LA BRAISE SOUS LA CENDRE
Disclaimer : voir prologue.
Chapitre 22 : Sous la surface, partie 2
« On y va ? » demanda David en les encourageant du regard.
Sous des dehors calmes, Rogue retira ses gants alors qu'Hermione plongeait lentement ses mains dans le pot. Le sorcier observa avec intérêt la jeune femme qui laissait les sensations l'envahir. Au toucher, l'onguent était bien évidemment gras et avait la texture de la gélatine fondue. Sous l'oeil averti de David, Hermione malaxa un moment, puis prononça la formule magique consacrée. L'effet fut immédiat et saisissant, même pour elle.
« Alors ? » demanda David.
« C'est chaud... On dirait presque que c'est vivant... » dit-elle en tentant de décrire ses impressions. « C'est comme si l'on trempait ses doigts dans un courant d'eau, comme si c'était insaisissable... »
« Est-ce que tu as l'impression d'avoir de légers fourmillements ? »
« Oui... Oui, quand je bouge les doigts... C'est agréable. »
« C'est en train d'agir » dit le jeune homme. « Continue, il est important que tu t'imprègnes bien du baume car tu joues le rôle de catalyseur pour William... » Il se tourna vers Rogue. « Immergez vos mains jusqu'aux poignets et étalez bien... » Rogue s'exécuta. « ... C'est ça... Hermione, prends lui les mains maintenant, et prononce à nouveau la formule... »
Hermione fit comme David le lui dit. Ils attendirent quelques secondes, mais Rogue finit par secouer la tête et fit le geste de vouloir retirer ses mains.
« Attendez ! Hermione, masses-lui les mains, s'il te plaît... Il faut vraiment qu'elles soient enduites et que le baume pénètre la peau... »
« Ok. »
Hermione commença à masser les paumes et les doigts de Rogue avec appréhension. Et si cela ne marchait pas ? Immédiatement, elle se fustigea intérieurement en s'en voulant de son manque de confiance. Il fallait que ça marche... Et puis, si ce n'était pas le cas, ils recommenceraient à chercher jusqu'à ce qu'ils trouvent quelque chose...
La jeune femme trouva par ailleurs que c'était une sensation agréable de laisser glisser ses mains sur celles de Rogue de cette façon... C'était même un geste assez troublant... assez intime. Le silence les entourait confortablement. N'était-ce que la présence de David qui la gênait inconsciemment, Rogue et elle auraient pu se croire seuls et profiter de ces instants pour faire un peu mieux connaissance... Et plus si affinités ? Allons donc ! Si le simple fait de masser les mains de son ancien professeur commençait à faire naître de telles pensées en elle, elle n'était pas sortie de l'auberge !... Involontairement, à cette idée à la fois iconoclaste et sérieuse dans son esprit, Hermione se mit à rougir.
Rogue observa une rougeur subite apparaître sur le visage de la jeune femme et en comprit avec un choc l'origine. Même s'il ne sentait pas grand chose présentement dans ses mains, Il était ravi de susciter un tel trouble en elle. Il pouvait aisément deviner le cours des pensées de la sorcière et son intérêt s'en trouva décuplé. Ainsi, il avait réussi à attirer son attention et à toucher une fibre sensible en elle... Son coeur fit un bond dans sa poitrine et il se prit à espérer comme un fou qu'elle s'intéresse davantage à lui dorénavant.
Hermione sentit l'atmosphère se modifier singulièrement en l'espace de quelques secondes. Le jeu subtil entre eux venait de basculer et la magie de ces quelques minutes, de disparaître. A présent, elle n'appréciait guère de sentir le regard de son ancien professeur rivé sur son visage de cette façon. Elle n'osait croiser ses yeux de peur d'y lire... Quoi ? Du désir ? Du désespoir ?... Que pouvait-il éprouver en cet instant ? La tentation de lui demander s'il sentait qu'elle le touchait était grande, mais elle se retint parce que l'onguent ne semblait pas avoir d'effets sur lui... Inquiète, elle continua à lui masser doucement les mains en se concentrant sur ses propres mouvements afin d'assouplir les articulations de Rogue.
Et tout à coup, elle s'arrêta net en poussant un petit cri de surprise. Elle lâcha aussitôt les mains de Rogue et le dévisagea, étonnée. Lui aussi semblait choqué et la regardait avec incrédulité.
« Qu'est-ce qui se passe ? » demanda David.
« J'ai senti... » dit la sorcière.
« Continue, Hermione... » s'écria David. « Continue ! »
Mais la jeune femme hésitait à reprendre les mains du sorcier dans les siennes. Elle dévisagea Rogue en silence. A son froncement de sourcils et à son regard qui s'était durci, elle vit qu'il avait compris ce qu'elle avait ressenti et ce que cela signifiait.
« David, est-ce que vous pourriez nous laisser seuls un instant, je vous prie ? » demanda Rogue d'une voix égale.
« Mais, je... »
« ... David, s'il te plaît... ? » l'interrompit Hermione, sentant qu'il lui serait impossible d'échapper aux questions du Maître des Potions.
Le jeune homme les regarda tous les deux comme s'ils étaient subitement devenus fous. Il hocha finalement la tête et sortit sans un mot. Mentalement cependant, il se promit de ne pas manquer de demander une explication à son amie plus tard.
Après son départ, Rogue continua à dévisager avec intensité la jeune femme qui commença à gigoter nerveusement devant lui.
« Hermione, il est pour le moins étrange que vous ayez réagi de cette façon à ma signature magique... J'ai senti votre fluide me traverser, comme un écho presque symétrique... au mien... » Il laissa sa phrase en suspens et reprit doucement : « ... Vous m'avez menti lorsque vous m'avez dit que vous ne connaissiez rien en Magie Noire... »
« Je ne voulais pas que vous pensiez... » commença t'elle pour se défendre.
« ... que vous aviez lu des grimoires interdits ? » finit-il d'une voix plus froide. La jeune femme se mit à rougir, confirmant ses doutes. « ... Pauvre petite inconsciente... Vous vous êtes dit que vous ne craigniez rien tant que vous ne passiez pas aux actes, n'est-ce pas ?... Vous vous êtes dits qu'avec votre système de valeurs, votre sens du bien et du mal, vous seriez assez forte pour tenir tête à vos pulsions les plus profondes ? »
Tout à coup très pâle, Hermione se raidit et le regarda droit dans les yeux.
« Je n'ai pas envie d'en parler » répondit-elle simplement avec fermeté.
Elle se leva et s'apprêta à partir, mais il l'en empêcha.
« Ah oui ? Et bien, moi, j'ai envie d'en discuter… maintenant ! » affirma t'il en lui saisissant brusquement le poignet.
Le même phénomène que précédemment se produisit à nouveau, peut-être même amplifié par leurs émotions violentes.
« Ne me touchez pas ! » cria Hermione qui secoua brutalement le bras et se défit avec rage de sa poigne glissante.
« Ne me dites pas que cela vous déplaît, je ne vous croirai pas… »
« C'est faux ! Vous me rép... » Hermione s'interrompit brutalement avant d'aller trop loin.
« Allons, allons, inutile de mentir... » dit Rogue, tout à fait conscient de ce qu'elle avait manqué de laisser échapper. « Nous savons parfaitement tous les deux ce qu'il en est réellement... »
Ils s'observèrent l'un et l'autre quelques secondes. Sur le qui-vive, Hermione secoua la tête, en négation de ce qu'elle ressentait. Rogue réfréna l'envie de la pousser dans ses retranchements et se tut. Il présentait obscurément qu'il ne fallait pas s'aventurer pour l'instant sur ce terrain plus que délicat.
Pourquoi, ô grand pourquoi, toutes les discussions entre nous doivent-elles systématiquement tourner à l'affrontement ou à l'orage ? pensa Hermione de manière incongrue au même moment.
Et puis soudain, quelque chose en elle se brisa. Elle se sentit lasse, fatiguée de lutter contre elle-même, dans un combat qui la laissait de plus en plus désemparée et perdue. Refuser maintenant d'aborder ce sujet - surtout avec lui, qui était mieux à même de la comprendre et de l'aider - c'était se condamner à errer avec ses interrogations et ses remords pour le restant de ses jours. Etait-ce un fardeau qu'elle était prête à supporter seule ?
Image même de la fragilité et du désespoir, elle retourna s'asseoir, indécise quant à la marche à suivre. Il y avait tellement de questions sans réponses.
« Je ne savais pas... » murmura t'elle finalement.
Rogue respira à nouveau en s'apercevant seulement maintenant qu'il avait retenu inconsciemment son souffle pendant ces quelques secondes qui lui avaient parues une éternité. Il lui dit doucement :
« Non, vous ne saviez pas que les grimoires eux-mêmes étaient des leurres magnifiques destinés à enchaîner les esprits qui ont soifs de connaissances. Et plus vous lisiez et appreniez, et plus vous aviez faim... Quel pêché d'orgueil... »
Rogue observa sa jeune compagne, qui semblait accuser le coup et être complètement perdue à présent. Avait-elle compris quel était le prix à payer pour obtenir ces connaissances ? Il n'en était pas trop sûr. Lui aussi au même âge qu'elle, n'avait vu que les bénéfices qu'il pouvait retirer de l'étude des textes interdits, et pas les pièges. Mais une fois qu'on était allé trop loin dans l'apprentissage de la Magie Noire, il était extrêmement difficile de faire machine arrière. Il fallait un caractère en acier trempé pour reprendre sa vie en main et se maîtriser. Très peu de sorciers réussissaient. La plupart d'entre eux retombaient dans la facilité et ne s'opposaient plus à l'appel de la magie occulte et à ses multiples tentations. Ceux-là étaient définitivement perdus. Il continua :
« La Magie Noire a une volonté propre, une sorte d'énergie qui agit comme un aimant en attirant à elle le moindre désir, l'ambition, la colère ou la peur. Sous des formes séduisantes, elle exploite ces faiblesses et les amplifie, les nourrissant de jalousie, de rancune et de haine... Plus vous êtes puissant et plus l'attrait est irrésistible... »
Rogue avait prononcé ces mots d'un ton neutre, perdu dans le contemplation de ses mains qu'il se frottait l'une contre l'autre. Il pouvait à nouveau sentir très faiblement les flux d'énergie qui passaient de l'une à l'autre. C'était nettement insuffisant pour produire de la magie en quantité et qualité appréciable, mais c'était déjà une amélioration certaine de sa condition. Il aurait dû en être heureux, mais ce qu'il venait d'apprendre au sujet de la jeune femme, confirmait ses pires craintes et l'inquiétait beaucoup, même s'il n'en laissait rien paraître. Il ne voulait pas que la jeune femme panique.
Hermione, quant à elle, réfléchissait. Elle avait senti la force mystérieuse dont il parlait l'attirer obscurément à chaque fois qu'elle avait été confrontée à toutes les formes de Magie Noire. En son for intérieur, elle croyait jusqu'à présent que ses lectures ne l'avaient pas entraînée bien loin et que le processus était réversible. Et si elle se mentait à elle-même ? Chaque mot était gravé en elle, chaque incantation marquée au fer rouge dans son esprit. Elle se souvenait de tout et n'avait qu'à invoquer les formules à voix haute pour que les sorts se réalisent... Elle frissonna et commença à avoir peur. Un instant, elle se rebella contre l'idée terrifiante de ce qu'elle pouvait être devenue et tenta de se rassurer en lançant :
« Pourtant, il y a des sorciers qui lisent ces grimoires et qui ne sont pas pour autant des mages noirs… Remus, par exemple, quand il enseignait la défense contre les forces du mal, devait bien avoir lu quelques livres sur le sujet, non ? » »
« C'est vrai... Mais il n'avait pas l'intention de se servir de ces sortilèges. Il ne retenait que les moyens de s'en défendre... Car c'est l'intention qui compte, ce que vous voulez faire de ces sorts en définitif. »
Hermione frissonna aux souvenirs de certaines expériences. « La Magie Noire... Vous en parlez comme si... A t'elle une conscience propre ? »
« Non, pas à proprement parler. Tout est une question de pouvoir. Elle a juste cette volonté et cette forme d'énergie plus prédominante que dans la magie basique que tout le monde utilise... Hermione, depuis des siècles, c'est un sujet qui fait couler beaucoup d'encres de la part des théoriciens de la Magie, mais aucun, à ma connaissance, n'a apporté de vraies réponses quant à la nature, à l'essence même de la Magie Noire... Vous n'avez donc rien lu à ce propos ? »
« Non. »
« Trop occupée à vous imprégner des grimoires, hein ? » ne put-il s'empêcher de lâcher d'un ton sarcastique.
Ebranlée, Hermione lui lança un regard blessé pour toute réponse.
« Pardonnez-moi, c'était une remarque déplacée... » Il vint s'installer à côté d'elle et lui demanda : « Puis-je savoir exactement ce qui a motivé ses recherches à l'origine ? »
« Harry... Quand j'ai vu que la médecine traditionnelle et conventionnelle ne marchait pas sur lui, j'ai tout de suite su qu'il fallait que j'explore d'autres directions, que je me procure des livres interdits. Après tout, c'était Voldemort qui lui avait infligé cette malédiction... »
« L'enfer est pavé de bonnes intentions. Une devise moldue, qui a sa raison d'être... » Hermione rougit. Il poursuivit avec un calme effrayant : « ... Vous poursuiviez un double but. Vous vouliez vous venger, n'est-ce pas ? Ou plutôt venger la mort de Weasley ? »
La jeune femme ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit. Il se tourna vers elle.
« Je ne veux pas être cruel avec vous, mais je dois savoir... Jusqu'où êtes-vous allée ? Vous êtes vous servie de ce que vous avez appris ? »
« Je ne sais pas... Peut-être, oui... Comment savoir ? »
« Avez-vous tué le couple Lestrange ? »
Un long silence.
« Oui » souffla t'elle finalement.
Rogue ferma brièvement les yeux. « Ce chemin que vous avez choisi d'emprunter, ne vous amènera pas à ce que vous cherchez. »
« Cette chienne le méritait ! Elle a payé pour tous ceux qui ont soufferts de sa main ! »
Sa réaction immédiate et emportée indiqua clairement à Rogue qu'elle n'avait toujours pas fait la paix avec elle-même et qu'elle pouvait encore subir l'influence de la tentation.
« Et qu'y a t'il eu après la gratification immédiate de sa mort ?... Rien, n'est-ce pas ? Les sortilèges et les malédictions prennent ce qu'il y a de meilleur en vous, et en échange, ils n'offrent rien... rien qu'un vide immense, impossible à combler... »
Hermione étouffa un gémissement. Il était passé par là, il savait. Qui mieux que lui pouvait comprendre ce qu'elle éprouvait ? Parfois, de plus en plus souvent, elle avait le sentiment d'être une coquille vide sans âme. Dans ces moments là, plus rien ne l'intéressait et elle ne faisait plus attention à elle, ni à personne. Même son métier qui l'obligeait à être proche des autres, prenait une saveur amère et mécanique. Elle s'abrutissait alors de travail pour tenter d'oublier une existence qu'elle trouvait de plus en plus monotone.
En embrassant une vie et une carrière dans le monde magique, elle s'était éloignée de ses parents Moldus. A présent, ils se parlaient peu et se voyaient encore moins. Sa meilleure amie, Ginny, n'aurait pu comprendre ce besoin de bouger qu'elle ressentait et avait ses propres problèmes à régler avec un Harry qui déclinait lentement. David, qui avait partagé sa vie un temps, avait ses recherches à mener et était très pris. Quant à Remus, elle n'avait que peu de nouvelles de lui et savait qu'il arpentait inlassablement l'Europe à la recherche de Mangemorts en fuite. Elle se sentait très seule et voyait honnêtement son avenir sous de sombres auspices. Ce qu'elle avait toujours pris pour de la déprime, était peut-être lié à ce sentiment d'insatisfaction, cette faim permanente dont il parlait ? Elle soupira.
« Si cela peut vous rassurer, la Magie Noire ne fait partie de votre nature, Hermione. »
« Qu'est-ce que vous en savez ? » demanda t'elle avec amertume.
« Je pense vous connaître un peu... Et puis, il est clair que vous n'arrivez pas à gérer le conflit interne qui vous ronge petit à petit. La plupart du temps, vous avez encore suffisamment de bon sens pour maîtriser cette envie, et pourtant, vous hésitez... Si vous continuez ainsi, vous perdrez la bataille contre la tentation. Elle finira par vous séduire et vous détruire. »
« Dis comme cela, ça paraît si simple... Mais je ne sais pas par où commencer... »
« D'abord, continuez à résister comme vous le faites. Avec toute votre âme, de toute vos forces. Rappelez-vous toujours qui vous êtes, ce que vous êtes. Dites vous que vous êtes une puissante sorcière et que vous n'avez pas besoin de la Magie Noire... C'est avant tout une question de volonté. »
« Parfois, c'est si difficile... »
« Je sais. Il y a toujours des moments de doute... C'est humain... »
« Je vous déçois, n'est-ce pas ? »
Il haussa les épaules. « Je ne me permettrai pas de vous juger et de jeter la première pierre... » Il ajouta après quelques instants de silence : « Hermione, je peux vous apporter mon expérience, des clés pour mieux comprendre, des conseils pour éviter les pièges et les erreurs... »
« Mais ?... »
« C'est un chemin initiatique que vous devrez entreprendre seule. Il vous faudra trouver votre propre voie... »
« Je comprends... » Il y eut un moment de silence. « Et vous ? Comment vous en êtes-vous sorti ? »
« Je ne veux pas vous décourager, mais on ne s'en sort jamais véritablement... » Hermione le regarda avec un mélange d'inquiétude et de désespoir. « ... C'est un combat permanent pour ne pas succomber. Une bataille contre soi-même dans laquelle la faiblesse est exclue. Pour cela, j'ai appris à gérer mes réponses émotionnelles à certains stimuli... Je ne suis donc pas à l'abri, si c'est ce que vous voulez dire. »
« C'est pour cela que Dumbledore ne vous a jamais proposé le poste de Défense contre les Forces du Mal ? »
« C'est moi qui ai dit à Albus de ne pas me le donner... C'était beaucoup trop dangereux... Pour tout le monde. »
Elle ouvrit de grands yeux en réalisant une chose : « Mais alors, vous prenez un gros risque avec moi ! »
« Vous êtes en effet un objet de convoitises pour moi... A plus d'un titre... » ajouta t'il doucement d'une voix grave et riche. Leurs regards s'attachèrent brièvement l'un à l'autre pendant qu'Hermione rougissait à ces paroles emplies de sous-entendus. « ... Mais comme j'ai toujours aimé vivre dangereusement... »
« Alors, vous acceptez de m'aider ? »
Rogue eut un rictus féroce. « Je vais tellement vous harceler que vous allez trouver que vos cours de potions ressemblaient à des parties de plaisir à côté de ce que vous allez vivre maintenant... » susurra t'il avec une jubilation presque sadique.
Hermione fit une grimace éloquente et gémit : « C'est réconfortant de savoir que vous acceptez de partager mon enfer personnel... »
Rogue prit un air sincèrement choqué. « Sachez, Miss Granger, que les Serpentards peuvent éprouver de la compassion ! » s'écria t'il d'un ton faussement outré.
« Oh, vraiment ? » demanda Hermione, en le regardant avec perplexité.
« Sérieusement, je serai près de vous car je sais ce que c'est, quand personne ne vous soutient et ne vous ouvre la voie vers la lumière... »
Profondément touchée, Hermione eut instantanément les larmes aux yeux. « Merci Severus... du fond du coeur. »
« Il n'y a pas de quoi, Hermione. »
Rogue résista à l'envie de lui caresser la joue pour la rassurer. Surtout ne la touche pas, pensa t'il. S'il aimait sincèrement Hermione, il allait devoir paradoxalement lutter contre le désir qu'elle lui inspirait et laisser ses sentiments de côté tant qu'elle était fragile. S'il l'aimait, il ne l'entraînerait pas au plus profond d'un gouffre dont elle voulait désespérément sortir en la soumettant à la tentation qu'il représentait. Finalement, lui aussi se préparait des moments difficiles. Il se leva, autant pour s'éloigner d'elle que pour lui indiquer qu'il était prêt à l'action.
« J'ai besoin de voir les livres interdits que vous avez lus. Je suppose qu'ils sont chez vous ? »
« Oui. »
« Alors, allons-y. »
« Maintenant ? Mais l'onguent ? Vos mains ? »
« Nous continuerons plus tard... Vous venez ?... »
Rogue sortit du laboratoire, suivi par Hermione. Après de brèves explications avec David, ils quittèrent l'appartement du jeune homme. Ils empruntèrent les bus Moldus pour se rendre chez la sorcière, et une demi-heure plus tard, ils étaient arrivés.
Une désagréable surprise les attendait. L'appartement d'Hermione avait été fouillé de fond en comble. Le salon était dans un désordre indescriptible, les meubles sens dessus dessous, les rideaux déchirés et des tas d'objets éparpillés sur le sol. Ceux qui avaient fait ça, n'avaient pas pris la peine de dissimuler leur venue.
Catastrophée, la jeune femme commença à arpenter son salon et les autres pièces en se désolant. Rogue la rejoignit dans sa chambre où le matelas avait été littéralement lacéré à coups de couteaux. Des plumes et des vêtements jonchaient le parquet. Les portes des placards étaient éventrées, comme si un ouragan avait dévasté la pièce.
« Vérifiez s'il vous manque des objets de valeur. »
« La seule chose qui ait de la valeur, c'est mon émeraude, et je la porte en permanence sur moi. »
« Ils l'ignoraient peut-être... »
« Ou alors ce n'est pas ce qu'ils cherchaient... »
Hermione s'affaira dans son secrétaire où elle rangeait certains dossiers personnels et professionnels. Pendant ce temps là, Rogue s'approcha des portes et les examina attentivement, notamment aux points de rupture où de longues échardes apparaissaient.
« Vous avez trouvé quelque chose ? » demanda Hermione.
« Ces portes ont été fracturées par magie. Vos visiteurs ont dû passer toutes leurs frustrations sur elles. »
« Reculez-vous, je vais voir... Prior incanto ! »
Comme si une bande magnétique était rembobinée, les portes émirent un craquement sinistre en même temps qu'elles se brisaient à nouveau. Cet événement paradoxal confirma bien ce qu'avait dit le sorcier.
« Ca ressemble à un avertissement... »
« Vous croyez que Flavius est derrière tout cela ? » demanda Hermione.
« Il semblerait bien qu'il ait retrouvé votre trace... Venez, il ne faut pas qu'on reste ici. »
« Je vais chercher les livres et je prends quelques affaires. »
« Faites vite. »
Rogue quitta la chambre et retourna dans le salon. Le sorcier considéra le carnage. Un travail d'amateur, qui se souciait peu de masquer son passage. Machinalement, il ramassa quelques livres qui étaient tombés de leurs rayonnages pour les remettre à leurs places. Et là, il en fut pour une surprise : sous le dernier volume qu'il venait de soulever, il découvrit une petite pyramide de cristal, avec en son coeur, une violette prisonnière...
Rogue se pencha et la ramassa. Cet objet, il le connaissait bien. Ce ne pouvait être une coïncidence ! C'était le presse parchemin qui se trouvait sur son bureau, dans les cachots de Poudlard. Comment se retrouvait-il chez la jeune femme ? Une seule explication : elle avait dû le subtiliser quelques années plus tôt alors qu'elle travaillait sur les potions.
Il se souvenait d'avoir acheté cette pyramide en pensant à Hermione, et surtout, à une façon de lui révéler son amour. La sorcière qui lui avait vendu l'objet, lui avait dit que ce serait un cadeau parfait. La violette était le symbole de l'amour secret dans le langage des fleurs. Elle comprendrait...
Mais jamais il n'avait eu le courage de lui offrir cette pyramide. Il l'avait alors conservé dans l'espoir de la lui donner un jour. Il eut un sourire. Le destin avait une bien curieuse façon de frapper aux portes parfois...
Hermione déboula dans le salon avec un sac de vêtements et des livres sous le bras. Elle se figea net en voyant Rogue près de la bibliothèque et en apercevant l'objet qu'il tenait entre ses mains. Quand le sorcier tourna la tête vers elle, son coeur manqua un battement alors qu'elle le voyait sourire de manière douce, comme s'il évoquait un souvenir plaisant. Hermione eut d'autant plus honte du geste qu'elle avait commis quelques années auparavant, qu'il semblait heureux de retrouver cet objet qui devait beaucoup compter pour lui.
« Je... J'ai... » commença t'elle par dire, incapable de donner une explication.
« Vous l'avez prise... »
Ce n'était pas une question. Hermione rougit et se perdit dans la contemplation des motifs de la moquette. Rogue s'approcha d'elle.
« Ca ne fait rien. De toute manière, elle vous était destinée... »
« Pardon ? » demanda Hermione en relevant les yeux, surprise.
« Je voulais vous la donner... Mais je n'ai pas pu. »
Un délicieux frisson remonta le long de la colonne vertébrale d'Hermione, alors que Rogue la dévisageait intensément comme rarement un homme l'avait fait auparavant. Comme lorsqu'il dessinait, toute une palette d'émotions était à présent identifiable dans ses yeux noirs. Le sorcier fit lentement un pas vers elle, puis un autre, avant de s'arrêter si près d'elle qu'elle se mit à retenir sa respiration, de peur de briser l'atmosphère particulière qui venait de s'installer entre eux.
Sans la quitter des yeux, le sorcier leva une main vers ses cheveux et caressa quelques mèches et quelques boucles rebelles. Hermione pencha légèrement la tête de côté pour appuyer ce geste inattendu. Pour la première fois, elle vit du désir s'allumer dans le regard de Rogue et ressentit la même envie s'éveiller en elle comme un écho. Le sorcier promena alors ses yeux de jais sur ses traits avant que son regard ne se pose sur ses lèvres. Le coeur d'Hermione se mit à battre plus violemment alors qu'il se penchait lentement en avant, prêt à l'embrasser. Tremblante, la jeune femme ferma les yeux alors qu'il s'approchait...
Mais rien ne se produisit. Elle sentit un courant d'air plus frais sur son visage et ouvrit à nouveau les yeux... pour voir que Rogue venait de s'éloigner d'elle en la regardant confusément, un mélange d'émotions contradictoires sur ses traits. Cela ne dura que l'espace d'une seconde et le masque familier d'impassibilité refit son apparition. Hermione faillit exprimer toute sa frustration, lorsqu'il lui tendit le presse parchemin comme si de rien n'était et la devança en lui disant :
« Tenez... Gardez-le... »
Interdite, Hermione prit la pyramide et sentit une fureur sans nom l'envahir. Décidément, dans la famille 'mufle', elle n'avait qu'à demander le Maître des Potions ! Mais plutôt que d'exprimer sa colère à voix haute, ce furent ses yeux qui lancèrent des éclairs dans le dos du sorcier, alors que Rogue s'avançait vers la cheminée en l'ignorant purement et simplement.
« Retournez chez David immédiatement en bus et attendez que je revienne... » l'entendit-elle dire. « ... Nous irons chez Malefoy ensemble ce soir. »
« Où allez-vous ? »
« Rendre visite à un ami de longue date... » Il prit une poignée de poudre de cheminette et le jeta dans l'âtre. « Chemin de Traverse ! »
Sans un autre mot, il disparut dans une explosion de flammes vertes.
A suivre...
Seconde partie terminée. J'espère que je n'ai pas créé trop de frustrations ? (Rires machiavéliques...) Non, non, je vous assure, je ne l'ai pas fait exprès ! C'est l'histoire qui veut ça ! (ou l'auteur fait ce qu'il veut... Gniark, gniark gniark !). Entres parenthèses, c'est mon double pervers qui s'expriment ! (Pas vrai, pas vrai !)
Bravo à Djeiyanna pour avoir reconnu l'emprunt fait à Anne Rice. Je ne pense pas que le Talamasca et le David Talbot original m'en voudront beaucoup. Lisez au passage la grande saga des Sorcières (formidable), et bien sûr, les chroniques des Vampires (magnifiques et gothiques).
Ici, rien de bien spécial, sinon la réapparition d'un objet significatif pour Severus, disparu chapitre 10 (Cccrrrrrrrr... bruit de la neurone qui bosse en surrégime) et l'explication sur les dangers de la Magie Noire (j'y reviendrai plus tard).
Dans le prochain chapitre, un personnage emblématique réapparaît et Lucius nous montre un peu plus de son caractère tordu, voire dérangé.
Je viens de m'apercevoir que je commence à avoir beaucoup de fans, même si elles ne s'expriment pas toujours à chaque nouvelle mise à jour. Alors, les filles, je vous remercie toutes de votre soutien et de vos encouragements, même quand ils ne sont pas écrits. C'est pour vous et grâce à vous que je continue cette aventure. (Ca, si c'est pas de la promo TF1, je remballe mes crayons !)
Je vous embrasse. A la prochaine sur ce site et sur le groupe HRFRHO.
Nad.
