Ruptures d'un processus linéaire

Merci à Mme Rowlings, qui est prêteuse,

La cigale, qui ne fait que fait que passer…

Toujours merci à Alixe, Alana Chantelune et Vert

Crys… Le précédent fut bien et celui-là ?

Très belle remontée de Lunenoire, ici aussi, contente que cette histoire te plaise ! Pour moi, Harry accepte Dudley parce qu'il a sans doute toujours rêvé que leur relation soit différente. Et puis aussi, parce que c'est un personnage rigolo à écrire !

Voici Csame presque vexé, zut, ça faisait longtemps… Sur la forme, tu ne posais pas de questions… Sur le fond, oui, le dernier était un peu triste, mais c'était le solde des comptes… et ça répond aussi à Ce baratineur de Charme… Oui, j'en ai fait de ce Remus-là quelqu'un d'important pour Harry – même s'il ne ressemble pas à celui d'autres fics…hein Lazoule ? Je te surprends ? C'est le plus beau compliment qu'on puisse me faire !

Bon, on entre doucement dans le vif du sujet, ça devrait plaire à Sisicho…

Espérons que tous le juristes, qui m'observent et se marrent, seront être magnanimes avec une pauvre sociologue qui fait une incursion sur leurs terres… Et non, malgré les rumeurs persistantes, je ne suis pas éduc spé…

13 – Remus ou l'art de la confession

Quand Harry poussa la porte du pub, les basses lui apprirent qu'ils entraient dans un de ces bars pour jeunes Moldus, avec de la musique électro qui semblait là pour remplacer les conversations. Il eut un sourire contrit pour Lupin :

« C'est Dudley qui a voulu qu'on se retrouve là… C'est à côté de son école, je crois. »

Remus se contenta de lui rendre son sourire et de lui faire de la tête le signe d'avancer. Ils ne sortirent que difficilement la zone du comptoir, profitant finalement du savoir-faire d'une serveuse et se glissant dans son sillage. Au fond du pub, il y avait une sorte de petite piste de danse qui devait servir plus tard le soir et, plus loin encore, une série de niches. Harry commença à maudire son cousin et ses lieux de rendez-vous, quand Parvati se leva pour leur faire signe.

« Vous voilà ! Harry ! Professeur, vous avez fait bon voyage !? »

« Bonsoir Parvati ! » - répondit Remus tranquillement. « Si vous pouviez oublier le « professeur », j'aurais l'impression de ne pas être encore aussi vieux que Dumbledore ! »

« Oh », dit Parvati en rougissant légèrement. Harry sourit en la voyant, si intimidée par Lupin. Quand il l'avait quitté le midi, après un repas commun à la cafétéria du Ministère, elle lui avait fait répéter deux fois l'heure et le lieu de rendez-vous. « Bien sûr, heu, Remus ? » proposa-t-elle.

Lupin la remercia d'un sourire. Dudley s'était levé pendant l'échange, attendant un peu timidement en retrait. Harry allait le présenter, mais son cousin fut plus rapide :

« Bonjour Monsieur, je suis Dudley, le… le cousin de Harry… Vous vous souvenez ? »

Harry repassa dans sa tête les rares fois où Lupin et sa famille s'étaient croisés et ne trouva aucun bon souvenir commun. Mais ni Dudley ni Remus ne semblèrent avoir envie de s'en rappeler. Harry remarqua alors, derrière son cousin, sur la banquette une jeune femme qui ressemblait étrangement aux personnages des jeux qu'adorait Dudley. Ses vêtements sombres ne cachaient rien d'une plastique parfaite et faisaient ressortir ses cheveux rouges savamment décoiffés. Tonks aimerait, estima le jeune Auror.

La jeune femme parlait très bas avec animation dans un minuscule téléphone portable. Ça doit être une copine de Dudley, continua-t-il à réfléchir. « La fameuse Emmie ? » Qui d'autre qu'une graphiste pouvait choisir une tenue aussi originale ?

«… et voici une amie à moi… Tam Wilson…», continua Dudley.

Tam…La journaliste ? Dudley avait perdu la tête ? Harry écarquilla les yeux et Dudley eut un petit geste furtif d'excuse.

« Tam, voici mon cousin Harry et… »

La susnommée Tam fit un petit signe de salut de sa main libre, désignant l'appareil avec une petite grimace, et recommença à chuchoter de plus belle dans son téléphone.

« Elle est avec son rédac chef…», expliqua Dudley sur un ton désolé. « Je vous la présenterai plus tard. »

« On va pas rester longtemps de toute façon », intervint Parvati. Et Harry sentit qu'elle les avait attendus avec impatience. « Ron nous retrouve au restaurant… »

« Un restaurant ? C'est une bonne idée ça, je meurs de faim ! » - lança alors la voix avec laquelle Harry avait discuté au téléphone. La jeune femme avait refermé son appareil et les regardait tous avec un grand sourire confiant - Ils allaient tous se réjouir qu'elle les accompagne. Harry n'eut pas besoin de chercher le regard de Dudley. Celui-ci prit qu'une courte inspiration avant de s'exclamer :

« Oui, hein, si vous devez aller aussi loin, vous devriez partir maintenant ! Vous nous raconterez… »

« Oui tu as raison, Dudley », approuva précipitamment Parvati. « Une heure au moins… avec les embouteillages… »

« Ah, vous allez y aller comment ? Tu m'as dit que vous n'aviez pas de voiture ? » - demanda la journaliste se tournant vers Parvati. Harry qui avait observé avec un certain intérêt, son cousin et sa petite amie inventer de toutes pièces un mensonge énorme en quelques secondes, fut tout aussi édifié par l'aplomb de Parvati quand celle-ci expliqua :

« Mes parents, mes parents vont venir nous chercher… D'ailleurs… »

Ils ont répété ou quoi ?

« Waow… le vieil oncle de province, tes parents… C'est le repas officiel alors ? » demanda Tam Wilson avec un vrai sourire, « Comme c'est romantique ! »

Parvati devint opportunément pivoine, renforçant la conviction de Tam Wilson qu'elle avait correctement interprété ce qui se passait. Le 'vieil oncle de province' eut l'air de s'amuser prodigieusement du quiproquo, et Harry décida qu'il devait arrêter de s'inquiéter. Mais soudain, la journaliste moldue fronça ses sourcils et demanda :

« Et toi, Dud, t'es pas invité ? »

Cette fois, elle avait pris tout le monde par surprise, et des regards fatigués et anxieux volèrent en tout sens autour de la table. Harry fut tenté d'appliquer une bonne vieille recette magique pour contrer définitivement la curiosité de la jeune femme… A trois sorciers, ils arriveraient sans doute à un résultat acceptable…. Mais finalement, Dudley intervint de nouveau sur un ton évasif :

« Une autre fois, trop de travail, trop de monde… Tu veux qu'on dîne ensemble ?»

« Mais attends, si c'est son oncle, c'est aussi un peu le tien, non ? » insista la jeune femme.

« Pas vraiment », dirent Harry et Dudley en même temps, et cette fois Remus ne put s'empêcher de rire doucement.

« Mademoiselle Wilson, je vous déconseille fortement de vous lancer dans des recherches généalogiques sur 'notre' famille », expliqua-t-il. Et il y avait une telle autorité tranquille dans sa voix que la jeune femme se tut.

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« Où allons-nous ? » demanda Harry un fois sur le trottoir.

« Dans un restaurant indien, juste à côté de la maison… C'est bon, c'est tranquille et c'est pas loin », expliqua Parvati.

« Je ne vais donc malheureusement pas rencontrez vos parents, Parvati ? » demanda Lupin avec un air innocent très étudié.

« Malheureusement », confirma la jeune femme avec un sourire un peu nerveux.

« Vous êtes une jeune Auror pleine de ressource ! »

Parvati rougit une nouvelle fois, se tourna vers Harry, qui ne sut que lui sourire, avant de se retourner vers Lupin pour expliquer :

« On a pensé que vous seriez fatigué par le voyage, et il y a tellement de monde qui veut vous voir dans les jours qui viennent ! »

« Je suis ravi de passer une soirée en si bonne compagnie… »

Ils se turent quelques instants et Harry demanda :

« Qu'est-ce que qu'elle faisait là, d'abord, cette journaliste !? Dudley exagère ! »

« T'énerve pas, Harry, ils avaient rendez-vous avant… Il pensait qu'elle partirait vite, mais elle est restée quand je suis arrivée… » - commença raisonnablement Parvati avant de continuer avec une exaspération certaine : « Elle est d'une curiosité ! 'Et vous êtes qui ? » « Et ce Harry, il va venir ? » « Et vous travaillez dans quoi ? » ; « On vous a jamais dit que vous vous mettriez bien plus en valeur avec un léger maquillage ? »

Harry pouffa. Parvati était habillée très simplement, d'un jean et d'un col roulé noirs, et il imagina qu'elle avait transformé sa robe d'Auror en imperméable… Elle devait arrivée droit de ses cours – et à la Division des Aurors, la féminité n'était pas particulièrement prisée.

« Rigole pas », grogna-t-elle en lui envoyant une bourrade dans le bras. « Je m'étais pas sentie si stupide et transparente depuis le bal de quatrième année… ».

Une telle sortie calma instantanément Harry. Depuis qu'ils étaient ensemble, ils n'avaient jamais reparlé de cette soirée lointaine, où il avait été avec elle faute de mieux. Il doutait que ce soit le 'bon moment' – si ce moment hypothétique existait même. Mais Remus sembla lire sur son visage comme dans un livre et rit doucement :

« Ah non, ne me rendez pas arbitre de vos querelles, tous les deux ! Surtout si elles sont aussi vieilles que vos études à Poudlard…»

Les deux jeunes Aurors s'empourprèrent légèrement, comme des enfants pris en faute, et tous continuèrent leur chemin en silence, jusqu'au moment où Lupin ajouta avec une certaine nostalgie :

« Encore que ça me rajeunit… Tes parents, Harry, ne cessaient de nous demander de trancher leurs disputes. »

« Ils… ils se disputaient beaucoup ? » demanda Harry avec une voix qu'il n'arriva pas à débarrasser de son tremblement.

Lupin rit.

« Je vais te répondre ce que leur disait Sirius : 'Hé, disputez-vous, sinon, on va croire que vous allez vous séparer !'… C'était leur fonctionnement… c'était aussi parce qu'ils étaient profondément semblables l'un à l'autre… Rien ne rend plus intransigeant que de reconnaître ses défauts chez un autre… »

Harry déglutit. Il essaya de croire que c'était parce que Remus avait parlé de son parrain, puis il décida de regarder la vérité en face :

« On m'a… on m'a toujours dit… »

« Qu'ils s'aimaient ? Mais bien sûr ! Enormément ! »

« Que… que ma mère était beaucoup plus raisonnable », termina doucement Harry. Parvati lui prit la main et la serra, il lui rendit sa pression.

« Mais James aussi était raisonnable ! James aussi était doué, James aussi était ambitieux… il avait juste une autre façon de le faire savoir ! » - répondit Lupin avec une animation que Harry lui avait rarement vu.

Il se demanda pour la milliardième s'il arriverait jamais à avoir une image équilibrée de ses parents… La main douce de Parvati dans la sienne lui rappela l'opinion de la jeune femme en la matière : « parce que tu crois que quiconque a une image juste de ses parents ? On n'a pas une seule image de ses parents mais différentes images, à différentes époques, dans différentes situations… toi, tu as différents regards sur ce qu'ils étaient, ça revient au même ! »

Là, au croisement de deux boulevards particulièrement bruyants, il ne trouva rien de mieux à répondre que :

« Oh. »

« Nous y voilà », intervint alors Parvati en désignant une petite enseigne discrète ornée d'un éléphant rose. « La meilleure cuisine magique indienne de tout Londres ! »

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« Remus ! » s'exclama Ron, déjà attablé à une table, une bière devant lui. « Bienvenu ! »

Lupin lui rendit sa chaleureuse poignée de main.

« Harry m'a dit que tu as été blessé ? Ça va ? »

« Comme neuf ! Je… je voulais venir avec Harry, mais vous le connaissez, il avait décidé d'y aller seul ! »

Harry baissa le nez, hésitant entre prendre cette remarque légèrement ou comme une critique de fond sur sa perpétuelle tendance à se lancer seul dans des combats démesurés. Mais Lupin vint à son aide :

« Je pense, Ron, que nous avions tous les deux besoins de nous… de nous mesurer une bonne fois l'un à l'autre avant de faire alliance contre tous les méchants ! Ceci fait, tous ceux qui ont la patience d'avoir de l'amitié pour nous sont les bienvenus ! »

Parvati sourit. Harry se sentit rosir, mais Ron continua :

« Ouais, parce que plus j'y pense, plus je me dis qu'il va vous en falloir des amis ! »

Ceci rendit tout le monde pensif autour de la table. La serveuse arriva opportunément avec des menus, et tout le monde décida de laisser Parvati commander un assortiment de plats qu'ils partageraient.

« Nous voyons Justin quand ? » demanda Lupin, dès que la serveuse se fut éloignée.

« Demain matin… L'après-midi, il est pris, mais il a dit qu'il prendrait le temps qu'il faudrait dimanche… »

« Mais le dimanche, n'oubliez pas que nous sommes invités chez les Weasley », intervint Parvati.

« Tes parents sont au courant, Ron ? » demanda Remus.

« Non… et je pense qu'on peut encore attendre pour qu'ils le soient », répliqua le rouquin avec conviction.

Tout le monde acquiesça.

« De toutes façons, », demanda Harry en se tournant vers Lupin, « tu restes…? »

« Le temps qu'il faudra », promit le vieux sorcier, « le temps qu'il faudra… »

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« Bon, si je comprends bien M. Finch-Fletchley , vous voulez attendre d'avoir rassemblé tous les témoignages pour faire la demande officielle », résuma Lupin.

Harry sourit intérieurement au 'M. Finch-Fletchley' , il était sûr que ça rappelait à Justin ses années à Poudlard plus qu'autre chose, mais bon. Les gens de la génération de Remus restaient sans doute plus formels. Il avait quand même fallu rien de moins que la mort de Voldemort pour que Lupin se décide à tutoyer Ron et Hermione !

« Oui, je pense comme Harry que, dès que le Ministère va comprendre ce que nous avons en tête, ils ne vont pas rester passifs… Ils vont chercher à faire pression sur des témoins, peut-être sur la presse aussi pour qu'elle n'accorde pas trop d'intérêt à notre projet… Je veux donc le maximum de témoignages avant… »

« Il t'en manque beaucoup ? » demanda Harry, qui n'avait cessé de se demander comment Justin comptait s'assurer le témoignage de Rogue.

« J'ai le tien et celui de Ron, mais après ce que vient de me raconter M. Lupin, je pense que je vais vous réinterroger pour explorer toutes les pistes que pourrait utiliser la défense…. Je vais aux Etats-Unis dans quinze jours pour affaires… moldues… et je dois en profiter pour faite un saut à Salem et voir Hermione….Entre temps, je pense que j'aurais réussi à interroger Rogue… »

Lupin et Harry se regardèrent, leur question muette assourdissante, mais l'avocat continua, tournant les pages de son dossier un peu trop rapidement :

« Je pense que ce sont les témoignages les plus importants… Il faudra aussi bien sûr contacter les Diggory pour voir s'ils sont prêts à raconter ce que leur a dit Dumbledore au moment de la mort de Cédric - J'ai du mal à anticiper quelle sera leur réponse…Les membres de l'Ordre encore vivants devront aussi témoigner avoir vu Sirius Black, libre, membre de l'Ordre, et avoir su qu'il était innocent… »

« Ron ne veut pas que ses parents… », commença Harry.

« Je vais te répondre comme à lui. Je sais qu'ils diront la vérité ; ils peuvent être mis au courant quand on n'en saura plus sur la stratégie de la défense… Il y a Nymphadora Tonks, Shackelbot… »

« Des Aurors », commenta Harry avec une grimace.

« Oui. Nous les contacterons quand l'enquête sera officielle… De toute façon, l'autre partie va le faire… »

« Il y aurait aussi les membres de l'Armée de Dumbledore », lança Harry avec un mélange de dérision et d'affection dans la voix. Les résultats n'avaient sans doute pas été à la hauteur de leurs ambitions, et l'aspirant Auror qu'il était devenu mesurait bien à quel point ils avaient été présomptueux. Mais ce petit groupe qui avait cru en lui constituait l'un de ses meilleurs souvenirs de cinquième année.

Justin, qui avait fait partie de ce groupe, secoua cependant la tête :

« J'y ai pensé Harry, mais non, et pour deux raisons. D'abord, nous nous éloignerions du sujet : nous n'avons jamais eu l'occasion de voir Sirius ou Pettigrow… Même ceux qui étaient au Ministère n'ont rien vu qui remette en cause la version passée des événements. Je pense donc qu'il faut se concentrer sur l'assassinat de tes parents, Harry…. Tu ne pourras pas régler tous tes comptes avec tout ton passé dans ce procès…», ajouta finalement l'avocat en replongeant dans ses notes pour éviter son regard.

Harry fut halluciné de la lecture que Justin avait de ses motivations profondes. Etait-il si transparent ? Quand son ancien camarade était-il devenu si fin psychologue ?

« Et la deuxième raison ? » - demanda Lupin, sans doute pour leur épargner une gêne supplémentaire.

« La deuxième raison est que j'en ai fait partie… et que je ne veux pas qu'on apparaisse au procès comme ayant été particulièrement proches. »

Comme Harry levait les yeux de nouveau vers lui, l'avocat précisa :

« Je suis heureux, Harry, que tu me considères comme quelqu'un en qui tu peux avoir confiance et, justement, je ne veux pas te décevoir. Ils ne vont pas nous faire de cadeaux, alors autant laisser de côté tout ce qui pourrait se retourner contre nous… »

Harry le regarda longuement avant d'être sûr d'avoir bien compris le raisonnement de l'ancien Poufsouffle.

« Tu as peur qu'ils disent : 'regardez les, à quinze ans déjà, ils prenaient d'assaut le Département des Mystères, aujourd'hui c'est tout le Ministère' ? »

« Exactement. »

Les trois hommes se turent. Harry hocha la tête comme pour dire qu'il avait compris.

« Bref, je vais continuer mon travail de fourmi, ça devrait être prêt après Noël… Là, je demanderais officiellement le dossier… On verra s'ils nous le donnent… »

« Ils peuvent refuser ? » demanda Remus sur le ton de la conversation.

« Non, mais ils peuvent rendre ça très long et difficile, des pièces peuvent se 'perdre'… des choses comme ça. On verra bien. »

« Et on ferait quoi alors ? » demanda Harry, les sourcils froncés.

«Justement, c'est là que je veux en venir… Dans un tel procès, on aurait pu vouloir de l'argent, et alors on aurait pu envisager un arrangement à l'amiable… » - commença-t-il sur le ton de quelqu'un qui est parti pour un long exposé théorique. Comme Harry ouvrait la bouche, Justin leva la main et ajouta : « Ecoute-moi, Harry, je sais que ce n'est pas cela que tu veux. Je veux juste que vous compreniez mon raisonnement. Si on avait été prêt à accepter un compromis, on aurait eu intérêt à agir discrètement. Mais, comme ce n'est pas ce qu'on veut, il faut que le nettoyage public du linge sale devienne incontournable. »

« En bref, il faut la presse », comprit Remus avant Harry.

« Oui. »

Une étincelle étrange traversa le regard de l'avocat quand il croisa celui interrogatif de son ancien professeur de Défense contre les forces du mal.

« Mais avant, tu disais qu'ils allaient faire pression... » - commença Harry les sourcils toujours froncés.

Justin eut un sourire satisfait, comme s'il les avait amenés exactement là où il voulait, et se pencha par-dessus son bureau.

« Nous allons être plus malins qu'eux… »

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« Et vous avez accepté ? »

Lupin haussa les épaules.

« Ai-je d'autre choix ? Et puis quelque part, même si je doute que ça intéresse quelqu'un d'autre que Justin, je crois que j'ai envie de voir tout cela écrit quelque part… »

Harry sentit un nœud se relâcher dans sa poitrine en entendant ces mots. Quand il avait parlé de son idée de livre à Justin, il n'avait pas pensé que ça allait devenir une pièce maîtresse de la stratégie de l'avocat. Quand il s'en était rendu compte, dans le cabinet feutré de la City, il s'était senti singulièrement mal à l'aise, comme s'il se servait indûment du dernier Maraudeur. Savoir que celui-ci pouvait trouver une raison personnelle à l'aventure aidait un peu.

« Tu verras, Luna est un peu étrange… »

« Ron ! » s'indigna Parvati.

« … mais c'est une très bonne journaliste et sa boîte d'édition marche très bien ! » s'empressa d'ajouter l'interpellé.

« Enfin, mieux que celle de son père », corrigea Harry.

Remus sourit. Parvati demanda.

« Il veut donc sortir le livre, quoiqu'il arrive, pour que le Ministère ne puisse pas enterrer l'affaire ? »

« C'est l'idée ».

« Et ça suffira ? » demanda Ron.

« On verra bien », intervint Lupin. « Hum, je vais vous envahir pour quelques semaines du coup… »

« Je vais te laisser ma chambre », dit Harry. « Tu es ici chez toi ! »

« Je peux… » - commença Dudley qui pour l'instant les avait écoutés dans le plus profond silence discuter de tout ce que Justin avait dit.

« C'est bien comme ça », intervint doucement Parvati, « Harry viendra dormir chez moi, de toutes façons… » Comme elle rosissait, Ron termina en levant les yeux au ciel :

« … c'est déjà ce qui se passe le plus souvent ! »

Tous sourirent sauf Lupin, qui avait pris un air songeur.

« Il va falloir penser à la pleine lune », dit-il très doucement.

Les trois autres sorciers échangèrent un regard. Evidemment.

« Tu… tu ne prends plus… » - demanda, presque timidement, Harry.

« Je ne connais personne qui soit capable d'en préparer », expliqua froidement Lupin.

Instantanément, Harry revit Rogue entrer dans le bureau de Remus, quand celui-ci l'avait invité à boire le thé dans ce dimanche étrange où aucun des deux n'avait été totalement sincère avec l'autre. En revoyant l'air méprisant et dégoûté qu'arborait Rogue en amenant la potion Tue-Loup, il se rappela que Justin avait de nouveau éludé la question de comment il comptait convaincre l'ancien Maître des Potions de Poudlard, devenu expert indépendant, à témoigner dans ce procès. Mais la voix pratique de Ron le tira de ses réflexions :

« Bon faut y réfléchir… bien sûr, tout le monde ne peut pas préparer ça dans sa cuisine, mais je peux demander aux jumeaux, ils emploient de très bons sorciers en potion… »

« Bonne idée », approuva Parvati. « On peut aussi demander aux gars du labo mais… »

Elle grimaça et les autres sorciers n'eurent pas besoin de sous-titres. Personne n'accepterait de préparer une telle potion sans poser de questions. Et les gens du labo travaillaient pour le Ministère et, même si Lupin était officiellement enregistré, la dernière chose qu'ils avaient besoin était une enquête de routine du Ministère sur ce que le lycanthrope faisait chez eux.

« Même avec la potion tue-loup », continua un peu tristement Lupin, « je… je ne veux être une menace pour personne… »

Et là tous les regards se tournèrent vers Dudley. Oui, Ron, Harry ou Parvati se sentaient capables de tenir tête à un loup-garou calmé par une potion efficace. Ils se sentaient capables de prendre toutes les sécurités nécessaires pour eux même. Mais comment protéger un Moldu ?

« Dudley… » - commença Harry après de longues secondes de réflexion. « Il faudrait peut-être que tu ailles dormir ailleurs pendant trois jours, au moment de la pleine lune ? »

Son cousin le regarda d'un air étrange.

« Mais qu'est-ce que vous avez avec la pleine lune ? »

« Oui ».

« Au point où nous en sommes, et puisque je vais bientôt livrer toute ma vie en pâture à un éditeur, pourquoi ne pas lui dire ? » - lança Remus, sa voix oscillant entre dérision et raison.

Ron haussa les épaules. Parvati réfléchit et murmura :

« Remus a raison »

Harry les regarda tous les trois tour à tour pour vérifier que personne ne changeait d'avis, inspira et articula : « Remus est un loup-garou ».

Le silence minéral qui suivit lui apprit que Dudley digérait mal l'information. Il fronça les sourcils dans une mimique qui le rendait aussi expressif que quand il cherchait à calculer s'il avait eu plus de cadeaux que l'année précédent à son anniversaire. Puis soudain, il secoua la tête :

« Un loup-garou ? Tu veux dire qu'il se transforme en loup avec la pleine lune ?… Harry ! Vous me faites tous marcher… les loups-garous, ça n'existent pas !»

Harry se demanda s'ils avaient quelque chose dans la bibliothèque qui convaincrait Dudley de l'existence des loups-garous aussi sûrement que « Le Quidditch à travers les âges » l'avait persuadé que les balais volaient…

« Malheureusement, jeune homme », intervint alors Remus d'une voix presque professorale. « Si j'ai l'air d'avoir 70 ans, alors que je n'en ai pas encore 50, si je vis seul au fond de l'Ecosse, et encore parce que Harry a la bonté de me verser depuis près de dix ans une pension que je ne mérite pas… »

« Tu crois que Sirius t'aurait laissé crever la faim ? »

Mais Remus l'ignora, et Harry le détesta pour cette façon qu'il avait de toujours se rabaisser. Il décida qu'il verrait Luna le premier pour la mettre en garde contre le dénigrement systématique que le loup-garou adoptait pour parler de lui.

« … tout cela, et bien d'autre chose d'ailleurs, n'est vrai que parce que je souffre de manière irrémédiable et permanente de Lycanthropie», termina Lupin.

« Qu'il est un loup-garou », traduisit obligeamment Ron à Dudley qui avait écouté la sortie la bouche ouverte. « Cela signifie qu'il se transforme en loup féroce la nuit de la pleine lune, ce qui peut être un peu dangereux pour son entourage", conclut-il maladroitement.

« Mais, 25 jours par mois, il est tout à fait normal », ajouta précipitamment Parvati.

Normal ? Qui était normal autour de cette table ? Harry n'arriva pas à ajouter un mot parce que cette scène l'émouvait plus qu'il ne l'aurait cru possible. Mais son blond cousin finit par retrouver une certaine contenance :

« Waow… et, vous connaissez aussi des vampires ? »

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Dans le prochain, Luna entre dans la ronde…tiens ça fait presque un titre de chapitre, ça…

(version revue le 30 septembre 2007)