Chapitre 5 : Café liégeois et Affogato
Des pats lourds tout près de sa tête le font gronder, se plaindre et écraser son oreiller sur sa tête pour bloquer le bruit. Il a encore envie de dormir. Ce n'est qu'au moment où la porte du bureau s'ouvre violemment que Milo manque de tomber du canapé. Dans le noir, il cherche désespérément des yeux n'importe quoi pour se défendre, mais le sommeil lui embrume la vue. Ou est-ce que Aiolos a bien pu ranger ce fichu arc ? Ah ! Quand il faut menacer Milo, il est à portée de main, cependant quand Milo est attaqué par un cambrioleur, il n'y a plus rien pour l'aider !
On utilise l'interrupteur et Milo est agressé par la soudaine luminosité. Avec soulagement, il reconnait la silhouette d'Aiolia.
« Tu as dormi dans le café ?! Tu aurais pu me prévenir ! » Hurle son ami. « Je t'ai cherché partout ! »
« Arrête ! Tu vas réveiller tout le quartier. On va avoir le droit à des plaintes.
- Je m'en fou des plaintes !
- Mais qu'est-ce que tu as … ce n'est pas la première fois que je découche. »
Aiolia ne répond rien. Milo a alors la possibilité de le dévisager. Il est livide, a des cernes dignes d'un panda et ses cheveux sont dans tous les sens.
Alors Milo se lève précipitamment et… une couverture glisse par terre. Bizarre, il ne l'avait jamais vue. Elle est rouge avec des fleurs stylisées brodées. Et en laine en plus ! Milo est certain que personne de sa connaissance ne possède quelque chose d'aussi joli. Une couette dont on a pris soin sans aucun doute parce qu'elle semble assez âgée, mais en excellent état.
Il n'a pas le temps de s'interroger qu'Aiolia accroche ses bras à son coup.
« Hé ! ça va ? Je suis désolé de t'avoir fait peur. » Aiolia acquiesce, mais se tait. Pourquoi est-ce que tout le monde se jette au cou de Milo en ce moment sauf la personne qui l'intéresse ?
Milo poursuit, pour ne pas laisser un silence gênant s'installer : « je croyais que Saga allait mieux ? »
Aiolia acquiesce à nouveau et sert Milo plus fort.
« Tu veux en parler ? »
Aiolia fait non de la tête, et Milo soupir avant de décider de lui rendre son étreinte. Son ami tressaille et murmure : « juste une chose : je ne veux jamais être en couple. C'est horrible.
- Allée ! Ne dis pas ça ! Je pense qu'ils sont heureux, tu sais… c'est juste compliqué. »
Les épaules d'Aiolia se soulèvent. Pas convaincu du tout. Puis, il demande d'une voix presque normale : « Tu n'as brûlé que notre appartement j'espère ? » Il lance un regard critique autour d'eux. « Le café à l'air en bon état, mais tu as sans doute eu le temps de dissimuler les preuves…
- Ce Kanon… Quelle balance ! Il pourrait se taire des fois. Il aurait mieux fait de te dire qu'on a fait un chiffre énorme… si tu savais à quel point je suis lessivé : tu serais plus gentil ! »
Pourtant, la vérité c'est que le sentiment qu'il a ressenti lorsqu'il a offert le café à Camus l'a boosté jusqu'au bout de la nuit. Il ne touchait plus terre.
Après une minute, il ajoute tendrement : « Tout était super. Tu veux voir les photos du costume nul de Kanon ? Et j'ai réussi à en faire de Camus. Heureusement, il n'a rien remarqué. »
Aiolia a un rire encore mouillé par les larmes et s'échappe de l'étreinte : « OK. Je pensais que ce serait Kanon qui en prendrait ?
- Tu le connais : il ne gâcherait pas son talent pour la fête d'un « bouiboui » »
Alors qu'Aiolia s'assoit sur le canapé en grommelant des insultes à l'encontre de ce snob de photographe, Milo replie la couverture et la place délicatement sur un siège.
Aiolia explose de rire alors qu'il scroll le portable de Milo. Ça fait du bien de voir que son moral est meilleur : « Il faut que tu envoies celle-là à Aphrodite ! »
Milo sait instantanément de laquelle il parle : Camus écrasé par quatre gamins, bien décidés de combattre l'ours et ressortir victorieux. On le voit par terre, la capuche et les oreilles à moitié arrachés. Dans ces circonstances, Camus parvient à garder son air bienveillant ! Incroyable !
Est-ce que son talent avec les enfants viendraient du fait qu'il soit l'ainé d'une fratrie ? Ça fait déjà un moment que Milo soupçonne Camus d'avoir élevé en partie ses deux frères, sans l'aide de ses parents.
Inutile de parler de ses soupçons à Aiolia, il poursuit donc joyeusement : « Qu'est-ce que tu crois ? Il m'a dit qu'il allait m'offrir des fleurs en remerciement quand il va repasser. »
Aiolia s'assombrit : « Tu crois que Shura sera… peu importe… je…
« Je m'en fou. » Finit-il.
Mais bien sûr. Pense Milo.
Il est suffisamment intelligent cependant pour ne rien dire.
« Tu me l'enverras à moi aussi ? » Demande Aiolia pour changer de sujet.
« Entendu ! Mais c'est notre secret ! »
Puis son ami regarde dans la direction de la chaise et de la couverture : « je croyais qu'on n'avait rien pour dormir ici ?
- Alors ce n'est pas à toi ?
- Bah non. Peut-être qu'un client a eu pitié de toi. »
Milo n'y croit pas trop, mais bon. Il la gardera jusqu'à ce que la bonne âme ou le creep qui l'a bordé hier soir se manifeste.
Pour la première fois de sa vie, Milo est nerveux à l'idée d'envoyer un message. Ses relations viennent et passent. Elles ne sont pas censées rester donc il n'a jamais de pression lorsqu'il communique.
Il pianote sur le clavier de son portable : « Comment ça va depuis hier » Trop ennuyeux. Sans envoyer, il efface.
« Je t'ai manqué ? » Trop désespéré.
« Hey ! » ça conviendrait s'il était sur Tinder.
Son portable vibre.
Wow ! Camus a pris les devants ! Est-il possible qu'il puisse lire dans ses pensées ? « Bonjour. Désolé de te déranger. Tu pourras me rendre ma couverture ? »
Alors, c'était lui.
Evidemment que c'était lui.
Seul Camus aurait fait un aller-retour de chez lui au café pour lui apporter de quoi dormir. Il a un côté, c'est bête à dire, mais… maternel.
Cette fois, Milo sait quoi dire : « Merci. Tu veux manger un morceau cet aprem ? Je suis off et toi aussi je crois ? »
Milo voit les petits points du chargement de la réponse apparaitre puis disparaitre.
Camus à l'air d'hésiter, ou de réfléchir à une manière délicate de rejeter Milo.
Alors voilà ce qu'on ressent quand on ne s'en fou pas ? Les gens vivent avec ça tous les jours ?
Il repense à Aiolia. Oui, être dans une vraie relation à l'air… d'une chose terrifiante…
La réponse arrive enfin.
« Avec plaisir. Il y a un glacier pas cher et bien noté à côté de chez moi. »
Un glacier en plein automne.
Sans surprises, ils sont les deux seules personnes dans ce café. Il pleut aujourd'hui, ça doit en décourager plus d'un. Le pire jour pour manger une glace. Camus est trop bizarre. Mais Milo ne déteste pas.
Le sac, contenant la couverture, est posé bien droit sur la banquette derrière Camus. Avant de la reprendre, il n'a pas pu s'empêcher de la replier comme il faut. Milo avait donc raison à son sujet : il est maniaque.
Le glacier est un petit établissement en face du port de Pirée. Le quartier est industriel et Milo s'était attendu à un café simple au mieux et débraillé au pire. Mais l'endroit est cosy, surtout que leur table est joliment décorée par un napperon tout simple. Une carafe d'eau transparente ou l'on a ajouté de la menthe y trône, elle luit sous la lumière d'une lampe ronde aux motifs pop vieux jeux.
Milo meurt d'envie de sortir son carnet et de prendre des notes, mais il craint de donner l'impression à Camus qu'il s'ennuie. Comme il est encore tôt dans l'après-midi, il reste du brouillard sur l'eau. La mer est particulièrement agitée, presque bleue nuit.
Ce spectacle est… romantique. On dirait le théâtre de passions interdites… Milo a presque envie d'en rire. Pourtant, le silence qui s'éternise a fait monter une boule dans sa gorge. Il lève les yeux de son menu qu'il n'a, bien sûr, pas lu. Il croise à ce moment-là le regard de Camus.
« Je te laisse commencer. » Dit Camus. Le visage impassible et pourtant Milo décèle un grain d'humour dans sa voix. Comme Milo est, admettons-le, confus il ajoute : « Tu sais, bien ? Nous n'arrêtons pas de nous couper la parole. A partir du moment où nous nous retrouvons seul tous les deux, donc… j'anticipe… um… »
Milo explose de rire. La tension s'est évaporée.
« Hé ! » Lance Camus.
« Ha ! Ha ! Ha ! Désolé, je ne m'y attendais pas ! »
C'est beaucoup trop mignon.
Avant que Camus ne se vexe pour de bon, Milo dit : « Tu viens souvent dans ce café ? Tu nous fais des infidélités ?
- Je n'oserais jamais te faire ça. » Milo espère qu'il y a un sous-entendu. Il le jurerait parce que Camus se mord les lèvres comme ci il en avait trop dit. « C'est la première fois que je viens, mais je me suis dit que leur spécialité t'intéresserait peut-être ?
- Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que c'est ! QU'EST-CE QUE C'EST !
- Tu ressembles terriblement à un chiot qui aurait pris forme humaine… mais plus sérieusement : veux-tu tenter leur café liégeois ? Comme tu… um… aime bien essayer des recettes inédites, je me suis dit que ça te donnerait de l'inspiration. Tu as l'air tellement heureux quand tu découvres de nouvelles idées… »
Combien de fois peut-on être touché en plein cœur par une même personne ?
Face au silence, Camus poursuit : « j'ai dit quelque chose de stupide ? »
« Non, bien sûr que non ! » Difficile de reprendre contenance, quand on est sincèrement impressionné par une personne qui a toujours de petites intentions. La couverture et maintenant ça : « Ça te dérange si… » je te demande ta main ?
L'arrivée du serveur l'empêche de se ridiculiser jusqu'à la fin de ses jours. Milo pousse un soupir de soulagement. Il essaie tant bien que mal d'avoir l'air cool, détendu, en s'étalant plus librement sur sa chaise. Il manque de perdre l'équilibre. Le serveur fait comme s'il n'avait rien remarqué, Camus de son côté esquisse un sourire.
« Je n'ai pas encore choisis. » Dit Milo.
« Ça ira pour cette fois. » Répond le serveur. « Mais sachez que je n'ai pas tout mon temps… » Il y a quelque chose de pas clair dans cette phrase. Comme une menace.
Ce gars a un côté terrifiant. Il a presque l'aura d'un tueur en série. « Heu… je prendrais un café liégeois. » Panique Milo.
Pendant que Camus, de son côté, ne semble pas déphasé : « vous nous laisseriez plus de temps pour choisir ? »
Un type immense au comptoir, taillé comme le minotaure, lâche un rire éclatant : « tu l'as entendu Angelo ? Laisse-les tranquille ! »
Le serveur louche, jette un regard assassin à Camus qui ne sille pas, puis s'éloigne.
« Tu m'impressionnes ! » Dit Milo. « C'est le genre de gars qui pourrait rajouter de la mort au rat dans notre commande. Ça ne te fait pas peur ?
- Oh, j'ai fait la majorité de mes études à Paris. » Répond Camus en jouant avec le menu. Son ongle cramoisit froisse le papier. « J'ai l'habitude. »
Paris a l'air d'être un endroit horrible.
Comme s'il lisait dans ses pensées, Camus explique : « je préfère vraiment la Sibérie. Même si je devais marcher vingt-quatre kilomètres pour atteindre la première ville, ce qui est certain, c'est qu'il y avait une vraie solidarité.
- Alors, tu as grandi en Sibérie ? Pour de vrai ! Ce n'était pas une blague ?
- Pourquoi ça aurait été une blague ? Je ne te l'ai pas dit ? Hyôga, est née en Russie, Issak en Finlande. Je suis le seul à être née en France.
- C'est pas banal ! Tu es vraiment le type le plus bizarre que je connaisse !
- Pardon ? Nos parents voyagent beaucoup et ils nous forçaient à les accompagner partout où ils allaient. Ce n'est pas si étrange que tu veux bien le croire ! »
« Ces dernières années, nous ne les voyons qu'une fois par an, pas plus. » Ajoute Camus, son expression bien gardée.
Milo préfère ne pas insister pour le moment : « Ha ! là ça devient plus logique ! Oh ! Ne sois pas vexé, je devrais dire plutôt que… tu es le type le plus intéressant que je connaisse. Ce serait plus juste ! »
S'il pouvait conserver le petit sourire de Camus dans une bouteille, il le ferait. Un raclement de gorge distrait Milo de sa contemplation.
Deux personnes sont entrées dans le café pendant qu'ils parlaient. Avec un look qui lui rappelle instantanément Aphrodite. Mais l'Aphrodite en mode homme invisible. Vu leur taille, Milo parierait que ce sont des ados. L'un porte un chapeau d'été où dépasse des cheveux verts, et est affublé de lunette de soleil. L'autre a posé sur sa tête une cagoule qui dissimule la moitié de son visage.
Encore des célébrités que Milo ne connait pas ? Ou sont-ils venue braquer une banque ? Vraiment, si c'est le cas, c'est le dernier de ses soucis. Comme Camus ne peut pas les voir de là où il est, quel intérêt de lui faire remarquer ?
« Tu as choisi ? » S'inquiète Camus qui a repéré le regard noir du serveur celui-ci se tient comme un coureur : décidé de revenir à la charge.
« Heu… je sais ! Une limonade maison et le café liégeois.
- Tu es certain ? les deux me semblent…
- Mal accordé. » Déclame Milo d'une voix monocorde.
Un petit temps de latence, puis… « tu m'as imité ! C'était moi ? »
Un gloussement s'échappe d'un des deux ados. Mais Milo n'y fait pas trop attention : les joues de Camus deviennent écarlates. Il reprend un ton de voix inanimé : « Je suis Camus, mon signe astrologique est le poisson et j'adore me déguiser en ours pour Halloween.
- Tout est faux ! Mon signe astrologique est le verseau ! » S'écrit Camus comme s'ils avaient tous les deux cinq ans et qu'ils se disputaient à la cour de récrée.
- Eh bien voilà ! Je sais à peu près à quelle date se situe ton anniversaire. Merci bien ! Au fait, le mien est seulement dans une semaine. Et je suis scorpion. »
Camus croise les bras sur son sternum. Son visage rosit un peu plus chaque seconde.
« Je le sais déjà. » Admet-il. « Nous te préparons une fête pour ton anniversaire, Aiolia s'occupe de tout.
- Camus… est ce que c'était par hasard une fête surprise ?
- Oh non ! Je crois que tu as raison. »
Le couple se met à rire franchement derrière eux ; Milo en est un peu agacé. Ils écoutent clairement leur conversation.
Alors qu'il essaie de leur faire signe de s'occuper de ce qui les regardent, le serveur revient, l'air encore plus énervé : « vous vous êtes décidé ? »
Camus sursaute, il devait être dans ses pensées, puis il ouvre maladroitement son menu. Peut-être a-t-il perdu la page de sa commande ?
« Vous pourriez lui laisser encore du temps ? » Demande Milo avec son sourire le plus charmeur. « Tout à l'air délicieux. Dur de faire un choix. Et sincèrement votre attitude ne nous aide pas. »
« T'as gagné ! J'm'occupe plus de vous… » Gronde le serveur. Puis il hurle vers le géant : « Aldébaran ! Charge-toi d'eux ! » Il les laisse, grommelant quelque chose comme « ils vont me le payer. » et rend visite aux ados.
Le fameux Aldébaran, quant à lui, fait un clin d'œil entendu à Milo : « Appelez-moi quand vous êtes prêt ! »
Lui, Milo l'aime déjà.
« Désolé. » Dit Camus « et merci. J'hésite encore. Tout à l'air tellement sucré.
- Mais ? Pourquoi t'as choisi cet endroit ?
- Parce que j'étais certain que toi tu aimerais. »
OK ! Respire Milo. Tu ne peux pas être systématiquement en apnée dès qu'il dit un truc mignon. Parce qu'il en dit très souvent ! Tu vas en mourir à force !
« OK ! OK, OK, OK ! » Milo se concentre. « On va essayer de se baser sur ce que toi tu aimes : les choses épicées, les goûts très prononcés et sans sucre, de préférence. » Camus acquiesce. Sa tête est fourrée dans les pages, comme pour se dissimuler du monde extérieur. « Tu connais si bien mes goûts… »
Le cœur de Milo fait un bon, mais il poursuit courageusement. Il trouve ce qu'il cherche : « ça ! » Crit il en pointant du doigt la ligne du menu qui l'intéresse. On dirait qu'ils viennent de déterrer un trésor. « T'as vu ? Une glace salée au parmesan. »
« Oh ! » Fait Camus comme toujours. Et maintenant Milo sait avec fierté quand il s'agit d'un « Oh » heureux.
« Ça t'irait ? On commande ? »
Elle arrive : cette expression délicate de Camus, presque tendre. Milo se rend compte qu'il commence à avoir du mal à s'en passer.
Pendant leur gouté, Milo répète à Camus qu'il n'est pas déçu de ce repas, bien au contraire ! A tel point que Camus finit par lui dire qu'il a compris et qu'il est heureux d'avoir bien choisi. La cuillère de Milo reste dans une coupole vide. S'il avait été seul, il aurait peut-être même léché les derniers résidus à l'aide de son doigt.
On va éviter pour un premier rendez-vous. Ou un deuxième. Ou juste une sortie entre bon copain ? Milo crève de savoir ce qu'ils pourraient être.
A la fin de la journée, il est suffisamment à l'aise pour sortir son carnet de notes. Camus essaie de garder un visage neutre, mais Milo n'est pas dupe : son ami est accoudé sur la table. Si son corps était un peu plus penché, il serait presque allongé pour voir ce que Milo écrit.
Il prend donc pitié de Camus, et lui fait signe de s'asseoir à côté de lui plutôt qu'en face de lui.
Une fois que Camus s'est installé, Milo partage son travail : « Quand je suis inspirée, quand j'ai vu ou lu quelque chose en rapport avec le café, je l'écris direct. Désolé si ça te parait mal poli.
- Non ! Pas du tout ! Mais… tu dessines aussi ?
- Oui, il le faut bien, ça aide les schémas lorsque j'ai envie d'améliorer la présentation des cafés. Si j'ai eu une idée… tiens, tu vois : aujourd'hui, je vais essayer d'enrichir ma recette d'Affogato.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Un dessert Italien : tu prends un expresso et tu y mets une boule de glace vanille, puis des amandes par-dessus. Là, je voulais me contenter de la recette classique… mais… »
Milo trouve la page qu'il a consacrée à l'Affogato, le dessin qu'il a crayonné en coin de page n'a pas vraiment changé depuis des mois. Il prend son stylo rouge et ajoute des pointillés par-dessus les amandes.
Les yeux de Camus deviennent ronds. Puis il dit, clairement impressionné : « Tu as beaucoup de talent !
- Tu me flattes, c'est qu'un gribouillis !
- Non. Je… trouve ça très réaliste.
- Ha, ha, ha ! La flatterie vous ouvrira toutes les portes, Monsieur Camus (mais au fait, tu as un nom de famille ?)
- Ce sont des épices ?
- Tout juste : piments et paprikas. Et tu sais qui m'inspire là, maintenant ? »
A quelques pas d'eux, Milo croit entendre : « oh mon dieu ! Ils ne vont pas oser ? » Si ses deux adolescents les jugent, qu'ils aillent voir chez Hadès s'il y est. Il a le droit d'être fleur bleue, même passé la vingtaine.
Il relève la tête de son carnet pour les remettre à leur place, mais il se retrouve littéralement nez à nez avec Camus. Le regard de celui-ci est fixé sur ses lèvres. Surpris la main dans le sac, Camus fait signe de s'écarter mais Milo lâche son stylo, le bruit arrête sa fuite.
Peut-être n'a-t-il pas envie de s'échapper.
Quand ce sont-ils à se point rapprochés ?
« Moi ? » Interroge Camus. Sa voix est presque rocailleuse : on pourrait croire qu'il n'a pas parlé depuis longtemps.
« Bien sûr que c'est toi. »
Leurs visages gravitent l'un vers l'autre. Là, Milo en est presque certain : il n'imagine pas. Il ne se fait pas d'idée. Il y a réciprocité ici.
Pourtant, il semblerait qu'il n'est pas au bout de ses peines : « Oups. Désolé. » Fait le serveur acariâtre
Le pantalon de Milo est soudain recouvert de glaces. La sensation non seulement détruit cet instant, mais provoque aussi leur séparation.
Milo en est certain : ils ont l'air coupable. Comme des gamins.
L'un des ados poussent un petit cri et Camus s'aperçoit enfin de leur présence. Il tourne la tête dans leur direction, et sa mâchoire s'affaisse, comme dans un cartoon des années 50 : « Shun ? » Demande-t-il. Puis, Milo jurerait que Camus glapit : « Hyôga ! »
Eh bien, Milo est ravi de pouvoir enfin rencontrer la famille de Camus. Quelle circonstance charmante…
Dans le métro, Milo essuie les remarques méprisantes et les ricanements des passagers. Son pantalon salit ne passe pas inaperçu. Le trajet dure plus d'une demi-heure et Il débarque à l'appartement d'une humeur massacrante. Au moins, le reste de ses vêtements ne sont pas trempés Camus a insisté pour lui prêter son parapluie avant de raccompagner son frère et le petit ami de celui-ci, qui oui, ont trouvés très malin d'espionner l'ainé de la famille.
Isaak a l'air d'être difficile, mais Hyôga semble ne rien avoir à lui envier !
« Mauvaise journée ? » Demande Aiolia.
Il fait à peine attention à lui, il préfère réduire en pièce Kanon à Smash Bross.
Bien fait ! ça lui apprendra.
Comme Milo ne daigne pas répondre, Aiolia cri : « Hey ! J'te parle ! »
Kanon parvient à l'expédier hors du terrain et Milo est totalement oublié. Tant mieux. Il s'enfonce dans les toilettes. Les hurlements choqués d'Aiolia ne font rien pour aider une migraine naissante.
Quand il retire son pantalon avec une grimace – il a fini par devenir poisseux. Un miracle que des guêpes ne l'aient pas attaqué. – Milo sort son portable de sa poche. Il voit alors un petit message :
« Tu vas rire mais avec tout ce qui s'est passé, j'ai dû faire demi-tour pour récupérer la couverture : je l'avais oublié à notre table. Et puis, quand je l'ai trouvée, je me suis dit : maintenant, il va devoir me revoir pour me rendre mon parapluie. »
Un second message apparait : « Avec un peu de chance, si je te prête un objet différent tous les jours, nous serons forcés de sortir ensemble très souvent. »
Les traits de Milo se détendent. Il n'attend que ça.
« Je compte sur toi pour le faire. » Réponds Milo.
Bonus :
Camus : « Il était déjà gentil, beau, drôle, sympa. Et maintenant il est intelligent et talentueux ! Tu devrais voir ses dessins... Aphrodite, qu'est-ce que je vais faire ? »
Aphrodite : « b**se-le ! »
