Bonsoir à tous ! Je tiens vraiment à m'excuser pour ce mois d'absence, le mois de mai fut très dense pour moi au niveau du boulot, mais je suis de retour ! Pour me faire pardonner, je vous propose cette fois-ci un long chapitre avec de l'action et du mystère, dans une ambiance ... aquatique. J'espère que ça vous plaira.

Bonne lecture à tous !


Chapitre 53

Hackmon sortit de la forêt et s'approcha du lac placide aucun souffle de vent ne ridait sa surface. La nuit sans lune donnait un aspect inquiétant à cette étendue d'eau aussi inerte que la mort. Soudain, une sphère lumineuse se matérialisa et éclaira le lac endormi : une brume vaporeuse et nacrée s'agitait en son sein.

– Alors ? demanda Hackmon.

– Ils savent, répondit la voix d'Homeostasis. Ils ont lu l'historique.

Hackmon fronça les sourcils.

– C'est une bonne chose. Ils devaient connaître la vérité.

Homeostasis ne répondit pas immédiatement. Hackmon fixa la sphère nébuleuse pendant quelques secondes, jusqu'à ce que la voix du dieu résonne, d'un ton grave et menaçant :

– Ils devaient la connaître, oui … mais pas pour nous trahir !

– Nous trahir ? Que veux-tu dire, Seigneur ?

– Ils veulent redonner vie à Meicoomon.

Hackmon tressaillit.

– Meicoomon est morte dans le monde réel, c'est impossible.

– Pas pour cet enfant nommé Koushiro ! Il est en train d'élaborer un programme qui pourrait bien fonctionner, et pour lequel il n'a pas hésité à violer les lois qui régissent l'ordre du digimonde.

– Qu'entends-tu par-là ?

– Il va recourir aux souvenirs de Meicoomon pour reconstituer son code source.

– Comment a-t-il récupéré ces données ?

– Grâce à Hikari, la jeune fille qui peut sentir ma présence mais qui se refuse à me laisser parler à travers elle. Elle a réussi à pénétrer la mémoire centrale …

– Impressionnant …

– Je ne te demande pas d'être en admiration devant ses pouvoirs ! Ce qu'ils sont en train de faire perturbe l'équilibre, on ne joue pas impunément avec la vie et la mort.

– Même s'ils parviennent à ramener Meicoomon, elle ne possèdera plus les données qu'Apocalymon lui avait transmises, car elles ont été détruites à la mort d'Ordinemon. Pourquoi serait-ce mal de la ressusciter ?

– Je suis celui qui garantit l'harmonie du monde digital et le cycle de la vie des digimons. Ces humains ne peuvent pas se substituer à moi ! C'est grâce à moi qu'Yggdrasil a pu être enfermé dans l'Océan des Ténèbres il y a douze mille ans, sans moi, les Jomons et toute l'espèce humaine auraient été éradiqués de la Terre.

– Ces enfants considèrent peut-être qu'il existe une autre manière de rétablir l'équilibre entre nos deux mondes, une manière qui impliquerait de troubler momentanément l'harmonie.

– Comment peux-tu dire une chose pareille, Hackmon ?

– Ce n'est pas parce que je suis ton plus fidèle serviteur que je ne réfléchis pas par moi-même. Pourquoi avoir donné le symbole de la justice à Meiko si tu ne croyais pas que Meicoomon puisse revenir ?

– J'espérais tisser avec elle le lien que j'ai perdu avec Hikari, afin de guider les Élus.

– Mais ton plan n'a pas fonctionné, tu es incapable de parler à travers Meiko. Réfléchis bien, seigneur : si ces enfants réussissent à ramener Meicoomon, cela pourrait jouer en notre faveur.

– Mais si ça n'est pas le cas, je t'avertis immédiatement : je n'hésiterai pas à prendre des mesures radicales.

:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::

Koushiro acquiesça, son téléphone collé à l'oreille.

– Oui, c'est ça, dans l'ordinateur de Mlle Himekawa. Tenez moi au courant si vous rencontrez des difficultés pour passer les différents niveaux de sécurité afin d'accéder au dossier concernant le reboot. Bon courage à vous aussi, M. Tagaya.

Il coupa la communication et rangea son téléphone dans sa poche, puis il mit passa la lanière de son sac à dos sur son épaule et descendit rejoindre ses amis qui l'attendaient à la sortie de l'hôtel. Malgré l'heure matinale, le ciel dégagé annonçait que la journée serait chaude, et l'humidité imprégnait déjà l'air. Il jeta un œil à sa montre : huit heures trente du matin. Le ferry pour l'île de Yonaguni partait à dix heures pile et ils devaient compter une heure de marche pour se rendre au port, de l'autre côté de l'île. Quand ils arrivèrent, le bateau avait déjà mouillé à quai. Ils validèrent leur billet dans une sorte de gare maritime qui disposait de plusieurs guichets, puis, ils s'avancèrent sur l'embarcadère : la mer translucide clapotait contre la coque du bateau. Le ferry comprenait deux étages couverts avec des sièges pour les voyageurs, ainsi qu'un passage extérieur permettant de s'avancer jusqu'à la proue ou de monter sur le pont supérieur. Ils montèrent à bord prirent place sur de confortables sièges bleus. À peine assis, Joe fouilla dans son sac et en sortit une petite plaquette de comprimés ronds. Il en décapsula deux et les avala avec une gorgée d'eau.

– Qu'est-ce que tu fabriques encore ? demanda Daisuke.

– Étant donné que la traversée va durer six heures, mieux vaut prendre quelque chose pour éviter le mal de mer.

– Le mal de mer ? Mais comment peux-tu avoir le mal de mer alors que ton partenaire est un digimon marin ?

– Je t'en pose, moi, des questions ?

– La traversée dure six heures ? s'étonna Yamato. Je ne pensais pas que c'était si long.

– C'est le seul ferry qui va à Yonaguni depuis l'île d'Ishigaki, déclara M. Nishijima, et il n'y a pas d'itinéraire plus rapide.

Koushiro avait ouvert son ordinateur sur ses genoux et s'était connecté à la salle des serveurs où avaient dormi leurs digimons.

– Quand est-ce qu'on pourrait sortir ? demanda Agumon. Je veux voir la mer, moi !

– Dès qu'on aura pris le large, déclara Iori, vous pourrez sortir si vous vous faîtes discrets.

À cet instant, le moteur du ferry se mit à vrombir et toutes les vitres vibrèrent. Le signal de départ retentit et les Enfants Élus sentirent que le bateau se détachait lentement de l'embarcadère, en soulevant de gros remous qui rappelaient le bouillonnement d'un jacuzzi. Peu à peu, la vitesse du ferry s'accrut.

– On peut sortir maintenant ! s'exclama Miyako.

Tous les Enfants Élus poussèrent la porte qui donnait sur le couloir extérieur et le remontèrent jusqu'à la proue. Là, Koushiro libéra tous les digimons. Gomamon sauta sur la rambarde et s'émerveilla en découvrant les flots que l'étrave du bateau fendait à vive allure.

– Waouh, toute cette écume, c'est beau !

– Ça me rappelle la première fois que nous avons quitté l'île des fichiers binaires sur le dos de Whamon et que nous avons traversé l'océan jusqu'au continent Serveur, se souvint Tentomon.

L'île d'Ishigaki devenait de plus en plus petite à mesure que le ferry prenait le large. Le vent battait les cheveux des adolescents et chargeaient l'air d'embruns. Le bateau prit de la vitesse, en provoquant de petits soubresauts.

– Je crois que je vais retourner m'asseoir à l'intérieur, dit Joe qui était devenu légèrement vert.

– Déjà ? s'exclama Gomamon. Je veux rester dehors, moi !

– Tu n'as qu'à aller avec Taichi.

– Je viens avec toi, lança Koushiro à Joe, suivi de Tentomon.

– J'ai vu qu'il y avait des tables à l'air libre, sur le pont arrière, signala Daisuke. On pourrait s'y installer et disputer une partie de cartes, j'ai emporté un jeu avec moi. Il va bien falloir s'occuper pendant six heures.

– C'est une très bonne idée, acquiesça Ken.

Iori, Miyako, Takeru et Hikari les suivirent.

– Moi, j'aimerais monter sur le pont supérieur, déclara Sakae.

– Moi aussi, acquiesça Taichi.

– Je viens avec vous, déclara Yamato.

Sora et M. Nishijima les accompagnèrent. Meiko semblait hésiter entre aller jouer aux cartes ou monter sur le pont supérieur.

– Meiko … tu veux venir avec nous ? lui demanda Taichi.

La jeune fille rosit légèrement et acquiesça :

– Oui !

Tandis que le premier groupe se dirigeait vers l'arrière du ferry, leurs digimons sur leurs talons, les autres gravirent les escaliers en fer qui conduisaient au pont supérieur. Agumon, Gabumon, Gomamon et Ryudamon les suivirent à pied, Piyomon en volant. Quand ils parvinrent en haut des marches, ils restèrent sans voix : la vue sur la mer y était encore plus dégagée et infinie qu'en bas. Tout au bout du pont se dressait la cabine de pilotage. Sakae, éblouie, fit glisser son sac à dos de ses épaules pour en extirper un carnet à dessin, se mit en tailleur et commença aussitôt à tracer une esquisse, Ryudamon à ses côtés. M. Nishijima s'accouda à la rambarde bâbord et Gomamon sauta près de lui :

– Ça vous embête si je me mets là aussi ?

– Non, pas du tout, répondit-il avec un sourire.

– Et moi aussi, je peux ? demanda alors Agumon en faisant de même.

– Bien-sûr ! rit le professeur.

Côté tribord, Yamato et Sora s'étaient penchés pour voir le sillon mousseux que leur bateau ouvrait dans l'eau. Yamato passa un bras dans le dos de Sora et la serra contre lui. Elle sourit et laissa sa tête reposer sur son épaule. Un peu plus avant, à tribord, Taichi contemplait l'océan aux côtés de Meiko. L'infini qui se déployait devant lui le grisait, car la brise salée réveillait en lui le goût de l'aventure. Cependant, cet horizon bleuté, sans limite, lui rappelait également l'immensité de la tâche qu'ils avaient encore à accomplir en tant qu'Enfant Élus. Il tourna la tête vers Meiko et vit qu'un voile de tristesse avait envahi son regard.

– Tu penses à Meicoomon ?

– Oui … j'aimerais tellement que Koushiro et M. Tagaya réussissent leur programme, mais je sais que je ne dois pas trop nourrir d'espoir. Si cela ne devait pas aboutir, j'ai appris à vivre avec l'idée que Meicoomon ne serait plus à mes côtés.

Taichi s'était subrepticement rapproché de la jeune fille. Doucement, il prit sa main dans la sienne. Meiko sursauta et sentit son cœur s'accélérer. Taichi se pencha alors vers elle et lui murmura :

– Quoiqu'il arrive, tu seras toujours une Enfant Élue. Je veux que tu en sois convaincue.

Meiko tressaillit et releva la tête vers Taichi, qui la dévisagea avec tendresse. Elle soutint son regard en silence, sourit, puis se tourna de nouveau vers la mer.

:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::

Daisuke, Ken, Miyako, Iori, Hikari, Takeru et Mimi jouèrent autant de parties de cartes qu'ils étaient de participants, et lorsqu'ils se lassèrent, ils décidèrent de faire un tour sur le ferry. Le ciel se couvrait de lourds nuages gris et la chaleur devenait plus étouffante. Ils croisèrent soudain Sakae, qui redescendait du pont supérieur, Ryudamon sur ses talons.

– Vous étiez là-haut depuis tout ce temps ? s'étonna Miyako.

– Oui, j'ai dessiné la vue sous plusieurs angles. Maintenant, j'aimerais faire plus d'esquisses du bateau, à plus tard !

À l'intérieur de l'espace couvert pour les passagers du premier étage, Koushiro soupira une énième fois et referma son ordinateur.

– Ça ne sert à rien, dit-il en relevant la tête vers Joe. Cela fait une demi-heure que j'ai perdu la connexion.

– Tant que nous étions près des côtes, tu devais encore capter, mais maintenant que nous avons pris le large ça doit être impossible.

À cet instant, une vive silhouette longea les vitres près desquelles ils étaient assis pour remonter vers la proue. Ils reconnurent Sakae, qui, avec son habituel entrain, se dirigeait à l'avant du bateau. Koushiro la vit s'asseoir, sortir un carnet de croquis et un crayon. L'adolescent, songeur, ne put empêcher son regard de s'attarder sur les traits plein de vie et de candeur de la jeune fille. Joe remarqua son air rêveur et le taquina :

– Tu sais, hier, tu aurais peut-être dû venir à la plage avec nous … en plus d'être dynamique, Sakae n'est pas mal du tout en maillot de bain.

Koushiro se sentit rougir et se retourna vers Joe.

– Mais dis donc, tu l'as observé, dis-moi ! Je me demande ce que dirait Chisako de tout ça …

– Voyons du calme, c'est juste une remarque objective.

À cet instant, quelqu'un cria :

– Regardez, c'est l'île de Yonaguni !

– Viens ! dit Joe à Koushiro en se levant.

Les deux adolescents sortirent à tribord et rejoignirent les autres Élus à la proue. Devant eux se dessinait une fine ligne brune de terre dentelée, et à mesure que le ferry s'en approchait, l'île prit du relief, ses promontoires rocheux se dressèrent sur la mer. Le bateau contourna la côte jusqu'à une baie dominée par un phare sous lequel se trouvait le port. Ils accostèrent à quatre heures pile de l'après-midi le soleil de fin de journée se rapprochait de l'horizon pour s'y abîmer, perçant les nuages de ses derniers rayons.

– Il fera nuit dans une heure, déclara M. Nishijima, et une grande partie de cette île n'est pas éclairée. Cela ne sert à rien de commencer nos recherches maintenant, allons plutôt nous reposer à l'hôtel.

– Ici aussi, l'Agence nous a réservé un hôtel ? s'ébahit Iori. Elle a vraiment de sacrés moyens.

– Disons qu'à côté du matériel informatique, un tel voyage n'est pas si cher, observa M. Nishijima. Pour autant, je ne pense pas qu'elle refinance de sitôt une équipée comme la nôtre.

Les Enfants Élus rirent et prirent la direction de l'hôtel.

:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::

Le lendemain, ils se levèrent de bonne heure et prirent un petit déjeuner copieux, puis ils quittèrent l'hôtel avec un sac à dos. Ils avaient convenu que les digimons resteraient dans l'ordinateur de Koushiro, sauf s'ils avaient besoin d'eux.

– Bon, comment procède-t-on ? demanda Yamato.

– D'abord, résumons les informations que nous possédons déjà, déclara Koushiro.

– Eh bien, nous savons que la capitale des Jomons a été bâtie sur cette île y a douze mille ans, débuta Ken. Les Jomons étaient alors la civilisation la plus avancée que la terre ait connue.

– À cette époque, continua Hikari, l'île était rattachée au reste du Japon et continent asiatique, avant la fin de la dernière période glaciaire.

– Et c'est dans un laboratoire de cette capitale que Gennai et son collègue ont créé le digimonde en utilisant l'énergie de la qualcorite, poursuivit Takeru.

– Donc, la qualcorite que nous cherchons doit encore se trouver sur l'île aujourd'hui, dit Daisuke.

– La question est de savoir où, acheva Joe, songeur.

– À mon avis, il faut nous éloigner du centre-ville, déclara Taichi. Si la qualcorite n'a jamais été découverte, c'est qu'elle n'est pas dans un lieu habité.

– Alors, commençons plutôt par la partie sauvage de la côte, proposa Miyako.

– Une minute, les arrêta Sora. La qualcorite pourrait-elle être enterrée ? Si c'est le cas, comment allons-nous la retrouver ?

– Je pense que nos digivices devraient réagir lorsque nous serons près d'elle, réfléchit Koushiro. Donc, si l'un de vous sent son digivice briller, c'est que nous approchons du but.

– Alors, en route ! décréta Daisuke.

Tous acquiescèrent et se mirent en marche. Ils suivirent une longue route qui s'élevait peu à peu depuis le port pour dominer des falaises couvertes de végétations. Leur flanc tombait à pic jusqu'aux rivages de sables gris sur lesquels les vagues marines se mourraient. Au-dessus des falaises, un vaste plateau couvert d'herbe verdoyante s'étendait à perte de vue. Quelques petites montagnes, au centre de l'île, dressaient leur sommet sous le ciel clair. À Yonaguni, il faisait presque aussi chaud qu'à Ishigaki, mais fort heureusement les adolescents avaient emporté des bouteilles d'eau. Ils se rendirent rapidement compte que l'île était en grande partie inhabitée. Ils passèrent devant un grand cimetière, dans lequel ils recherchèrent plus activement des traces de la qualcorite, sans succès. Ils poursuivaient leur chemin sous le soleil quand soudain, Meiko s'exclama :

– Regardez, des chevaux !

Elle avait raison : des chevaux ocres paissaient tranquillement sur le plateau qui surplombait la mer.

– Ils sont tous petits ! remarqua alors Sakae.

– Mais oui ! se rappela Iori. C'est la race propre à l'île de Yonaguni, un livre que j'ai lu le mentionnait.

Quand ils passèrent à hauteur des équidés, ils se rendirent effectivement compte qu'ils étaient à peine plus grands que des poneys.

– C'est marrant, fit Mimi.

Ils marchèrent pendant près de deux heures et demie sans que leurs digivices ne perçoivent la moindre présence de la qualcorite. Découragés, ils revinrent vers le port et achetèrent quelques sandwichs. Assis sur un muret face à la mer, ils mangèrent tout en réfléchissant.

– Ce qui est sûr, observa M. Nishijima, c'est que la qualcorite existe toujours, sinon le monde digital aurait disparu.

– Mais on a parcouru les deux tiers de l'île sans que nos digivices n'émettent le moindre signal, soupira Miyako. Même si elle s'était trouvée sous terre, on aurait dû la détecter.

– Logiquement, réfléchit Daisuke, elle devrait se trouver dans une partie ancienne de l'île.

Il remarqua alors deux hommes en train de discuter, des caisses de poissons à leurs pieds : des pêcheurs. Ils connaissaient sûrement bien l'île. Le jeune homme sauta sur ses pieds et alla à leur rencontre.

– Bonjour ! les salua-t-il avec un grand signe de la main. Avec mes amis, nous sommes des touristes de passages et nous ne connaissons pas bien Yonaguni. Peut-être pouvez-vous nous aider ?

– Que souhaitez-vous savoir ? lui demanda l'un des deux hommes.

– Quel est l'endroit le plus ancien de l'île ?

Les deux hommes échangèrent un regard, perplexes.

– Le cimetière, peut-être, plaisanta l'un des deux hommes. Sinon, on a un petit musée ethnographique, mais le reste de la ville n'est pas bien vieux.

– Après, marmonna le deuxième, ce n'est pas vraiment sur l'île, mais beaucoup de plongeurs se rendent sur la structure sous-marine de Yonaguni.

– La structure sous-marine de Yonaguni ? répéta Daisuke, intrigué.

– Oui, c'est une sorte de longue pyramide sous l'eau, mais les scientifiques ne sont pas d'accord pour dire si c'est une construction d'origine humaine ou naturelle. Un grand nombre d'entre eux pense qu'elle n'a pas pu être édifiée par l'homme, car elle aurait au moins dix mille ans d'existence, et à cette époque les humains ne savaient pas ériger de telles structures. En attendant, ça attire beaucoup les touristes qui font de la plongée sur le site.

Daisuke remercia les deux hommes et rejoignit ses amis.

– Nous n'avons cherché que sur l'île, mais nous avions oublié qu'il y a douze mille ans le niveau de la mer était bien plus bas qu'aujourd'hui !

– Évidemment ! acquiesça Taichi. La qualcorite, comme le reste de la capitale des Jomons, a été submergée …

– Et comme la qualcorite ne se corrode pas, cela ne l'a pas affectée, ajouta Koushiro, impressionné.

– Cette pyramide est sans doute celle de la capitale des Jomons, renchérit Daisuke. Les scientifiques disent qu'elle n'a pas pu être construite par l'homme car elle serait trop ancienne, mais nous savons que les Jomons étaient une civilisation très avancée avant le reboot de la Terre.

– Tu as raison, la qualcorite est forcément là-bas, murmura Hikari.

– Il faut absolument y aller, dit Iori.

– Est-ce que ces pêcheurs peuvent nous y emmener ? demanda Taichi.

– Ce serait peut-être mieux d'y aller par nos propres moyens ? souligna Joe. Si nous trouvons la qualcorite, mieux vaut que personne ne soit au courant de son existence.

– Oui, c'est vrai … mais aucun de nous ne sait conduire un bateau.

– Si, moi, déclara M. Nishijima. Enfin, un petit.

Tous les adolescents le regardèrent avec des yeux ronds, car ils n'arrivaient pas à imaginer leur professeur pilotant un bateau.

– Ça faisait partie de la formation tout terrain des forces armées dont dépend l'Agence, expliqua M. Nishijima comme s'il considérait lui-même cette compétence comme une bizarrerie.

– Bon, alors ça devrait le faire, décréta Taichi. Il doit bien y avoir de petits bateaux à moteur à louer dans les environs.

– Une chose encore, les interrompit Daisuke. Apparemment, les gens se rendent sur cette structure avec un équipement de plongée, car la pyramide se situe à trente mètres sous l'eau.

– Ne t'inquiète pas, le rassura Iori. Si Armadillomon se digivolve en Submarimon, nous pouvons nous charger des recherches.

– Malgré tout, ce serait bien que nous soyons plusieurs, souligna Sora.

– Gomamon aussi est un digimon aquatique, dit Joe. Je peux accompagner Iori si je dispose de matériel de plongée.

– Moi, je peux aussi y aller avec Sakae ! s'exclama Ryudamon.

– Nous ? s'étonna Sakae. Mais tu n'es pas un digimon aquatique, Ryudamon.

– Bien-sûr que si ! Même si je peux voler, les dragons ont toujours été des créatures aquatiques.

– Vraiment ? Dans ce cas, Joe, Iori, nous pourrions vous aider.

– D'accord, allons donc louer du matériel de plongée, déclara Taichi.

– Mais qui va payer ? demanda Yamato.

– L'Agence, pardi, répondit M. Nishijima avec un sourire.

:::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::

M. Nishijima tourna la clé de contact du grand zodiac : le moteur se mit à gronder et crachota de l'eau par ses circuits de refroidissement.

– Tout le monde à bord !

Sur la berge, Mimi ne pouvait contenir le fou rire qu'il l'avait saisie dès qu'ils avaient quitté la boutique de matériel de plongée. Joe, rouge comme une pivoine, n'y tint plus.

– Tu vas arrêter, oui ?

– Je … je n'y peux rien. Tu ressembles trop à un pingouin !

À ces mots, tous les Enfants Élus se retournèrent vers le jeune homme et l'observèrent des pieds à la tête : avec sa combinaison de plongée et sa capuche lui montait jusqu'au menton, Joe ressemblait effectivement à un pingouin. Un pingouin un peu engoncé dans ses plumes le masque qui pendait à son cou n'arrangeait pas les choses. Joe, dépité, se pencha pour attraper le gilet sur lequel était attachée sa bouteille d'oxygène.

– En attendant, ce n'est pas vous qui avez dû mémoriser à toute vitesse comment fonctionne ce machin !

– J'ai tout écrit sur un papier pour le relire, dit alors Sakae en les rejoignant.

La jeune fille portait également une combinaison, un gilet et une bouteille, mais elle avait laissé ses cheveux à l'air libre. Koushiro ne put s'empêcher ce noter que ce vêtement soulignaient toutes ses formes … il se sentit brusquement rougir, secoua la tête et se reconcentra sur son ordinateur pour faire sortir Gomamon, Ryudamon et Armadillomon de la salle des serveurs.

– Tu sais, Joe, lança Yamato à son ami, tant que nous ne sommes pas sur place, tu peux enlever ta capuche. Après, ce n'est que mon avis …

– Ah bon, si tu le dis, marmonna Joe, un peu dubitatif sur sa capacité à remettre sa capuche en place une fois qu'il serait à bord.

– Bon, on y va ? dit Takeru.

Tous les adolescents retirèrent leurs chaussures, remontèrent leur pantalon jusqu'aux genoux puis grimpèrent dans le zodiac qui pouvait contenir jusqu'à vingt personnes. Iori était resté en short et en tee-shirt, car grâce à son digimon il n'aurait pas besoin de combinaison de plongée. M. Nishijima tourna le gouvernail : le semi-rigide bondit en avant et ils s'éloignèrent de la plage. Ils contournèrent l'île afin de se rendre sur le site que leur avait indiqué les pêcheurs, et ne tardèrent pas à arriver en vue du relief décrit par les deux hommes.

– Voilà, ça devrait être par ici, déclara M. Nishijima en coupant le moteur.

Les Enfants Élus se penchèrent sur l'eau bleue.

– On ne voit rien, dit Mimi.

– C'est normal, si la pyramide se trouve à trente mètres de profondeur, déclara Ken.

– Bon, je pense qu'il est temps d'y aller, déclara Iori en se levant. Armadillomon, tu es prêt ?

– Quand tu veux, Iori !

Le jeune garçon brandit son digivice et cria :

– Hyper-digivolution !

Le corps d'Armadillomon s'illumina et le digi-œuf de la responsabilité lui permit d'évoluer pour devenir Submarimon, le digimon des profondeurs. Le grand espadon robotique aux deux paires d'ailerons latéraux se jeta à l'eau son long bec était hérissé de pointes comme un harpon.

Submarimon fit glisser le verre de la capsule qu'il portait sur son dos afin de permettre à Iori de s'y allonger à plat ventre. Puis, il referma la vitre et plongea.

Pendant ce temps Joe avait lui aussi sorti son digivice pour permettre à Gomamon d'évoluer en Ikkakumon. Il attacha son gilet, chaussa ses palmes, plaça son masque sur son visage et son détendeur dans sa bouche, puis il enjamba le boudin gonflable du bateau et se jeta à l'eau. La température de la mer était agréablement douce en ce mois d'août. Il appuya sur le bouton qui permettait de gonfler son gilet afin de ne pas sombrer. L'air le remplit immédiatement et le fit remonter : Joe ressortit la tête de l'eau et lança :

– Sakae, reste ici pour le moment. On va faire une première prospection avec Iori, et si on a besoin de ton aide, nous te ferons signe.

– D'accord, acquiesça la jeune fille.

Joe remit l'embout de son détendeur dans sa bouche et dégonfla son gilet. En quelques secondes, il disparut sous la surface.

Il descendit graduellement de plusieurs mètres finalement, ce matériel de plongée n'était pas si compliqué à manier. Pendant plusieurs secondes, il ne vit rien d'autre que le bleu intense de la mer : au-dessus de sa tête, autour de lui, sous ses pieds, le bleu sans horizon l'entourait, l'enveloppait, traversé parfois par quelques rayons de soleil qui se faisaient de plus en plus ténus à mesure qu'il s'aventurait vers les profondeurs. Seules les bulles qu'il expirait troublaient le silence de cet univers si différent du monde terrestre. Soudain, il repéra Ikkakumon qui se trouvait déjà bien plus bas que lui. Joe se renversa tête vers le bas et battit des pieds. Peu à peu, il commença à distinguer une forme massive sous lui.

Une imposante construction de pierre se révéla alors dans l'atmosphère trouble du fond marin : elle paraissait mesurer des dizaines de mètres de hauteur, à tel point que Joe eut l'impression d'atterrir sur le toit d'un palais. Sa forme rectangulaire s'étageait en trois terrasses auxquelles des escaliers latéraux donnaient accès et tout l'édifice était couvert de mousse. Joe remarqua à cet instant que Submarimon et Iori naviguaient déjà autour de la pyramide. Il les rejoignit avec Ikkakumon, et lorsqu'ils se trouvèrent au pied des murs de la structure de Yonaguni, ils mesurèrent toute la hauteur et la majesté qu'elle devait posséder lorsqu'elle était encore émergée. Submarimon lança à Ikkakumon :

– Iori me dit que les parois sont trop lisses pour être le fruit de la nature. Cette pyramide est bien celle de la capitale des Jomons.

Joe acquiesça. La qualcorite devait forcément se trouver quelque part, peut-être à l'intérieur. Il sortit son digivice de la poche de son gilet et nagea jusqu'à Submarimon. Il montra l'appareil électronique à Iori pour l'inciter à sortir le sien. Le jeune garçon, à plat ventre dans la capsule, acquiesça et le plaça devant lui.

– Maintenant, dit Submarimon à Ikkakumon, séparons-nous en deux groupes et menons des recherches.

Submarimon partit sur la gauche, tandis que Joe prenait à droite avec Ikkakumon. Des poissons de toutes tailles les entouraient, évoluant avec tranquillité dans ce monde aquatique qui étouffait les sons du monde extérieur. À l'intérieur de la capsule, Iori leva soudain un doigt :

– Regarde Submarimon ! Là, il y a une faille qui permet d'entrer par le haut entre les murs de la pyramide. Tu peux t'en approcher ?

– Pas de problème !

Submarimon donna un coup de nageoire vers la droite et piqua vers la brèche. Entre les murs de la pyramide, il faisait plus sombre. La fissure dans laquelle ils avaient pénétré formait un long couloir rectiligne qui traversait toute la pyramide. Iori jeta un œil à son digivice : il n'émettait toujours aucune lumière. Soudain, le passage qu'ils suivaient se rétrécit en un goulot d'étranglement. Submarimon s'immobilisa :

– Aïe … je risque de ne pas pouvoir aller plus loin … je suis trop gros pour passer dans ce trou.

– C'est vrai, reconnut Iori. Allons chercher Joe, lui ne porte que sa bouteille sur le dos, il devrait pouvoir passer.

Ils ressortirent de la faille et passèrent au-dessus de la pyramide afin de retrouver le jeune homme. Ils tournèrent pendant plusieurs minutes autour de la structure sans ne discerner rien d'autre que des poissons. Soudain, Submarimon s'exclama :

– Je vois Ikkakumon !

En effet, il se trouvait plus haut qu'eux, en compagnie de Joe. Ils observaient un relief sur l'un des étages de la pyramide, qui rappelait une tortue. « Une sculpture de l'époque Jomon », devina Iori. Submarimon rejoignit Joe et Ikkakumon, puis leur exposa la découverte qu'ils venaient de faire avec Iori.

– Vous avez raison, Joe pourra sûrement se glisser dans ce trou, acquiesça Ikkakumon. Allons voir.

Tous nagèrent en direction de la faille et la remontèrent jusqu'au goulot d'étranglement. Joe observa l'étroite fente, puis acquiesça. D'un coup de palme, il se faufila à l'intérieur quand il émergea de l'autre côté, il se retrouva face à deux mégalithes d'impressionnantes dimensions.

L'un avait été érigé contre le mur de la pyramide, l'autre collé à lui, et seule une fine fente les séparait. Il leva la tête : l'espace n'était pas fermé, Ikkakumon et Submarimon devaient donc pouvoir passer par-dessus la faille pour le rejoindre. Au même moment, un faisceau de lumière attira son attention. Il baissa les yeux vers son gilet et sentit son cœur s'accélérer : une lueur filtrait à travers l'une de ses poches. Il l'ouvrit et en sortit son digivice, qui brillait intensément la qualcorite devait être toute proche. Il fit demi-tour, rejoignit ses compagnons et leur montra fébrilement son digivice, dont la lueur papillotait légèrement. Les yeux de Iori s'écarquillèrent et il acquiesça. Joe leur fit signe de passer au-dessus de la faille et de le rejoindre de l'autre côté ils s'exécutèrent et découvrirent alors les mégalithes. Au même moment, le digivice de Iori s'illumina à son tour.

– Nous touchons au but, confirma Ikkakumon.

Tous s'approchèrent des mégalithes et les observèrent attentivement. Iori songea que la fente entre les deux pierres pouvait rappeler la rainure entre les deux battants d'une porte. Et si … s'il s'agissait de la porte qui menait à la qualcorite ?

– Submarimon, dis à Joe de coller son digivice contre la pierre ! lança Iori à son digimon.

Submarimon transmit le message et Joe fit tout de suite un essai : à peine avait-il posé son digivice sur la fente qu'un crissement résonna. Lentement, les deux mégalithes s'écartèrent ... et derrière ces battants préhistoriques apparut un tunnel, obscur et étroit, qui avait l'air de s'enfoncer sous la pyramide. Son diamètre n'était pas large, un mètre ou deux tout au plus. Joe songea que s'il pouvait passer, Ikkakumon et Submarimon ne pourraient jamais le suivre dans souterrain sinueux. Les digimons semblaient eux aussi mesurer l'ampleur du problème. Rentrer seul dans ce boyau n'inspirait pas confiance à Joe. Il montra la surface à Ikkakumon, Submarimon et Iori : il voulait remonter pour leur parler. Ses amis hochèrent de la tête nagèrent vers la surface, en faisant un bref palier de décompression.

Quand ils firent irruption hors de l'eau, tous les Enfants Élus se penchèrent avec avidité vers eux.

– Alors ? demanda Daisuke.

– Je pense qu'on l'a trouvée, dit Joe. Nous nous sommes aventurés dans une faille au-delà de laquelle se trouvent deux mégalithes accolés l'un à l'autre. Le digivice de Iori et le mien se sont illuminés dès que nous nous en sommes approchés. Ces énormes pierres forment une porte derrière laquelle se trouve un tunnel qui s'enfonce sous la pyramide.

– La qualcorite doit être au bout ! s'exclama Taichi.

– L'ennui, ajouta Submarimon, c'est que ce tunnel est tortueux. Ikkakumon et moi ne pas y pénétrer.

– Et si vous ouvriez davantage le passage grâce à vos attaques ? suggéra Yamato.

– Surtout pas ! s'exclama Koushiro. La pyramide pourrait s'effondrer sur elle-même.

– Si je me digivolve en Hisyaryumon, mon corps devrait être assez souple pour m'y glisser, proposa alors Ryudamon.

– J'ai eu la même idée, dit Joe. Sakae, Ryudamon, nous allons avoir besoin de votre aide.

– D'accord, acquiesça la jeune fille en sortant son digivice. Ryudamon, tu es prêt ?

Le petit digimon hocha la tête et le digivice de Sakae s'illumina. Le corps de Ryudamon se mit à grandir, une armure noire recouvrit son dos et ses pattes : Ginryumon apparut. Puis, le symbole de Sakae brilla et Ginryumon accéda au stade ultime : Hisyaryumon, le dragon rougeoyant au casque de samouraï, plongea dans la mer.

Sakae se jeta à son tour à l'eau et gonfla son gilet. Puis, elle mit son détendeur dans sa bouche.

– Prête ? lui demanda Joe.

– Prête !

Ils mirent leur détendeur dans leur bouche et s'immergèrent en même temps que Iori et Submarimon. Ensemble, ils redescendirent vers la faille. Joe passa le premier dans le goulot d'étranglement, suivi de Sakae et d'Hisyaryumon. Ikkakumon, Submarimon passèrent par-dessus la paroi. Dès qu'ils se trouvèrent de l'autre côté, les digivices des trois adolescents se mirent de nouveau à scintiller. Joe indiqua à Sakae la porte mégalithique, puis le tunnel qui entrait sous la pyramide. Celle-ci se tourna vers son digimon. Hisyaryumon inclina la tête.

– Allons-y. Joe, Sakae, suivez-moi.

Le dragon ondula son long corps et pénétra dans le tunnel. Joe et Sakae agitèrent lentement leurs palmes pour le suivre. À l'intérieur du boyau, aucune lumière ne filtrait. Heureusement, les sphères émeraude et vermillon qu'Hisyaryumon tenait entre ses griffes éclairèrent leur chemin. Ils suivirent l'étroit tunnel pendant plusieurs minutes, dans la semi-obscurité. Soudain le corps d'Hisyaryumon disparut et le boyau s'élargit.

Sakae et Joe débouchèrent dans une vaste salle de pierre sombre. Du matériel électronique corrodé par l'eau et le temps tapissait le sol et la mousse sous-marine recouvrait tous les murs, à l'exception d'un pilier appuyé contre la paroi centrale. Dans cette colonne lisse à l'aspect cuivré avait été percée une alcôve circulaire, fermée par une petite vitre, où flottait une boule polie de métal qui scintillait comme de l'or. « La qualcorite ! » pensèrent Joe et Sakae en même temps. Ils sortirent leur digivice : ils brillaient plus intensément que jamais. Hisyaryumon s'approcha du pilier et frappa délicatement la vitre de la niche avec sa queue. Le verre se brisa, donnant accès à la qualcorite. Joe s'en saisit et la retira de l'alcôve.

Au même instant, un grondement résonna tout autour d'eux. L'eau amplifia le son qui devint rapidement assourdissant et des fissures lézardèrent les murs de la salle dans laquelle ils se trouvaient. L'ancienneté de la pyramide et la pression de l'eau accéléra le processus : des pierres commencèrent à se détacher du plafond et des parois. Sakae et Joe écarquillèrent les yeux, paniqués.

– Vite, sortons d'ici ! s'exclama Hisyaryumon.

Joe et Sakae palmèrent à toute vitesse vers le tunnel. À ce moment, un bloc tomba du plafond et obstrua l'entrée du passage. « Pas ça ! » pensa Joe intérieurement. Hisyaryumon se plaça au-dessus des adolescents pour les protéger des éboulis ils devaient sortir coûte que coûte. Joe saisit son digivice et le serra fermement.

De l'autre côté du tunnel, le grondement parvint aux oreilles de Submarimon et d'Ikkakumon.

– Il se passe quelque chose, dit Iori anxieux.

À cet instant, le corps d'Ikkakumon s'illumina. Le digimon sentit un flot d'énergie l'envahir et déclara :

– Joe est en danger. Ils ont besoin de nous.

Il sentit alors son corps croître, ses muscles se développer, un marteau apparaître dans sa main. Il évolua en Zudomon, puis se tourna vers Submarimon :

– Il faut dégager ce tunnel.

– D'accord, acquiesça Iori.

Zudomon prit un peu de recul et lança de toutes ses forces son marteau contre la paroi de la pyramide :

– Marteau vulcain !

– Torpille oxygène ! visa à son tour Submarimon.

Les attaques s'engouffrèrent à l'intérieur du tunnel, faisant s'écrouler plus encore le passage.

– Arrêtez ! s'effraya Iori. On ne fait qu'aggraver les choses !

– Il n'y a pas d'autre solution, il faut faire une percée qui leur permette de sortir, répliqua Zudomon.

Dans la salle souterraine, les murs se craquelaient, les pierres pleuvaient de toutes parts. Hisyaryumon concentrait toutes ses forces afin de protéger Joe et Sakae, mais les forces commençaient à lui manquer.

– Il ne faut surtout pas que la qualcorite soit touchée, dit-il, ou le monde digital pourrait disparaître.

Une pierre érafla soudain Joe, l'entraînant vers le sol. La violence du coup lui fit lâcher la qualcorite, qui rebondit sur les dalles de pierre. Sakae, paniquée, nagea jusqu'à la boule dorée et la récupéra à temps. Elle rejoignit Joe, qui semblait un peu sonné, mais il retrouva rapidement ses esprits. Sakae se rendit alors compte que sa bouteille d'oxygène avait été cabossée et remarqua un filet de bulle, qui s'échappait de l'enveloppe en métal. Une fuite ! Sakae saisit le manomètre accroché au gilet de Joe, qui permettait de vérifier la pression et la quantité d'oxygène disponible dans la bouteille. La flèche du compteur chutait à toute vitesse. Affolée, elle montra le manomètre à Joe, qui comprit à son tour. Il ne pourrait bientôt plus respirer. Hisyaryumon l'avait lui aussi compris. Il lança ses boules d'émeraude et de vermeil vers le tunnel dans une tentative désespérée pour ouvrir un passage.

À l'autre bout du boyau, Zudomon et Submarimon déployaient toutes leurs forces pour tenter de sauver leurs amis avant qu'il ne soit trop tard. Après avoir lancé ses bulles sous pression, Submarimon forait maintenant directement la paroi avec son nez dentelé. Mais plus ils s'acharnaient, plus le souterrain s'effondrait.

Joe sentait qu'il devait faire de plus en plus d'efforts pour respirer l'air commençait à lui manquer. La qualcorite dans une main, Sakae attrapa Joe de l'autre. Elle retira le détendeur de sa bouche et l'amena vers celle de Joe : elle voulait partager son air avec lui. Joe le comprit et saisit l'embout. Il aspira une grande goulée d'air, pendant que Sakae retenait son souffle, puis, la jeune fille reprit son détendeur et respira à nouveau. Ils échangèrent plusieurs fois afin que Joe économise son air, cependant, Sakae savait qu'ils ne tiendraient pas très longtemps avec ce stratagème.

Soudain, dans le vacarme tonitruant de l'effondrement, deux sons différents leur parvinrent. L'un émettait un bruit métallique contre la pierre, l'autre évoquait le tressautement une scie sauteuse. Le bloc qui obstruait le tunnel fut brusquement expulsé par les attaques de Zudomon et de Submarimon. Joe, Sakae et Hisyaryumon s'écartèrent juste à temps, tandis que les deux digimons remontaient le tunnel à toute vitesse pour émerger dans la salle voûtée.

– Vite ! leur lança Hisyaryumon. Joe a une fuite dans sa bouteille, remontez-le à la surface !

L'oxygène n'arrivait déjà plus aux poumons de Joe depuis plusieurs secondes. Il retint sa respiration alors que Zudomon le prenait dans ses bras et pria pour que la remontée soit rapide. Submarimon, lui, zigzaguait pour éviter les éboulis.

– Submarimon, remonte-toi et met Iori à l'abri ! lui lança Hisyaryumon. Sakae, viens, dépêchons-nous !

La jeune fille acquiesça et donna un grand coup de palme. À cet instant, tout un pan de mur s'écroula et elle dut s'écarter de justesse pour ne pas être écrasée. Dans sa frayeur, la qualcorite lui échappa pour rouler au sol. « Non ! » pensa-t-elle intérieurement. Elle repiqua tête la première vers la boule et l'attrapa. Au même moment, un rugissement de pierre retentit autour d'eux comme un ouragan. La pyramide tout entière se fissura et commença à s'écrouler sur elle-même.

– Sakae ! s'écria Hisyaryumon.

Il fit demi-tour et se lova au-dessus de la jeune fille pour la protéger. Les pierres tombèrent sur son armure, l'endommagèrent, la brisèrent, écrasèrent le dragon. Hisyaryumon, voulut résister, mais les pierres eurent raison de lui : cette pyramide était trop grande, trop lourde, le poids était trop important, il ne pourrait jamais y survivre. Il se recroquevilla sur Sakae pour la préserver coûte que coûte. Au même moment, le digivice et le symbole de la jeune fille irradièrent d'une lumière incandescente.

Terrifiés, Iori et Submarimon s'étaient écartés de la pyramide de Yonaguni qui s'effondrait avec un grondement de bateau avalé par les profondeurs de l'océan.

– Tu les vois Submarimon ? demanda Iori à son partenaire, paniqué.

– Non, je ne vois rien …

Les pierres continuaient de s'affaisser les unes sur les autres, détruisant totalement la salle souterraine dans laquelle se trouvait la qualcorite.

– Ils ne peuvent pas … murmura Iori, sans oser terminer sa phrase.

À cet instant, un grondement plus puissant encore que celui de l'effondrement se propagea dans la mer en ondes vibrantes. Le toit de la structure de Yonaguni fut brusquement pulvérisé : les pierres jaillirent comme une éruption sous-marine. Une immense créature jaillit alors des profondeurs de la pyramide : son corps scintilla de toute part dans la lumière pâle et dansante de l'océan. Iori et Submarimon découvrirent alors un grand dragon aux écailles dorées, la tête recouverte d'un kabuto orné de plumes violettes. L'impressionnant digimon déploya ses bras au bout desquels il tenait deux immenses sabres, avec lesquels il avait brisé le toit de la pyramide. Sa queue se terminait en une hache dorée à crochet et des protections d'armure samouraï couvraient ses épaules. Ses yeux luisaient du même vert que ceux d'Hisyaryumon.

– C'est le digimon de Sakae ! s'exclama Submarimon. Il s'est digivolvé !

– Où est Sakae ? fit Iori, inquiet.

– Dans ses bras !

Il avait raison : le dragon doré tenait sur sa patte droite le corps inanimé d'une jeune fille, et dans sa gueule miroitait une petite boule de métal poli.

– La qualcorite ! s'exclama Iori, soulagé.

Le grand dragon remonta alors vers la surface Submarimon mit plein gaz pour le suivre.

Sur le bateau semi-rigide, les Enfants Élus avaient vu avec inquiétude la mer se mettre à bouillonner tout près d'eux : il se passait quelque chose sous l'eau. Inquiets, ils tous se penchèrent.

– Digimon aquatique ou pas, s'ils ne remontent pas dans la minute qui vient, j'y vais, déclara Taichi.

– Attends, l'arrêta Yamato.

À cet instant, Zudomon surgit, Joe dans ses bras. L'adolescent, qui avait été sur le point de se noyer, reprit une énorme goulée d'air frais. Zudomon rejoignit l'île de Yonaguni à la nage et déposa Joe sur le sable. Quelques secondes plus tard, l'eau s'agita à nouveau : Submarimon émergea à son tour, Iori dans sa capsule.

– Vous allez bien ? Où sont Sakae et Hisyaryumon ? lui lança Daisuke.

Un soulèvement d'eau gigantesque lui répondit, tel le jaillissement d'un geyser. Un dragon doré, qu'aucun des Enfants Élus n'avait encore jamais vu, creva la surface. Il déploya des ailes noires à l'aspect métallisé et s'envola au-dessus de l'eau. Tous reconnurent Sakae, qu'il tenait contre lui. Le dragon gagna la plage de Yonaguni où il déposa délicatement la jeune fille.

– Rejoignons-les ! s'exclama Koushiro.

M. Nishijima mit le moteur en marche et ils gagnèrent la côte. Submarimon les suivit et déposa Iori sur le sable, avant de se retransformer en Armadillomon. Tandis que les Enfants Élus débarquaient, Sakae reprit peu à peu connaissance. Elle se redressa, pantelante, cligna des yeux. Puis, elle leva la tête vers son digimon. Elle écarta quelques mèches trempées de son front et le dévisagea avec stupeur :

– Hisyaryumon ?...

– Je devais te protéger, Sakae, murmura-t-il, et pour cela je devais devenir plus fort. Je suis Ouryumon à présent.

– Ouryumon, répéta-t-elle, impressionnée.

Le dragon inclina alors la tête et ouvrit lentement la gueule : la boule de qualcorite y reposait, intacte.

– Vous l'avez trouvée ! s'exclama Daisuke, avec un grand sourire.

– Incroyable, murmura Hikari.

– Bien joué, les gars ! les félicita Taichi.

– Que s'est-il passé sous l'eau ? demanda Miyako.

– La pyramide s'est effondrée, expliqua Iori.

– Quoi ? Effondrée ? répéta Takeru.

– Dès que nous avons touché la qualcorite, tout a tremblé, et les murs ont commencé à se fissurer, déclara Sakae. L'une d'elle a éraflé Joe et a percé sa bouteille d'oxygène.

– Heureusement, Zudomon t'a remonté à temps, lui dit Takeru.

– Oui, acquiesça Joe en se relevant, le souffle court.

Il adressa un regard à son partenaire, dont le corps s'illumina pour redevenir Gomamon. Joe le prit dans ses bras.

– Merci, tu m'as sauvé la vie.

– Il faut bien que quelqu'un t'empêche de faire des bêtises, dit Gomamon en rougissant légèrement.

– Et toi, Sakae, pourquoi es-tu restée bloquée sous l'eau ? demanda Meiko à sa sœur.

– En sortant de la salle souterraine, répondit la jeune fille, j'ai dû éviter un éboulis et la qualcorite m'a échappée. Hisyaryumon a voulu me protéger, mais la pyramide était si lourde, si colossale …

– C'est alors qu'il s'est digivolvé ? comprit Mimi.

– Oui, confirma la jeune fille.

– C'est fascinant, dit Koushiro.

– Merci, Ouryumon, souffla Sakae. Sans toi, nous n'aurions pas récupéré la qualcorite.

– Pour moi, le plus important est que tu sois saine et sauve, répondit gravement le dragon doré.

À cet instant, son corps s'illumina, et il régressa. Quand la lueur qui l'enveloppait s'éteignit, un petit digimon se trouvait au pied de Sakae. Les yeux de la jeune fille s'écarquillèrent :

– Tu n'es pas redevenu Ryudamon ?

– Non, dit le petit digimon, après une telle digivolution j'ai besoin de me régénérer en revenant au stade bébé : je m'appelle Kyokyomon.

– Il est trop mignon ! s'exclama Mimi.

Sakae prit Kyokyomon dans ses bras, attendrie. Les autres Enfants Élus reportèrent alors leur attention sur la boule dorée qu'ils avaient tirée des eaux. Taichi se pencha et la ramassa délicatement :

– Merci à vous tous. Merci pour votre courage et votre détermination. Nous avons enfin trouvé la qualcorite.

– C'est incroyable de se dire que cette simple boule permet au digimonde d'exister depuis douze mille ans, observa Sora, songeuse.

– Cette sphère ne fonctionne pas toute seule, mais en résonnance avec son double qui se trouve dans le digimonde, rappela Iori.

– En tout cas, Yggdrasil ne pourra plus s'emparer de celle-ci, dit Yamato.

– Nous allons devoir la protéger, dit Daisuke.

– Dans ce cas, rapportons-la à l'Agence, déclara M. Nishijima. C'est l'endroit où elle sera le plus en sécurité.