L'adolescent l'aida à se remettre debout, ses bras tenant fermement ses épaules basses.
Lorsqu'ils se furent redressés, Jérémie desserra son étreinte.
Doucement.
Mais ça allait, elle reprenait des forces.
Avant qu'il n'ait pu dire quoi que ce soit, son portable se mit à sonner.
Il échangea un regard intrigué avec Odd, puis décrocha.
« BELPOIS ! OÙ ETES-VOUS ! » rugit l'appareil, prenant les intonations de Jim Moralès.
« Monsieur ? Mais qu…
- Dîtes moi où vous vous trouvez, vite !
- Vous fâchez pas M'sieur, on est juste parti se…
- Vous êtes dans l'enceinte du collège, oui ou non ?
- N-n-non M'sieur mais… »
Un profond soupir s'échappa de l'appareil.
« Où que vous soyez, restez-y ! NE REVENEZ SURTOUT PAS AU COLLEGE ET RESTEZ OU VOUS ETES ! tonna le professeur.
- Pourq…
- Des parasites non-identifiés ressemblant approximativement à des poux géants ont attaqué l'établissement ! Tous les pensionnaires sont rassemblés dans le réfectoire et nous sommes coincés ! Nos moyens de communications sont coupés et la porte ne tiendra pas longtemps ! Ils utilisent des euh… des lasers pour brûler l…
- Monsieur, y a-t-il eu des morts ?
- Pas encore, tout le monde est là. »
Jérémie laissa échapper un soupir de soulagement.
- Maintenant il faut que je coupe et que je prévienne les secours, mon portable se décharge à un vit…»
Et le silence. Les bips répétitifs indiquant que l'utilisateur avait raccroché n'inspirèrent pas confiance à Jérémie.
Odd prit la parole.
« Qu'est-ce qu'i's'passe ?
On fonce à l'usine et on repêche Yumi et Ulrich au passage. »
ooOOoo
Lorsque Odd avait commencé à dresser l'inventaire des vieux objets effrayants qu'il avait trouvé dans un coffre poussiéreux, Yumi avait préféré s'en aller.
Mais pas pour rejoindre Jérémie et Aelita.
Elle avait retraversée l'endroit et ouvert la porte d'entrée.
Ulrich était là, seulement il n'attendait sagement leur retour : il fendait l'air de ses poings et de ses genoux au gré des ennemis imaginaires qui lui traversaient l'esprit.
A la vue de Yumi il s'arrêta, puis dissimula une expression gênée.
« Qu'est-ce que tu fais ?
- Un peu de mise à niveau… Histoire de pas rouiller… hésita-t-il. Parce que c'est bien gentil de désintégrer tous ces monstres sur Lyoko, ça n'entretient pas la forme. Enfin, pas quand tu reviens dans le réel.
- Tu aurais pas des trucs à m'apprendre… ? » demanda-t-elle sur un ton qu'elle voulait celui de la conversation.
Il s'efforça de ne pas trop écarquiller les yeux.
« Bah… Quel genre de truc ?
- Les bases… Enfin, quelque chose qui puisse nous servir si XANA nous envoie des monstres. Ici.
- Eh bien… avait-il commencé après des minutes de réflexion. Il y a bien un truc. Mais c'est assez compliqué. C'est du combat indonésien, donc si tu veux t'as des principes qui sont un peu… hasardeux… Mais rudement efficace. J'ai bien entendu des choses sur des techniques en duo mais… »
Son expression trahissait le fait qu'il n'avait pas fait qu'en entendre parler. Il poursuivit.
« C'est assez euh… mystique, on va dire, se hasarda-t-il, tentant de décrire son idée. Ca raconte que quand deux combattants sont parfaitement en phase l'un avec l'autre (qu'ils se font confiance, en gros), tu peux développer des enchaînements… Symétriques. Si tu veux les deux se connaissent si bien qu'ils savent que l'autre est en train de faire les mêmes mouvements que lui, et c'est très efficace quand l'ennemi est en surnombre… Ca permet d'en éliminer rapidement, conclut-il.
- Je vois le principe, assura Yumi, qui à présent se rapprochait de lui, car dans son combat il était parti quelques mètres plus loin. Et tu penses que… Tu pourrais me l'apprendre ?
- Je sais pas… C'est très dangereux, il faut vraiment que les deux personnes se fassent confiance à fond, l'un comme l'autre.
- Je te fais confiance à fond, déclara Yumi, les yeux brillant d'une étincelle de vie. Et quand on se bat sur Lyoko, je sais toujours que je peux compter sur toi. Comme je t'assure que tu peux compter sur moi. C'est…
- ...Une intuition, poursuivit Ulrich.
- Plus que ça. »
En disant ça, ils s'observèrent. Bien qu'ils voyaient nettement le visage de l'autre, aucun des deux ne sembla s'apercevoir que la distance entre ceux-ci se réduisait lentement, progressivement, jusqu'au point de rencontre.
Et ils partirent pour un long baiser intense, qui dura, longtemps, et aucun des deux ne s'aperçut non plus qu'ils passaient leurs bras autour de l'autre, pour finir par presser la totalité de leur silhouette contre celle de celui qui n'avait été pendant si longtemps qu'un ami.
Et tandis qu'ils se séparaient, lentement, progressivement, ils se regardèrent comme jamais ils n'avaient osés se regarder, débarrassés des masques de la retenue et du respect amical.
Alors qu'ils n'étaient plus retenus que par leurs bras passés autour de la taille de l'autre, les cris de Jérémie traversèrent les murs de bois.
Interloqués, ils échangèrent un œil entendu avant de se séparer et de foncer dans la propriété.
