Être en retard devient une habitude, désolée. Bon, j'ai une bonne raison, le travail est assez prenant pour moi en ce moment. Mais ça devrait déjà être beaucoup mieux la semaine prochaine. Enjoy ! Merci pour les reviews ça me fait chaud au cœur !
Chapitre 3 : thé russe
Des gens s'agglutinent contre la fenêtre, grattant la glace, leurs visages sont écrasés contre le verre. Leur portable sortit pour prendre des photos ou faire des stories. On se croirait dans un film de zombie. Sans contagion.
Aphrodite dévoile une jambe décorée d'une jolie basse résille et la lève vers le ciel en vraie pinup. Puis, il envoie un baiser. Il ne fait rien de plus pour leur signaler qu'il a remarqué leur présence. Discuter sans s'arrêter dans la direction de Camus semble bien plus intéressant. Celui-ci par miracle (ou habitude) parvient à travailler dans ces conditions.
Les accoutrements les plus délirants vont bien à Aphrodite.
La célébrité craqua au bout de six jours d'anonymat scrupuleux et débarqua un beau matin avec un tutu rose et une veste en jean, le visage découvert. Il aurait trouvé trop « étouffant » de dissimuler sa beauté. (Ce sont ses propres mots, cringe Milo).
Depuis, son déguisement d'homme invisible traine sans doute quelque part dans une garde-robe de la taille de l'appartement de Milo et d'Aiolia. Une autre nouveauté intéressante accompagne ce changement : une silhouette intimidante, dans son costume de pingouin, protège Aphrodite. Indissociable de la célébrité comme une fidèle ombre.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, Camus ne semble pas trop déphasé par cet ami si extravagant qui ne rate jamais une occasion de se faire remarquer. Comment ces deux êtres si différents arrivent-ils à être proches ?
Ce n'est pas la première fois que Milo est intrigué par le fonctionnement de Camus. Il a l'air de protéger son calme avec la force d'une ourse envers ses petits, tout en acceptant sans discernement ses proches. C'est curieux. Mystérieux.
Un boom contre l'une des vitres fait sursauter Milo. Un des fans a dû glisser et s'est probablement fait mal. Mais il n'y a pas de sang… heureusement, ça aurait pris du temps à nettoyer et aussi le pauvre gars ne mérite pas ça. Milo se demande si son ex est parmi cet attroupement. Il espère que non ! Il ne veut surtout pas la croiser depuis qu'elle lui a envoyé sur l'app : « je t'ai vu te barrer avec une mocheté aux cheveux teintés. » Il l'a bloquée depuis.
L'intimidant vigile de la Fashion Week est assis à une table où il peut à la fois surveiller l'entrée et s'assurer que son patron n'a besoin de rien. Milo ne sait pas quoi penser de lui, il a l'air quelconque, presque invisible. Pourtant ce matin, il a démonté le bras d'un paparazzi juste devant la porte du café.
Après l'incident, Aiolia l'aurait sans doute flanqué dehors si Aphrodite n'avait pas remué ses lèvres pulpeuses comme s'il allait gémir : « Je ne pourrai plus venir si vous le jetez dehors… s'il vous plaît ! Tolérez-le. »
La panique avait complètement submergé Aiolia, car des larmes de crocodile s'étaient déversées sur les joues rondes d'Aphrodite : « Vous m'empêcheriez de passer du temps avec mon meilleur ami que je ne vois jamais ? Et que j'aime ! Vous seriez assez cruel ? »
« Ne me mêle pas à tes histoires, Aphrodite. » Avait déclaré Camus sans lever les yeux de son ordinateur.
« S'il vous plaiiiit ! » avait insisté Aphrodite une dernière fois. Milo aurait juré entendre des trémolos dans sa voix !
« Et l'oscar du meilleur rôle masculin revient à… » déclara Camus sans émotion jusqu'à ce qu'il lève la tête d'un air entendu dans la direction d'Aphrodite. Milo n'avait pas retenu son rire en voyant l'air scandalisé d'Aiolia. Le pauvre avait totalement marché au point d'éprouver de la culpabilité !
Même Shura avait esquissé un sourire.
Milo a de grosses journées. Depuis l'arrivée de la célébrité, le café ne désemplit plus. Son long ongle peint en rouge claque contre la machine à café de manière répétitive. Il sait qu'ils ont besoin de ces clients, ils sont sortis de la saison touristique. Jusqu'au mois de novembre et la venue du froid, ils ont tous les trois bien besoin de cet argent.
« Umh. » Voilà Camus au comptoir. Il reconnait sa voix instantanément, comme soumis à une expérience pavlovienne ; heureusement, il ne salive pas. Cependant, il se redresse.
Son corps, lui, n'est pas tout à fait d'accord : ses mouvements sont saccadés par la fatigue.
« Qu'est-ce que je peux te servir, Elsa ? » Demande-t-il, sans même se retourner. Il n'est pas sûr d'avoir envie de se montrer sous son pire jour.
« Je crois que quelqu'un a renversé du café sur le trottoir dehors. Viens avec moi. Je vais te montrer les dégâts.
- Camus ne t'inquiète pas, ça va sécher.
- Les gens vont penser que le café est sale. »
Le fait que Camus insiste est ce qui pousse Milo à se retourner. Camus est toujours poli.
Des yeux intenses, river sur lui, l'accueil comme si Camus voulait lui faire passer un message.
« Je te suis. » Se désespère Milo, qui ne comprend décidément rien à cet être étrange.
Une fois dehors Camus marche avec détermination jusqu'à l'arrière du café. Ils sont dans une petite ruelle isolée où personne jamais ne passe.
« Bah ! » S'exclame Milo, et pour la première fois, il se demande si Camus ne se fiche pas de lui. « Mais il n'y a rien ici ! »
« Tu te trompes. » Explique Camus. « Ici se trouvent ta pause de quinze minutes et la mienne. Je n'en peux vraiment plus… »
Milo pendant un instant est bouche bée.
« Mais… et ton ami ? Tu ne vas pas le laisser tout seul ?
- Ne t'inquiète pas. Si je ne l'avais pas fait, il me l'aurait soufflé. Il n'en a pas l'air, mais il a de bonnes notions de mes besoins, du point de vue de mon espace vital. Parfois, tout ce qui gravite autour de lui peut être étouffant, et il en a conscience.
- Vous avez une amitié mature. » Déduis Milo avec envie.
Milo a très peu d'amis. Ils se comptent sur les doigts d'une main et même avec eux, il garde toujours une petite distance de sécurité. D'ailleurs, Kanon a disparu depuis des mois, ce n'est pas surprenant avec son travail, mais Milo aimerait parfois avoir plus de nouvelles.
« Tout à fait. » Lui répond Camus avant de s'assoir sur le sol en tailleur. On dirait qu'il va méditer. Milo se croirait au cours de Yoga de Shaka… Camus n'a rien à envier à l'élégance du maître.
« Attention, les gens vont penser que c'est sale. » Se moque Milo, un doigt pointé vers le sol, avant de le rejoindre. Il a l'impression de se détendre, ses muscles se réveillent sous forme de courbatures, pourtant il n'en laisse rien voir. Il veut avoir l'air stylé lui aussi. Il lève la tête : au-dessus de lui, suspendu à un balcon, du linge sur un étendoir perché entre deux fenêtres est malmené par le vent.
On dirait qu'on retire toutes les heures de travail de Milo parce qu'il est comme parcouru des pieds à la tête par une eau bienfaisante.
Camus, de son côté, ne daigne pas lui répondre. La seule chose qui prouve qu'il a bien entendu la remarque est un sourcil relevé jusqu'à sa frange.
« Tu veux qu'on discute ? Si tu préfères, on peut juste… rester là à rien faire. » Demande Milo avant de le rejoindre au sol. Camus semble réfléchir, il replie ces jambes contre son torse et place ses mains sur ses genoux. Puis sa tête trouve un coin douillet sur elles. Une douceur est là, bien encrée, lorsqu'il lève les yeux vers Milo.
Lui, il a l'air malin à le fixer comme un stalker. Peut-être est-il envoûté ? Camus est un peu magicien.
« Pas si tu es trop fatigué.
- Jamais trop fatigué pour passer du temps avec mon client préféré.
- Ah oui ? Ton client, j'avais oublié : tu l'as dit aussi lors de la Fashion Week. »
Milo ne sait pas ce qu'il a bien pu faire, mais Camus se relève direct. Le sort se brise et sans même s'excuser, il lui dit. « Bon, j'y retourne. »
- On vient d'arriver.
- Toi tu n'as qu'à rester.
- Mais… »
Sans explication, Camus s'éloigne à toute vitesse. Mais j'ai fait quoi comme connerie ? S'interroge Milo pour la centième fois de sa vie.
Son top deux de ses pensées après : cette fois encore, je l'ai probablement bien cherché.
Camus n'est pas là le lendemain. Ni celui d'après. Les suivants non plus. Milo guette la cloche, lève la tête quand un client arrive, dissimule sa déception par une blague ou un sourire quand Camus n'apparaît pas.
Il aurait vraiment dû lui demander son numéro de téléphone ou un de ses réseaux. Au moins, il aurait une idée de ce qui se passe.
« Bizarre, sans Camus le coin à l'air vide. » Dit un matin Aiolos. « On s'attache et puis ils disparaissent… tu ne l'as pas dragué Milo ? » Son ton n'est plus nostalgique, mais accusateur. Milo déglutit : « J'ai juré ! »
Combien de fois devra-t-il le répéter ?
« Je suis sûr que c'est toi qui as merdé quelque part. » Déclare Aiolia. « Franchement, il était trop adorable, tu aurais pu faire un effort pour une fois ! » Milo l'a bien vu que Camus est adorable… merci bien ! Il n'est pas aveugle !
« Ou bien tu as fait fuir Aphrodite à force de mater son garde du corps. » Réplique Milo du tac au tac.
« De quoi ?! Comment oses-tu ! Je vérifie juste s'il ne blesse personne. Ce type est dangereux, violent…
- Sexy. » Ajoute Aiolos.
« Sex… mais la ferme. » Gronde Aiolia.
« Lui, il a le droit de draguer les clients, mais moi…
- Tu sais très bien pourquoi tu n'as plus le droit, tu étais hors de contrôle. » Lui rappelle Aiolos.
« Je drague pas ce psychopathe ! Et puis, ce n'est pas un client : il ne commande rien, tout ce qu'il fait, c'est terrifier les gens ou lire son stupide journal ! Qui lit les journaux papier alors qu'on a tous un portable !? Un poseur, voilà tout ! » Hurle Aiolia alors que la clochette de la porte raisonne.
En mode homme invisible, Aphrodite glisse jusqu'au comptoir.
« Tu es seul pour une fois ? » Demande Milo.
« Je suis toujours seul. » Explique Aphrodite. « Sauf quand je suis avec Camus. »
Milo ne sait pas quoi répondre à cela. Clairement, il ne s'y attendait pas. Des millions, voir des milliards de fans et voilà qu'Aphrodite correspond à ce cliché commun : on peut être seul au monde au milieu d'une foule. Aphrodite se met à rire à gorge déployée : « par Athéna, si tu voyais ta tête !
- Mais… c'était des conneries ?
- Non, tout est vrai ! Calme-toi, ça n'a rien de tragique, au contraire, j'ai de la chance de l'avoir rencontré. »
Milo ne répond rien à cela. Il ne sait pas grand-chose de Camus quand il y réfléchit. Bien sûr, il discute tous les jours, et pourtant rien de profond ne sort de ses échanges. Est-ce que Camus a des frères et sœurs ? Qui était son premier amour ? A-t-il d'autres amis qu'Aphrodite ?
Il aurait aimé le lui demander. Pour se distraire de ses pensées, son Travail est là, prêt à lui faire oublier tout ce qui pourrait le toucher : « Qu'est-ce que je te sers, Aphrodite ?
- Toi tu as l'air triste. Est-ce que la fin du monde est arrivée et on ne m'a pas prévenu ? Blague à part : tu as besoin de sortir.
- Ça ne répond pas à ma question.
- Donne-moi un macchiato. Et je t'invite ce soir. On sort. C'est mon dernier soir à Athènes. Je suis attendue à Londres pour le début de ma tournée mondiale.
- Une tournée mondiale, vraiment ?
- Shura sera là. Vous êtes donc les bienvenus Aiolia. » Aphrodite reprend son souffle. « Et Aiolos. » Termine-t-il.
Milo jurerait que la pause était volontaire, et il n'est pas le seul : il est très clair qu'Aiolia veut défendre son honneur. Pourquoi le grand ténébreux sexy l'intéresserait ! Mais Aiolos intervient avant lui, tout excité : « on a qu'à aller au lounge de Saga. Camus sera là ? Ils nous manquent. »
« Je vais voir ce que je peux faire. » Réponds Aphrodite. « Mais il sera heureux de savoir que vous avez envie de le voir. Il avait peur de n'être rien d'autre qu'un… » Aphrodite baisse ses lunettes et Milo recule. Il commence à craindre les pauses de la célébrité : il peut voir derrière les verres, des sourcils si serrés l'un contre l'autre qu'ils semblent avoir fusionnés. « Client. »
Milo est confus. Pourquoi cette agressivité.
« Mais bien sûr que non. » Lance Aiolos et Aiolia, en même temps. « C'est notre ami ! »
Milo les regarde, médusé.
« Tu n'as pas mal ? » Demande Aphrodite. « La tasse déborde. » Milo sursaute puis le macchiato lui échappe des mains et s'écrase sur le carrelage. Ses doigts le brûlent.
« Passe vite ta main sous l'eau froide. Oust ! Je vais m'occuper de nettoyer. Aiolia, refais un Macchiato. »
Parfois, Aiolos ressemble vraiment à un chef de guerre déployant ses troupes.
Il lui obéit machinalement.
« Milo sera de la partie ? » Demande Aphrodite alors que Milo se déplace jusqu'au robinet.
« Je viendrais. Et ne parle pas de moi comme si je n'étais pas là !
- Parfait ! »
L'eau coule et le soulage. Milo est heureux que son expression soit dissimulée et qu'ils soient tous les trois trop occupés à planifier la soirée.
Alors Camus souhaite être mon ami ?
Il aurait bien aimé le comprendre plus tôt.
Assis sur le canapé VIP, des chaînes protègent leurs intimités, Milo et Aiolia semblent à l'abri du monde extérieur. Aiolia a un bras sur l'accoudoir, la tête tournée vers Aiolos. Celui-ci s'est levé pour déverser une marée de questions au pied du propriétaire des lieux : Saga. Le pauvre à dû mal à se concentrer sur les verres qu'il essaie de leur préparer.
Il a un très joli costume cravate ce soir-là et il arbore une queue de cheval qui lui va à la perfection. Saga a sans doute reçu un compliment sur son apparence, car il joue avec une mèche de cheveux nerveusement et que Aiolos est presque affaissé sur le comptoir. Les mains s'emmêlent autour du neuf de cravate, qui bien sûr, ne s'était pas vraiment défait.
Aiolia lève les yeux au ciel, puis essaie de jouer à un de leur jeu préféré : quelles bêtises, tartes à la crème, ces deux-là se disent-ils ?
Comme toujours, Aiolia imite Aiolos, prenant un ton incroyablement enjoué : « coucou mon copinou ! Tu sais que ton père est un voleur ? »
« Pourquoi ? » Répond distraitement Milo, pendant que Saga remue les lèvres. Celui-ci a un petit sourire en coin, alors que les doigts d'Aiolos s'attardent sur son coup. Milo est distrait trop nerveux pour faire la voix aiguë qu'il prend quand il joue à être Saga. Celle qui d'habitude fait hurler de rire Aiolia et vaguement sourire Kanon.
D'ici quelques minutes, Aphrodite et Shura seront là. Peut-être aussi Camus. Ils sont en retard… évidemment !
« Parce qu'il a volé les étoiles pour les mettre dans tes y… » Milo l'arrête d'un coup de coude : « Chut, les voilà. » Crit-il presque.
Shura pousse les fêtards du club sans ménagement et trace un chemin qu'Aphrodite empreinte après lui en roi de la soirée. Il tient la main de Camus qui n'a vraiment pas l'air à sa place.
Milo quant à lui, est profondément heureux de le revoir et en même temps déçu que Camus ne soit pas particulièrement habillé pour l'occasion. (Combien de T-shirts noirs sans manche possède-t-il ?) Jusqu'à ce qu'il arrive devant eux.
« Bonjour. » Il n'y a pas que son corps qui exprime un état de nervosité totale, la voix de Camus est tendue. Il a du mal à les regarder dans les yeux.
« Hey ! Content de te revoir enfin ! Je ne savais pas que tu avais un coup. » Dit Aiolia sincèrement. Les cheveux de Camus sont relevés en un joli chignon tressé. Eh oui, la courbe du coup de Camus est longue, gracieuse, appétissante.
« C'est moi qui l'ai fait ! » Chantonne Aphrodite à propos de la coiffure complexe de son ami, puis il pousse Camus à s'asseoir. Jusqu'à ce qu'il s'installe au plus près de Milo. Cinq centimètres les séparent. Camus le regarde de ses yeux clairs, tout proches. Ses cils infiniment longs.
« Tu as mis du mascara. » Débloque Milo comme un imbécile. Sans même répondre au salut.
« C'est moi qui lui ai mis. » Grince Shura avant d'ouvrir un journal. Personne ne saurait dire s'il est sérieux ou pas.
« Tu vas lire le journal ici ! » S'étrangle Aiolia.
- Qui va m'en empêcher ? Toi peut-être ?
- C'est super mal poli ! On est ici pour se parler ! S'amuser !
- Vous, peut-être. Moi je travaille…
- Très bien, eh bien fais ta vie. »
Aiolia se lève, furieux. Certainement par vengeance, il s'en va casser le coup d'Aiolos. Et peut-être par jalousie se dit aussitôt Milo.
« Shura, j'ai envie de danser. » Déclare Aphrodite.
« Pas avec moi j'espère…
- Avec toi ou d'autres, je m'en fiche ! Je veux danser.
- Umpph, entendu. »
Milo fait signe de se lever pour les accompagner, mais Shura pose deux mains sur ses épaules : « toi tu restes. »
Puis, il les laisse, prêt à reprendre sa place dans l'ombre d'Aphrodite.
Camus et Milo sont seuls.
Pourtant, ils restent collés l'un à l'autre sur ce grand canapé où ils auraient toute la place pour se mettre à l'aise.
« Je… » Commence Milo. « Tu… » Fais Camus au même moment.
« Toi d'abord !
- Non, je t'en prie. Je t'ai interrompu. »
Milo se racle la gorge : « tu as beaucoup manqué à Aiolos.
- Oh ! C'est gentil de sa part.
- Et à Aiolia.
- Que veux-tu. » Soupire Camus. « Je suis un bon client. Ça rapporte, je suppose.
- Non, je… laisse-moi finir. À moi aussi. Parceque j'ai… tu sais quoi ? je ne sais rien de toi. Tu ne dis absolument rien de perso !
- Que veux-tu savoir ? Ce n'est pas comme si j'étais mystérieux… et puis pour répondre à des questions, il faudrait que tu m'en poses. »
De quoi ? Ce dit Milo. Tu es une énigme sur patte.
« Pourquoi tu es venue tout l'été par exemple ? Tu es étudiant non ? Tu n'as pas tant d'argent que ça ? Ça a dû te coûter cher de venir si souvent.
- Ma présence te dérangeait ?
- Mais non enfin ! Bon sang, j'essaie juste d'être ton ami ! »
Camus joint ses mains sans rien dire. Comme prit en faute : « désolé, je… moi aussi. Si tu le veux. J'aimerais beaucoup ça. »
Par réflexe, Milo laisse traîner son bras sur la banquette, juste au-dessus des épaules de Camus. Celui-ci relève sa tête et dévisage Milo, il ne dit rien au sujet du bras et s'approche de lui, imperceptiblement.
Mais Aiolos est là, et il a juré. Il se reprend et laisse Camus poursuivre : « Ma Climatisation est cassée et je ne supporte pas la chaleur.
- Et maintenant, elle est réparée et tu n'as plus de raison de passé ?
- Toujours cassée. Mon logeur n'est pas un bon samaritain, si tu veux tout savoir.
- Ni même quelqu'un de responsable on dirait.
- Cependant, il fait suffisamment bon ces derniers jours pour que je travaille chez moi. Et pour tout te dire, je n'ai plus trop d'argent pour passer autant de temps au café.
- Donc je ne te reverrai plus ?
- Cela dépend de toi. Suis-je ton client préféré ou veux-tu qu'on se voie en dehors de ton travail ?
- Ton ami ! Je te l'ai dit ! J'veux être ton ami. Si pour te voir je dois t'offrir une boisson tous les jours, je le ferais. »
Camus se dandine, ses mains se recroquevillent l'une contre l'autre : « Pas la peine d'aller jusque-là. Tu sais…
- Umh, et pourquoi pas ? J'en ai envie. »
Camus est encore plus près, sa hanche contre celle de Milo.
Veut-il être là ? Est-il conscient de ce qu'il fait ?
Milo a envie de faire glisser ses ongles dans la nuque rousse, et vérifier s'il peut faire tomber la chevelure d'un coup de pouce sur l'attache noire qui dépasse.
« Que veux-tu savoir d'autre ? » L'interroge Camus. Apparemment heureux.
Ce soir-là, au milieu de la musique, de la danse, des personnes bourrées et insupportables, une bulle se crée autour d'eux. Milo et Camus échangent.
Camus a deux frères qui vont bientôt venir squatter chez lui. Milo est fils unique, mais vit en colloque avec Aiolia et considère ses deux collègues comme sa famille.
La couleur préférée de Camus est le blanc. Milo lui dit que ce n'est pas une couleur et qu'il devrait en choisir une autre. S'il est un tant soit peu normal. Camus lui assure qu'il n'a pas l'intention de le devenir : normal. Il est très bien tel qu'il est. Milo ne peut pas et ne veut pas le contredire.
Ils restent seuls pendant des heures. Et plus d'une fois, Milo se demande s'il ne va pas faire glisser Camus sur ses genoux.
Ils restent tous les deux à accumuler des softs sur leur table. Milo pourtant aime bien boire d'habitude. Surtout lors de premier rendez-vous, il s'ennuie toujours à un moment ou un autre avec ses rencards l'alcool l'aide à les trouver plus intéressant. Mais avec Camus, ce soir, on ne peut pas vraiment parler de premier rendez-vous, nan ?
Soudain, Aiolia et Aphrodite, totalement finis par l'alcool, se jettent sur eux avec violence. Il doit être trois heures du matin. Où le temps est-il passé ?
Aphrodite avachit sur Milo, prend le visage de Camus dans ses mains et gonfle ses joues comme s'il s'agissait de celles d'un bébé. « Je t'aime toi, je t'aime toi, et… je t'aime toi. Tu vas tellement me manquer ! »
Camus laisse pour une fois transparaître toute son émotion et prend Aphrodite dans ses bras. Ils se serrent très fort.
« Ne t'inquiète pas », hurle Aiolia qui lui est perché sur les genoux de Milo. « On s'occupera de lui. Tu n'as rien à craindre ! »
« Il a raison. C'est juré. » Renchéri Milo.
À ses mots, la tête de Camus dépasse de l'épaule d'Aphrodite. Dans la lumière des néons, Milo décèle un peu de rouge sur ses joues. Sa couleur préférée à lui.
« Un thé noir ? » s'étonne Aphrodite, trahie. « J'aurais préféré ton Chai.
« Un thé russe, donc avec des agrumes, bergamotes, écorces d'orange, et un peu de citron. » Répète Milo en tendant le bouchon du thermos rempli à ras bord. « C'est bon pour ce que tu as. Tu me remercieras quand ta migraine va disparaître. Et le chai est aussi un thé noir. »
« S'il est russe, j'espère qu'il n'y a pas de vodkas dedans. » Grimaces Aphrodite. « Je ne boirais plus jamais de ma vie, je le jure !
- Ne fais pas de promesse que tu n'as pas l'intention de tenir. »
Aphrodite lève ses sourcils avant de rire.
Il s'écarte pour prendre Camus une cinquième fois dans ses bras. Inébranlable, Camus le laisse faire, les bras ballants.
Milo a déjà distribué la boisson à Aiolos et Aiolia qui en avait bien besoin.
Ils en ont du courage quand même d'aider le chauffeur de taxi à faire rentrer les valises innombrables d'Aphrodite. Certaines d'entre elles, Milo en est certain, ne tiendront pas dans le coffre et finiront sur les sièges arrière. À croire qu'on déménage.
« On peut en laisser quelques-unes chez Camus, non ? » Demande Shura qui lui est dans une forme olympique. Il n'a pas bu une goutte la nuit dernière. Cet homme est beaucoup trop sérieux pour son propre bien, mais en même temps, Milo est rassuré de savoir qu'Aphrodite est protégée par quelqu'un d'aussi pro. À croire qu'il a fini par s'attacher à la célébrité.
« Mon pauvre Shura. » s'écrit Aphrodite. « C'est déjà le cas. J'ai laissé quelques babioles dont je n'ai pas l'utilité d'urgence.
- Donc, je suppose que ce qu'il y a dans ces dix valises t'est indispensable ?
- Assurément ! »
Puis Shura appelle Aiolia : « Hey toi !
- J'ai un nom !
- Je sais. Je veux ton téléphone aussi.
- Pourquoi je ferais ça !
- Pour qu'on garde contact durant la tournée. Tellement évident… »
Milo ne sait pas trop si Shura trolle ou est véritablement sérieux. Un peu des deux, parierait-il.
Après quelques minutes de négociations, qui admettons le, ressemblent plus à des cris qu'à une conversation, Aiolos fini par se lasser du spectacle et envoie le numéro d'Aiolia sur le portable de Shura. Sans même son accord.
Alors que Aiolia jure qu'il fera payer cette trahison à son frère, Aphrodite rend le capuchon à Milo puis se jette sur lui. Ses bras entourent son coup.
« Ouf ! » Aphrodite a beau être le plus petit de leur groupe, il pèse lourd et Milo ne s'attendait pas à ce débordement d'affection.
Contre son oreille, Milo entend. « Si jamais tu t'occupes mal de lui, j'te butte… » ce n'est pas une blague, les bras se resserrent. Il ne s'agit plus d'une étreinte. On en veut à sa vie. « Je m'en souviens : hier tu t'es engagé à t'occuper de lui en mon absence. » Termine Aphrodite avant de lui faire un bisou sur la joue.
« Tu n'oserais pas me faire de promesse que tu n'as pas l'intention de tenir ? »
Milo est trop retourné pour faire autre chose qu'acquiescer.
Alors qu'Aphrodite rentre dans le taxi en leur envoyant des baisers, Camus essuie une larme unique sur son visage.
Impossible ! Se dit Milo en le regardant. Comment pourrait-il en faire autrement ? Qui ne souhaiterait pas s'occuper d'un tel homme ?
Soudain, il se rend compte qu'il a fait deux promesses incompatibles.
Je suis très mal.
PS : la blague sur le thé russe à base de Vodka m'a été faite par une collègue qui n'en avait jamais bue et qui savai que j'étais d'origine russe. Je lui ai emprunté pour cette histoire.
PSS : j'écris toujours Aiolia comme le plus tsundere des tsundere. Et je n'ai aucun regret.
