Ruptures d'un processus linéaire
Bon je ne vais pas encore m'excuser d'être si longue… c'est une fic pour laquelle je rame… mais j'irai jusqu'au bout… promis !
Merci à ceux qui sont passés par là : Crys, Thamril, Alixe et Alana Chantelune… spéciale dédicace à vous quatre !
16 – Un zeste de Baccardi
Harry rentra étonnamment tôt chez lui ce vendredi là. Non seulement il rentrait tôt, mais il rentrait satisfait – en tout cas plus satisfait que d'habitude – de sa journée, de son boulot d'Auror et de sa vie en général. Ça se voyait d'ailleurs, il souriait aux vitrines et aux grands-mères qui faisaient leurs courses, armées de cabas en toile cirée. Il souriait aux enfants moldus qui rentraient de l'école, aux policiers qui les faisaient traverser, au Sikh qui tenait l'épicerie de nuit au bout de sa rue et même à Mr Holloway, le voisin du premier qui était toujours le premier à prévoir l'épidémie de grippe qui emporterait le quartier.
Ils avaient arrêté toute la bande – même les chefs. Ces semaines de planque, de filatures et d'enquêtes avaient porté leurs fruits et l'ensemble du réseau avait été démantelé. C'était énorme et il fallait s'attendre à des félicitations personnelles de Fudge pour toute l'équipe impliquée, avait souligné Shackelbolt. Mais ce n'étaient pas les possibles félicitations de Fudge qui faisaient sourire Harry.
Harry était content parce que c'était la première opération de terrain de grande envergure à laquelle il avait fait plus que « observer ». Il était entré en janvier dans les six derniers mois de sa formation d'Auror, « les six derniers mois du noviciat », comme avait l'habitude de les appeler Dean. Il avait maintenant le droit de se servir de sa baguette de son propre chef et non plus « en cas de légitime défense ou en réponse à un ordre explicite du supérieur responsable » - autant dire que les Aurors en titre faisaient peu appel pour des opérations 'intéressantes' à des jeunots nerveux qui de plus ne pourraient même pas les couvrir en cas de grabuge !
Il avait serré les dents pendant un an et demi – mais n'avait-il pas passé les deux tiers de sa vie à serrer les dents ? L'autre tiers se partageant assez également entre des moments où il avait montré les dents hors de propos et des moments où il avait regretté amèrement son impulsivité… Et, il avait forcé le respect de son mentor – qui prétendait peut-être être surprotectrice avec lui, mais qui au quotidien, avait toujours su le remettre à sa place quand il oubliait de serrer les dents – et des autres aussi… Parce que, et c'était une des bonnes choses qu'il oubliait sans doute trop souvent, les Aurors n'idolâtraient pas Le Survivant.
Ça ne voulait pas dire qu'ils minimisaient le fait qu'il ait débarrassé le monde de l'immonde psychopathe monomaniaque qui s'était lui-même baptisé Lord Voldemort… ça ne voulait pas dire qu'ils lui reconnaissaient une certaine expérience en matière de magie noire et de coups tordus… mais la lutte contre la magie noire et les forces du mal était la vie des Aurors, de tous les Aurors et que Harry les ait rejoints ne faisait qu'inscrire sa trajectoire individuelle dans une destiné collective et indivise… Bref, le Survivant se fondait dans la masse, dans un corps…
Ce n'était pas quelque chose qu'il avait anticipé. Mais c'était quelque chose qu'il était venu à respecter et même à apprécier… Peut-être parce qu'il n'avait jamais eu que des familles adoptives et que celle-ci en était une autre… une qui aujourd'hui venait de le reconnaître pleinement comme l'un de ses membres…
Et, si ça ne suffisait pas, il y avait la satisfaction d'avoir participé au démantèlement de cette bande qui profitait de la crédulité des uns et de la profonde détresse des autres pour s'enrichir d'un commerce aussi interdit que dégradant. Le laboratoire clandestin de cette bande de malades regorgeait de poils et ongles de loups-garous, de dents de vampires et de cornes de satyres, qu'ils achetaient à vil prix aux créatures auxquelles la communauté magique ne savait pas reconnaître une place pour les vendre, sous formes de poudres et d'onguents aux effets aussi incertains que ridicules, à des sorciers peu scrupuleux et des moldus crédules.
Evidemment il avait, pendant ces semaines, pensé de nombreuses fois à Lupin, qui sans l'argent des Black en aurait peut-être été réduit à se vendre en pièces détachées… Harry doutait qu'il s'y serait soumis, il serait plutôt mort de faim, en silence, au plus profond d'une forêt… Mais il était quand même content d'avoir jeté un coup de pied dans la fourmilière des profiteurs de la misère du monde… « Non que ça nourrisse les pauvres bougres qui venaient là », avait murmuré Tonks dans le laboratoire. Et, Harry s'était réjoui de constater que Parvati et lui n'étaient pas si atypiques dans leur manière de voir douloureusement le monde. Alors qu'est-ce qu'il manquait pour que ça change ?
Est-ce que le livre de Luna allait changer des choses ? Est-ce que le procès allait le faire ? Harry sentit sa bouche s'assécher comme à chaque fois qu'il mesurait tout ce qu'il attendait des actions qu'il avait entreprises. Comme l'avait fait remarqué Hermione dans sa dernière – longue – lettre, il fallait se garder d'une chute trop longue en cas de déception :
« Harry, ton combat est juste et personne plus que Sirius et Remus ne méritent la justice. Mais si tous les combats justes avaient porté leurs fruits du premier coup, on vivrait sans doute dans un monde bien différent. Vous avez tout mon soutien et je viendrais témoigner si cela peut être utile mais surtout faites attention à vous et mesurez vos forces, parce que aussi loin que vous mènera ce premier combat, il ne pourra que vous amener au pied du second… »
En repliant la lettre, Harry s'était demandé si Hermione aurait un jour des enfants parce qu'il était curieux de voir les résultats que pourrait susciter une mère pareille. Ça dépendrait bien sûr aussi du père et cette réflexion-là l'avait amené à réfléchir une nouvelle fois au vide de la vie affective de Ron et au fait qu'il ne semblait toujours pas décidé à tourner la page Granger de sa vie…
Mais en ce milieu d'après-midi, il était loin de ces pensées défaitistes. Il rentrait exceptionnellement tôt et content chez lui et il voulait penser à des choses positives. Le livre de Luna sortait vendredi et Lupin revenait la veille. S'il y avait quelque chose à faire c'était profiter de la vie avant qu'elle ne se complique !
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« Je suis… c'est d'un conformisme affligeant, je… bien sûr…Emmie, c'est juste comme ça… »
Quand Harry poussa la porte de l'appartement, Dudley, l'oreille vissée à son téléphone, arpentait le couloir, visiblement agacé.
« Salut Dudley ! »
« Bonjour Harry, tu rentres tôt, dis-moi ? Non Emmie… je t'écoute ! C'est mon cousin qui rentre… »
Harry rit doucement en voyant son cousin repartir dans sa marche agacée dans l'appartement. C'était souvent le cas quand cette Emmie, que Harry n'avait jamais vue, téléphonait… sauf quand ils parlaient business. Là, Dudley semblait totalement incapable de s'arracher à son clavier pour essayer immédiatement ce qu'elle lui suggérait. Mais Emmie appelait souvent aussi pour parler avec Dudley – ce qui expliquait que pendant longtemps Harry et Ron aient cru qu'il y avait plus entre eux. Jusqu'à qu'ils comprennent que Emmie était lesbienne et que quand elle appelait comme cela, c'est qu'elle avait des malheurs sentimentaux. Et voir Dudley s'efforcer de la consoler une fois de plus renforça encore la foi qu'Harry avait envie de professer envers la vie ce jour-là !
Il entra néanmoins dans sa chambre, posa ses affaires et s'allongea sur son lit, satisfait à l'idée de n'avoir rien à faire jusqu'à demain. C'était dommage que Ron et Parvati n'aient pas le même emploi du temps que lui… Dudley repassa devant sa chambre et Harry attrapa des bouts de conversation, un peu à son insu.
« Je sais, je sais, c'est intolérable d'être obligée de venir accompagnée par quelqu'un du sexe opposé, de préférer l'apparence à la vérité des sentiments… je suis d'acc… »
Harry songea qu'il n'était pas réellement sûr que ce genre de conversation aurait pu se dérouler exactement dans les mêmes termes entre deux sorciers. L'homosexualité était même sans doute un sujet encore plus tabou dans le monde magique. Encore un côté victorien sans doute…
« … mais Emmie, si je n'avais pas promis à Tam depuis des semaines… non, j'ai pas d'idée…non… mon cousin ? » - demanda soudain Dudley, et il semblait s'être arrêté au milieu du couloir et ses doutes étaient palpables. « Non… enfin, si, bien sûr qu'il est présentable ! »
Harry ne put qu'étouffer un fou rire en imaginant le visage de Dudley à cet instant. Le sourire aux lèvres, il se demanda distraitement ce qu'Emmie entendait par présentable. Est-ce qu'une cicatrice en forme d'éclair était rédhibitoire ? - se demanda-t-il, suivant instinctivement du doigt la ligne brisée qui lui marquait le front.
« … oui, il a une copine et…Mais, Emmie, EMMIE, je sais pas du tout s'il est libre ce soir… Bon, d'accord… je lui demande…je te rappelle…Oui, oui…»
Quand Dudley poussa la porte de sa chambre, Harry s'était redressé sur ses coudes et avait déjà ouvert la bouche pour protester :
« Je sais, Harry, je sais, tu as mieux à faire que de venir à une soirée branchée, escorter une graphiste géniale mais qui malheureusement n'a aucun intérêt pour les garçons… » - constata Dudley, l'air de ne pas imaginer un instant que son cousin puisse accepter.
Présenté comme ça…Harry décida de faire l'effort de s'informer.
« Une soirée branchée ? »
« Un truc où tout le monde voudrait aller », expliqua son cousin. « C'est organisé par une des plus grandes agences de pub de Londres.. Ils ont fait la campagne pour la nouvelle playbox… un truc pour jouer sans avoir d'ordi, Harry… Du coup, ils invitent un certain nombre de développeurs, de graphistes, etc. et aussi de potentiels investisseurs dans ce secteur… Tam nous a trouvé des invitations, et je veux même pas savoir comment… Le problème c'est que c'est une boîte plutôt vieux jeu… c'est précisé qu'il faut venir accompagné…
«… de quelqu'un de l'autre sexe.. »
« C'est écrit Harry… » - confirma Dudley avec une grimace. « Du coup, Emmie ne veut pas y aller, mais c'est une connerie, Harry, c'est là qu'on rencontre des gens… Et puis, elle est seule en ce moment de toutes façons ! »
Le silence s'installa quelques secondes, et Dudley fit mine de sortir. Harry le retint :
« Elle va faire comment ? »
« Entre les copains graphistes qui seraient en pleine concurrence avec elle et les vieux copains qui sont pris ce soir…. » - expliqua son cousin, en le regardant avec un espoir nouveau. Harry secoua la tête.
« Ne me regarde pas comme ça, Dud, tu le sais mieux que moi, je n'y connais rien en jeu… »
« Honnêtement, tant mieux ! »
«… ni en ordinateur, ni en pub, ni en investisseur… » - continua Harry.
« Tu sais boire du Baccardi sans rouler par terre ? »
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« Oh Harry, je suis ravie de te rencontrer, Dudley parle tellement de toi ! » c bizarre commen on croit toujours faire plaisir avec cette petite phrase ! mouarf
L'interpellé jeta un regard surpris vers son cousin qui détourna rapidement les yeux.
« Bon, alors, comme Dud disait que t'avait rien à te mettre, je t'ai amené plusieurs propositions.. » continua une petite blonde toute en courbes, sans avoir l'air de remarquer l'échange. Elle disposait sur le lit de Dudley différents éléments de costume masculin tout en commentant ces choix.
Grandissime Merlin, à quoi avait-il encore dit oui avec son grand cœur et sa permanente volonté de se rendre utile ! Pourquoi Parvati et Ron n'étaient-ils pas là pour lui rappeler qu'il n'était pas censé sauver le monde entier en permanence, et en particulier en prenant des risques aussi inconsidérés à quelques semaines d'un procès sans doute retentissant ?
« Bon, on peut le voir très branché, veste en cuir, pantalon un peu serré, chemise froissée… Je savais pas que tu avais les yeux verts… Dommage, j'avais une super chemise en soie indienne, mais il fallait des yeux qui supportent ça… »
Harry lança un regard affolé vers Dudley qui ravala son sourire.
« Tu sais Emmie, Harry c'est un scientifique…en dehors de ses étoiles, t'as rien de plus classique ? »
« Si, si, un MA. GNI. FI. QUE. costume en lainage noir… regardez ça ! Ça jette non ?»
Harry réussit alors à articuler la question un peu superficielle mais qui le taraudait :
« Mais tu sors tout ça d'où ? »
« J'adore les vêtements masculins », répondit Emmie en replongeant dans ses sacs pour en extraire une chemise blanche légèrement brillante et une cravate aux reflets changeants. Faudrait y mettre un coup de fer, vous avez ça ? »
Harry fut sidéré d'apprendre que son cousin « avait ça ». Pourtant il leur demandait souvent des sortilèges de défroissage quand il sortait, mais il n'eut pas trop le temps de creuser.
« Bon Harry, tu préfères quoi ? » demanda Dudley, à peine la jeune femme fut sortie de la pièce ;
« Le classique je crois… »
« J'en étais sûr… »
« B'en l'autre, hormis des bottes en peau de dragon, je vais ressembler à Bill Weasley… » -constata Harry.
Dudley ne chercha pas à savoir qui était Bill, il avait sans doute renoncer à se retrouver dans la famille tentaculaire de Ron, où il craignait encore que ce Bill ne soit d'une manière ou d'une autre lié à un de leurs mauvais souvenirs communs.
Harry enfila avec un peu de gêne le costume qui se révéla largement trop grand.
« Aïe », soupira Dudley, presque pour lui-même, « on dirait toi quand tu ne portais que mes vieux vêtements »
« Encourageant » répondit Harry avec un peu d'acidité. Dudley lui lança un regard inquisiteur puis se lança :
« C'était con, tu sais, elle ne te donnait jamais ceux qui était vraiment trop petits pour moi… J'ai jamais trop compris, elle qui prétendait toujours que tu n'étais pas présentable, pourquoi elle t'habillait comme un épouvantail.. »
« C'est muet un épouvantail », marmonna Harry, tout en pivotant devant la glace.
Dudley préféra ne pas commenter :
« Ta baguette ne pourrait rien faire ? »
« Tailleur, figure-toi, c'est un métier ! »
Mais Emmie revenait.
« Oh, ça va pas du tout… T'as beaucoup moins d'épaules que ton cousin… »
« Mon côté dans la lune… » - bougonna Harry, en train de changer d'humeur. Dudley le sentit.
« Essaie l'autre ! » proposa-t-il précipitamment comme s'il craignait qu'il change d'avis.
Harry le crucifia de ses yeux verts mais se saisit de la chemise moulante, de la veste en cuir et du pantalon assorti. Indéniablement, ça lui allait mieux… Et avant qu'il ne se convainque de pouvoir assumer un costume aussi voyant, il se retrouva coincé entre Dudley et Emmie dans un taxi.
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« Qu'est-ce que tu fous là ? »
« Hm… Ron ? »
« Sauf erreur c'est ma chambre ici, vieux ! »
« Ron… j'ai.. » Harry s'assit, la tête lourde des Baccardis avalés tout en essayant d'être une compagnie aussi décorative qu'inexistante pour Emmie.
Ça c'était révélé difficile… d'abord, parce que dans ce genre de soirée, comme le lui avait expliquer Dudley, tout le monde vient pour remplir son carnet d'adresse… et donc il avait dû expliquer à une foule de gens de tout âge que non, il n'était ni graphiste, ni webmaster, ni concepteur de jeu, ni banquier, ni même mannequin… Ensuite, parce qu'il s'était rendu compte que s'il s'isolait trop, il attirait immanquablement les représentants des deux sexes qui étaient venus en l'espoir de rencontrer l'âme sœur… Et cette deuxième race-là était encore plus difficile à éconduire que la première…
« Tu ES dans mon lit », intervint brutalement son ami en s'asseyant lourdement à côté de lui.
« Oui », constata Harry, avant de retrouver l'information manquante, « j'ai prêté le mien à Emmie… »
« Emmie ? »
« Oui Emmie Sunderton, la copine de Dudley… »
« Et pourquoi pas SON lit ? »
« Parce que Tam y est avec lui ? »
« Qui ? »
« Tam… une journaliste… » - expliqua Harry, en se frottant les yeux et en évaluant l'effort que demanderait d'aller jusqu'à la salle de bain chercher de la potion Requinquante.
Le silence de Ron l'alarma et il chercha ses lunettes à tâtons pour observer le visage rouge de son ami.
« 'Ça va pas ? » demanda-t-il.
« Si ça va ? » commença Ron perdant petit à petit le contrôle de sa voix. « Je rentre d'une garde de nuit de SEPT heures, après m'être coltiné des saoulards de Pré-au-lard, pour te trouver dans MON lit, la maison pleine de MOLDUS… et si Parvati était là, je dormirais OU ? MAIS PEUT-ETRE M. POTTER, PREFERE LES JOURNALISTES, LES GRAPHISTES ET AUTRES JE NE SAIS QUOI A SES PROPRES AMIS ? »
« Chut, tu vas les réveiller ! »
« Mais qu'ils se réveillent tous ! Je suis chez moi, BORDEL ! »
« Mais… »
« Et je suis meilleur que toi en sortilège d'oubli ! »
Harry ne préféra pas discuter, il se leva, attrapant sa baguette au passage.
« Tu fais quoi là ? » grommela Ron soupçonneux.
Harry leva sa baguette, faisant apparaître un matelas et un sac de couchage sur le sol avant de répondre :
« Ce que j'aurais dû faire dès le début »
Ron ravala sans doute un commentaire désobligeant et monta dans son lit avec un haussement d'épaules indignées. Harry s'installa dans son lit improvisé sans ajouter un mot et attendit que Ron éteigne la lumière. Dans l'obscurité, il murmura.
« Je suis désolé... on était saoul tous les quatre… J'ai pensé que c'était plus simple ! »
« On peut savoir pourquoi vous étiez saouls ? » grogna après une minute de réflexion Ron.
« J'ai… j'ai accepté de servir d'escorte à Emmie à une soirée branchée… »
« Une soirée quoi ? »
« Chic »
« Ah, j'ai cru à un de leurs trucs électriques… »
« Ça l'était »
« Quoi ? »
« Laisse tomber… T'aurais dû être là…. Y'avait plein de jolies filles seules… »
« Harry ? »
« Quoi 'Harry', moi j'ai expliqué toute la soirée la physique quantique et bu des Baccardi… c'est tout ! »
Ron siffla.
« B'en mon vieux… Et Parvati moi qui croyaient que tu bossais les dossiers de Justin !»
Harry soupira dans le noir entendant les reproches muets de son ami. Oui, sans doute, ce n'était pas très malin…
« Elle était avec toi ? » demanda-t-il plutôt.
« Les trois premières heures, ensuite, ils ont été appelés pour une histoire de détournement d'artisanat moldu, un ferry tout entier qu'un gars s'était mis en tête de s'approprier... a priori, ils vont pas revenir avant le matin… Remarque, c'est bientôt… Bon, j'en peux plus… Bonne nuit, Harry…»
Au bruit du lit, Harry sut que Ron s'était tourné sur le côté et endormi quasi instantanément - Une capacité que Harry lui enviait depuis qu'il le connaissait. Lui par contre, sut qu'il ferait mieux de ne plus compter sur le sommeil…
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Il avait regardé l'aube se lever en buvant régulièrement des potions pour faire disparaître sa fatigue et sa gueule de bois. Il avait la tête étrangement vide et n'arrivait pas à s'inquiéter vraiment de ce que les deux Moldues présentes allaient ou non pouvoir déceler d'inhabituel en se levant, ni à ce que Parvati trouverait à dire si elle passait par là en rentrant… ni même à retrouver l'enchaînement logique des vingt dernières heures… Il soupira et se retourna pour préparer du café. Il avait la main sur sa baguette dans la poche de sa robe de chambre quand il perçut la présence de Emmie sur le seuil de la cuisine.
« Emmie ! »
« Je t'ai fait peur ? »
« Je ne t'ai pas entendu arriver », répondit-il, douloureusement conscient des flacons de potions sur la table, derrière lui. La blondinette sourit et expliqua, sans entrer.
« J'allais aux toilettes… je t'ai vu… tu ne dors pas ? »
« Je dors peu », répondit-il avec sincérité.
« Moi aussi… » Elle frissonna. « Je vais mettre un pull…. »
« Je prépare du café ».
Quand elle repartit vers sa chambre, il fit rapidement disparaître les flacons de potion, lança une bouilloire d'eau et sortit du sucre, du lait et des céréales sur la table pour qu'elle paraisse moins vide.
Emmie ne revenant toujours pas, il s'affola un peu. Elle fouillait peut-être dans ses placards à la recherche d'un pull… Il fit l'inventaire mentalement du contenu de ses placards : quelques rouleaux de parchemin, quelques livres de cours, un balai de course, un chaudron plein de toiles d'araignées… Les objets étranges étaient sans doute nombreux – moins nombreux que dans une maison traditionnelle de sorciers - mais quand même… Pour tromper sa nervosité, il sortit encore du lard et des œufs et se lança dans la préparation d'un petit-déjeuner complet…
« Waou », apprécia Emmie en revenant. « Quelle efficacité ! »
Il lui sourit.
« On va avoir besoin de se remettre l'estomac à l'endroit, non ? »
« Mouais… faudrait que je commence par de l'aspirine… j'ai le métro dans la tête, là…»
Harry grimaça. Il ne savait pas où Dudley rangeait ses médicaments.
« Je suis désolé, j'en ai pas »
« Ah ? » s'étonna Emmie, la tête entre les mains. « Tu tiens bien l'alcool, dis- moi… t'as une recette magique ?»
Une recette magique ? Harry déglutit puis sur une impulsion irrationnelle, il rouvrit un placard et sortit un flacon violet.
« Des matins comme celui là, je prends ça… cinq gouttes… c'est pas très bon, mais c'est efficace ! »
Emmie lui lança un regard soupçonneux.
« C'est légal ? »
Harry mit du temps à comprendre l'allusion et rit alors nerveusement.
« Des plantes, c'est tout… »
« Oh… un truc phyto alors… c'est cool », se détendit Emmie, « ma mère est très phyto… new age… mais elle m'a jamais rien sorti pour les gueules de bois ! »
« Non ? » demanda Harry en se demandant ce que 'phyto' pouvait être. Il avait ces vingt-quatre dernières heures dresser une longue liste mentale de mots sur lesquels qu'il voulait interroger Dudley. En attendant, il lui prépara la potion qu'elle avala bravement. L'eau siffla et il se précipita pour s'occuper du café.
« C'est cool pour Dud, hein ? C'est une super fille, Tamara, un peu envahissante mais géniale… »
« Oui ? » dit Harry en songeant à une autre fille, un peu envahissante mais géniale qui s'intéressait à Dudley.
« Certains vont dire qu'elle s'intéresse à lui que parce qu'il est considéré comme un concepteur qui monte », continua Emmie, visiblement peu soucieuse d'être entendue ou non. « Mais moi je crois pas… elle pourrait se contenter de jouer les Pygmalion, sans s'embarrasser de coucher avec lui… »
« Vraiment ? » répondit Harry en lui versant du café.
« Hum… enfin… l'amour, hein ? »
La porte d'entrée claqua alors et Harry se figea.
« J'arrive bien ! » lança une voix douce et fatiguée, confirmant ses craintes.
« Parvati, ma chérie ! » répondit-il immédiatement. En se levant pour aller à sa rencontre, il lança un regard appuyé à Emmie comme pour l'inviter au silence en sortant de la cuisine. Ils revinrent ensemble, Harry soutenant une Parvati visiblement épuisée.
« Parvati, voici Emmie, tu sais la graphiste dont Dudley nous a tant parlée… » - expliqua-t-il en la faisant asseoir.
« Oh, vous… avez dormi ici ? » demanda Parvati avec une surprise si flagrante que Harry ne put s'empêcher de fermer les yeux.
« Je lui ai laissé ma chambre » - dit-il tout de suite avant que les non-dits et les quiproquos se multiplient.
« Ta chambre ? »
« Oui, Dudley est… avec une amie… Tu la connais d'ailleurs, Tamara… la journaliste… »
A la tête de Parvati, il ne faisait aucun doute qu'elle se rappelait la jeune femme. Harry lui lança un regard inquisiteur en lui tendant une tasse de café fumant qu'elle accepta en silence. Elle aurait sans doute fini par poser des questions si Dudley et Tam ne s'étaient pas alors extraits de leur chambre, les cheveux ébouriffés et un tube d'aspirine à la main. Ils se contentèrent de salutations minimales, semblant prendre la présence de Parvati comme allant de soi, et s'absorbèrent tout deux dans la contemplation des bulles qui montaient comme si elles avaient déjà un pouvoir sur leur mal être général.
« Vous savez, Harry m'a fait prendre un truc vachement plus efficace », déclara alors Emmie tout sourire et preuve vivante de l'efficacité des préparations du magasin « De mon chaudron » ouvert récemment sur le Chemin de Traverse. Parvati se crispa, Dudley soupira, Tam leva la tête :
« C'est des plantes », renchérit Emmie.
« C'est quoi comme plantes ? » interrogea la journaliste.
« Sais pas…un mélange », balbutia Harry en évitant le regard de Parvati.
« On peut essayer ? »
« Vaut mieux pas mélanger avec l'aspirine », essaya Harry. « Plus de café ? »
« Pourquoi ? » insista Tamara, faisant une nouvelle fois état de sa grande ténacité.
« Hum… l'aspirine... ça fluidifie le sang… vaut mieux pas mélanger… » - grommela-t-il tournant le dos à la tablée.
« Oui, ne jouons pas à l'apprenti sorcier », renchérit Parvati suavement. Pov'Harry
« Oui », répondit l'interpellé en ramenant le café sur la table, évitant toujours de la regarder. Il posa ses deux mains sur le dossier de sa chaise, restant debout. « Moi, je vais devoir y aller… Tu viens cet après-midi ?» demanda-t-il encore en se tournant vers Parvati.
« Je t'accompagne…. Faut que j'aille me coucher… »
« Vous coucher ? » s'étonna Emmie.
« J'ai… regardé des étoiles toute la nuit… Rosalind, le douzième satellite d'Uranus », expliqua Parvati et les trois Moldus hochèrent la tête d'un air entendu avant de leur souhaiter une bonne journée. Emmie remercia Harry de l'avoir accompagné à cette « comédie » la veille, Dudley l'informa avec un sourire entendu qu'il ne serait pas là ce soir, Tam eut un petit signe vague de la main et Parvati le poussa dehors. Une fois dans la rue, Harry se retourna vers la jeune femme, hésitant.
« Il a plein d'amies, Dudley », énonça celle-ci, ses yeux pailletés rivés sur Harry.
« J'ai juste voulu rendre service… »
« Il serait peu avisé qu'il aille assombrir l'humeur de Luna à quelques jours d'un évènement aussi important », ajouta-t-elle, un peu brusquement.
« Je ne savais pas… »
« Quoi ? » l'interrompit-elle, d'une voix tellement lasse que Harry se demanda si c'était la jeune femme en face de lui ou sa propre conscience qui venait lui faire la leçon, « tu ignorais que je pouvais avoir le sens des priorités ? »
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La suite verra la fameuse conférence de presse, ou plutôt ses conséquences, et la vie ordinaire des Aurors… je penche pour une idée générale assez simple : « Les félicitations de Fudge »…
