas par quel miracle ses parents pourraient simplement lui sourire et lui dire : Du moment que tu es heureux. Il entend déjà leurs protestations, leurs propos insultants, le dégoût dans leur voix. Il caresse les doigts de son homme, il a longuement hésité, mais il préfère que Taiga l'attende dehors. Il ne veut pas que ses parents s'en prennent à lui, il ne veut pas que les mots de son père blessent Taiga comme ils l'ont blessé lui.
« Dai… Tu es sûr que tu ne veux pas que je vienne avec toi ?
— Non… Juste… Attends-moi dehors ok ? J'en aurai pas pour longtemps…
— Ok. Tout ce que tu veux. »
Il est juste un petit garçon qui a toujours voulu rendre fier ses parents et qui sait qu'il a fait la pire bêtise au monde à leurs yeux, qui se sent fautif alors même qu'il sait que se sont ses parents qui ont torts. Il est le gamin qui comprend que ses parents ne sont pas des gens aussi bons qu'il croit et qui ne parvient pas à y faire face.
Comment ses parents qu'il aime et qui l'ont toujours aimé peuvent-ils être des monstres ?
C'est cette réalité qui le détruit. Parce qu'enfant il était heureux. Enfant il a eu tout ce qu'il voulait, il est allé pêcher avec son père, il a eu des histoires, il a eu des câlins de sa mère, il est allé à la fête foraine, il a pu avoir tous les jouets qu'il voulait et des parents aimants et attentionnés, même si parfois ils étaient durs au sujet de l'école, c'était pour son bien et il le sait aujourd'hui. Sans eux, il n'aurait probablement pas fait toutes ces études pour être là où il en est aujourd'hui.
Et pourtant, il n'y a pas de demi-mesure. Il ne peut pas accepter l'intolérance de ses parents. Même s'ils ont été de bons parents ça ne pardonne pas leur faute. Parce que rejeter quelqu'un pour quelque chose d'aussi con que sa sexualité ou sa religion ou ses choix de vie ou… Peu importe. Ce n'est juste pas acceptable.
Et ça lui fait terriblement mal. C'est ce qui le ronge depuis plus de quinze ans, depuis ce baiser volé avec Tetsuya dont son père a été témoin. Il a mis du temps à comprendre, à accepter qu'il n'était pas en faute, qu'il avait le droit d'aimer les garçons. La réaction de son père ne l'a pas aidé évidemment, le chemin a été compliqué. Mais même une fois qu'il a compris, faire face à ses parents… Il n'a jamais pu. Pas avant aujourd'hui. Parce qu'il a toujours su que ça signifiait perdre ses parents et au fond il n'était pas prêt à ça. Mais aujourd'hui, il sait qu'il ne peut pas continuer comme ça, s'il veut avancer, il doit les confronter et tourner la page. Même si c'est la page la plus difficile à tourner de sa vie.
Il descend du taxi, et plonge ses mains dans ses poches pour cacher ses poings serrés. Il retrouve Taiga sur le trottoir devant la maison.
« Voilà… C'est là que j'ai grandi. »
C'est une petite maison mitoyenne avec un étage et un petit jardin très bien entretenu. Rien à voir avec le chalet de Taiga qui est posé sur un immense terrain fait d'herbes sauvages et de forêts. Taiga n'a pas essayé de dompter la nature, simplement de s'y frayer quelques passages.
« Tu m'attends là hein ?
— Je bouge pas promis. »
Il a l'estomac noué, mais il hoche la tête et se décide à franchir les marches qui le mène jusqu'à la porte. Sa main tremble quand il la lève pour appuyer sur la sonnette. Taiga s'est assis sur une marche et joue sur son téléphone. Il lui jette un dernier regard avant de se décider à appuyer, se rassurant dans sa présence à quelques mètres de lui.
La porte s'ouvre presque immédiatement sur sa mère.
« Daiki ! Tu es vraiment rentré ? Entre ! Entre ! »
Il la suit à l'intérieur. La porte se referme dans un léger bruit et un frisson désagréable le parcourt avec la sensation que la nasse dans laquelle il s'est laissé prendre en remettant le pied à Tokyo revient se resserrer autour de lui, comme s'il glissait encore un peu plus loin dans la tanière de la veuve noire qui le dévore peu à peu.
L'enthousiasme de sa mère ne pèse que plus sur son cœur. Elle l'enlace et il lui rend son étreinte avec un peu de désespoir, sachant que ce sera probablement la dernière fois qu'il serrera sa mère dans ses bras. Il a la gorge nouée et envie de pleurer. Il a envie de la supplier de ne pas l'abandonner. Mais sa mère ne tournera pas le dos à son mari pour un fils gay. Si son père l'a surpris à embrasser son meilleur ami et n'en a jamais rien dit à sa femme. Sa mère a été la première à décrier le « choix » de sa meilleure amie. Il a espéré les faire comprendre, leur faire changer d'avis quand Satsuki qu'ils connaissent depuis toujours a épousé Reira. Mais au contraire c'est là qu'il a compris que ça n'arriverait jamais.
« Je suis contente de te voir. J'ai fait quelques cookies. Je sais que tu adores ça. Pourquoi tu n'as pas voulu déjeuner avec nous ce midi ?
— Désolé… J'avais un autre truc de prévu. »
Il regarde autour de lui un peu nerveusement.
« Papa n'est pas là ?
— Dans le garage. Je vais le chercher. Retire ta veste, installe-toi ! Ça fait plaisir de te voir ! »
Il regarde sa mère s'éloigner, mais il ne retire pas sa veste. Il s'installe sur le canapé nerveusement. Ça a toujours été sa place quand ses parents avaient quelque chose à lui reprocher. Chacun dans l'un des fauteuils et lui installer tout seul au centre du canapé. Il n'est plus un gamin et il semble moins perdu au milieu de ce meuble imposant, mais il n'en reste pas moins impressionné. Fébrile, il se masse la nuque. Sa jambe tremble.
Il relève la tête un peu vivement en entendant ses parents revenir.
« Bonjour fils. Comment vas-tu ? »
Son père le salue moins chaleureusement que sa mère. Il a toujours été plus distant, peut-être qu'il ne lui a jamais vraiment pardonné d'avoir embrassé Tetsuya. Peut-être qu'il sait au fond que ce n'est pas possible de changer et qu'il a toujours su ce que son fils est vraiment.
« Je vais… Bien. Et vous ?
— Très bien ! Prends-un cookie. »
Par réflexe, il pioche un gâteau dans l'assiette qu'elle lui tend. Mais son estomac est trop noué pour qu'il ne croque dedans. Elle n'y prête pas attention et continue toujours aussi joyeusement.
« Alors comment était ton voyage ? Tu es rentré plus tôt que prévu. C'est une bonne chose. J'espère que ton employeur peut te reprendre tout de suite. »
Il l'interrompt aussitôt, s'il faut commencer par quelque chose autant commencer par ça.
« J'ai démissionné.
— Qu-quoi ? Pourquoi ? Tu as trouvé un meilleur emploi ? »
Aussitôt la suspicion dans la voix de son père, il le regarde. Son visage est dur et fermé. Il déglutit. Ce regard l'a toujours un peu effrayé enfant, sachant qu'il signifiait qu'il avait failli et qu'il serait puni. Et il réalise que son père connaît probablement déjà la réponse à cette question. Il le regarde intensément quelques instants et il devine que son père a probablement toujours su et sait pourquoi il est là.
« Non. Je vais me mettre à mon compte et retourner vivre aux États-Unis.
— Mais c'est absurde… ça ne devait être que des vacances. Enfin… Daiki tu n'y penses pas… Tu as déjà trente-deux ans. Il est temps que tu te maries et que tu aies des enfants ! Il faut que tu arrêtes de jouer maintenant. »
Il tourne son attention vers sa mère qui a soudain changé de ton. Il avait oublié la sacro-sainte famille et les petits enfants tant attendus, par tous sauf par lui. Toutes ses années sa mère n'a jamais cessé de lui demander quand il allait se caser, quand il allait ramener une jolie jeune femme à la maison, quand il allait se marier, quand il aurait des enfants… Quand… Quand il fonderait sa propre petite famille modèle et s'installerait à son tour dans un petit pavillon de banlieue. Il n'est plus vraiment effrayé maintenant, c'est la colère qui prime à présent. Comme si sa mère avait activé un bouton en lui, le faisant glisser sur la mauvaise pente. Alors sa voix est plus ferme et irritée quand il répond.
« Non ce n'est pas absurde maman. C'est ma vie et c'est comme ça que j'ai envie de vivre… C'est là-bas que j'ai envie de vivre avec Taiga.
— Taiga ? Tu as rencontré une femme aux États-Unis ? »
Sa mère est incrédule et semble ne plus savoir quoi dire s'il a trouvé une femme, la donne change un peu évidemment.
« Pourquoi ne viendrait-elle pas ici ? Ce serait préférable… C'est à la femme de suivre son mari. »
Les mots de sa mère lui hérissent la nuque. Et dire que des gens se sont battus pour les droits des femmes. Mais il ne veut pas se lancer dans ce débat-là avec elle, c'est peine perdue. Il tourne son attention sur son père qui s'est tendu et qui a évidemment deviné.
« Kagami Taiga est un homme. Je suis gay… Et je l'aime. »
Un silence lourd et glacial tombe sur eux. Sa mère est blême et a un mouvement de recul. Son père a la mâchoire étroitement serrée et le regarde avec colère et soudain il explose.
« Comment tu oses Daiki ? Après ce que nous avons fait pour toi ? Comment tu oses nous imposer ça ?! Nous t'avons tout donné et c'est comme ça que tu nous récompenses ? »
La colère de son père est palpable, mais ne fait qu'amplifier la sienne, la rage qui gonfle dans son ventre. Il a envie de hurler et de pleurer. Il savait. Il savait que ça se passerait comme ça mais ça n'en est pas moins douloureux.
« Vous êtes sérieux ? Vous n'allez pas juste accepter que je sois heureux ? Vous ne pensez qu'à votre réputation ? Vous… L'important ce n'est que vous ? Vous êtes mes parents ! Vous devriez juste souhaiter que je sois heureux ! »
Sa mère les regarde l'un après l'autre.
« Ce n'est pas une plaisanterie ? Daiki… Vraiment ?
— Oui maman. Vraiment. Et pour anticiper ta prochaine question. Depuis toujours. Je n'ai jamais été attiré par les femmes. Mon premier petit ami était Tetsu.
— Oh mon dieu… »
Le visage horrifié et plein de dégoût de sa mère alors qu'elle pose une main devant sa bouche agit comme un coup de poignard dans sa poitrine. Ses yeux s'embuent de larmes, mais il est retient tant bien que mal. Il regarde ses deux parents et gronde.
« C'est tout ?
— Sors d'ici. Tu n'es plus mon fils. »
Il s'y attendait. Mais il reste choqué par les mots de son père. Il tourne le regard vers sa mère cherchant un quelconque soutien. Mais elle grimace et détourne le regard indiquant clairement qu'elle ne veut plus le voir et qu'il n'existe déjà plus à ses yeux.
Il a envie de protester de les secouer, de leur dire qu'ils ne peuvent pas faire ça que c'est une aberration qu'ils ne peuvent pas abandonner leur fils comme ça. Mais il sait qu'ils le peuvent et ils viennent de le faire.
Il se lève les poings serrés il a envie de briser quelque chose, de frapper un mur, de hurler. Mais il contient la colère, il repose le cookie sur la table, rejoint l'entrée, enfile rapidement ses chaussures ouvre la porte et sort. La porte se referme avec un léger bruit derrière lui. Et tout semble s'éteindre.
Taiga est toujours là et se redresse dès qu'il a entendu la porte.
« Dai ? »
Son homme fronce les sourcils, visiblement inquiet parce ce qu'il voit. Lui il a l'impression d'être vide et de ne plus rien ressentir. La colère, la tristesse tout est resté derrière cette porte… Tous ses sentiments peut-être sont restés derrière cette porte. Il ne ressent plus rien. Il est vide. Taiga le rejoint en quelques pas pour l'enlacer.
« Dai ? Ça va ? »
Il reste immobile, incapable de bouger, incapable de répondre à l'étreinte de son homme. A vrai dire, il ne comprend pas cette étreinte. Il ne comprend plus ce qu'il fait ici, il ne comprend plus ce qui se passe.
« Fuck… »
Taiga jure et l'entraîne vers la rue. Il se laisse faire. Il est éteint. Vide. Il regarde devant lui, il regarde Taiga et il se sent inerte. Il entend les sons, il sent le contact de la main de Taiga dans la sienne, il est conscient d'être et du monde qui l'entoure. Et pourtant, il ne ressent rien. Il entend Taiga appeler un taxi.
Ils montent dans le véhicule et Taiga donne l'adresse de son appartement et il se redresse.
« Non.
— Dai ? »
Taiga le regarde incrédule. Il rectifie et donne une nouvelle adresse au chauffeur avant de répondre à son homme.
« J'ai promis à Satsu qu'on la retrouverait au Karaoké.
— Quoi ? T'es sûr que c'est une bonne idée ? Tu n'as pas l'air…
— Quoi ? »
Vivant ? Non. En effet… Il se sent mort et l'idée de rentrer chez lui et de se retrouver seul avec Taiga lui semble très inapproprié. Un vague semblant de conscience lui rappelle que Taiga est son petit ami et qu'il attendrait donc qu'il agisse avec lui comme un petit ami, comme le fait que Taiga à cet instant tient sa main dans la sienne, comme il l'a pris tout à l'heure dans ses bras, comme son regard brille d'une étrange lueur quand il le regarde. Et tout ça soudain le met vaguement mal à l'aise. Il se sent trop creux, une coquille vide, il n'arrive pas à se sentir en phase avec la réalité. Il a juste envie de boire, de bouger, de ne surtout pas penser. Ne pas penser à cet abîme de vide qu'il ressent, à la raison de ce néant.
« Si c'est ce que tu veux…
— Ouais… C'est ce que je veux… »
Il détourne le regard. Il ne veut pas voir l'inquiétude dans ce regard. Ce regard… Ce regard remue des choses en lui qu'il ne veut pas ressentir, qu'il ne veut pas reconnaître, qu'il ne veut pas… Le vide… Le vide est calme. Le vide est apaisant. Le vide est vide. Sans pensées, sans inquiétudes. Rien.
Taiga ne dit plus rien et ça lui va. Il n'a pas lâché sa main, mais il ne dit rien. C'est déjà ça. Il ne le regarde pas, parce que regarder Taiga réveille trop de choses. Il envoie un message rapide à Satsuki pour la prévenir qu'ils arrivent et qu'il n'a pas envie de parler juste qu'il a besoin de boire quelque chose de fort, de chanter et de danser.
Il lâche la main de Taiga presque avec soulagement quand il paye le taxi et sort de la voiture. Il entre dans le bâtiment et rejoint la pièce où il sait que ses deux amies l'attendent avec la bouteille qu'il a demandée. Quand il pousse la porte, il évite les regards concernés de ses deux amis et se laisse tomber sur une banquette après avoir posé négligemment sa veste sur le dossier et attrape la bouteille pour se servir un verre.
« Alors on chante quoi ?
— Dai-chan…
— Satsu… Boire. S'amuser. Chanter. Danser. »
La jeune femme n'insiste pas mais se lève pour s'approcher de Taiga qui semble être resté figé dans l'entrée. Taiga qu'il n'ose pas regarder. Taiga qui l'effraie un peu parce qu'il remue des choses et qu'il sent que ces choses pourraient trop facilement remplir le vide.
« Enchanté. Je suis Satsuki.
— Enchanté Kagami Taiga. »
Il n'écoute pas ce qu'ils disent, il ne veut pas savoir. Il avale un premier verre rapidement. Il veut maintenir le vide et l'alcool réussi ça très bien. Taiga finit par s'asseoir à côté de lui et il n'aime pas réaliser que sa présence calme un peu sa nervosité. Il remplit un second verre et le lui tend sans le regarder. Taiga hésite mais le prend.
« Merci. »
Il prend le micro et lance une chanson. Il demande à Reira de chanter avec lui. Il ne veut pas avoir à parler. Il sait qu'ils vont tous vouloir lui poser des questions. Surtout Satsuki et peut-être Taiga. Non Taiga attendra d'être seul avec lui. Reira ne cherche pas à le faire parler, c'est ce qu'il aime avec elle. Alors ils se lèvent tous les deux et ils chantent.
A un moment, Satsuki se joint à eux et vient danser avec sa femme. Il ne demande pas à Taiga de le rejoindre, une part de lui en a envie, mais l'autre a peur. Il a peur de ce qu'il pourrait ressentir si Taiga s'approchait trop de lui. Il a peur du regard de Taiga qui semble ne pas vouloir le quitter. Il continue à danser avec ces deux amies. Il ferme les yeux, laissant juste la musique l'envahir.
Il ne sait pas combien de temps il chante, ondule sur la musique, ni combien de verres il boit. Il sait juste qu'il boit beaucoup trop. Il boit suffisamment pour glisser vers cet état où il n'est plus tout à fait vide, mais où plus rien n'a d'importance.
