Bonjour ! Comment allez-vous en ce moment ? Les choses ne sont plus pareilles que le mois dernier, hein ? J'espère que le confinement ne vous fait pas trop de peine. Pour vous distraire, je vous propose un nouveau chapitre ! Un chapitre que j'ai beaucoup aimé écrire, j'avais à la fois l'inspiration et la motivation ! Magnifique. J'ai même déjà écrit trois pages pour le chapitre 20 (chapitre 20 :o ). Mais est-ce que vous vous rendez compte ? Cela fait deux ans que j'écris cette histoire ! Même plus longtemps que ça, avant que je ne publie. Deux ans ! Incroyable. Et nous entamons aujourd'hui le dernier tiers de l'histoire.
Je n'ai pas de musiques pour ce chapitre, mettez votre préférée !
Bonne lecture !
Chapitre 19 : Conflit
À son réveil, Harry se dit qu'il n'avait pas du tout discuté avec Draco de tout ce dont il voulait parler. Il y avait tellement de choses… Pansy, Blaise (Pansy lui avait-elle dit pour lui ?), s'il voulait des enfants, etc. Ce n'est pas qu'il repoussait la conversation, c'est qu'elle continuait de lui échapper.
Aujourd'hui, ils parleraient de cela et de rien d'autre. Il était temps de mettre les choses à plat.
Harry toucha gentiment la joue endormie de Draco. Ses lèvres étaient légèrement entrouvertes, ne demandant qu'à être embrassées. Ce qu'Harry fit, évidemment. C'étaient de tous petits baisers, juste pour apprécier ses lèvres contre les siennes. Encore et toujours ses lèvres. Il les adorait et il adorait les embrasser.
Draco ne mit pas longtemps à se réveiller. Harry s'en rendit compte lorsqu'il répondit à son baiser et murmura dans sa bouche :
« Bonjour chéri.
- Bonjour, mon amour, lui répondit Harry avec un sourire.
- Je veux que tu me réveilles comme ça tous les jours.
- On ne vit pas ensemble, ça serait compliqué.
- Tu pourrais venir me voir avant que je me lève ou alors on pourrait vivre ensemble. »
Cela prit Harry au dépourvu. Et encore un truc à rajouter à sa liste des sujets qu'ils devaient aborder. Non, il ne devait pas être ironique. La situation ne se prêtait pas à ça. Draco venait de lui dire qu'ils voulaient vivre ensemble ! Harry cafouilla. Était-il prêt à parler de ça ? N'était-ce pas un peu trop tôt ? Comment emménager ensemble pouvait être trop tôt si Harry voulait déjà parler de mini Harco… Drarry. Harry-Draco ?
Draco étouffa un rire.
« Tu fais une de ces têtes. C'était une blague.
- Oh. »
C'était une blague.
« Est-ce que tu veux des enfants ? » lâcha-t-il, regrettant de ne pas être capable de contrôler ce qu'il disait dès que ces mots furent prononcés.
Draco le regarda avec des gros yeux.
« A… Avec toi ? »
Harry hocha la tête. Il ne se sentait plus de laisser sortir des phrases de sa bouche sans son accord.
« Ce serait mentir que de dire que je n'y ai pas pensé mais… je n'y ai jamais vraiment réfléchi. Si tu vois ce que je veux dire.
- Oui, oui, je comprends.
- Tu veux une réponse maintenant ?
- Oui. »
De ça, il était sûr. Il ne pouvait plus attendre. Il voulait savoir où il devait se poser. Quelle attitude adopter.
« Je… Il faut que je t'avoue quelque chose.
- Quoi donc ? T'as un enfant caché ?
- Quoi ? Non, rit Draco. C'est à propos de mon père. Il a découvert deux potionnistes qui travaillent dans l'optique de permettre aux hommes…
- D'avoir des enfants sans passer par une mère porteuse, oui, je sais.
- Tu sais ? »
La surprise se peignait sur son visage, relevait ses sourcils, traçait des lignes sur son front.
« Hermione l'a découvert en fouinant.
- Ah. »
Évidemment, disait son visage. Harry se mit en position assise. Ils ne pouvaient pas avoir cette conversation allongé. Draco suivit son mouvement. Ils se tenaient maintenant en tailleur, l'un en face de l'autre.
« Depuis quand tu sais ça ? voulut savoir Draco.
- Je ne sais pas, fin novembre ?
- Pourquoi tu ne m'en as pas parlé avant ?
- Pourquoi tu ne m'en as pas parlé avant ? Je croyais que ton père avait fait ça dans ton dos. Et je n'ai jamais vraiment eu l'occasion d'en parler avec toi. »
Draco soupira.
« Il l'a effectivement fait dans mon dos, à moitié. Il m'a prévenu de ce qu'il allait faire avant d'offrir officiellement son don.
- Mais… Pourquoi ? Je me suis toujours demandé pourquoi il avait fait ça ?
- Pour la lignée. »
Évidemment, disait de nouveau son visage.
« La lignée Malfoy doit continuer. »
Un petit sentiment d'horreur envahit Harry.
« Est-ce que tu as parlé avec lui d'avoir des enfants ? »
L'idée lui était odieuse. Il en avait parlé à son père et pas à lui ? Pourquoi se prenait-il autant la tête ? se reprit-il immédiatement. Draco avait le droit de parler à Lucius Malfoy d'enfants qui seraient, de fait, ses petits-enfants.
« Bien sûr. C'est mon devoir, en tant qu'héritier de la famille. Quand j'étais avec Astoria, le principe était simple. On savait ce qu'on attendait de nous et j'étais d'accord pour. Quand j'ai commencé à sortir avec toi, la question a bien sûr été posée sur la table. On était resté sur une adoption jusqu'à ce qu'il découvre ces deux potionnistes. Il n'a rien contre du sang nouveau dans la famille tant que c'est du sang-pur, pour redynamiser le patrimoine génétique, mais il préfère que ce soit directement le mien. »
Tout cela n'était que des grands mots. Des grands mots froids.
« Mais toi ? insista Harry. Est-ce que tu veux des enfants ?
- Eh bien, oui, je suppose. Tu sais que je n'aime pas vraiment les enfants en soi. Mais lorsque je les connais, comme Teddy par exemple, ils peuvent être attendrissants. Un enfant à moi serait différent des autres. Ça serait le mien.
- Ça ne me dit pas vraiment si tu en veux vraiment ou pas. Tout ce dont tu me parles c'est ton "devoir familial". Si tu n'avais pas à t'en préoccuper, en aurais-tu toujours envie ?
- Mais c'est mon devoir, tu ne peux rien y changer.
- Imagine. Ce n'est pas bien d'avoir des enfants quand on n'en veut pas.
- Et toi ? lui rétorqua Draco. Tu veux des enfants ?
- Oui. Mais tu le sais déjà, ça. »
Draco l'ignora.
« Avec moi ?
- Bien sûr.
- Quand tu étais avec Weasley, est-ce que tu voulais aussi des enfants avec elle ? »
Où est-ce qu'il voulait en venir ?
« Oui…
- Donc tu voudrais des enfants avec n'importe qui ?
- Oui. »
Draco devint silencieux. Il réfléchissait. Harry le voyait à la façon dont il fronçait ses sourcils, si blonds que c'était presque comme s'il n'en avait pas. À quoi pouvait-il bien penser ? Il avait peur de ce qu'il allait dire. Harry voulut le faire taire quand il se remit à parler :
« Quand j'étais avec Astoria, je ne voulais pas d'enfants avec elle.
- C'est parce que vous n'étiez pas amoureux.
- Oui mais toi tu en veux, point barre, peu importe la personne. »
Ça ne ressemblait pas à Draco de dire « point barre », Harry se fit la réflexion.
« Moi, continua-t-il, je n'en voulais pas, avec personne. Mais avec toi, j'en veux. Ce n'est pas qu'une question de devoir. Si c'est avec toi, ça ne me déplairait pas.
- Vraiment ? »
Draco acquiesça. Harry le trouva extraordinairement beau. Encore plus que d'habitude. Était-ce parce qu'il venait de lui dire qu'il voulait des enfants avec lui ? Certainement. Timidement, il prit la main de Draco, qui la lui laissa sans rien dire. Il toucha ses doigts, caressa son dos et la garda finalement dans la sienne. Draco lui sourit tendrement. Une pensée saugrenue lui vint à l'esprit.
« Ton père est au courant pour notre vie sexuelle ? grimaça-t-il.
- Urgh, non ! éructa-t-il.
- Tu crois qu'il pense… qu'on l'a fait ? Jusqu'au bout, je veux dire. »
Il ne voulait pas dire pénétration comme Draco l'avait fait la veille.
« Certainement, admit Draco à contrecœur.
- Tes parents sont au courant de ta sexualité ?
- Non, avoua-t-il. Ils ne comprendraient pas. »
Draco haussa les épaules.
« Il faut que tu leur dises.
- Ce n'est pas toi qui décides. »
Il avait raison, bien sûr.
« Tu veux que je leur dise ? »
Draco le regarda comme si des oreilles de lapin avaient poussé sur sa tête à lui.
« Quoi ? Non ! T'es fou. »
Draco Malfoy l'avait affublé de bien des noms d'oiseaux, surtout pendant leurs années à Poudlard mais c'était la première fois qu'il le traitait de fou. Cela vexa Harry.
« Je ne suis pas fou. »
Draco leva les yeux au ciel.
« Bien sûr que non. C'était une façon de parler.
- Je vous trouve bien familier avec moi, Mr Malfoy.
- Écoute, on parlait d'avoir des enfants ensemble il y a une minute.
- Des enfants avec vous ? Vous n'y pensez pas ! »
Cela tira un sourire aux coins des lèvres de Draco. Un sourire qui disparut bien vite pour être remplacé par un visage inquiet.
« Quelle heure est-il ? N'es-tu pas censé aller en cours ?
- Mais je veux encore qu'on discute. J'ai plein de trucs à parler avec toi.
- Ça, il fallait le faire quand je t'ai proposé hier soir, Monsieur Je-ne-veux-pas-j'ai-cours-demain. Allez, va te préparer, ordonna-t-il en le poussant hors du lit.
- Quand est-ce qu'on peut se revoir ? demanda-t-il, refusant d'aller plus loin.
- Quand tu veux. Mais je vois Pansy aujourd'hui, on a beaucoup à discuter.
- Il faudra que tu me dises tout à propos d'elle.
- Si tu veux. »
Il poussa Harry dans la garde-robe et celui-ci abandonna, se lançant donc à la recherche de vêtements parmi ceux qu'il laissait en libre-service chez Draco. Tout en s'habillant, ils convinrent de se revoir le soir-même, autant pour passer du temps ensemble que pour discuter de Pansy. Après un petit-déjeuner rapide, Harry partit suivre ses cours et la journée commença. Il ne tenait pas en place et voulait revoir Draco, tout de suite. Mais il rongea son frein et attendit patiemment.
Son esprit changea de préoccupation quand, d'un air contrit, Neville lui montra la Gazette du Sorcier du jour qu'il avait lu pendant la pause. Avec le pressentiment qu'il n'allait pas aimer ce qu'il allait lire, il prit le journal à la page – au moins, ce n'était pas la Une – que lui avait désignée son ami. Bon. Bah déjà ça parlait d'eux. Une photographie les montrait, lui, Draco, Lucius et Narcissa, et Isobel dans le fond, au sortir de la cheminette avec un titre accrocheur qui disait : « Draco Malfoy, ancien mangemort, sorti de l'hôpital ! Harry Potter vient l'accueillir ! » Et comme on pouvait s'y attendre d'un article avec un titre pareil, le contenu était du même niveau qu'un magazine people. C'était rempli de suppositions présentées comme des faits, ça déglinguait Draco et mettait le doute sur Harry tout en le peignant comme une personne de compassion. « Il veut remettre cet ancien méchant méchant mangemort dans le droit chemin. » Ou quelque chose comme ça.
Comme à chaque fois que Harry lisait ce genre d'inepties, la colère monta en lui. Et si le journaliste avait été face à lui, il aurait cassé son appareil photo comme il l'avait fait avec Grilled.
Ils avaient un cours annulé avant le repas alors Neville lui proposa un duel pour se détendre. Harry accepta joyeusement et une fois leur entraînement terminé, il se sentait déjà mieux. Il n'avait plus qu'une hâte, terminer cette journée et que Draco lui fasse un câlin.
Quand il termina son apprentissage avec Julian, il était exténué. Il avait passé la journée à se faire du mouron pour tout et le stress avait tué son cerveau. Pourquoi avait-il envoyé Pansy dans les bras de Draco hier ? Il était stupide ou quoi ? Il se créait des problèmes là où il n'y en avait pas. Il avait été trop empathique… Qu'est-ce que ça lui faisait que Pansy et Draco ne soient plus amis ? Ça faisait plus de Draco pour lui.
Il était tellement égoïste. Pourquoi pensait-il à des trucs pareils ? Il était pas bien ! C'était comme s'il se réjouissait du malheur des autres et ça c'était un grand non. Il n'était pas un méchant de film de superhéros à donner des coups de pied à des petits chiots ! O.K., bon, respire. S'il avait envoyé Pansy dans les bras de Draco, c'était parce que c'était son amie et que c'était important de s'entourer de personnes qui nous aiment – même si cette personne en particulier l'aimait de façon romantique et pas amicale. Il avait confiance en Draco, jamais il ne le trahirait, il ne voyait pas pourquoi lui offrir Pansy sur un plateau devrait changer quoi que ce soit à leur relation. Draco l'aimait et il l'aimait. Tout. Allait. Bien.
Il entra dans la salle de musique où il entendait le son des cordes de la harpe s'en échapper. En le voyant, Draco arrêta de jouer et lui sourit avec une tendresse qu'il ne montrait qu'à lui. C'était son sourire pour lui, rien que pour lui. Harry fit ce qu'il avait envie de faire depuis qu'il avait quitté Draco ce matin-là, il le prit par la main pour le relever de son siège et le prit dans ses bras. Draco, surpris par cette soudaine action, rit et répondit à son câlin.
« Qu'est-ce qui t'arrive, amour ?
- Je t'aime, c'est tout.
- Aw… Je t'aime aussi Harry.
- Pourquoi tu sonnes comme si j'étais un chat ?
- T'es mon petit chaton à moi, plaisanta Draco.
- Je préfèrerais être un chien », répondit Harry sur le même ton.
Il soupira, amusé.
« On est stupide, hein ?
- Peut-être, approuva Draco d'un air malicieux. Mais tant qu'on est stupide ensemble, ça ne me dérange pas. »
Harry rit et relâcha son étreinte sur Draco pour pouvoir l'embrasser comme il se devait.
« Tu as passé une bonne journée ? » s'enquit le blond quand il eut fini.
Harry soupira et se lança dans les péripéties de sa journée, qui, en soi, n'était pas si mouvementée que ça. Ils allèrent s'asseoir sur les causeuses pour discuter de façon plus confortable. Draco l'écouta avec attention jusqu'au bout, se plaignant avec lui de la Gazette du Sorcier.
« Et toi ? voulut savoir Harry après avoir fini de rouspéter. Comment ça s'est passé avec Pansy ?
- O.K., alors laisse-moi tout t'expliquer d'abord. »
Harry acquiesça alors que Draco se rasseyait correctement, comme si sa position pouvait impacter son histoire.
« Pansy et moi, on se connaît depuis l'enfance. On était copains de jeu, dans le même genre de "réunions" que ma mère organise ces derniers temps pour Teddy. Donc c'est mon amie d'enfance si tu veux. Après la guerre, ses parents – tous les deux mangemorts reconnus – ont été envoyés à Azkaban. Ils étaient peut-être riches mais ils n'avaient pas la même influence qu'a ma famille, qui s'est toujours bien sortie de situations où l'on devrait recevoir une plus grosse punition.
- Ton père a quand même été à Azkaban, quand on était à Poudlard.
- Oui. Crois-moi, il n'y retournera plus. »
Harry fit apparaître du thé sur un petit plateau et leur servit chacun une tasse. Du thé au gingembre pour Draco et à la camomille pour Harry, leurs préférés respectivement. Avec un air attendri, Draco continua :
« Pendant les procès, tu nous es venu en aide – et je t'en serai toujours reconnaissant.
- Mais ?
- Celui de Pansy avait eu lieu juste quelques jours avant le mien et – je ne sais pas si tu es au courant – mais on lui a retiré sa baguette.
- Oui, je sais. J'ai appris ça hier.
- Elle n'a pas aimé, ça c'est certain, Draco hocha la tête. Elle n'a pas pu terminer Poudlard, ça la ronge beaucoup. »
Harry compatit. Être privé de sa baguette et ne pas pouvoir passer ses ASPICs quand les offres d'emploi ne juraient que par ça… ce ne devait pas être agréable tous les jours. Harry ne s'imaginait pas un jour sans baguette. Il avait pourtant vécu comme un moldu pendant toute son enfance mais la magie était devenue une seconde nature, il ne pouvait pas la retirer de sa vie de tous les jours. Certes, il y avait la magie sans baguette mais cela demandait une haute maîtrise de la magie et tout le monde n'en était pas capable.
« Quand elle a appris que nous, nous avions eu ton aide et qu'on s'en sortait avec une simple amende et des travaux d'intérêt général, elle l'a très mal pris. Elle est venue me voir et m'a dit des trucs vraiment très… pas très… voilà.
- Quoi donc ? »
Draco lui offrit un visage mal aisé et il grimaça avant de boire une gorgée de son thé.
« Entre autres, elle m'a accusé de m'être prostitué pour toi et que ça ne pouvait être que la seule raison pour laquelle tu nous avais aidés.
- Oh. Ew.
- Ne lui en tiens pas rigueur, s'il te plaît. Elle a dit tout ça sous le coup de la colère et elle était blessée…
- Ça ne pardonne pas qu'elle t'a dit des choses odieuses.
- Moi, je lui pardonne. J'aimerais que tu le fasses aussi. Si je te parle de tout ça, ce n'est pas pour que tu la juges. C'était il y a longtemps.
- Oui, tu as raison, pardon. Continue. »
Draco se massa la nuque un instant puis reprit :
« On s'est engueulé. Suffisamment fort pour qu'on ne se reparle plus, puis que trop de temps soit passé pour qu'on se rabiboche.
- Vous vous êtes réconciliés aujourd'hui ?
- On a mis les choses à plat. Je pense qu'il nous faudra un certain temps pour qu'on retrouve la complicité qu'on avait avant. Mais je veux qu'on redevienne ami, elle m'a beaucoup manqué.
- Est-ce que tu sais qu'elle… »
Harry s'empêcha de terminer sa phrase. Il n'avait pas le droit de le dire. C'était à Pansy d'avouer qu'elle était amoureuse. Il ne pouvait pas la mettre dans une mauvaise position si Draco n'était pas au courant.
« Quoi ? demanda l'objet de ses pensées.
- Non, rien.
- Qu'elle est amoureuse de moi ?
- Tu savais ?
- Bien sûr. Elle s'est déclarée à moi en sixième année, c'est là que je lui ai avoué que c'était toi qui m'intéressais et pas elle. J'espère qu'elle rencontrera un jour quelqu'un qui pourra répondre à ses sentiments.
- Tu es gentil. »
Draco pouffa et faillit renverser sa tasse à moitié vide.
« Moi ? Gentil ?
- Bien sûr ! Tu ne me crois pas ? »
Draco le regardait avec des yeux perplexes et amusés à la fois. Harry ne put pas résister à son expression et lui vola un baiser.
« Accepte le compliment sans ronchonner, veux-tu ? »
Draco leva les yeux au ciel.
« Bon du coup, et lors de ton attaque ? voulut savoir Harry. Pourquoi n'est-elle pas restée pour… je ne sais pas, chercher du renfort, ou aider ou…? Je sais que c'était Blaise la cavalerie mais il était tout seul contre trois. Elle ne pouvait quand même pas s'imaginer que c'était assez. Même si au final ça l'a été, m'enfin, tu vois ce que je veux dire.
- Harry, dit sérieusement Draco, comprends-tu vraiment ce qu'il s'est passé avec ces hommes ?
- Ils l'ont battue parce qu'elle était connue comme ex-mangemort ? Une sorte de vengeance. »
Draco secoua la tête et reposa sa tasse sur le plateau.
« Ils ne comptaient pas que la blesser. Vois-tu, Harry, quand une femme se fait attaquer, elle ne se fait pas toujours attaquer comme un homme le serait. Les hommes ne se vengent pas que par les coups sur une femme.
- Tu veux dire que… » s'horrifia Harry.
Draco acquiesça.
« Elle te l'a dit ?
- Non, je l'ai compris tout de suite en voyant ces hommes. Je suis arrivé à temps, l'idée venait seulement de se former dans leurs esprits. Est-ce que tu comprends, amour ? Elle ne pouvait pas revenir m'aider.
- Je comprends », l'informa Harry.
Il se sentait idiot. Pourquoi n'avait-il pas pensé à ça ? En y repensant, c'était presque évident. De la pitié pour Pansy se forma dans son cœur. Elle avait peut-être fait des choses pas bien dans le passé mais elle payait pour ses actions. Ce n'était pas à des types lambda d'apporter une justice qui n'appartenait qu'à eux. Ce n'était pas la justice. Harry espéra dur comme fer qu'on allait les retrouver et qu'ils recevraient la punition qu'ils méritaient.
« Concernant Blaise d'ailleurs… commença Draco.
- Oui, approuva Harry, comprenant tout de suite de quoi voulait parler son petit ami. C'est suspicieux, il ne nous a pas tout dit.
- Il n'a pas mentionné Pansy non plus et on ne sait pas ce qu'il s'est passé entre le moment où il l'a croisée et qu'il m'a amené à l'hôpital.
- Il faudrait qu'il vienne au bureau faire une déclaration.
- Non, Harry. Je veux que l'on règle ça entre nous d'abord.
- Pourquoi ?
- Code du Serpentard. On veille d'abord les uns sur les autres. Si Blaise ne nous a pas tout dit, c'est qu'il doit y avoir une raison. Laissons-lui une chance de s'expliquer avant d'impliquer les aurors.
- D'accord. Mais on s'en occupe avant la fin de la semaine et après on ira au Bureau des Aurors.
- Marché conclu. »
Après cette lourde discussion, Draco voulut reprendre sa harpe et Harry l'écouta jouer jusqu'à ce qu'il doive récupérer Teddy chez les Weasley.
o0O0o
Draco invita innocemment Blaise à venir chez lui le vendredi et celui-ci, inconscient du piège qu'on lui tendait, accepta. Harry rejoignit Draco peu de temps avant que son meilleur ami ne soit censé arriver, après une longue séance avec sa psy. Depuis que Meredith lui avait appris qu'il était atteint de PTSD, chacune de leurs séances semblait enfin mettre du sens à tout ce qui se passait dans sa vie. Jamais il n'aurait cru pouvoir un jour sentir que tout était aligné sur une table et qu'il n'avait plus qu'à ranger de façon ordonnée ce que l'on devait mettre de côté. C'était presque… trop simple.
Il en parla avec Draco avant que Blaise n'arrive. Son petit ami fut étonné de tout ce qu'ils avaient « découvert » avec Meredith et fut largement enthousiaste à l'idée.
« Tout ça c'est grâce à moi, pointa-t-il avec hauteur.
- Haha, tu rigoles, c'est grâce à ta mère.
- Ouais mais quand même, c'est grâce à moi. »
Harry rit au moment où Blaise apparaissait dans le petit salon, accompagné d'un elfe.
« Qu'est-ce qu'il y a de si drôle ? s'enquit-il.
- Harry se moque de moi, se plaignit Draco.
- Ce n'est rien de nouveau ça ! »
Harry pouffa alors que Draco croisait les bras, mécontent.
« Pourquoi toutes les personnes dans ma vie se moquent de moi ? grommela-t-il.
- Oh… tu sais bien que c'est parce qu'on t'apprécie », dit Harry.
Il passa un bras autour des épaules de Draco et embrassa sa tempe. Draco se brisa en un sourire. Ce fut au tour de Blaise de se plaindre :
« Argh, non ! Arrêtez de vous bécoter devant moi. Je ne suis pas là pour vous regarder vous rouler des pelles.
- Tu es ridicule Blaise », pouffa Draco.
Le grand garçon s'installa dans un fauteuil.
« Tu ne m'offres pas un café ? »
Draco leva les yeux au ciel et demanda à l'elfe qui n'avait pas encore été congédié de leur préparer des boissons. Quand il fut parti, Blaise, tout sourire, demanda :
« Alors ? Tu voulais me voir pour quoi ?
- J'ai discuté avec Pansy l'autre jour.
- Pansy, eh ? »
Son sourire ne dévoilait rien d'autre que ses dents.
« Elle est à nouveau dans la bande alors ?
- Oui, en quelque sorte.
- Tant mieux. Ses commentaires sarcastiques et ses talents en poésie me manquaient.
- Je ne t'ai pas interdit de la voir pourtant. »
Blaise laissa échapper un rire moqueur et passa une main lascive dans ses cheveux. Comment Luna avait pu tomber amoureuse de lui ? C'était le play-boy par excellence.
« Tu sais bien qu'on ne dit pas de mal de mes amis.
- Est-ce que c'est pour ça que tu ne m'as pas dit que c'est Pansy qui t'a appris où j'étais quand on m'a attaqué ? »
Son sourire se fit éthéré.
« Elle t'a dit ?
- Oui elle m'a dit. Et tout le bureau des aurors.
- Ah. »
Il ne paraissait même pas embêté d'apprendre ça. Mince, il était pire que Draco quand il s'agissait de cacher ses véritables émotions ! Est-ce que tous les Serpentard étaient comme ça ? Ou juste l'aristocratie magique ? Draco se pencha dans son siège, ses bras ballants entre ses jambes, les coudes sur les genoux.
« Comptes-tu expliquer ce qu'il s'est réellement passé ce soir-là ? Pourquoi m'as-tu caché ça ? »
Blaise jeta un œil à Harry.
« Harry ne répètera rien de ce que tu nous diras dans cette pièce. »
Harry, lui, n'en était pas vraiment sûr. Pour ne rien ne leur avoir dit jusqu'à présent, il devait avoir fait quelque chose de douteux.
« Permets-moi d'en douter. C'est un auror.
- Apprenti, corrigea Harry sans y penser.
- Ouais, comme si ça changeait quelque chose.
- Tu ne vas rien raconter au Bureau, n'est-ce pas Harry ? » demanda Draco en le regardant avec sévérité et en insistant sur son prénom.
Harry haussa les épaules et leva les yeux au ciel.
« Tout dépend de ce que j'entends.
- Oh sérieux Potter ? s'exaspéra Draco. T'avais vraiment besoin de dire ça ? »
Blaise éclata de rire.
« Hé, au moins il est honnête.
- Trop honnête pour son bien, tu veux dire. »
Draco secoua la tête, désespéré de son petit ami. Blaise rit à nouveau, de toutes ses dents, comme s'il prenait plaisir à les dévoiler. Pendant une ridicule seconde, Harry se dit : Est-il un vampire ? Mais non, évidemment que non. Il n'était pas un vampire. La preuve, il avait le droit de manier une baguette. Ses pensées étaient parfois vraiment stupides.
« Tu ne vas rien nous dire ? tenta Draco, n'y croyant plus.
- Oh si, je me moquais juste de vous.
- Blaaaaaise.
- Quoi ? Tu sais bien que je peux rien te cacher. On est frérot mec.
- Dis encore un truc et je te ferai regretter le jour où tu es né.
- Tu ne veux plus entendre ce que j'ai à dire ? » parla innocemment Blaise d'un ton suave.
Draco grogna. Et Draco ne grogne pas. Enfin… pas beaucoup. Était-ce la première fois qu'Harry le voyait interagir avec un de ses amis ? Maintenant qu'il y pensait, Draco avait souvent passé du temps avec lui et Hermione (et peut-être Ron) mais lui n'avait jamais été en compagnie de Blaise et Draco, agissant comme les amis qu'ils étaient, sans les normes sociales derrière tout ça pour refroidir leurs liens. Harry avait l'impression de redécouvrir son petit ami. Cela le rendit mal à l'aise et il ne savait pas pourquoi et ça l'énervait et il dit :
« Hum, du coup, qu'est-ce qu'il s'est passé ? »
Blaise se tourna vers lui, comme s'il se rappelait soudainement qu'il était là et qu'il existait. Il dévoila ses dents.
« Je ne te fais pas encore confiance Potter.
- Harry, le corrigea-t-il.
- Harry, sourit-il avec ironie, comme si c'était quelque chose qu'on pouvait faire. Je ne te fais pas encore confiance et je préfèrerais que tu ne saches pas ce que je vais dire mais je sais que Draco va finir par te le raconter. Parce que je raconte tout à mes meilleurs amis. »
Cette dernière diatribe, d'un ton accusateur, était dirigée vers Draco. Ce dernier leva les yeux au ciel.
« Tu ne vas pas continuer à m'en vouloir de ne pas t'avoir dit pour Harry, Merlin ! C'était il y a plus de cinq ans.
- On raconte tout à ses amis », dit-il en pointant Draco du doigt, ses yeux s'étrécissant.
Par la magie, jamais on n'allait en venir au sujet ! Harry soupira. À quoi s'attendait-il avec deux Serpentard ? Ils se lançaient des piques à chaque tournure de phrase.
« Bon ! força-t-il. Est-ce qu'on peut en venir au but ?
- O.K. ! s'énerva Blaise. J'ai flanqué la raclée de leur vie à ces mecs !
- Quoi ? s'exclama aussitôt Draco. Mais je croyais qu'ils n'étaient plus là quand tu es arrivé.
- Parce que j'ai menti, l'intello ! Ah gn gn, deux plus deux, quatre, ah je suis intelligent. »
C'était si… enfantin. Harry ne put pas se retenir et explosa de rire. Le regard des deux amis fusa sur lui, le coupant net. Puis ce que Blaise avait dit fit son bout de chemin dans la tête de Harry.
« Attends, tu leur as "flanqué une raclée" ? »
Blaise eut le mérite de paraître gêné puis sa façade se recomposa, agrémentée de fierté. Ou plutôt de « rien à foutre ».
« Je les ai envoyés à l'hôpital, élabora-t-il seulement pour être plus flou.
- Oh non, Blaise qu'as-tu fait ? s'inquiéta Draco.
- Pansy m'a dit ce qu'il s'est passé, j'ai couru te rejoindre et tu étais déjà au sol, inconscient. Je n'ai pas pu me retenir. Je les ai défoncés.
- Blaise, qu'as-tu fait ? »
Il soupira.
« J'ai utilisé crucio entre autres… J'ai… euh… cassé tous les os d'un des mecs. »
Avec quel sort avait-il fait ça ? s'horrifia Harry. C'était de la magie noire.
« Je crois que l'un d'eux ne parlera plus jamais après ce que j'ai fait.
- Morgane et Lucifer, Blaise ! Tu peux finir à Azkaban ! s'égosilla Draco.
- Ils t'ont fait du mal ! Je t'ai apporté justice.
- Ce n'était pas de la justice, ça, intervint Harry. C'était de la vengeance, pure et simple. »
Blaise le regarda froidement, du dégoût dans les yeux.
« Es-tu en train de dire qu'ils ne le méritaient pas ?
- Bien sûr que non. Mais ce n'était pas à toi de leur "rendre justice". C'est aux autorités.
- Genre toi ? » demanda-t-il avec un ton dédaigneux.
Harry leva les yeux en l'air. Cette conversation commençait à l'agacer. Mais on parlait d'hommes que le garçon en face de lui avait mis à l'hôpital ! Ce n'était pas bien. Peu importe ce qu'ils avaient fait.
« Non ! La justice. Le Magenmagot. Les aurors sont là pour arrêter, pas pour appliquer la justice.
- Harry, intervint Draco. Blaise m'a sauvé. Tu ne vas quand même pas lui reprocher ça ?
- Ouais, Draco était blessé. Ça compte comme de la légitime défense.
- Eh bien… pas vraiment, lui apprit Draco d'un air peiné. Si c'était juste pour les arrêter, oui, mais tu es allé beaucoup plus loin que ça. Tu les as mis à l'hôpital, tu as utilisé un sortilège impardonnable, et j'imagine qu'ils ne sont pas dans un bon état du tout.
- Je ne te connaissais pas euphémisant, se moqua l'autre Serpentard.
- Ce n'est pas un mot. Et ce n'est pas drôle, Blaise ! Ces gars pourraient parler et te dénoncer. Et je n'ai pas envie de voir mon meilleur ami derrière les barreaux. »
Blaise ne semblait pas inquiet pour un sou. Il dénigra l'angoisse de Draco d'un mouvement de la main et d'un sourire. C'était comme s'il se moquait éperdument d'avoir blessé – presque à mort – des personnes. Bien sûr, ces personnes les premières avaient fait du mal d'abord à Pansy puis Draco mais rien ne justifiait une telle violence. Ce n'était pas correct. Blaise fit part de son brillant raisonnement :
« Comme s'ils allaient courir chez les aurors pour dire qu'ils se sont fait attaquer pendant qu'eux… qu'est-ce qu'ils faisaient ? Ils attaquaient deux innocents. T'inquiète pas qu'ils vont pas cafter.
- Sauf qu'une enquête a été ouverte, sortit Harry, maintenant clairement énervé par l'attitude nonchalante de Blaise. On sait déjà le nom de l'un d'eux.
- Ah ouais ? C'est quoi ?
- Je ne peux pas te le dire, c'est confidentiel. »
Harry croisa les bras.
« Il faut que tu viennes au bureau et que tu avoues.
- Quoi ? Hors de question !
- Tu préfères qu'on remonte jusqu'à toi et qu'on soit moins compréhensif de ce que tu as fait ?
- Franchement Harry, tu me déçois. Je pensais que t'étais un mec plus cool que ça.
- C… Cool ? C'est pas une question d'être cool ou pas !
- Stop ! cria Draco. Arrêtez ça. »
Harry fumait et Blaise paraissait maintenant vaguement ennuyé par la situation.
« C'est simple, proposa Harry. Soit tu viens avec moi au bureau et je plaiderai en disant que tu essayais de protéger Draco et que tu as perdu le contrôle pour qu'on ne te donne qu'une amende et des travaux d'intérêt général, soit je vais le dire moi-même.
- Pas si je t'en empêche.
- Hé ! Ça suffit vous deux ! Si vous continuez à vous menacer, c'est moi qui vais finir au tribunal, car je vous aurais donné la raclée de votre vie ! »
La diatribe de Draco les arrêta enfin, bien que cela ne les empêcha pas de se jeter des regards noirs. Le blond se prit la tête dans les mains.
« Bien comment on règle ce problème ?
- C'est pas compliqué, dirent Harry et Blaise en même temps.
- Vous ! Taisez-vous ! Silencio, conjura-t-il en sortant sa baguette. C'est moi qui parle. Vous êtes insupportable. Pourquoi tu les as tabassés Blaise… soupira Draco. Tu ne pouvais pas juste les stupéfixer ? Non n'essaie pas de parler, je ne veux plus vous entendre. Blaise, t'es mon meilleur ami et je veux t'aider mais tu ne facilites pas les choses… Pourquoi tu nous as dit ce que tu leur as fait ? Tu devais bien te douter comment on allait réagir. Vas-y, réponds. »
Il leva son sort de mutisme, permettant au jeune homme de parler de nouveau.
« Comment vous alliez réagir ? railla Blaise. Je savais très bien comment tu allais réagir, Draco. Je ne pouvais pas savoir que ton copain, lui, ne comprendrait pas ce que c'est que de prendre la justice en main, et que tu le suivrais dans son idée. »
Au-delà de la colère qui brûla la gorge de Harry, ce qu'avait dit Blaise le mit mal à l'aise. Il se tourna vers Draco, voulant des réponses. Son petit ami capta son regard et soupira. Blaise répondit à sa place :
« Draco aurait compris et ne m'aurait jamais dénoncé aux aurors si tu n'avais pas été là. »
Draco le tua du regard mais ne le renvoya pas au silence pour autant. Harry commençait à en avoir assez d'être le seul à ne plus pouvoir s'exprimer. Il frappa du poing le canapé sur lequel il était assis. Draco lui fit les gros yeux avant de se rappeler qu'il l'avait rendu muet. Il annula le sort.
« Tu n'aurais pas fait ça ? » voulut savoir Harry, incrédule.
Draco le regarda sans rien dire puis reposa son regard sur la table basse devant eux.
« Blaise est mon meilleur ami, s'il a des problèmes, je l'aide. Et si c'est avec la justice, j'aiderais à le cacher d'elle.
- Alors que tu es juge ?
- Comme si être juge m'empêchait de commettre des crimes.
- Je ne suis pas d'accord avec ça. On ne devrait pas fuir la justice. Il faut être responsable de ce que l'on a fait.
- Tu ne peux pas comprendre, tu n'as jamais été du mauvais côté de la société.
- Bien sûr que si ! J'étais jugé comme un paria en cinquième année pour oser dire que Voldemort était de retour. »
Draco soupira.
« Cette conversation ne mène nulle part.
- Non, approuvèrent Harry et Blaise.
- Est-ce que… Est-ce que l'on peut prendre le week-end pour y réfléchir ? Pas de décisions hâtives, c'est quelque chose de sérieux. »
Harry supposa qu'il pouvait accepter cela. Blaise avait été laissé libre pendant un mois, il pouvait bien l'être encore quelques jours. Draco échangea un regard avec son ami que Harry interpréta comme : « Laisse-moi lui parler. » Blaise acquiesça et se leva.
« Dans ce cas, je m'en vais vu que votre interrogatoire est fini. La prochaine fois, Draco, ne me fais pas marcher droit dans un piège. »
L'interpelé grimaça une excuse alors que Blaise quittait la pièce sans un regard pour eux. Il devait être énervé contre eux. Il n'y avait rien d'étonnant à ça. Quand ils furent seuls, Draco se tourna vers Harry et s'exclama :
« Qu'est-ce que c'était que ça ? Pourquoi tu l'as coincé comme un lapin ? Tu as fait tout ce qu'il ne fallait pas faire pour qu'il nous écoute et accorde de l'importance à ce qu'on dit.
- Il faut qu'il aille se dénoncer, énonça Harry, restant fermement sur ses idées. Il t'a peut-être sauvé mais il a mis des gens à l'hôpital. Il se croit au-dessus des lois, c'est dangereux.
- Je suis d'accord.
- Ah ouais ? C'est pas l'impression que tu me donnais tout à l'heure.
- Parce que si je n'avais pas donné l'impression que j'étais de son côté, il serait déjà à l'autre bout du monde à l'heure qu'il est.
- Permets-moi de douter de ça. »
Draco leva les yeux en l'air.
« Oui, je ne l'aurais pas dénoncé aux aurors, il m'a sauvé, rappelle-toi. Mais j'aurais fait en sorte qu'il ait l'idée de lui-même d'aller se dénoncer.
- C'est trop tard de toute façon.
- Ça, c'est sûr. Je ne vois qu'une solution qui convienne à tout le monde. »
Harry sentait sa colère retomber au fond de son estomac. Il avait oublié à quel point les Serpentard pouvaient être manipulateurs.
« Quoi donc ? demanda-t-il, sa voix se radoucissant.
- Il accepte de se dénoncer mais ne dit pas toute la vérité aux aurors, ou l'édulcore, et je laisse tomber ma plainte pour qu'on évite de retrouver ces mecs.
- Comment ça se fait que personne ne se soit questionné sur eux ? S'ils sont aussi mal en point, on aurait dû en entendre parler.
- À travers toutes les autres victimes des attentats ? Le personnel de l'hôpital a sûrement jugé que c'en étaient encore d'autres. Ils se sont fondus dans la masse des blessés. Mais ce n'est pas important. Est-ce que mon plan te convient ?
- Oui… Je crois que tu as raison. Et Blaise sera puni pour ses actions, même s'il évitera Azkaban. Et le bureau est trop occupé en ce moment pour se pencher véritablement sur l'affaire. »
Draco soupira et laissa tomber sa tête sur l'épaule de Harry.
« Je n'aime pas quand on se dispute comme ça. »
Harry caressa sa joue.
« Moi non plus.
- Mais je suis soulagé que ces gars ne s'en soient pas sortis impunis. Ils ont eu la monnaie de leur pièce et avec un peu de chance, ils ne s'attaqueront plus à qui que ce soit.
- Ou plus vraisemblablement, leur haine envers les ex-mangemorts va grandir.
- Pff… laisse-moi rêver. »
Ils restèrent ainsi pendant un moment, se remettant de cette prise de bec qui avait exténué tout le monde. S'énerver prenait tellement d'énergie, pourquoi ils faisaient ça déjà ? C'était plus simple de juste s'entendre. Puis Draco dit :
« Je sais que tu ne penses pas comme ça mais Blaise a raison lui aussi. Je doute que la justice sorcière aurait fait grand cas de ces personnes. Il m'a apporté justice.
- C'était une vengeance.
- Certes. Mais ça veut aussi dire qu'il tient beaucoup à moi.
- Je comprends. »
Harry laissa échapper un gros soupir. Il ébouriffa ses cheveux.
« Je crois… Je crois que si je t'avais vu comme il a dû te voir, évanoui, la cible de plein de maléfices, j'aurais aussi pété un plomb. Moi aussi, sur le coup de la colère j'ai déjà utilisé crucio.
- Ah ouais ?
- Ouais… Contre Bellatrix mais ça l'avait faite rire et contre Carrow, il avait craché au visage de McGonagall.
- Nooon, il avait osé faire ça ? McGonagall est terrifiante !
- C'est ça que tu retiens ? » rit Harry.
Draco posa une main sur sa jambe, comme s'il voulait l'ancrer avec lui et ne plus le lâcher.
« Tu es humain Harry. Tu as fait des choses pas bien mais moi j'en ai fait des pires. Tu as bien laissé tomber les miennes alors je ne vois pas pourquoi je m'attarderais sur tes erreurs.
- Je ne sais pas… ça me rend faillible et c'est quand même… j'ai torturé quelqu'un, ce n'est pas n'importe quoi.
- La guerre nous fait faire des choses affreuses. Allez, viens, n'en parlons plus. »
Draco glissa une main dans sa nuque et lui déposa un baiser sur les lèvres.
« Aller où ? sourit Harry.
- À la bibliothèque. Je suis en train de lire un livre diablement intéressant et je veux te le lire. Je vais le recommencer du début rien que pour toi.
- Haha, je crois que je n'ai jamais autant "lu" de livres depuis que je suis avec toi. Qu'est-ce que c'est cette fois ?
- Une pirate qui capture une princesse et en tombe amoureuse.
- Tu m'as eu à pirate. Allons lire ce livre ! »
o0O0o
Le week-end passa et dimanche soir, Draco se réunit en tête à tête avec Blaise. Harry aurait voulu être présent mais son petit ami jugea plus sûr de convaincre Blaise seul. Il le connaissait mieux et saurait mieux lui présenter la chose.
Harry attendit donc le verdict impatiemment. Il tenait son téléphone portable entre les mains, le fixant dès que Teddy ne requérait pas son attention. Après les attentats, il avait obligé Draco à s'en munir d'un quand il était à l'hôpital mais lorsqu'il avait refusé, prétextant qu'il n'avait pas besoin de ça, ses parents étaient intervenus en disant que ce n'était pas une si mauvaise idée. Ils s'en étaient eux-mêmes procurés un et Harry avait l'impression que c'était le monde à l'envers. Depuis quand les Malfoy s'intéressaient à la technologie moldu ? Sûrement quand elle s'était révélée plus adaptée qu'un hibou en cas de danger. Harry avait dû les aider à contracter un abonnement et installer une ligne téléphonique chez eux, oubliettant le pauvre gars venu poser leur ligne fixe.
Un Draco qui envoyait des textos était terriblement amusant. Il refusait de raccourcir ses mots malgré le temps que cela lui faisait perdre et le nombre de caractère limité par SMS. Résultat, il faisait systématiquement des fautes de frappe et ses messages devenaient presque illisibles. Et pour Draco, le langage SMS de Harry était incompréhensible. Autrement dit, ils avaient pris l'habitude de s'appeler plutôt que de s'envoyer des messages. Harry avait même augmenté son abonnement pour avoir plus d'heures d'appels.
Son téléphone sonna. Harry enfonça aussitôt le petit bouton vert.
« Alors ? demanda-t-il.
- Bonjour, rétorqua Draco d'une toute petite voix. (Si Ron criait au téléphone, Draco murmurait. Harry devait toujours tendre l'oreille.)
- Bonjour mon chéri. Alors ?
- Alors il a accepté. Il ne va évidemment pas dire tout ce qu'il leur a fait mais seulement qu'en me voyant au sol, il a perdu le contrôle et leur a lancé "quelques sorts" pour les mettre hors d'état de nuire. Il ne sait pas qui c'est. Il ne sait pas ce qu'ils sont devenus et s'il n'a rien dit jusqu'à maintenant, c'est qu'il avait honte. Quant à moi, je retire ma plainte car j'estime qu'ils ont eu la monnaie de leur pièce. Ça te semble bien ?
- Ça fera l'affaire.
- Très bien. J'irai au bureau des aurors demain avec lui. Et toute cette histoire sera terminée.
- J'espère bien.
- Parfait, dans ce cas, je vais raccrocher.
- Attends. Dis-moi que tu m'aimes. »
Il entendit Draco rire à l'autre bout du fil.
« Je t'aime, mon amour.
- J't'aime », répondit Harry, le cœur tout flottant.
Draco rit à nouveau et raccrocha. Il mettait toujours fin abruptement à leurs conversations quand Harry voulait qu'elle dure, même pour ne rien dire. Peut-être Draco n'était-il pas à l'aise de parler dans le vide ? Harry referma le clapet de son téléphone et croisa le regard de Teddy qui le regardait avec un grand sourire.
« Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-il, amusé.
- Moi aussi je t'aime ! lui annonça son fils. C'était tonton Draco ?
- Ouais petit curieux ! Viens ici que je te fasse des bisous ! »
Teddy pouffa et se laissa attaquer par Harry.
o0O0o
La déposition au bureau se déroula sans accroc, on retira les plaintes et Blaise ayant charmé son auditoire ne s'en sortit qu'avec une petite amende pour coups et blessures. Décidément, il savait tromper son monde, lui. Le reste de la semaine passa tranquillement jusqu'à ce que Draco vienne rendre visite à Harry un soir.
Teddy le colla toute la soirée, à poser des questions du genre :
« Tonton Draco, quand est-ce que tu te maries avec mon papa ? »
Ce à quoi le fameux tonton répondit :
« Si on se marie, tu ne pourras plus m'appeler Tonton Draco.
- Ah bon pourquoi ?
- Parce que si on se marie, je deviendrais ton papa. »
Teddy grimaça.
« Je préfèrerais que tu sois mon tonton. J'ai déjà un papa. T'as pas le droit de devenir mon papa à la place ! Je veux plus que tu te maries avec mon papa ! »
Draco avait ri et avait appris à Teddy à colorier ses dessins sans déborder. Cela avait fait sourire tendrement Harry. Décidément, Teddy était obstiné sur son idée de mariage. Enfin… maintenant il ne ramènerait pas le sujet de sitôt sur la table. Quand il comprendrait que Draco serait techniquement son "beau-papa" et non son "papa", là, il s'inquièterait.
Ainsi, quand ils furent dans l'intimité de leur chambre, à s'embrasser doucement, Harry demanda avec hésitation :
« Qu'est-ce que tu penses du mariage ? »
Les sourcils de Draco se levèrent avant de vite retomber et qu'un sourire flotta sur ses lèvres.
« Teddy te harcèle ?
- Tu n'imagines pas à quel point. »
Draco laissa échapper un rire traînant avant de finalement répondre à la question :
« Je ne me suis pas imaginé marié avant des années ! Je pensais que je finirais marié à une jeune fille de bonne famille que mes parents auraient choisie, comme Astoria.
- Et… Et à moi ? »
Harry sentit ses joues brûler alors il cacha sa tête dans l'oreiller, ne jetant qu'un coup d'œil à Draco. Ce dernier s'appuya sur son coude pour coincer une de ses longues mèches derrière l'oreille. Il fallait vraiment qu'il se coupe les cheveux. Les doigts graciles de Draco caressèrent sa joue.
« Pourquoi pas. Un jour. »
Harry prit sa main et l'embrassa. Ils échangèrent un long regard languissant et Harry embrassa Draco. Celui-ci passa un bras dans son dos, les rapprochant.
« J'ai décidé la date de notre départ pour la France, annonça Draco.
- Oh et c'est quand ?
- Pas ce week-end mais le suivant.
- Est-ce qu'on visitera Paris ? J'aimerais voir la Tour Eiffel au moins une fois dans ma vie.
- Si tu veux. On pourra en profiter pour passer chez Madam Borboleta Candies Ltd. »
Harry fronça les sourcils.
« Pourquoi ? Il y a déjà une boutique à Londres.
- Oui mais celle en France a des douceurs qui ne sont pas vendues en Angleterre. Elles sont extraordinaires et vraiment unique.
- Toi, tu en as déjà mangé », le taquina Harry.
Pendant qu'ils parlaient, Draco caressait ses cheveux, ses bras nus. Cela assoupissait Harry.
« Bien sûr, rit Draco. Mais il y a longtemps. Je veux t'en faire goûter. Il y en a qui jouent avec les émotions. C'est très amusant. Certaines peuvent même te faire voler.
- Celles-là, on les trouve déjà dans la boutique à Londres. Et c'est pas vraiment voler mais plus léviter. Mais celles des émotions ont l'air amusant. Et donc, changea-t-il de sujet, on séjournera dans ton "castel" ?
- Oui. Si l'on va à Paris, on pourrait envoyer nos affaires samedi pendant que nous on visite et le soir – ou plus tôt si tu préfères – on s'installe là-bas et dimanche, je te fais visiter les alentours. Ou alors on passe la journée tous les deux. C'est comme tu veux.
- On verra ça sur place », sourit Harry.
Draco continua à lui raconter tout ce qu'il aimerait lui faire visiter à Paris, les particularités du monde sorcier là-bas et Harry l'écouta tout en dodelinant de la tête jusqu'à ce qu'il s'endorme au doux son de la voix de l'homme qu'il aimait.
o0O0o
Ça n'allait pas bien. Pas bien du tout. Il avait beau regarder la liste des choses qu'il aimait, accrochée dans la cuisine, cela ne s'arrangeait pas. D'habitude en la relisant, cela le faisait sourire et lui permettait de s'accrocher. Là, elle le rendait juste en colère. Il n'y avait pas de raison, se répétait-il, mais voilà, regarder la liste le mettait en colère.
Il ouvrit un placard un peu plus loin, toujours en fixant ce bout de papier qui ne marchait pas, et sortit une bouteille et un verre. C'était plus fort que lui. Ce n'était pas qu'il voulait se plonger dans l'alcool, mais au moins, quand il buvait, il ne ressentait pas toutes ces émotions… pour un certain moment. Il savait que la descente de l'alcool n'était pas jolie-jolie à voir chez lui mais juste pour ce court moment bienheureux, il en avait besoin.
Il ne comprenait pas. Il était heureux en ce moment. Tout se passait bien. Les morts d'Andromeda puis Kreattur et les attentats ne l'avaient pas trop atteint psychologiquement, comme il l'avait craint. Alors pourquoi se sentait-il aussi mal ?
Il se servit un verre et le but, une main tenant fermement le comptoir de la cuisine. Il laissa tomber sa liste pour regarder plutôt les plantes que Meredith et Draco lui avaient offert, qui malgré tout ce qui s'était passé, avaient bien poussé. Elles aussi lui faisaient plaisir à voir habituellement. Mais aujourd'hui, rien ne marchait. Ses idées moroses étaient toujours aussi moroses et il s'était remis à boire.
La culpabilité l'envahit. Il n'avait pas véritablement bu comme ça depuis un long moment. Et voilà qu'il foutait tout en l'air. Il était irrattrapable. Comment pouvait-on l'apprécier ? Comment pouvait-on l'aimer ? Il était ridicule et bon à rien. Il engloutit le reste de son verre.
Il savait que ces pensées n'étaient pas vraies, que c'était juste son cerveau qui était malade. Il le savait, il se soignait ! Il allait voir Meredith toutes les deux semaines ! Mais il ne pouvait s'empêcher de remuer tous ces moments où il avait été nul, où il avait eu honte, où il avait pleuré, où il s'était battu, et tout cela lui revenait en pleine tête, sans aucun filtre. Tout ça pour lui dire qu'il ne valait rien et que « Regarde ta vie, tu n'as rien accompli de positif ».
Non, non, non, il ne devait pas penser ça. Il frotta ses yeux qui devenaient désagréablement humide et sortit le couteau à cuisine. Teddy attendait son petit-déjeuner et il allait lui apporter. Il repoussa son verre. Il prit une orange, la coupa en deux et la pressa. Coup d'œil vers la bouteille. Il prit une deuxième orange, la coupa en deux et la pressa. Sa main se tendit vers le verre. Il prit une troisième orange, la coupa en deux et… se servit de nouveau de l'alcool. Il engloutit son verre et pressa sa troisième orange. Il ne pouvait pas. Il n'y arrivait pas. Tout ce qu'il entreprenait ne servait à rien, ne voulait rien dire. Le monde était vide et il n'était que la lumière découvrant que les ténèbres étaient déjà là, à l'attendre (1).
Il regarda le jus d'orange qu'il venait de presser. Certainement, il y en avait assez pour deux personnes ? Il le versa dans deux verres. Sa main se posa sur le couteau.
Momentanément.
Aussitôt reculée.
Mais suffisamment pour qu'une idée rampe dans sa tête. Une idée odieuse et infecte. Mais qui s'installa. D'horreur, il rangea le couteau et claqua le tiroir, s'en éloignant aussitôt, les mains à moitié levées, en défense.
Il ne pouvait pas avoir pensé ÇA. Il n'avait aucune raison de faire ÇA. Sa respiration était saccadée. Ça n'allait pas DU TOUT. Comment avait-il pu seulement imaginer ça alors que Teddy était dans le salon, à attendre qu'on vienne lui donner à manger ? L'image de son fils envahit son esprit et il s'y raccrocha de toutes ses forces. Il ne pouvait pas le laisser tomber. Il avait besoin de lui. Il avait besoin d'un père, là, présent, bien vivant.
Son regard claqua sur la bouteille. Tout était de sa faute. Bon, certes, tout n'était pas de sa faute mais il fallait qu'il commence quelque part et il allait s'en dé-ba-rra-sser. Il la prit, la vida dans l'évier. Puis vida son placard entier et les vida toutes une à une. Dans un petit coin de son esprit, il ne pouvait pas s'empêcher de penser à tout le gâchis que ça représentait, qu'il pouvait très bien les mettre dans un coin où il n'allait jamais, ou les envoyer chez les Malfoy, pour ce que cela importait. Mais non, il fallait qu'il les vide, qu'elles n'existent plus devant lui.
Quand il eut vidé son cellier, il récupéra son téléphone qui chargeait et composa le numéro de Meredith. Il savait que c'était dimanche, qu'il était tôt mais elle avait dit qu'il pouvait l'appeler en cas de problème alors il allait l'appeler. Le téléphone sonna une fois, deux fois, trois fois, puis on décrocha. Harry faillit exhaler un soupir de soulagement.
« Allô ? demanda une voix endormie. Meredith Patcher à l'appareil.
- Allô Meredith ? C'est Harry. Je sais qu'il est un peu tôt mais…
- Oh Harry ? Donne-moi une seconde, je vais faire du thé. »
Il l'entendit se cogner dans quelque chose et elle poussa un juron avant de s'excuser aussitôt pour son interlocuteur. Puis, lorsque Harry entendit en fond la bouilloire qui chauffait, Meredith dit :
« O.K., Harry. Dis-moi ce qu'il se passe. »
Harry soupira.
« Je me sens dans le mal. Et ni la liste ni la plante ne m'aident à aller mieux…
- Ça ne marche pas à tous les coups. Pour certaines personnes, c'est même pas du tout.
- Oui mais jusqu'à présent, je me sentais toujours mieux en les regardant.
- Ça doit être plus grave que d'habitude alors. Raconte-moi. »
En bafouillant, Harry lui expliqua du mieux qu'il put ce qu'il venait de se passer. Il eut toutes les peines du monde à lui avouer les pensées qui l'avaient traversé quand il avait posé sa main sur le couteau et pleura tout le long de l'explication. Meredith lui donna plus des conseils que des paroles réconfortantes. Elle l'aida à voir ce qu'il ressentait de façon plus méthodique et moins dans l'empathie, lui permettant de s'éloigner un peu de tous ces sentiments. Puis elle lui dit que tout cela était normal et qu'il n'y avait aucune honte à avoir, que cela pouvait arriver même aux meilleurs d'entre nous.
Teddy pointa sa petite tête blonde pendant l'entretien et Harry s'arrêta de parler pour serrer son fils contre lui de toutes ses forces. Il avait faim mais Harry n'avait toujours pas fini de parler avec Meredith. Et il ne voulait pas que Teddy entende ce qu'il avait à dire. L'enfant ne fut pas content qu'on retarde son repas et le fit savoir. Finalement, Meredith lui souffla qu'il serait plus pratique de discuter dans son bureau et que s'il se sentait capable d'attendre, elle pouvait lui donner un rendez-vous mardi. Harry accepta, il avait déjà dit le plus gros et leur discussion – bien qu'incomplète – lui avait fait du bien. Meredith lui assura qu'elle pourrait lui faire certificat médical lorsqu'il s'inquiéta de sécher le travail.
Il raccrocha donc avec un rendez-vous mardi après-midi dans son agenda et s'occupa enfin du petit-déjeuner de Teddy qui lui hurlait dans l'oreille. Il repensa beaucoup à ce qu'il s'était passé ce matin-là, voire même tout le temps. Il n'osa pas l'avouer à Draco qu'il vit le lundi soir bien que celui-ci sentit que quelque chose n'allait pas. Mais il était tellement engoncé dans les préparatifs de leur départ ce week-end qu'il accepta sans discuter l'excuse de Harry.
Mardi, Harry annonça en début d'après-midi à Julian qu'il devrait partir plus tôt pour raison médicale. Son mentor s'inquiéta pour sa santé mais face au refus d'en parler de Harry, il n'insista pas et lui proposa même de ne pas revenir au travail après son rendez-vous. Mais avant son départ, ils avaient du travail. Et il y avait du nouveau sur l'affaire Crossman. Ou plutôt l'affaire Dawson. Mais comme elle avait été nommée avant que l'on sache que Crossman était en réalité Dawson, on continuait à l'appeler comme ça. Le fait était que Balthazar Dawson, l'ex-mangemort, venait de se réveiller du coma. Et que son cerveau n'avait pas subi les mêmes dommages que sa femme. Il était sain d'esprit. Cependant l'hôpital avait refusé qu'on vienne l'interroger car il devait encore se remettre et leur avait indiqué qu'ils pourraient le voir à partir de la semaine prochaine. Cela rendit Harry impatient. Ils allaient enfin pouvoir savoir ce qu'il s'était réellement passé.
Il se rendit chez Meredith, le cœur ne sachant plus exactement sur quels sentiments se poser. Elle lui demanda comment il avait tenu le coup depuis dimanche et Harry répondit qu'après leur conversation téléphonique, il s'était senti beaucoup mieux. Meredith souleva un sourcil dubitatif et Harry dut reconnaître que ça n'allait pas très top même s'il était vrai qu'il se sentait mieux depuis qu'il avait pu lui parler.
« Je ne veux pas me sentir dépressif comme ça… Je suis censé aller en week-end en amoureux. Ça va tout gâcher. Est-ce que tu sais depuis combien de temps on n'a pas eu de vrais rendez-vous ? Le tout premier ! En avril ! L'année dernière. Oh Merlin, ça va bientôt faire un an, paniqua-t-il.
- Calme-toi Harry. Prends une grande respiration. Ce n'est pas grave. Rien de tout ça n'est grave. Ne pas avoir de "rendez-vous" ne vous a pas empêchés de vous voir et de vous aimer. Et même, ça va rendre ce week-end très spécial ! Qu'est-ce que vous allez faire ? l'enjoignit-elle à raconter.
- On va aller à Paris… commença Harry, sachant pertinemment que Meredith tentait de le distraire.
- Oh Paris ! La capitale romantique, c'est super. Tu as hâte ?
- Ou… Oui. Ça fait un moment qu'on n'était pas tous les deux tous les deux.
- Et qu'est-ce que tu aimerais faire ?
- Oh, Draco a déjà prévu un super programme, on va beaucoup visiter ! »
Un sourire tendre s'installa sur les lèvres de Harry. Draco lui avait fait tout un discours hier sur tout ce qu'ils allaient voir samedi. Il ne pouvait plus attendre. Surtout qu'ils allaient passer la journée entière tous les deux.
« Qu'est-ce que tu aimerais dire à Draco ce week-end ?
- Ce que j'aimerais dire ? J'imagine… que je l'aime ? Comme toujours. Et que je suis pas prêt d'arrêter de l'aimer. »
Meredith eut un sourire comme si elle avait en face d'elle quelque chose de beaucoup trop adorable.
« C'est bien. C'est important de dire à son partenaire qu'on l'aime. Ou de le lui montrer.
- Oui, approuva Harry.
- Est-ce que tu as parlé de ta santé mentale avec Draco ces derniers temps ? »
Harry grimaça.
« Pas vraiment.
- Tu as le droit de ne pas vouloir en parler, le rassura Meredith. Mais je pense qu'il est important d'en discuter avec ton petit ami. Cela lui permettrait de mieux comprendre ce que tu traverses et de t'aider dans cette épreuve.
- Mais… il avait dit qu'il ne savait pas comment m'aider et que c'est pour ça qu'il préférait que je voie un professionnel… toi. »
Meredith rit de bon cœur et dit :
« Et il a raison. Il n'est pas forcément capable de te soigner mais il peut t'aider à aller mieux. Par exemple, juste en étant à tes côtés quand tu vas mal, ou te distraire quand tu as des pensées sombres, pendant que moi, je tente de les faire disparaître.
- Oooh, je vois. »
Meredith lui sourit puis changea de position dans son fauteuil pour se pencher vers Harry.
« O.K., alors maintenant dis-moi, quel est le truc le plus fou que tu veux faire avec Draco ? Ne te retiens pas et dis-moi la première chose qui te passe par la tête.
- Je veux qu'on se marie et qu'on ait des enfants.
- Une vie familiale posée alors ? Bien, maintenant dis-moi ce qu'il se passera si tu n'es plus là pour pouvoir faire ça. Comment crois-tu que Draco réagira ? »
Harry baissa les yeux, coupable.
« Il sera dévasté. Et triste et en colère. Il m'en voudra. »
Meredith prit gentiment sa main.
« Je ne dis pas ça pour te faire culpabiliser, crois-moi. Je te montre simplement une raison, un idéal auquel il faut que tu t'accroches pour ne pas te laisser emporter. Il ne faut pas que tu laisses ces poussées suicidaires vaincre. Une liste des choses que tu aimes n'est pas quelque chose de suffisamment fort pour te soutenir. Il te faut des choses réelles et si l'idée de te marier avec Draco et d'avoir ses enfants ne marche plus, il te faudra trouver une nouvelle ancre. Comme ton fils par exemple. »
Harry approuva, ne se faisant pas confiance pour répondre.
« Ce que je veux dire, c'est… crois en l'avenir. Je sais, c'est très cliché et tout le monde dit ça mais c'est vrai. Focalise-toi sur ce que tu veux, ce que tu veux devenir et accroches-y-toi. Un jour, tu verras que tout cela aura passé et tu auras plein de mini-toi avec ton mari. »
Harry ne put s'empêcher de rire au ton qu'elle avait pris pour dire ça.
« Tu aimes Draco, pas vrai ? Alors appuie-toi sur lui, fais-lui confiance pour te retenir. Je t'assure qu'il ne te laissera pas tomber. »
Harry acquiesça. Les paroles de Meredith lui faisaient chaud au cœur. Puis sur un ton plus détendu et amusé, elle dit :
« Ne crois-tu pas qu'avant de vous marier, vous devriez vivre ensemble ?
- Je… Draco en a déjà parlé… mais c'était une blague. Mais j'arrête pas d'y penser depuis.
- Tu sais, dit-elle en lui faisant un clin d'œil. Certaines personnes utilisent l'humour pour "tester" leurs idées chez leur partenaire, par crainte d'être immédiatement rejetées.
- Mais n'est-ce pas un peu trop tôt ? Ça ne fait pas si longtemps qu'on est ensemble.
- Harry, dit Meredith d'un air sérieux. Je vais te dire quelque chose que je n'ai encore jamais dit à mes patients. Jack et moi, nous avons commencé à vivre ensemble une semaine après notre mise en couple. Si c'est une question de "bon moment", laisse-moi t'apprendre qu'il n'y en a pas. »
Harry écarquilla les yeux.
« Je croyais que vous ne viviez pas ensemble. Le studio à The Understander…
- C'est comme si c'était un appartement de fonction, balaya-t-elle d'un mouvement de la main. Il y dort quand il termine trop tard ou veut jouer au psychomage et y invite des gens. Il vit chez moi. Chez nous, maintenant.
- Ouah… une semaine quand même, percuta Harry. J'imagine que vous vous connaissiez depuis longtemps. »
Meredith haussa les épaules.
« Pas plus longtemps que toi et Draco.
- Oh. Oui. Tu as raison. »
La jeune femme lui sourit.
« Ne te laisse pas avoir par ce que la société dit "être normal". Tout le monde est différent. Et donc tout le monde est normal. »
Leur séance continua, en se penchant plus particulièrement sur l'état mental de Harry et ce qu'il pouvait faire pour y remédier, mais surtout, parlant de sa cause, l'origine de son PTSD. Et Harry comprit qu'il ne datait pas de son combat final contre Voldemort mais remontait à beaucoup plus loin, plus tôt. Aux Dursley et au placard sous l'escalier. Il pleura beaucoup pendant cette séance-là et en en sortant, il était vidé de ses sentiments et exténué. Ils avaient bien avancé, cela voulait dire ?
Il retourna travailler après s'être accordé une pause-café et un énorme éclair au chocolat. Quand il rentra à la maison et que Teddy lui sauta dans les bras, il se sentait mieux, beaucoup mieux à vrai dire. Son cerveau fonctionnait à toute vitesse et il pensa avec violence à Draco. Il n'arrivait pas à croire qu'il pouvait ressentir pour lui des sentiments plus forts que ce qu'il ressentait déjà mais voilà, il était éperdument amoureux de lui. Fou amoureux. Et il voulait plus, tout. En soi, il l'avait déjà tout à lui. C'était inexplicable. Il l'avait déjà et il ne voulait qu'une chose, l'avoir à nouveau. Oh Merlin, c'était embarrassant. Comment pouvait-on être aussi amoureux de quelqu'un ? Est-ce que cela s'arrêterait un jour ? Ou l'amour était-il une courbe exponentielle ?
Cette nuit-là, il ne rêva que de Draco et de Draco et encore de Draco. Mais aussi d'un Draco qui le prenait, murmurait son nom à son oreille et le faisait jouir par la seule force de son amour. Évidemment, au petit matin, il avait souillé son caleçon comme un adolescent. Le cœur battant suite à son rêve et le sexe palpitant, il se rendit compte qu'il ne s'était jamais laissé penser à ça depuis qu'ils sortaient ensemble. Il voulait que Draco le prenne, le pénètre. Il voulait être le réceptacle de son amour et de son sperme.
Ouah, il était vraiment obsédé. Il n'avait jamais vraiment imaginé qu'ils feraient ça. Que Draco lui ferait l'amour. Bon, d'accord, c'était à moitié un mensonge. O.K., il s'était vu faire l'amour à Draco. Plus d'une fois. Mais pas de cette façon. Pas autant. Avec tant d'intensité. Il ne pouvait plus penser à rien d'autre.
Un coup d'œil au réveil lui apprit qu'il avait largement le temps de passer un moment avec lui et son érection. Il repoussa ses couvertures et glissa une main dans son pyjama en se mordant la lèvre, rencontrant immédiatement son membre chaud et humide de son rêve érotique. Il n'avait encore jamais connu l'orgasme dans un rêve mais clairement, là, il l'avait vécu. Il se masturba en gémissant. Puis, poussé par ce que son cerveau avait inventé pendant la nuit, il descendit un doigt vers ses fesses. Un peu hésitant, il fit rentrer une phalange de son index.
C'était… une sensation étrange. Mais pas désagréable. Il poussa un peu plus, tout en continuant à se caresser. C'était bon. Une fois, avec Ginny, ils l'avaient fait par derrière. Et elle avait semblé avoir aimé. Lui aussi pouvait aimer. Il imagina Draco avec lui, les doigts de Draco remplaçant son doigt et, plus que ses caresses, ce fut cette image qui le fit éjaculer. Mais ce n'était pas aussi bon que lorsqu'il jouissait avec Draco. Se masturber seul n'était plus drôle. Il voulait le faire avec Draco.
(1) Formule détournée d'une citation connue de Terry Pratchet. Tous ceux qui me donnent la citation exacte auront droit au début du prochain chapitre !
Et ça y est, le prochaine chapitre, c'est le week-end en France ! Ça fait longtemps que je veux l'écrire…! En parlant d'écriture… aujourd'hui commence le camp NaNoWriMo. Je vous ai déjà expliqué ce qu'était le NaNoWriMo mais dans le cadre du "camp", on inscrit l'objectif qu'on veut. Et j'ai décidé d'y participer (après le désastre du NaNo de novembre dernier…) sur mon histoire originale en visant 20k mots. Il n'y aura donc pas de chapitre le mois prochain. (Même si en soi, j'en ai déjà écrit 3 pages, on verra si je me sens capable d'écrire deux histoires en même temps, étant donné la motivation que j'ai en ce moment.)
Sur ce, je vous souhaite un bon confinement !
