Chapitre 10
Erik se rendit presque invisible juché sur l'échafaudage qui se dressait à quelques centaines de pieds au dessus de la scène de l'Opéra.Il assistait à la première de la production " Samson et Dalila".La salle était comble et Erik était heureux de voir que les deux directeurs avaient reussis à vendre tous les billets mis en vente.Le spectacle en était à son second acte et Erik se surprit à ne pas regarder chaque artiste , ou encore ecouter chaque chanson comme il en avait pris l'habitude.
Il ne regardait qu'une seule chose : La prima ballerina.Les yeux d'Erik ne la quittaient pas tandis qu'elle glissait sur le parquet .Il essaya de garder en mémoire chacun de ses mouvements comme s'il ne devait plus jamais la revoir.Malgré le fait qu'il avait assisté de nombreuses fois aux répétitions , Erik était fasciné par chacun de ses gestes.
Son seul déplaisir , en observant Meg, fut de se rappeler ce qu'elle lui avait avoué la nuit précédente ?Elle était amoureuse.Ce fut à ce moment qu'Erik compris qu'ils ne pouvait plus se mentir sur les sentiments qu'il éprouvait pour elle.Au delà du fait qu'il avait été irrité par le fait qu'elle lui avait hurlé dessus , il avait senti son ventre se tordre de douleur à la simple idée de l'imaginer dans les bras d'un autre homme.Cette douleur était un sentiment qu'il ne connaissait que trop bien et il ne pouvait pas prendre le risque de connaître le même desespoir une nouvelle fois.Il pouvait être certain que ,cette fois ci , il ne pourrait jamais continuer à vivre avec cette douleur.
Sa seule consolation était de savoir que l'homme que Meg aimait n'avait pas les mêmes sentiments à l'égard de la jeune femme.Le simple fait de savoir cela lui donnait une petite lueur d'espoir..Peut-être ferait-elle finalement partie intégrante de sa vie ?Il se rendit compte que s'il voulait que les choses se finissent différemment il devait agir…Et vite..Erik était convaincu qu'il ne faudrait que très peu de temps à l'homme qui avait capturé le cœur de Meg pour que celui-ci réalise l'erreur qu'il était en train de commettre et revienne vers Meg avec de nouveaux sentiments.
Il devait deviner l'identité de cet homme le plus rapidement possible.Erik ne pouvait se permettre de perdre Meg comme il avait perdu Christine..Tout cela pour un jeune blanc-bec présomptueux..Peut-être devrait-il avoir recours à la chambre des tortures située dans son refuge et qui était inutilisée depuis tant d'années.
« Cette fois aucune compassion n'alterera mon jugement ..Cette fois je ferais n'importe quoi pour obtenir ce que je veux..Et ce dont j'ai besoin »
Erik réalisa que le plus grand défi qu'il avait à réaliser était que Meg lui fasse confiance à nouveau.Il repensa alors à la manière dont il l'avait traitée au bal masqué.Il l'avait menacée et ce n'était pas quelque chose que l'on pouvait difficilement oublier.
« Tu dois apprendre à te contrôler »
Erik essaya alors de se rassurer.Meg n 'était pas terrifiée par le fantôme de l'Opéra comme les autres personnes pouvaient l'être en général.Elle lui avait permis de la toucher sans dégoût aucun.Elle lui avait permis de danser avec elle au bal masqué alors , qu'il le savait très bien , aucune autre femme ne l'aurait supporté.Elle l'avait regardé dans les yeux , sans même essayé de voir l'horreur du visage torturé qui se cachait sous le masque.Elle avait eu le cran de lui hurler dessus..Ce que personne n'avait , jusqu'à présent , osé faire.Pendant le bal masqué , et pour la première fois de sa vie, Erik avait eu le sentiment d'être tout simplement un homme.Et tout ceci grâce à Meg.
Erik commencait à croire que Meg pouvait mettre fin à ses souffrance et à sa morne et triste existence.
« Même si elle ne m'aime pas , peut-être peut-elle apprendre à me tolerer.Elle me l'a dit ; elle est vouée à une vie de solitude tout comme moi » pensa t-il alors que le rideau final tombait sur le spectacle.
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Meg était dans sa chambre .Elle était épuisée et n'avait besoin que d'une chose.Mettre une robe de chambre et s'asseoir sur son lit.Il lui semblait vivre un rêve.Etre de retour sur scène devant une salle archi-comble lui avait sonné des ailes.Et les applaudissements nourris provenant du public l'avaient poussée à essayer d'atteindre la perfection que sa mère exigeait toujours d'elle.
Tout le monde avait été rendu fievreux par la performance de Meg.Les directeurs et ses amis de la troupe l'avaient félicitée chaleureusement.Six messieurs avaient voulu la féliciter à la fin du spectacle et sa chambre était de nouveau remplie de bouquets de fleurs rouges et roses .Elle avaient refusé de rencontrer ces messieurs , pretextant un terrible mal de tête.
Malgré leurs figures avenantes et leurs énormes fortunes , Meg avait du mal à trouver un quelconque interêt à tous ces jeunes prétendants.De nombreuses fois pendant le spectacle , elle s'était surprise à lever la tête vers les combles afin d'apercevoir une ombre ou encore un masque blanc.Mais elle n'avait aperçu ni l'un ni l'autre.
« Pourquoi t'en fais tu ?Il t'a menacée de te tuer..Tu ne dois pas être normale »
Mais elle se rapella de la danse , de ce qu'elle avait ressenti tandisqu'elle était dans ses bras et de la façon dont elle avait failli se noyer dans son regard emeraude.Il lui semblait qu'il aurait pu voir directement dans son âme.
Meg était assise sur son lit , se sentant terriblement seule.Elle n'avait pas idée que l'homme qui occupait ses pensées se trouvait à quelques mètres à peine d'elle derrière le lourd miroir argenté.Erik regarda Meg tandis qu'elle regardait la chambre autour d'elle.Il savait qu'elle était en pleine reflexion et aurait voulu savoir à quoi elle pensait.
« Mademoiselle…Mademoiselle » une voix grave se fit entendre tandisque l'on frappait à la porte.Le bruit fit sursauter Erik et Meg en même temps.
« Mademoiselle.C'est monsieur Francois et monsieur Jacques.nous devons vous voir immédiatemment, c'est assez urgent. »
« Je ne suis pas habillée correctement » répondit Meg à travers la porte. « Cela ne peut pas attendre demain matin ? »
« Habillez vous le plus vite possible.Cela ne peut vraiment pas attendre. »
Meg commença a s'inquieter.pourquoi les deux directeurs voulaient-ils à tout prix la voir ?Elle traversa rapidement la pièce et passa une longue jupe bleue et une chemisier couleur crème.Elle attacha ses cheveux en un simple chignon aussi rapidement que possible.Elle esperait seulement que ce qui se passait ne requierait pas de devoir porter un corset.
Erik se tenait dans la cage d'escalier derrière le miroir se demandant également pourquoi ces deux idiots de directeurs voulaient voir , il vit Meg passer à côté du miroir et sortir de son champ de vision pour se changer.
Meg ouvrit sa porte et aussitôt Francois et Jacques entrèrent dans la pièce.
« Il y'a quelqu'un qui veut vous voir » dit Francois d'une voix calme. « Un gentilhomme »
«Je ne souhaite voir personne..J'ai terriblement mal à la tête et.. »
Avant qu'elle n'ait pu terminer sa phrase , elle se retrouva face à face avec un homme inconnu , vêtu d'un costume gris et d'un chapeau haut de forme de satin noir.Il arborait une fine moustache et avait une figure agréable.
« Mademoiselle Marguerite Giry, nous aimerions vous présenter le marquis de Condorcet. » dit Jacques avec des manières exagerées.
Meg avait déjà entendu parler du marquis lorsqu'elle avait été dîner en ville.elle savait que c'était un homme très respecté , et qu'il possédait de nombreuses propriétés à l 'extérieur de Paris.Son immense richesse était un sujet de conversation pour les femmes qui passaient leur temps a jaser et bavarder.
« C'est un honneur de vous rencontrer.Votre réputation vous a précédé »tandisqu'elle faisait timidement une petite reverence.
« Ce serait plutôt votre réputation dont semble parler tout Paris , mademoiselle Giry.Quoiqu'il en soit les rumeurs au sujet de votre beauté étourdissante sont assurement toutes vraies et fondées » dit le marquis d'une voix maniérée et sophistiquée.
« Comme il est malin » pensa Erik alors qu'il sentait de l'exaspération monter en lui. « Cet homme est assurement trop vieux pour venir voir Meg après le spectacle. » En même temps , il realisa que le marquis ne devait guère avoir plus que lui.
« Excusez moi cette intrusion chez vous , mademoiselle mais je ne pouvais laisser passer l'opportunité de vous rencontrer.J'ai été absolument emballé par votre performance.Vous êtes une jeune femme très talentueuse. »
« Merci monsieur mais vous êtes vraiment trop généreux dans vos compliments » répondit Meg tout en rougissant légèrement.
« Je vous assure ma chère que je ne fais jamais de compliments à l'aveuglette »Vous avez vraiment beaucoup de talent. Je ne vais pas vous imposer ma présence plus longtemps et excusez moi encore une fois de vous avoir dérangée.Quoiqu'il en soit , je vais revenir regarder vos autres prestations.J'ai le sentiment que je vais devenir un spectateur régulier et assidu de l'Opera populaire.J'espère que vous me ferez l'honneur de votre présence Meg Giry. »
« Peut-être que je vous ferai l'honneur de connaître une morte lente et penible dans ma chambre de torture , monsieur le marquis » pensa Erik
« Bien sûr monsieur » répondit Meg.Elle ne pouvait s'empêcher d'être intimidée par la visite du marquis .
Alors qu'il allait partir avec monsieur Jacques , Francois prit le visage de Meg dans ses mains et l'embrassa sur la joue. « Je savais que vous deviendriez une star, mais le marquis…Oh merveilleuse petite ballerine ! »
Tandisqu'Erik regardait la scène avec le marquis et Meg se jouer devant lui , il commença à ressentir un mélange de jalousie et de rage monter en lui.Il réalisa alors qu'un nouvel obstacle venait de se dresser entre eux.
« J'espère , monsieur le marquis , que pour votre sécurité, vous ne dépasserez pas les limites en venant marcher sur les plates-bandes »
Il continua à observer Meg , après que ses « invités » se soient décidés à partir.Il ne put s'empêcher de remarquer combien elle était mince et délicate.Sa poitrine lui fit mal tandisqu'il repensa à la manière dont il avait serré sa main autour de son cou.Il l'observa tandis qu'elle se mettait au lit et soufflait sur la bougie pour l'éteindre.
« Je dois lui montrer que je suis bien plus qu'un monstre défiguré et violent.Et je dois lui faire comprendre à quel point j'ai besoin d'elle »
